BOUTTE transmission du savoir faire d expert a novice - these.pdf

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seulement des formes, utiliser celles existantes mais aussi un ordre d’apparition, d’argumentations et d’explications. On pourrait alors évoquer une organisation « didactique » de ce qui est à transmettre. Mais Poplimont (2000, p.171) précise que cette organisation anticipée, planifiée suppose « une analyse globale de la situation de travail » Dans le même ordre d’idée, Malglaive (1990, p.112) propose « une pédagogie à l’envers », mettant en avant l’approche par la pratique et supposant une analyse des situations de travail pour y repérer les savoirs en usage ». Un dernier aspect est à considérer, cette formalisation et cette organisation didactique dépendent du Successeur, de ses besoins, de son parcours, de ses connaissances, de son expérience en regard de la situation de travail et du domaine d’expertise du Professionnel Expérimenté. Ce dernier doit « ajuster » son action pédagogique en fonction du Successeur, de ses précurseurs (Bastien, 1997), pour conserver une zone proximale de développement (Vygotski, 1985) nécessaire et suffisante. Or qu’en est-il du Professionnel Expérimenté, Novice en matière de transmission ? Nous pensons que l’organisation didactique, la formalisation n’est pas forcément de sa compétence. Son savoir-faire est en grande partie devenu implicite, non formalisé. Il peut avoir prévu une organisation « didactique », anticipé l’ordre d’analyse et d’évocation. Mais la rencontre du Successeur, avec ses connaissances et surtout ses non-connaissances va conduire le Professionnel Expérimenté à questionner ce qu’il n’avait pas prévu, à réorganiser, modifier, ajuster son organisation didactique s’il en avait une. Nous le verrons plus loin, le Successeur est actif dans son apprentissage, mais il est aussi désirant et résistant. La nécessité de formaliser et d’articuler ce qu’il ne sait plus qu’il sait, et pourquoi pas ce qu’il ne sait pas, de trouver des explications, des argumentations qu’il ne possède plus ou pas. En clair, nous pensons que dans la relation au Successeur, le professionnel Expérimenté est conduit à faire ce travail de didactisatisation, à étayer et étoffer son savoir-faire. Abernot (1993) propose de considérer la « Périmaîtrise », résultante de l’apprentissage au-delà de la maîtrise. La périmaîtrise consiste à dépasser la maîtrise par la possibilité de discourir sur, de parler de, activant ainsi des connaissances connexes au domaine de maîtrise. De son coté, Barbier (1998) pose l’hypothèse que le travail de mentalisation, de formalisation, de recherche est aussi un acte de formation. Aussi nous rejoignons 148

Abernot (1993) et Barbier (1998), et pensons que dans cette mise en mots et en gestes, en argumentations et explications, le Professionnel Expérimenté explicite son savoirfaire, et ce faisant réapprend ce qu’il sait autrement, et peut-être apprend du nouveau. Il nous paraît donc que l’explicitation que provoque la relation au Successeur crée un nouveau « rapport au savoir » (Charlot, 1997), tant par la formalisation de ce qui est implicite que par l’utilisation ou la ré utilisation, l’évocation, la démonstration des savoirs déjà formalisés, dans la récursivité que posent Vygotski et Wallon. Il nous faudra aborder cet aspect plus loin, lorsque nous évoquerons la relation entre le Professionnel Expérimenté et le Successeur. 7.4.5.2 Quelques remarques Nous avons laissé en suspend une question qui peut resurgir, à savoir qui définit, qui évalue l’expertise du Professionnel Expérimenté. Question précisément opportune puisque nous avons précisé plus haut que Professionnel Expérimenté n’était pas forcément reconnu au sein même de l’entreprise. Tochon (1993) formalise cette question en proposant quelques critères de « choix » de l’expert. Il conclue très justement que chaque critère en soi est très subjectif, et que la durée de l’expérience elle-même est une condition nécessaire, mais pas suffisante pour rendre compte de l’expertise. Il estime cette durée nécessaire à 7 ans, Lieury et Fenouillet (1997, p.118) l’estiment à 10 ans, l’Expert partant en retraite est porteur de37 ou 40 ans d’expérience. La subjectivité étant de mise, doit-on chercher une base de critères « objectifs » pour déterminer qui a une expérience « experte » ? L’entreprise a- t-elle les moyens, a-t-elle intérêt à s’engager dans cette approche ? Si les Experts euxmêmes ne sont pas en mesure de formuler tout ce qu’ils savent faire, si l’abduction est une caractéristique de l’Expert à laquelle les recherches ne se sont pas intéressées, l’entreprise peut-elle adopter cette caractéristique pour « choisir » les experts ? La question clairement posée mériterait d’être abordée sous l’angle de l’évaluation, et elle intéresserait aussi bien le chercheur que le DRH. Cette question ne nous appartient pas, l’entreprise, bardée d’outils d’évaluation et de validation de compétence est par ailleurs celle qui s’engage dans cette initiative. Il lui appartient en premier lieu de déterminer, de choisir, de nommer, bref de reconnaître qui est Expert, qui est porteur d’une expérience significative, qu’il serait utile ou nécessaire de transmettre. 149

