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Parce que je suis une fille - Droits des filles

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cinéma – l’un <strong>des</strong> seuls endroits où nous<br />

pouvions aller sans être vus. Comme tous<br />

les couples, nous nous disputions pour<br />

savoir <strong>que</strong>l film, drame romanti<strong>que</strong> ou<br />

comédie nous allions choisir. Mais nous<br />

avions toujours peur <strong>que</strong> <strong>que</strong>lqu’un de<br />

chez nous nous ait vus. C’était parce <strong>que</strong><br />

j’étais catholi<strong>que</strong>, et Sammy protestant.<br />

Nous n’avons jamais pu voir la maison<br />

l’un de l’autre.<br />

Nous avons réussi à garder le secret<br />

sur notre relation pendant <strong>des</strong> mois, mais<br />

comme dans toute petite communauté,<br />

elle s’est ébruitée. Une menace de mort<br />

y a mis fin. On avait affiché sur ma boîte<br />

aux lettres en grosses lettres griffonnées<br />

au crayon: ‘Si tu continues à sortir avec ce<br />

type, il y aura <strong>une</strong> mort dans ta famille . Il<br />

était aussi écrit <strong>que</strong> j’avais causé la honte<br />

de ‘ma bonne famille Républicaine’. Après<br />

cet incident, nous nous sommes séparés,<br />

nous avions peur <strong>des</strong> voisin.<br />

Mon amie Claire, également catholi<strong>que</strong>,<br />

sortait avec <strong>que</strong>lqu’un qui était dans<br />

l’armée britanni<strong>que</strong> avant d’être capturé<br />

et déshabillé par l’IRA, tandis qu’on<br />

obligeait Claire à regarder. On lui dit<br />

qu’il regretterait le jour où il avait porté<br />

la main sur ‘<strong>une</strong> de nos <strong>fille</strong>s’. Plus tard,<br />

on a trouvé son corps criblé de 42 balles.<br />

Claire n’était pas la seule – beaucoup de<br />

<strong>je</strong><strong>une</strong>s <strong>fille</strong>s catholi<strong>que</strong>s ont du vivre la<br />

même tragédie se sentir coupables.”<br />

Tous les noms sont modifiés pour protéger les identités<br />

En dépit de l’ampleur terrifiante <strong>des</strong><br />

dégâts infligés aux enfants, on peut faire<br />

beaucoup, même avec <strong>des</strong> moyens limités.<br />

En Colombie, les <strong>fille</strong>s déplacées ris<strong>que</strong>nt<br />

trois fois plus de se retrouver enceintes avant<br />

l’âge de 15 ans. L’Association <strong>des</strong> Nations<br />

Unies pour le Planning Familial (UNFPA) et<br />

ses partenaires ont adopté <strong>une</strong> approche<br />

innovante pour toucher ces <strong>je</strong><strong>une</strong>s: <strong>des</strong><br />

pro<strong>je</strong>ts à vocation artisti<strong>que</strong> pour <strong>que</strong> les<br />

adolescents puissent trouver un exutoire et<br />

un remède à la violence qui entoure leur vie.<br />

Ce programme fait appel au théâtre, aux<br />

<strong>je</strong>ux de rôles, à la musi<strong>que</strong> et à la danse afin<br />

