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Parce que je suis une fille - Droits des filles

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nombre de personnes déplacées. La violence<br />

sexuelle et le viol ne sont plus un simple<br />

sous-produit <strong>des</strong> conflits mais <strong>une</strong> tacti<strong>que</strong><br />

délibérée visant à détruire <strong>une</strong> autre culture<br />

en changeant sa future population. Ce sont<br />

les <strong>je</strong><strong>une</strong>s femmes qui en paient le prix. Les<br />

Nations Unie ont noté qu’au Darfour, au<br />

Soudan: “Les <strong>fille</strong>s sont la cible de conflits<br />

inter ethni<strong>que</strong>s dans <strong>une</strong> forme délibérée<br />

d’humiliation d’un groupe donné et comme<br />

moyens de nettoyage ethni<strong>que</strong>. Près de<br />

40 pour cent <strong>des</strong> victimes ont moins de 18<br />

ans.” 32 De nombreuses <strong>je</strong><strong>une</strong>s femmes sont<br />

contraintes de porter l’enfant de leur violeur<br />

et peuvent avoir été infectées par le VIH<br />

transmis par leur assaillant.<br />

UNE PERSONNE DIFFÉRENTE 33<br />

À 12 ans, Lucy Aol serre son fusil<br />

dans <strong>une</strong> embuscade de soldats<br />

gouvernementaux. À 13, un commandant<br />

rebelle la prend pour épouse. À 16,<br />

elle est mère. Aujourd’hui, à 21 ans,<br />

elle étudie la santé environnementale<br />

à l’université et pro<strong>je</strong>tte d’utiliser ses<br />

connaissances au service de son pays<br />

déchiré par la guerre…<br />

Lucy avait 12 ans quand elle a été<br />

enlevée par la redoutable Armée de<br />

Résistance du Seigneur ougandaise (LRA)<br />

et forcée de marcher sur <strong>des</strong> kilomètres<br />

jusqu’à <strong>une</strong> base au Soudan, où on lui<br />

enseigne à manier un fusil. On estime <strong>que</strong><br />

la LRA a enlevé 25.000 enfants en vingt<br />

ans d’insurrection.<br />

“Nous avons servi d’esclaves,” dit Lucy.<br />

Elle dit <strong>que</strong> les combattants avaient de 10<br />

à 15 ans dans sa base. “On vous enseigne<br />

à vous servir de fusils pendant deux<br />

semaines, puis on vous envoie au feu,<br />

mais la plupart d’entre nous ne savent<br />

pas se battre, donc ils se font tuer. Les<br />

rebelles vous disent: ‘Ne vous rendez pas,<br />

ne fuyez pas ou ils vous tueront.”<br />

À 13 ans, on a fait de Lucy la troisième<br />

épouse d’un commandant. Elle a subi<br />

<strong>des</strong> sévices sexuels et a été battue par<br />

ses coépouses plus âgées. Elle a eu envie<br />

de se suicider. Trois ans plus tard, elle<br />

réussit à convaincre son ‘mari‘ <strong>que</strong> leur<br />

vie serait meilleure dans son pays. Un<br />

jour, craignant pour leurs vies, ils fuient<br />

le Soudan.<br />

Rentrés en Ouganda, <strong>des</strong> soldats<br />

gouvernementaux tuent son ‘mari’ et la<br />

mettent en détention. On l’emmène dans<br />

un centre pour anciens combattants;<br />

là, elle bénéficie d’<strong>une</strong> assistance<br />

psychopédagogi<strong>que</strong> et découvre qu’elle<br />

est enceinte. Sa famille lui fait bon accueil<br />

mais ses voisins, dont la <strong>fille</strong> a été tuée<br />

par les rebelles, sont moins bien disposés<br />

à son égard “Les gens disent <strong>que</strong> nous<br />

avons <strong>des</strong> fantômes autour de nous parce<br />

<strong>que</strong> nous avons tué,” dit Aol.<br />

Lucy Aol est à présent devenue <strong>une</strong><br />

