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mai:CA 2/05/11 5:18 Page 24<br />

Révoltes arabes<br />

La Libye ou la quête<br />

d’une liberté compromise<br />

C’est bien plus qu’un vent de<br />

liberté qui souffle sur la rive<br />

Sud de la méditerranée. Tout<br />

bonnement, il s’agit d’un<br />

profond séisme destructeur<br />

de régimes despotes et honnis. Le souffle<br />

est si puissant que rien ne semble l’arrêter.<br />

Pas même le mitraillage des foules<br />

dans les rues. Les cas libyens, égyptiens<br />

et tunisiens sont évidemment illustratifs.<br />

Les secousses ininterrompues depuis<br />

le début de l’année apportent cet air frais<br />

et vivifiant d’une ère nouvelle.<br />

Une fois de plus, la dialectique accélératrice<br />

vient narguer les analystes institutionnels<br />

et autres tenants attitrés de<br />

l’évolution « en douceur ».<br />

Hubert Védrine, ancien ministre français<br />

des affaires étrangères, affirmait<br />

dans un colloque en décembre dernier<br />

que les pays du Sud de la Méditerranée<br />

ne pouvaient espérer au mieux qu’un<br />

dictateur éclairé ! Les peuples habitants<br />

ces régions seraient sous-développés politiquement<br />

et les libertés démocratiques<br />

loin de leurs préoccupations premières…<br />

L’aspiration à mieux vivre intellectuellement<br />

serait ainsi trop ambitieuse<br />

pour ces « sous-hommes », autre mot utilisé<br />

dans un autre contexte, il est vrai, par<br />

un autre « socialiste » français. Cela dénote<br />

la perception affligeante que peuvent<br />

avoir quelques énarques « éclairés ».<br />

Les manifestants de Tunis ou de Tripoli<br />

montrent, heureusement, que les<br />

gens de la rue sont mille fois plus lucides<br />

que les « Rotary » bien pensants et… à-<br />

la-rue. En France, et plus largement en<br />

Occident, la décadence, c’est fatalement<br />

les croupions. Evidence.<br />

Tunis, Avenue Bourguiba (en arabe : Dégage Sebsi (actuel premier ministre) ;<br />

