Parce que je suis une fille - Droits des filles

Fabio De Paola
“L’infirmière m’a dit que j’étais trop
jeune pour avoir un bébé. Il n’y a pas de
planning familial dans le camp et on ne
nous parle pas de contraception. Avoir un
bébé maintenant était un accident mais
j’en suis heureuse.
Nous sommes arrivés au camp il y a
un an environ quand notre maison a été
incendiée et a brûlé. Je n’ai pas pu sauver
quoi que ce soit
pour le rapporter
au camp.
J’ai quitté l’école
à 12 ans parce
que mes parents
ne pouvaient
pas subvenir à
mes besoins.
Aujourd’hui je passe ma journée à
nettoyer la tente, à faire la cuisine et la
lessive. Mon mari est chauffeur de taxi
et gagne de l’argent pour subvenir à mes
besoins et à ceux de l’enfant que nous
attendons. Nous n’avons pas de lit et
dormons à même le sol de notre tente, ce
qui est difficile quand on est enceinte.
Parfois, je suis inquiète parce que des
jeunes gens ivres de l’extérieur viennent
dans le camp et commencent à jeter
des pierres. Ils veulent commencer des
bagarres en lançant des pierres dans le
camp et cela fait peur. Je me fais du souci
pour élever mon enfant ici.
Je voudrais avoir une grande famille et
que mon mari et moi ayons une maison à
nous avec notre famille.”
Lepoldina (17 ans, attend son premier
enfant avec son mari Joachim)
Les enfants qui ont quitté non seulement
leur maison et leur communauté, mais aussi
leur pays pour trouver refuge dans un pays
étranger, sont en majorité des garçons.
L’organisme des Nations Unies pour les
réfugiés, UNHCR (Haut Commissariat pour
les Réfugiés des Nations Unies) précise
qu’en 2003, seulement 28 pour cent des
9130 enfants non accompagnés et séparés,
chercheurs d’asile en Asie Occidentale
étaient des filles. 220 Probablement parce que
sortir d’un pays en conflit est onéreux, et
que les parents sont plus enclins à mettre en
sécurité leurs fils que leurs filles. Les laisser
voyager seules, les inquiète peut-être aussi.
Enfants non accompagnés et séparés à la
recherche d’un asile, par âge et par sexe,
2003 221
Destination
Pays nombre % filles
Belgique 419 37
Bulgarie 152 0.7
Allemagne 977 36
Irlande 277 53.8
Pays-Bas 1,058 31.6
Suisse 1,531 15.4
Royaume Uni 2,730 32.9
Parmis les filles qui prennent le risque
d’entreprendre un long et dangereux voyage
pour trouver asile dans une autre partie du
monde, un grand nombre ne connaît que
la langue de leur pays. Il n’est pas facile de
s’installer dans un nouveau pays sans avoir
des amis ou de la famille. Et très souvent
elles ne sont pas bien accueillies. En majorité,
elles réussissent à bâtir leur vie, à aller à
l’école, à se faire de nouveaux amis en
attendant le moment de rentrer chez elles
et de savoir si leur famille est toujours en
vie. Micheline avait 17 ans lorsqu’elle est
arrivée en Grande-Bretagne de la République
Démocratique du Congo avec sa sœur
cadette. Voici son histoire.
HISTOIRE DE MICHELINE 222
“Je suis arrivée en Grande-Bretagne
avec ma sœur Nanou il y a 4 ans. J’avais
17 ans à l’époque et elle 15. Nous ne
connaissions personne ; nous n’avions
pas d’argent et ne parlions pas l’anglais.
Donc, lorsque nous sommes arrivées à
la station d’autobus, nous avons attendu
que des gens parlent en français. Ils nous
ont présenté un de leurs amis du Congo-
Brazzaville et nous ont dit que nous
pouvions passer une nuit chez eux.