d’encourager les adolescents à raconter les<br />

traumatismes qu’ils ont vécus. Des conseillers<br />

santé spécialisés viennent deux fois par<br />

semaine leur parler de santé reproductive,<br />

de prévention et leur proposent <strong>des</strong> services.<br />

Le programme apporte aux participants <strong>des</strong><br />

outils pour lutter contre les aspects nuisibles<br />

<strong>des</strong> relations de genre, résister aux pressions<br />

exercées par les pairs et traiter la violence<br />

sexuelle. Ils bénéficient d’<strong>une</strong> information<br />

et de services pour prévenir les maladies<br />

et assurer la sécurité maternelle. Ce pro<strong>je</strong>t<br />

a ranimé l’estime de soi <strong>des</strong> adolescents<br />

TEUN VOETEN / Panos Pictures<br />

Journée de<br />

cessez le feu<br />

au Libéria, les<br />

effets à long<br />

terme de la<br />

guerresur<br />

les <strong>fille</strong>s<br />

demeurent<br />

mal compris.<br />

déplacés en leur donnant le sentiment de<br />

mieux contrôler leurs vies.<br />

Même le rétablissement de routines<br />

quotidiennes, telles <strong>que</strong> préparer les repas,<br />

faire la lessive, jardiner et aller à l’école<br />

peut favoriser l’impression d’avoir un but,<br />

renforçant l’estime de soi et l’identité. Se<br />

trouver avec d’autres dans <strong>une</strong> situation<br />

comm<strong>une</strong> constitue un moyen important<br />

pour guérir. Comme l’a relevé <strong>une</strong> étude:<br />

“La solidarité d’un groupe offre la protection<br />

la plus puissante contre la terreur et le<br />

désespoir et le meilleur antidote contre <strong>une</strong><br />

expérience traumati<strong>que</strong>. Le traumatisme<br />

isole; le groupe crée un sentiment<br />

d’appartenance. Le traumatisme fait honte<br />

et stigmatise; le groupe témoigne et affirme.<br />

Le traumatisme dégrade la victime, le groupe<br />

l’exalte. Le traumatisme déshumanise la<br />

victime, le groupe restaure son humanité.” 85<br />

Le rapport publié en 1996 par Graça<br />

Machel sur l’impact <strong>des</strong> conflits armés sur<br />

les enfants relève <strong>que</strong> tout soutien doit<br />

être adapté à l’individu et à sa culture. La<br />

psychothérapie telle qu’elle est pratiquée<br />

en Occident n’est pas toujours la mieux<br />

adaptée. “Dans les cultures qui ne<br />

distinguent pas nettement le corps, l’esprit<br />

et le soi et dans les<strong>que</strong>lles les esprits et<br />

les ancêtres jouent un rôle actif dans les<br />

perceptions, ceux qui désirent aider au<br />

sein de telles sociétés doivent comprendre<br />

les cultures locales, y compris leurs rites<br />

de passage, de mort et de deuil.” 86 Plan<br />

a élaboré <strong>des</strong> programmes de soutien<br />

psychosocial pour l’ensemble de l’Afri<strong>que</strong><br />

Occidentale qui adaptent les cérémonies<br />

traditionnelles et aident les enfants – surtout<br />

les <strong>fille</strong>s victimes de violence ou d’abus<br />

sexuels ou en proie à la guerre – et leurs<br />

familles à surmonter les traumatismes.<br />

Au milieu de tant de traumatismes, les<br />

<strong>fille</strong>s peuvent faire preuve de résilience<br />

et beaucoup d’entre elles ont démontré<br />

<strong>une</strong> aptitude incroyable à accepter leur<br />

passé, investir leur temps et leur énergie<br />

dans l’avenir et à participer aux différentes<br />

activités qui permettent d’acquérir <strong>des</strong><br />

compétences et à se développer. Les<br />

recherches ont montré <strong>que</strong> la plupart <strong>des</strong><br />

enfants, pourvu qu’on leur procure un<br />

environnement dans le<strong>que</strong>l ils reçoivent<br />

<strong>des</strong> soins attentifs et empreints de<br />

compréhension, seront capables de tirer de<br />

leurs propres ressources, ainsi <strong>que</strong> de celles<br />

de leur famille et de leurs pairs ce dont ils<br />

ont besoin pour faire face aux traumatismes<br />

passés et pour poursuivre leur sain<br />

développement. 87<br />

Certains pro<strong>je</strong>ts permettent aux enfants de<br />

<strong>des</strong>siner ce qu’ils ont vu, ce qu’ils aimeraient<br />

voir, de dire ce qu’ils ressentent, de parler<br />

avec <strong>des</strong> conseillers (voir chapitre 3). Dans<br />

bien <strong>des</strong> cas cependant, les enfants ne sont<br />

pas, ou peu, soutenus. Des <strong>fille</strong>s qui ont<br />

été enfants soldats, portant un fusil le jour<br />

et subissant <strong>des</strong> abus sexuels la nuit, sont<br />

confrontées à <strong>des</strong> problèmes particuliers<br />

qui ne figurent pas dans les programmes de<br />

démobilisation qui comportent un soutien<br />

psychologi<strong>que</strong>. Les programmes de ce genre<br />

ne se concentrent pas de manière spécifi<strong>que</strong><br />

sur les <strong>fille</strong>s et leurs besoins bien <strong>que</strong> ce soit<br />

expressément précisé dans les Principes de<br />

Paris, récemment adoptés, sur les enfants<br />

dans les conflits armés.<br />

4 Les <strong>fille</strong>s dans les forces combattantes<br />

“Je n’ai pas peur. Nous sommes préparées<br />

à combattre. Ici nous ne faisons pas la<br />

cuisine, nous combattons avec nos ami.”<br />

“Koshe” (14 ans), enrôlée dans l’Armée de<br />

Libération du Kosovo en 1998-99 88<br />

Leur nombre exact est impossible à<br />

connaître, mais on s’accorde pour dire qu’il<br />

y a actuellement au moins 300.000 enfants<br />

soldats dans le monde. Selon les perceptions<br />

populaires les <strong>fille</strong>s ne participent pas aux<br />

combats comme soldats. Mais si jamais<br />

cela a été vrai, cela l’est de moins en moins<br />

aujourd’hui. On constate dans <strong>une</strong> étude<br />

qu’entre 1990 et 2003 les <strong>fille</strong>s faisaient<br />

partie <strong>des</strong> forces combattantes dans 55<br />

pays. Elles portaient effectivement les armes<br />

dans 38 conflits dont tous étaient internes.<br />

“Il ressort <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> de cas concernant le<br />

Salvador, l’Éthiopie et l’Ouganda qu’un tiers<br />

<strong>des</strong> enfants soldats étaient <strong>des</strong> <strong>fille</strong>s. Si les<br />

<strong>fille</strong>s se rencontrent plus communément dans<br />

les forces armées d’opposition, elles sont<br />

souvent recrutées – de gré ou de force - dans<br />

les forces armées gouvernementales.” 89<br />

Une étude africaine indi<strong>que</strong> “qu’entre 1990<br />

et 2003, les <strong>fille</strong>s ont accompli un service actif<br />

62 L a Situation <strong>des</strong> <strong>fille</strong>s dans le monde 63

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