La révolution a été volée au peuple ; Où est la liberté )<br />

L’intelligentsia ne s’est pas spontanément<br />

bousculée au portillon pour exprimer<br />

son soutien au peuple libyen. Ni au<br />

peuple tunisien ou égyptien d’ailleurs.<br />

Il est vrai qu’à l’instar du nouveau<br />

ministre de l’intérieur, l’élite parisienne<br />

ne peut apparemment se passer des villégiatures<br />

traditionnelles « au chaud »<br />

dans les palais des dictateurs du Sud…<br />

En ces temps hédonistes des « philosophes<br />

» ignorés par la philosophie et autres<br />

intellectuels en carton, les peuples<br />

en révoltes ne doivent compter que sur<br />

eux-mêmes. Et ne s’accomplir que par<br />

eux-mêmes !<br />

DES RÉVOLTES INSURRECTION-<br />

NELLES DE L’AFRIQUE DU NORD<br />

Faisons, pour commencer, un aperçu<br />

général des rébellions en cours car le<br />

terme « révolution », usité par les médias,<br />

semble encore présomptueux. La suite<br />

nous dira ce qu’il en est.<br />

De prime abord, nous pouvons observer<br />

que les révoltes insurrectionnelles<br />

actuelles ne sont pas dirigées ou orchestrées<br />

par des organisations centralisatrices<br />

classiques. Ni par de quelconques<br />

officines. La lame de fond vient d’en bas,<br />

pure, hors de toute tutelle. Cela est évident<br />

pour la Tunisie, la Libye et l’Egypte…<br />

Notons cependant que pour ce qui<br />

concerne la Libye, la réaction démesurée<br />

et folle du clan Kadhafi (pilonnages des<br />

villes par des armes lourdes) suivie de<br />

l’interférence récente et musclée de<br />

l’OTAN) fausse la dynamique intrinsèque.<br />

En Algérie, la mayonnaise ne prend<br />

pas, et pourtant le malaise est similaire,<br />

voire identique. Il y a diverses raisons objectives<br />

et bloquantes. Nous en donnons<br />

les deux principales :<br />

le mouvement social, politique et<br />

identitaire, continuellement vampirisé<br />

depuis vingt ans, n’a jamais fait de bilan ;<br />

il est en miettes permanentes ;<br />

la « révolte » est suggérée d’en haut<br />

par quelques légaux oppositionnels siégeant<br />

au parlement ainsi que quelques<br />

comités de la société civile. Recherchant<br />

une synthèse des futures luttes (c’est<br />

louable), ils ignorent manifestement les<br />

ingrédients non maitrisables de la spontanéité<br />

révolutionnaire.<br />

C’est bien connu : la révolution ne se<br />

décrète pas, même si les conditions objectives<br />

et subjectives sont largement atteintes.<br />

De toute façon, sous un tel<br />

chapeau suggestif, elle eut été factice ou<br />

simplement de palais. Les gens ne s’y<br />

sont pas trompés.<br />

Depuis longtemps, les luttes en Kabylie<br />

sont légion et font référence en<br />

Libye, notamment chez les Berbères. Le<br />

peuple kabyle a débloqué l’Histoire en<br />

1980 et sert, depuis, de repère pour la<br />

communauté amazighe. A titre d’exemple,<br />

la journée du 20 avril, jour du Printemps<br />

kabyle élargie en Printemps<br />

berbère, est célébrée par tous les Imazighen<br />

: des Chleuhs du Maroc, aux Berbères<br />

de Nefoussa de Libye, en passant<br />

par les Chaouis en Algérie, etc.<br />

La phase se caractérisant par la stratégie<br />

de revendication au pouvoir central,<br />

est à son crépuscule et le nouveau centre<br />

de gravité s’est déplacé par la force<br />

des choses en Libye… qui au départ de sa<br />

révolte était en passe de devenir le nouveau<br />

phare de l’Afrique du Nord. L’évolution<br />

récente, comme notamment le<br />

soutien logistique d’Alger au dictateur libyen<br />

et la demande d’aide des insurgés<br />

aux bras forts de l’occident, peut faire<br />

avorter le souffle libyen. A suivre aussi.<br />

Chez les voisins, la machine qui<br />

s’emballe de manière incontrôlée inquiète<br />

les pouvoirs d’Alger et de Rabat.<br />

Ils scrutent les événements. Pour endiguer<br />

une éventuelle contagion - autre<br />

terme affligeant répété par les médias -,<br />

ces deux derniers proposent à la hâte des<br />

changements : levée de l’état d’urgence<br />

pour Alger et réformes institutionnelles<br />

pour Rabat.<br />

Politiquement et culturellement atrophiée<br />

jusqu’ici, la Libye peut désormais<br />

montrer une voie saine. En Kabylie, le<br />

mouvement, continuellement éculé par<br />

quelques ambitions personnelles surexploitées<br />

par les services, n’a pas encore<br />

atteint son terme naturel : passer à<br />

l’auto-reconstruction révolutionnaire et<br />

cesser de peindre des banderoles (à l’intention<br />

de qui ).<br />

Les Libyens, eux, peuvent transformer<br />

l’essai, à condition qu’ils aient noté<br />

les erreurs de leurs voisins, tant dans le<br />

mouvement national des années 50 que<br />

dans l’Algérie « indépendante ». Leur situation<br />

leur a permis d’acquérir intuitivement<br />

qu’il ne faut rien négocier au<br />

système ni rien lui revendiquer. Ils ont<br />

compris qu’ils doivent se servir et se faire<br />

par eux-mêmes. Mais avant tout ils doivent<br />

vaincre Kadhafi !<br />

UNE RADICALE CONVERGENCE<br />

DE LA BASE<br />

Il est indispensable de préciser la<br />

nouveauté. Il ne s’agit plus d’émeutes<br />

24<br />

courant alternatif - n°210 - mai 2011

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