BOUTTE transmission du savoir faire d expert a novice - these.pdf

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laquelle les acteurs se reconnaissent mutuellement comme père et fils symboliques et ainsi peuvent instaurer une relation symbolique de Père à Fils. Nous l’avons vu aussi, cette relation parentale symbolique est confirmée par Levi- Strauss (1974) dans une approche anthropologique comme un fondement structural de toute société, condition pour que s’exerce le don (Mauss, 1999). Il nous semble que la relation de transmission entre le Professionnel Expérimenté et le Successeur tend à favoriser cette position respective et de fait tend à favoriser, une relation de type « fusion-dépendance » au début au moins lorsque la dyade est fortement dissymétrique au sens de Winnykamen. Mais, l’apprentissage du Successeur, par imitation modélisation interactive, prépare le Successeur à son autonomie, c’est l’autonomisation. Du coup, la relation est paradoxale (Lerbet-Séréni, 1994, 1997), elle est tension entre fusion et séparation. Nous pourrions illustrer aussi ce paradoxe par une autre tension dialectique entre distance et proximité. A ce propos Postic (1988) prône le maintient d’une distance minimale, et Labelle (1996) se prononce pour une proximité, une réduction de cette distance. ou pour le dire comme Postic : « Dans la relation que l’enseignant établit avec la personne en formation, que celle ci soit enfant ou adulte, se joue un devenir »(Postic, 1988, p.165) Ceci rejoint et confirme la proposition de Lerbet-Séréni à savoir l’évolution de la relation vers la « socialité autonomisante », la création de soi via un alter dans une relation qui contribue à générer une dynamique d’autonomisation des sujets en relation. Le fils symbolique « grandit » en regard de son modèle et revendique son autonomie, le père symbolique voit grandir sa progéniture et cette croissance le menace dans sa position. Chacun des deux partenaires est pris dans le paradoxe de la relation dépendance-autonomie, fusion-séparation, sur base de conflits. Là aussi nous pouvons comprendre une évolution des modes de communication en fonction de l’évolution des positions respectives des acteurs, au fur et à mesure de leurs transformations respectives. Nous venons de voir que la relation est un processus complexe, susceptible d’auto-ecoorganisation vers des modalités évolutives. Il convient dès lors de tenter de repérer les 214

modes de communication possibles dans la relation que nous souhaitons étudier. Nous ne prétendrons pas reproduire de manière exhaustive tous les phénomènes de communication que d’autres auteurs et particulièrement Postic (1988a) ont fait remarquablement. Nous chercherons uniquement à relever des repères utiles, des observables pour rendre compte plus loin de l’évolution de cette relation. 9.3.1.8 La relation pédagogique comme une narration Une première approche possible pourrait consister à évoquer la « narration » comme mode privilégier de communication, dans lequel l’Expert se raconte, reconstruit « son histoire de vie ». Le document vidéo (Sapiéga, 1998) dont nous avons déjà parlé montre effectivement Louis Chiorino, Compagnon menuisier du devoir dans la relation à son apprenti. Or tout au long de ce document, Louis Chiorino se raconte, narre l’évolution de son métier, l’utilisation des outils, ses relations avec les autres métiers voisins. Benjamin (1991) propose en particulier la transmission orale de l’expérience dans un texte intitulé “ Le narrateur ”. La position du narrateur, décrite par Benjamin nous semble correspondre à un mode de communication possible, voire probable qui permet la transmission du savoir-faire, tel que nous l’avons présenté, c’est-à-dire incluant les représentations, les valeurs, le savoir-être, et bien sûr le savoir et les pratiques professionnelles. Ce mode de transmission renoue avec la tradition orale dont le compagnonnage est le témoignage encore vivant : « Ce que le narrateur raconte, il le tient de l’expérience, de la sienne propre ou d’une expérience communiquée. Et à son tour il en fait l’expérience de ceux qui écoutent son histoire. » (Benjamin 1991, p. 209) Ainsi donc, le narrateur communique son expérience, et donc son savoir-faire par voie orale tout en préservant les aspects relationnels. Mais cette modalité nous semble aussi pertinente pour ce qu’elle porte comme type de relation affective, que nous rapprochons de la relation fusionnelle précédemment évoquée. Le narrateur devient alors celui auprès de qui : « ...on aime à se réfugier fraternellement et à retrouver la mesure, l’échelle des sentiments et des faits humains normaux. » (Benjamin 1991, p. 207) 215

laquelle les acteurs se reconnaissent mutuellement comme père et fils symboliques et<br />

ainsi peuvent instaurer une relation symbolique de Père à Fils.<br />

Nous l’avons vu aussi, cette relation parentale symbolique est confirmée par Levi-<br />

Strauss (1974) dans une approche anthropologique comme un fondement structural de<br />

toute société, condition pour que s’exerce le don (Mauss, 1999). Il nous semble que la<br />

relation de <strong>transmission</strong> entre le Professionnel Expérimenté et le Successeur tend à<br />

favoriser cette position respective et de fait tend à favoriser, une relation de type<br />

« fusion-dépendance » au début au moins lorsque la dyade est fortement dissymétrique<br />

au sens de Winnykamen.<br />

Mais, l’apprentissage <strong>du</strong> Successeur, par imitation modélisation interactive, prépare le<br />

Successeur à son autonomie, c’est l’autonomisation. Du coup, la relation est paradoxale<br />

(Lerbet-Séréni, 1994, 1997), elle est tension entre fusion et séparation. Nous pourrions<br />

illustrer aussi ce paradoxe par une autre tension dialectique entre distance et proximité.<br />

A ce propos Postic (1988) prône le maintient d’une distance minimale, et Labelle<br />

(1996) se prononce pour une proximité, une ré<strong>du</strong>ction de cette distance. ou pour le dire<br />

comme Postic :<br />

« Dans la relation que l’enseignant établit avec la personne<br />

en formation, que celle ci soit enfant ou a<strong>du</strong>lte, se joue un<br />

devenir »(Postic, 1988, p.165)<br />

Ceci rejoint et confirme la proposition de Lerbet-Séréni à <strong>savoir</strong> l’évolution de la<br />

relation vers la « socialité autonomisante », la création de soi via un alter dans une<br />

relation qui contribue à générer une dynamique d’autonomisation des sujets en relation.<br />

Le fils symbolique « grandit » en regard de son modèle et revendique son autonomie, le<br />

père symbolique voit grandir sa progéniture et cette croissance le menace dans sa<br />

position. Chacun des deux partenaires est pris dans le paradoxe de la relation<br />

dépendance-autonomie, fusion-séparation, sur base de conflits. Là aussi nous pouvons<br />

comprendre une évolution des modes de communication en fonction de l’évolution des<br />

positions respectives des acteurs, au fur et à mesure de leurs transformations<br />

respectives.<br />

Nous venons de voir que la relation est un processus complexe, susceptible d’auto-ecoorganisation<br />

vers des modalités évolutives. Il convient dès lors de tenter de repérer les<br />

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