Ces géants noir - Natagora.org
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escapade<br />
<strong>Ces</strong><br />
au<br />
Joëlle Beaujean<br />
Sur le terril du Gosson, Daniel Rose<br />
réalise des inventaires variés de plantes<br />
et d'animaux. Depuis peu, Daniel<br />
est devenu le gardien du Gosson.<br />
Christophe Collas<br />
Pascal Hauteclair Pascal Hauteclair<br />
Pelouse rase agrémentée de fourrés denses sur le terril<br />
du Champ d'oiseaux (Flémalle)<br />
Vue du sommet boisé du terril de l'Espérance (St-Nicolas)<br />
à partir du terril du Gosson.<br />
Longtemps perçus comme des cicatrices<br />
de l’ère minière, les terrils suscitent maintenant<br />
un nouvel intérêt. À la demande des partenaires<br />
du projet Interreg IIIa « La Route des Terrils »,<br />
<strong>Natagora</strong> a mis sur pied une campagne<br />
participative de relevés biologiques<br />
sur ces géants <strong>noir</strong>s…<br />
Aperçu de cette vie diversifiée au<br />
cœur de nos cités…<br />
« Une caverne d’Ali baba… », voilà comment Daniel Rose<br />
résume les terrils !<br />
L’an dernier, Daniel a arpenté les terrils liégeois dans le cadre<br />
des relevés biologiques <strong>org</strong>anisés par <strong>Natagora</strong> à la demande<br />
de ses partenaires au sein du projet Intereg IIIa « La<br />
Route des Terrils ». C’est sur le terril du Gosson, à Saint-<br />
Nicolas, que nous le rencontrons à l’affût d’un oiseau, d’un<br />
papillon... Il tient à nous faire partager son amour des terrils.<br />
Interview d’un passionné hors norme !<br />
« Ça fait maintenant près de 15 ans que je pratique le baguage<br />
des oiseaux sur les terrils de Saint-Nicolas. Je suis tou-<br />
20 natagora numéro 19 mai-juin 2007
géants <strong>noir</strong>s<br />
cœur vert…<br />
\<br />
Pascal Hauteclair et Roland de Schaetzen<br />
Un terril c'est quoi…<br />
Un terril peut se résumer en un mot… une décharge<br />
! Et plus précisément une décharge de roches<br />
résultant d'une exploitation minière. En Belgique,<br />
au cours du 19 e et du 20 e siècle, l'exploitation du<br />
charbon a vu des dizaines de terrils se dresser<br />
dans le paysage. Aujourd'hui, ces terrils sont les<br />
témoins de ce passé industriel révolu. Beaucoup<br />
ont été rasés tandis que d'autres, oubliés des<br />
hommes, sont devenus des refuges pour des<br />
plantes, des animaux…<br />
Pascal Hauteclair<br />
jours agréablement surpris de l’abondance des oiseaux qui<br />
fréquentent les terrils. Quel plaisir d’observer la sittelle, le troglodyte,<br />
le pic vert parader et nicher dans les bois. Ce qui me<br />
surprend ce n’est pas tant les espèces observées mais bien<br />
la diversité et l’abondance des oiseaux présents sur ces terrils…<br />
au cœur de nos cités ! »<br />
Daniel souligne là un point important… les terrils sont avant<br />
tout des refuges naturels au cœur des villes. C’est également<br />
l’avis des vingt autres bénévoles qui ont réalisé des relevés<br />
sur les terrils. Tous ont été étonnés par l’abondance des<br />
plantes, des amphibiens, des papillons… rencontrés au<br />
cours de leurs prospections.<br />
Une histoire d'amour…<br />
Le terril du Gosson nous a révélé une belle surprise… la<br />
découverte d'une population d'azuré frêle ! La présence de<br />
ce papillon menacé en Wallonie est assez surprenante sur<br />
le terril. À la fin de l'exploitation minière au début des<br />
années 2000, le site a été ensemencé au canon. Le semis<br />
contenait la seule plante hôte connue pour sa chenille, la<br />
vulnéraire. Cette plante pousse habituellement dans les<br />
pelouses calcaires et maritimes.<br />
Parmi toutes ces observations, il tient à nous confier son<br />
coup de cœur : « Je n’oublierai jamais l’émotion que j’ai<br />
À gauche et ci-dessus, le sommet<br />
du terril du Hasard (Fléron), qui est aussi le<br />
point culminant du pays de Herve (365 m).<br />
À droite, une pente mobile du Gosson<br />
(Saint-Nicolas) colonisée par l'oseille<br />
à feuilles d'écusson.<br />
Pascal Hauteclair<br />
Pascal Hauteclair<br />
natagora 21
escapade<br />
ressentie lorsque, en hiver sur le<br />
Gosson, une bécassine sourde tapie<br />
dans la végétation s’est envolée à mes<br />
pieds. Il s’agit, avec l’alouette lulu, de<br />
ma plus belle observation sur ce<br />
terril ! »<br />
Une vie qui ne demande qu’à<br />