Abernot (1993) et Barbier (1998), et pensons que dans cette mise en mots et en gestes,<br />

en argumentations et explications, le Professionnel Expérimenté explicite son <strong>savoir</strong><strong>faire</strong>,<br />

et ce faisant réapprend ce qu’il sait autrement, et peut-être apprend <strong>du</strong> nouveau. Il<br />

nous paraît donc que l’explicitation que provoque la relation au Successeur crée un<br />

nouveau « rapport au <strong>savoir</strong> » (Charlot, 1997), tant par la formalisation de ce qui est<br />

implicite que par l’utilisation ou la ré utilisation, l’évocation, la démonstration des<br />

<strong>savoir</strong>s déjà formalisés, dans la récursivité que posent Vygotski et Wallon.<br />

Il nous faudra aborder cet aspect plus loin, lorsque nous évoquerons la relation entre le<br />

Professionnel Expérimenté et le Successeur.<br />

7.4.5.2 Quelques remarques<br />

Nous avons laissé en suspend une question qui peut resurgir, à <strong>savoir</strong> qui définit, qui<br />

évalue l’<strong>expert</strong>ise <strong>du</strong> Professionnel Expérimenté. Question précisément opportune<br />

puisque nous avons précisé plus haut que Professionnel Expérimenté n’était pas<br />

forcément reconnu au sein même de l’entreprise.<br />

Tochon (1993) formalise cette question en proposant quelques critères de « choix » de<br />

l’<strong>expert</strong>. Il conclue très justement que chaque critère en soi est très subjectif, et que la<br />

<strong>du</strong>rée de l’expérience elle-même est une condition nécessaire, mais pas suffisante pour<br />

rendre compte de l’<strong>expert</strong>ise. Il estime cette <strong>du</strong>rée nécessaire à 7 ans, Lieury et<br />

Fenouillet (1997, p.118) l’estiment à 10 ans, l’Expert partant en retraite est porteur de37<br />

ou 40 ans d’expérience. La subjectivité étant de mise, doit-on chercher une base de<br />

critères « objectifs » pour déterminer qui a une expérience « <strong>expert</strong>e » ? L’entreprise a-<br />

t-elle les moyens, a-t-elle intérêt à s’engager dans cette approche ? Si les Experts euxmêmes<br />

ne sont pas en mesure de formuler tout ce qu’ils savent <strong>faire</strong>, si l’ab<strong>du</strong>ction est<br />

une caractéristique de l’Expert à laquelle les recherches ne se sont pas intéressées,<br />

l’entreprise peut-elle adopter cette caractéristique pour « choisir » les <strong>expert</strong>s ? La<br />

question clairement posée mériterait d’être abordée sous l’angle de l’évaluation, et elle<br />

intéresserait aussi bien le chercheur que le DRH. Cette question ne nous appartient pas,<br />

l’entreprise, bardée d’outils d’évaluation et de validation de compétence est par ailleurs<br />

celle qui s’engage dans cette initiative. Il lui appartient en premier lieu de déterminer,<br />

de choisir, de nommer, bref de reconnaître qui est Expert, qui est porteur d’une<br />

expérience significative, qu’il serait utile ou nécessaire de transmettre.<br />

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