lien - OCL - Free
lien - OCL - Free
lien - OCL - Free
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
mai:CA 2/05/11 5:17 Page 4<br />
Nucléaire<br />
Fukushima-Tchernobyl :<br />
la transparence jamais n'abolira<br />
la radio-activité<br />
Le 12 mars, l'accident de Fukushima avait été classé au<br />
niveau 4 de l'échelle de risques, puis le 18 mars au niveau<br />
5, puis le 12 avril au niveau 7, soit celui de l'accident majeur<br />
comme Tchernobyl. Bien sûr, les autorités s'empressaient<br />
de rassurer en indiquant que les rejets étaient que<br />
de 7 à 12% de ceux de Tchernobyl. Admirons la science de<br />
nos experts qui peuvent déjà nous assurer ça alors que<br />
Fukushima n'est toujours pas sorti de l'accident, continue<br />
de cracher de la radio-activité, et qu'on ne peut toujours<br />
pas accéder aux coeurs des réacteurs pour en connaître la<br />
situation exacte…<br />
UN CLASSEMENT INUTILE<br />
En principe, les classements sont<br />
un outil pour «les décideurs», doivent<br />
servir à instaurer des mesures de protection<br />
de la population. Jusqu'au niveau<br />
3 compris, on considère qu'il ne<br />
s'agit que d'un incident, à partir du niveau<br />
4 c'est considéré comme un accident.<br />
Le niveau 4, c'est le niveau à<br />
partir duquel il y a un risque d'exposition<br />
de la population. Au niveau 4, aucune<br />
mesure particulière n'est à<br />
prendre pour la population à part la<br />
surveillance des aliments. Classer Fukushima<br />
niveau 4, il fallait oser! Au niveau<br />
5, le réacteur est endommagé et il<br />
y a un rejet «limité» de radio-activité,<br />
suffisant pour prendre des mesures. En<br />
résumé, les autorités japonaises ont<br />
donc attendu une semaine avant de se<br />
préoccuper de quoi que ce soit pour la<br />
population… Or, certaines mesures,<br />
comme la distribution d'iode par exemple,<br />
ne servent à quelque chose que si<br />
elles sont prises avant l'arrivée du<br />
nuage radioactif…Le niveau 7, c'es le<br />
niveau maximum, l'accident majeur,<br />
celui où il faut évacuer la population.<br />
On l'a compris, classer l'accident au<br />
niveau 7 un mois après sa survenue,<br />
c'est avoir abandonné totalement la<br />
population à son sort. Comme l'écrivait<br />
la CRII-Rad dans son communiqué du<br />
12 avril: «Le classement s’effectue le 12<br />
avril sur la base des rejets qui se sont<br />
produits pour l’essentiel 4 semaines<br />
plus tôt ! Qu’importe d’ailleurs le classement<br />
! La question de fond n’est pas<br />
de savoir où se situent les rejets de FU-<br />
KUSHIMA DAIICHI par rapport à ceux<br />
de Tchernobyl. Les experts auront tout<br />
le temps de le déterminer. L’urgence,<br />
c’est d’évaluer les niveaux de risque et<br />
de dimensionner en conséquence les<br />
mesures de protection. OU, PLUS EXAC-<br />
TEMENT, C’ETAIT L’URGENCE D’IL Y A 4<br />
OU 5 SEMAINES ! Il aurait fallu anticiper,<br />
évaluer les doses que les habitants<br />
étaient susceptibles de recevoir et décider<br />
en conséquence des contre-mesures<br />
à prendre pour limiter, autant<br />
qu’il est possible dans de telles conditions,<br />
l’irradiation et la contamination<br />
des habitants des zones les plus affectées.»<br />
Annoncer un accident, ça fait toujours<br />
mauvais genre auprès des actionnaires<br />
(ou des électeurs, s'il s'agit d'un<br />
nucléaire «public»)… Plusieurs moyens<br />
ont été pris pour retarder les différents<br />
classements. Le plus simple, toujours<br />