Le lendemain, nous sommes allées
aux Services Sociaux. Là, on nous a dit
que nous devrions aller voir les autorités
d’immigration, mais entre-temps, ils nous
ont trouvé un hébergement et nous ont
fourni les objets de base dont nous avions
besoin. C’était une énorme maison que
nous étions seules à occuper. Ma sœur
avait peur de rester dans une maison
aussi grande et nous avons dormi dans la
même chambre.
Le jour suivant, nous sommes allées
dans une maison plus petite. Nous nous
sommes inscrites à l’école et avons vu
un avocat. Nous avons fait beaucoup
de lèche-vitrine ! Je ne voulais pas
rester toute seule à la maison et elle
non plus, alors nous faisions en sorte
de rentrer ensemble chaque jour. Nous
avions encore besoin d’interprètes pour
aller chez le médecin, mais je voulais
apprendre vite, je portais un dictionnaire
avec moi pour vérifier des mots et des
phrases. Au début, ma sœur voulait que
ce soit moi qui parle, mais, encouragée
par le professeur, elle aussi s’est bientôt
mise à l’anglais.
Durant les quatre années que
nous avons passées ici, on nous a
fait déménager 6 fois. Parfois, sans
avertissement préalable. C’était très dur
pour nous. Nous vivions dans une maison
qui avait des trous dans le plancher, et
un autre dans le toit par lequel l’eau
tombait dans le living. Un jour, j’ai trouvé
ma sœur en larmes. L’eau se déversait en
grande quantité. J’ai été obligée de faire
semblant que ça ne m’affectait pas, afin
d’être forte pour elle. Mais c’était dur.
Nous avons encore passé quatre mois
dans cette maison malgré les courriers
envoyés pour que nous puissions
déménager ailleurs. Entre temps, j’ai eu
une fille, Yasmin. Pendant ce temps, la
guerre continue au Congo.
Nous n’y avons plus de famille. Où
pourrions-nous aller? Il y a des choses
qui se sont passées là-bas qu’il m’est
impossible de vous dire. L’ampleur de la
pauvreté, la guerre, les enfants vivant
dans la rue. Tous ces gens souffrent pour
rien. Le Congo a des richesses, mais le
peuple n’en profite pas.
Je suis maintenant bénévole le
vendredi dans un groupe de jeux. Je
suis un cours pour devenir assistante
maternelle. Je voudrais travailler dans un
hôpital pour aider des enfants malades.
Ma sœur espère suivre un cours d’aide à
domicile. Nous voulons faire des études.
J’aimerais que ma fille puisse faire des
études comme sa mère. Je voudrais
qu’elle possède les connaissances
nécessaires pour construire son avenir.
Voilà ce que j’espère. Peu m’importe
l’argent. Si j’avais deux livres à
économiser, je les enverrais aux gens du
Congo qui souffrent tellement”
7 Voix de filles
“Nous avons par-dessus tout besoin d’aide
et de conseils sur la manière de nous
protéger pour ne plus être exploitées. Nous
avons besoin d’apprendre à gagner notre vie
et créer de nouvelles opportunités pour nos
vies. Nous avons besoin de recouvrer notre
dignité et notre fierté.”
Rapport concernant la jeunesse de la
Commission Vérité et Réconciliation de Sierra
Leone 223
“Je voudrais un peu plus de justice. Je
voudrais que les gens cessent de m’exclure
parce que j’ai appartenu à des mouvements
de lutte armée. Je voudrais qu’ils sachent
que nous avons reçu suffisamment
d’enseignement pour nous permettre d’être
acceptées dans la société. A présent, nous
sommes comme les autres. Ils ne devraient
pas nous traiter comme ça : il faudrait que
nous puissions nous entraider pour créer un
climat de compréhension.”
Rose Kigeme (19 ans, Burundi) 224
“Pendant les frappes aériennes de juillet
2006 au Liban, j’ai participé aux secours
d’urgence. Cette expérience a été l’une des
plus enrichissantes et des plus stimulantes
de toute ma vie. Aussi minime soit-elle,
Cours
d’anglais
dans un
centre pour
réfugiés au
Royaume
Uni.
Philip Wolmuth/ Panos Pictures
116 L a Situation des filles dans le monde 117