<strong>je</strong><strong>une</strong> femme de 21 ans, rayonnante<br />

et communicative. Grâce à sa mère, à<br />

un petit héritage de son père décédé<br />

il y a un an, à beaucoup de travail<br />

et de détermination, elle économise<br />

suffisamment d’argent pour s’inscrire à<br />

l’Ecole de Médecine de Mulago, l’hôpital<br />

le plus prestigieux d’Ouganda. C’est<br />

sa mère qui s’occupe de sa <strong>fille</strong> qui a<br />

maintenant cinq ans, pendant qu’elle fait<br />

ses étu<strong>des</strong>.<br />

“Je n’ai pas d’argent pour envoyer<br />

Winifred à l’école pendant <strong>que</strong> j’étudie.<br />

Il lui faudra attendre. J’ai encore un an à<br />

Chapter 4, page 2<br />

Comparaison <strong>des</strong> préoccupations ma<strong>je</strong>ures <strong>des</strong> <strong>je</strong><strong>une</strong>s impliqués<br />

dans les conflits en Sierra Leone, en Ouganda et au Kosovo 35<br />

En abscisse : les niveaux de préoccupation en ordre<br />

croissant de faible (0) à élevé (70).<br />

70<br />

60<br />

50<br />

40<br />

30<br />

20<br />

10<br />

Sierra Leone 2002<br />

Ouganda 2001<br />

Kosovo 2001<br />

0<br />

1 2 3 4 5 6 7 8<br />

En ordonnée: Les catégories de préoccupations <strong>des</strong> <strong>je</strong><strong>une</strong>s de 1 à 8<br />

1 = Violence et insécurité<br />

2 = Education<br />

3 = Besoins économi<strong>que</strong>s et matériels<br />

4 = Psychosocial<br />

5 = Santé<br />

6 = Déplacement<br />

7 = Questions de genre<br />

8 = Rôles sociaux et relations<br />

terminer. Après, dès <strong>que</strong> j’aurai un travail,<br />

elle ira à l’école,” Elle ajoute, radieuse:<br />

“Je veux <strong>que</strong> ma <strong>fille</strong> ait toutes les<br />

chances <strong>que</strong> <strong>je</strong> n’ai jamais eues. Son<br />

éducation est très importante pour moi.<br />

Je crois qu’elle pourrait devenir avocate“.<br />

Ce <strong>que</strong> veulent les <strong>je</strong><strong>une</strong>s<br />

Lorsqu’on les interroge sur leurs<br />

préoccupations pendant et après le<br />

conflit, la priorité <strong>des</strong> priorités est la<br />

paix. Immédiatement derrière viennent<br />

l’éducation et la santé. 34 Si <strong>une</strong> <strong>fille</strong> n’a pas<br />

pu être scolarisée avant d’être prise dans le<br />

conflit, elle considèrera l’école comme <strong>une</strong><br />

priorité encore plus grande lors<strong>que</strong>, à la fin<br />

<strong>des</strong> combats, il lui faudra bâtir son avenir.<br />

Un ensemble de soins de santé sexuelle<br />

et reproductive compte également au<br />

nombre <strong>des</strong> priorités <strong>des</strong> <strong>je</strong><strong>une</strong>s femmes,<br />

de celles en particulier qui sont victimes<br />

de violence sexuelle, tombent enceintes,<br />

contractent <strong>des</strong> maladies ou sont blessées<br />

au cours <strong>des</strong> conflits.<br />

Une enquête menée auprès de <strong>je</strong><strong>une</strong>s<br />

de Sierra Leone, d’Ouganda et du Kosovo<br />

a permis de constater <strong>que</strong> l’éducation et<br />

la santé étaient au premier rang de leurs<br />

priorités après la survie, ce qui équivaut<br />

à reconnaître <strong>que</strong> leurs besoins n’avaient<br />

pas été satisfaits, ni à court ni à plus long<br />

terme. L’éducation était placée très haut<br />

sur l’échelle <strong>des</strong> priorités <strong>des</strong> <strong>fille</strong>s de Sierra<br />

