210x270 Myoline N° 1 - Institut de Myologie
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Michel Far<strong>de</strong>au<br />
Professeur honoraire au<br />
CNAM<br />
Fondateur <strong>de</strong> la Société<br />
Française <strong>de</strong> <strong>Myologie</strong><br />
m.far<strong>de</strong>au@<br />
institut-myologie.org<br />
Jacques S. Beckmann<br />
Département <strong>de</strong><br />
Génétique Médicale,<br />
CHUV, Lausanne, Suisse<br />
jacques.beckmann@<br />
unil.ch<br />
Hiroyuki Sorimachi<br />
Calpain project,<br />
Tokyo Metropolitan<br />
<strong>Institut</strong>e of Medical<br />
Science (Rinshoken),<br />
Tokyo, Japan<br />
sorimachi-hr@<br />
igakuken.or.jp<br />
J. Andoni Urtizberea<br />
Praticien Hospitalier, MPR<br />
A.P.H.P. Hôpital Marin<br />
<strong>de</strong> Hendaye, France<br />
andoni.urtizberea@<br />
hnd.aphp.fr<br />
HISTORIQUE<br />
Une contribution à l’histoire<br />
<strong>de</strong> la découverte <strong>de</strong>s calpaïnopathies<br />
MICHEL FARDEAU, JACQUES S. BECKMANN, HIROYUKI SORIMACHI, J. ANDONI URTIZBEREA<br />
« Histoire » est sans doute un bien grand mot. Il s’agit ici, plus simplement <strong>de</strong>s témoignages<br />
<strong>de</strong> quatre <strong>de</strong>s principaux acteurs <strong>de</strong> cette découverte. La <strong>de</strong>rnière réunion annuelle <strong>de</strong><br />
la Société Française <strong>de</strong> <strong>Myologie</strong> les avait réunis à Hendaye. Il a donc semblé opportun<br />
<strong>de</strong> recueillir leurs témoignages dans la genèse d’une découverte qui a profondément<br />
marqué l’histoire <strong>de</strong>s dystrophies musculaires <strong>de</strong>s ceintures et par là-même l’histoire<br />
<strong>de</strong>s myopathies héréditaires humaines.<br />
Dystrophie <strong>de</strong>s ceintures à La Réunion<br />
M. Far<strong>de</strong>au<br />
Tout a commencé un matin d’octobre 1986 par<br />
l’irruption, dans le couloir <strong>de</strong> l’Unité <strong>de</strong> Recherche<br />
Inserm que je dirigeais alors rue du Fer à Moulin, <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>ux personnes appartenant à l’Association Réunionnaise<br />
<strong>de</strong> lutte contre les Myopathies. Elles me<br />
<strong>de</strong>mandèrent <strong>de</strong> façon pressante <strong>de</strong> venir dans leur<br />
île examiner <strong>de</strong>s patients atteints <strong>de</strong> myopathie et en<br />
particulier la troisième sœur <strong>de</strong> l’un d’entre eux,<br />
l’une étant déjà morte et l’autre étant en phase<br />
terminale et hospitalisée. Quelques semaines plus<br />
tard, j’étais dans l’avion pour Saint-Denis <strong>de</strong> La<br />
Réunion et accueilli par cette famille.<br />
1987, à l’île <strong>de</strong> La Réunion<br />
Le diagnostic exact <strong>de</strong> la forme <strong>de</strong> myopathie que<br />
présentaient ces jeunes femmes, appartenant à la<br />
communauté musulmane, ne viendra que quelques<br />
années plus tard avec la découverte <strong>de</strong>s gènes<br />
responsables <strong>de</strong>s sarcoglycanopathies (dont<br />
l’analyse avait été entreprise en collaboration avec<br />
M. Ben Hamida et son équipe <strong>de</strong> l’<strong>Institut</strong> <strong>de</strong><br />
Neurologie <strong>de</strong> Tunis). Mais les collègues réunionnais<br />
souhaitaient profiter <strong>de</strong> ma présence pour me<br />
montrer les nombreux autres cas <strong>de</strong> myopathie<br />
qu’ils suivaient. C’est ainsi que je me suis retrouvé,<br />
quelques jours après mon arrivée, dans le sud <strong>de</strong><br />
l’île, à l’hôpital <strong>de</strong> Saint-Pierre, accueilli par le<br />
docteur Clau<strong>de</strong> Mignard. Le choc fut grand lorsque<br />
celle-ci m’amena à la consultation <strong>de</strong> son service,<br />
où m’attendaient une quinzaine <strong>de</strong> patients. L’analyse<br />
clinique immédiate permettait <strong>de</strong> penser qu’ils<br />
étaient tous atteints <strong>de</strong> dystrophie <strong>de</strong>s ceintures<br />
dans sa forme classique, décrite initialement par<br />
W. Erb un siècle plus tôt (1884) et individualisée<br />
quelques décennies plus tard par J. N. Walton et F. J.<br />
Nattrass dans un papier classique <strong>de</strong> Brain (1954).<br />
Malgré la qualité <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>scription, cette entité<br />
connut par la suite bien <strong>de</strong>s vicissitu<strong>de</strong>s, sans doute<br />
en raison <strong>de</strong> sa relative rareté, <strong>de</strong> l’absence d’une<br />
formule histologique particulière (en témoignait la<br />
variété <strong>de</strong>s lésions rencontrées dans les biopsies<br />
pratiquées chez ces patients) et <strong>de</strong> la facilité excessive<br />
avec laquelle ce diagnostic était porté. Si bien<br />
que certains cliniciens, parmi les plus rigoureux,<br />
ne voulaient même plus entendre parler <strong>de</strong> ce<br />
diagnostic qu’ils trouvaient trop imprécis et facteur<br />
<strong>de</strong> confusion (Brooke).<br />
Ce n’était cependant pas mon opinion, car j’avais<br />
suivi dans ma consultation parisienne quelques<br />
patients généralement jeunes, pour lesquels, après<br />
examens clinique et histologique approfondis, je<br />
n’avais pas d’autre diagnostic possible que celui <strong>de</strong><br />
dystrophie <strong>de</strong>s ceintures. Mais ce n’était là que<br />
quelques patients isolés et ma gran<strong>de</strong> surprise<br />
était <strong>de</strong> trouver réunies, en cette fin d’après-midi, un<br />
ensemble <strong>de</strong> personnes qui apparemment se<br />
connaissaient et dont la sémiologie était <strong>de</strong> ce type.<br />
Je leur <strong>de</strong>mandais la permission <strong>de</strong> prendre une<br />
photo, pour moi historique, <strong>de</strong> leur groupe dans<br />
cette salle d’attente.<br />
Les données cliniques <strong>de</strong> ces patients étaient<br />
remarquablement homogènes : une gran<strong>de</strong> sélectivité<br />
d’atteinte <strong>de</strong>s muscles <strong>de</strong>s épaules, <strong>de</strong>s bras, du<br />
tronc et <strong>de</strong>s membres inférieurs ; un respect du<br />
visage, <strong>de</strong>s muscles oculomoteurs et vélo-pharyn-<br />
Les cahiers <strong>de</strong> myologie N°2 AVRIL 2010 5<br />
HISTORIQUE