utilisé, ne pas communiquer les mesures<br />
de radio-activité. C'est un grand<br />
classique, qui pour le moment n'a souffert<br />
d'exception sur aucun des accidents<br />
répertoriés. Le second est de<br />
classer séparément chaque unité d'une<br />
centrale nucléaire. Au Japon comme en<br />
France et en beaucoup d'autres pays,<br />
chaque centrale nucléaire dispose de<br />
plusieurs réacteurs. Or, pour la population,<br />
évidemment, tous les rejets se<br />
confondent et se cumulent.<br />
Lorsqu'on nous annonce que les rejets<br />
sont beaucoup plus faibles qu'à<br />
Tchernobyl, il s'agit bien sûr des rejets<br />
au 12 avril. Déjà, nul ne sait quelle sera<br />
la dose cumulée, l'accident n'étant pas<br />
du même type. Ensuite, il faut savoir<br />
qu'il ne s'agit pas de mesures, mais de<br />
résultats de calculs expérimentaux à<br />
partir des mesures connues. Les organismes<br />
officiels évaluent les rejets à<br />
entre 7 et 13 fois (suivant les organismes<br />
mais à partir des mêmes données),<br />
le seuil de classement au<br />
niveau 7. Enfin, les rejets dans l'Océan<br />
Pacifique ne sont pas pris en compte<br />
puisqu'ils ne sont pas connus.<br />
UNE TRANSPARENCE<br />
TROMPEUSE<br />
Le 30 avril devait avoir lieu à Paris<br />
«une grande marche citoyenne pour la<br />
transparence sur le nucléaire», organisée<br />
par «Sortir du nucléaire Paris». Que<br />
ce soit la seule revendication retenue à<br />
l'heure de la catastrophe de Fukushima<br />
par de soit-disant antinucléaires n'est<br />
pas seulement pitoyable, c'est aussi<br />
assez symptomatique. Demander la<br />
transparence, c'est consensuel et ça<br />
rassure. D'ailleurs, celle-ci nous est<br />
promise à chaque accident industriel,<br />
tout particulièrement dans les domaines<br />
de l'agroalimentaire et de la<br />
santé. Comme si savoir que nous<br />
sommes en danger pouvait nous en<br />
protéger…<br />
Quelle transparence réclame-t-on<br />
Par exemple, je peux savoir par la CRIIrad,<br />
à défaut des autorités officielles,<br />
que dans la Drome, «Les activités en<br />
iode 131(seul radionucléide détecté)<br />
sont comprises entre 0,24 Bq/l et 4,9<br />
Bq/l.» (dans les eaux de pluie). Je ne sais<br />
pas si ça vous avance beaucoup, mais<br />
moi pas tellement. Evidemment, si je<br />
lis ensuite que « Ces très faibles activité<br />
n'induisent aucun risque pour les<br />
personnes qui se sont trouvés sous la<br />
pluie sans protection. En revanche,<br />
l'utilisation de l'eau de pluie comme<br />
source principale d'alimentation est<br />
déconseillée , en particulier si les<br />
consommateurs sont de jeunes enfants.»<br />
, toujours sur le même site de la<br />
CRII-rad, ça va nettement mieux. Sauf<br />
que signifie que la transparence n'a de<br />
sens que si je fais confiance à des experts<br />
pour me la traduire. Par exemple,<br />
si je lis la même chose sur le site de<br />
l'IRSN, je ne serai pas rassurée pour<br />
autant et je chercherai frénétiquement<br />
ailleurs une confirmation ou une infirmation.<br />
La transparence est une double<br />
illusion. Illusion de savoir alors que,<br />
sauf quelques spécialistes qui d'ailleurs<br />
quand ils sont honnêtes précisent<br />
que leur avis n'est pas définitif, nous<br />
sommes incapables de décrypter l'information<br />
qui nous serait donnée . Illusion<br />
de maîtriser notre environnement<br />
alors que cette transparence nous per-<br />
4<br />
courant alternatif - n°210 -mai 2011