Leone et d’Ouganda – ce qui était moins le<br />

cas au Kosovo, probablement parce <strong>que</strong> le<br />

système était déjà bien établi avant le début<br />

de la guerre.<br />

2 L’éducation: la clé du succès<br />

“L’éducation est la clé du succès… Si<br />

les nations sont obligées de rompre <strong>des</strong><br />

traités, nous devons bâtir <strong>une</strong> conscience<br />

au sein <strong>des</strong> habitants d’<strong>une</strong> nation…Nous<br />

sommes l’avenir et les gens devraient en<br />

avoir conscience… Pour l’instant, c’est d’un<br />

monde très instable <strong>que</strong> nous héritons.”<br />

Je<strong>une</strong> <strong>fille</strong> (16 ans), Colombie 36<br />

‘L’éducation revêt <strong>une</strong> importance<br />

particulière en temps de conflit armé.<br />

L’école peut représenter la normalité quand<br />

tout s’effondre aux alentours… La capacité<br />

de poursuivre l’enseignement contre vents<br />

et marées est un acte de foi en l’avenir. Les<br />

communautés qui possèdent encore <strong>une</strong><br />

école ont le sentiment de détenir <strong>une</strong> chose<br />

durable et digne de protection.”<br />

L’impact <strong>des</strong> conflits armés sur les enfants,<br />

Rapport de Graça Machel aux Nations Unies,<br />

1996<br />

Le monde a pris de nombreux engagements<br />

en matière d’éducation envers les enfants.<br />

L’article 28 de la Convention relative aux<br />

<strong>Droits</strong> <strong>des</strong> Enfants souligne leur droit à<br />

l’éducation et l’article 29 affirme <strong>que</strong><br />

l’éducation doit développer pleinement la<br />

personnalité de l’enfant, ainsi <strong>que</strong> ses talents<br />

et ses aptitu<strong>des</strong> mentales et physi<strong>que</strong>s.<br />

En 2000, lors du Forum Mondial de<br />

l’Éducation à Dakar, 180 pays se sont<br />

engagés à “assurer qu’en 2015, tous les<br />

enfants, particulièrement les <strong>fille</strong>s, les<br />

enfants vivant dans <strong>des</strong> circonstances<br />

difficiles [y compris ceux qui sont touchés<br />

par la guerre] et ceux qui appartiennent à<br />

<strong>des</strong> minorités, puissent avoir accès à l’école<br />

et achever <strong>une</strong> éducation primaire gratuite<br />

et obligatoire de bonne qualité”. Depuis,<br />

<strong>des</strong> efforts significatifs ont été réalisés pour<br />

améliorer l’accès à et la qualité de l’éducation<br />

dans les situations d’urgence en soulignant<br />

l’importance <strong>des</strong> différences entre les <strong>fille</strong>s et<br />

les garçons. 37<br />

Cependant dans neuf <strong>des</strong> pays où<br />

sévissent <strong>des</strong> conflits dans les<strong>que</strong>ls 20 pour<br />

cent <strong>des</strong> enfants meurent avant d’atteindre<br />

leur cinquième année, la moyenne nette de<br />

la fré<strong>que</strong>ntation scolaire dans le primaire<br />

est de 51 pour cent chez les garçons et de<br />

44 pour cent chez les <strong>fille</strong>s; ces chiffres<br />

sont nettement inférieurs aux moyennes<br />

correspondantes de 60 et de 55 pour<br />

cent pour l’ensemble <strong>des</strong> pays les moins<br />

développés. 38 En Afghanistan, seulement 37<br />

pour cent et 18 pour cent <strong>des</strong> <strong>fille</strong>s étaient<br />

scolarisées en 2002. 39<br />

Ces chiffres sont tout aussi inquiétants<br />

pour les <strong>fille</strong>s et les garçons placés sous<br />

protection spéciale: six pour cent seulement<br />

de tous les enfants réfugiés sont inscrits dans<br />

l’enseignement secondaire. Ce chiffre est<br />

encore plus bas dans les zones humanitaires<br />

de déplacement. 11<br />

48 L a Situation <strong>des</strong> <strong>fille</strong>s dans le monde 49

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