Ce qu'il faut connaître du bagne - Manioc
Ce qu'il faut connaître du bagne - Manioc
Ce qu'il faut connaître du bagne - Manioc
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
DU BAGNE. 109<br />
Ainsi, la société étant efficacement protégée, l'humanité<br />
commandera de ne pas poursuivre plus avant une<br />
expérience cruelle qui a fait ses preuves négatives et...<br />
son temps.<br />
Autre particularité significative : les partisans les plus<br />
irré<strong>du</strong>ctibles, dans le passé, de la transportation subissent<br />
peu à peu, insensiblement, l'influence de l'évolution<br />
des idées de notre époque : L'humanitarisme poursuit<br />
sa marche irrésistible, contre vents et marées.<br />
Voyez combien nous sommes tous écœurés à la lecture<br />
des rigueurs qui illustraient la vie dans les <strong>bagne</strong>s<br />
métropolitains. Or, ces <strong>bagne</strong>s ont été créés en 1748. <strong>Ce</strong><br />
n'est pas tellement vieux!... Dans quelque cinquante<br />
ans, lorsque nos arrière-petits-fîls liront les rigueurs de<br />
nos <strong>bagne</strong>s coloniaux, ne doutez pas <strong>qu'il</strong>s ne s'indignent<br />
alors comme nous nous indignons aujourd'hui des<br />
excès inutiles de la répression en 1748.<br />
Un juriste qui a fait autorité, M. Lévcillé, a été en<br />
Guyane au début <strong>du</strong> xx" siècle. A son retour, il écrivait,<br />
sous le titre « la Guyane et la question pénitentiaire » :<br />
« Je confesse que la situation générale n'est pas brillante<br />
et, m'interrogeant moi-même, dans la sincérité de ma<br />
conscience, je me suis demandé si, prié de donner mon<br />
avis, je réclamerais, pour la Guyane, soit l'abandon de<br />
toute immigration pénale, soit la continuation des<br />
anciens errements, soit leur réforme. » En dépit de la<br />
cristallisation de l'âge, cet éminent juriste qui avait<br />
constaté sur place, qui avait « vu » était ébranlé dans sa<br />
foi. Il ne savait plus! et, depuis, vingt-huit années nouvelles<br />
ont coulé au sablier <strong>du</strong> temps.<br />
Les mœurs, plus fortes que les lois, continueront de<br />
hâter la disparition des rigueurs et des flétrissures<br />
inutiles, encore inscrites actuellement dans nos lois;<br />
car, ainsi que le déclarait fort justement un forçat luimême<br />
: « La société a le devoir de châtier les coupables;<br />
elle n'a pas le droit d'achever de les démoraliser, de les<br />
souiller à tout jamais, de les avilir irrémédiablement. »