être découverte…<br />
Naturaliste confirmé, Daniel nous<br />
confie que ses plus surprenantes<br />
observations concernent les insectes.<br />
« Mon plus beau souvenir sur les terrils,<br />
et de loin, c’est, en juillet, la vue de<br />
centaines de papillons virevoltant dans<br />
À la recherche du<br />
crapaud perdu…<br />
Quelle surprise de découvrir sur le terril<br />
du Gosson une nouvelle population<br />
de crapaud calamite ! Ce joli petit crapaud<br />
intégralement protégé en<br />
Wallonie se rencontre dans les friches<br />
industrielles et sur les terrils. Il a<br />
besoin de vastes zones sans végétation<br />
avec des mares ou des flaques<br />
temporaires. Entre avril et août 2006,<br />
près de 300 pontes ont été comptées<br />
sur le site ! Donc un des 10 meilleurs<br />
sites de Wallonie !<br />
Pascal Hauteclair<br />
Le terril, un milieu<br />
qui évolue<br />
Charly Farinelle<br />
Rudi Dujardin<br />
Des larves de lucane cerfvolant,<br />
réputées associées<br />
au chêne, ont été trouvées<br />
sur le terril de Xhorré<br />
dans une vieille souche<br />
de bouleau.<br />
Dessin : Sten<br />
Eric Wlravens<br />
Pascal Hauteclair<br />
Le tabac d'Espagne pond ses<br />
œufs sur le tronc des<br />
arbustes; les chenilles descendent<br />
ensuite sur les violettes<br />
dont<br />
elles se nourrissent.<br />
Pascal Hauteclair René Dumoulin<br />
L'alouette lulu, espèce<br />
Natura 2000, profite<br />
parfois des pelouses rases<br />
des terrils pour y nicher.<br />
Ce fut le cas en 2005<br />
au Gosson.<br />
L'agrion nain, qui fréquente les mares<br />
temporaires, a été vu sur le terril du<br />
Gosson.<br />
Des centaines de criquets à ailes<br />
bleues sont observables sur les<br />
pentes mobiles, les sols nus et<br />
chauds des terrils.<br />
Le tussilage, une des rares<br />
espèces typiques de la végétation<br />
pionnière, fleurit dès la fin de<br />
l'hiver.<br />
22<br />
natagora numéro 19 mai-juin 2007
les friches du Gosson. Il y en avait de<br />
toutes les couleurs… des blancs, les<br />
piérides, des bleus, les azurés, des<br />
jaunes, les machaons… » La surprise<br />
de Daniel est tout à fait compréhensible.<br />
En effet, quarante espèces de<br />
papillons de jour, soit un tiers des<br />
espèces de Wallonie, ont été recensées<br />
sur les terrils l’été dernier ! Plusieurs<br />
d’entre elles sont peu communes<br />
comme le demi-deuil, la grisette ou<br />
encore le marbré-de-vert, un papillon<br />
migrateur qui n’avait plus été observé<br />
chez nous depuis 1980.<br />
« J’ai également réalisé pour <strong>Natagora</strong><br />
des relevés de criquets et de coccinelles.<br />
Là aussi, j’ai été étonné de la<br />
diversité en espèces. Je garde un souvenir<br />
saisissant de ces milliers de criquets<br />
à ailes bleues prenant le soleil<br />
sur les pentes schisteuses brûlantes du<br />
Gosson. Il fallait les voir s’envoler par<br />
dizaines sous mes pas… »<br />
Vingt espèces de criquets, sur les 46<br />
espèces wallonnes, ont été trouvées.<br />
Mais ce sont les coccinelles qui raflent<br />
la médaille d’or, avec vingt-cinq<br />
espèces recensées en 2006; soit deux<br />
tiers des espèces wallonnes !<br />
Les terrils, plus que des<br />
oasis de nature<br />
Des régions comme le bassin industriel<br />
liégeois ont subi de plein fouet<br />
le déclin de l’industrie lourde et<br />
d’extraction du charbon. Les terrils,<br />
qui y sont souvent les seuls pou-<br />
Sten<br />
La future maison des terrils sera située au pied du terril du Gosson (Saint-<br />
Nicolas). Cette infrastructure s'inscrit dans une série d'aménagements qui<br />
seront mis en place sur les différents terrils du projet : panneaux, sentiers<br />
de découverte nature, modules interactifs…<br />
mons verts dans des paysages encore<br />
trop marqués par les stigmates du<br />
passé, représentent une opportunité<br />
unique de redéveloppement socioéconomique.<br />
Leur valorisation<br />
comme espace accessible dans le<br />
contexte local et touristique se justifie<br />
pleinement.<br />
<strong>Natagora</strong> s’inscrit activement dans<br />
cette démarche. Dans le cadre du<br />
projet « Route des terrils »,<br />
<strong>Natagora</strong> exerce une mission d’assistance<br />
au Comité de Pilotage en<br />
matière de nature. <strong>Natagora</strong> veille à<br />
ce que l’intégration de la nature soit<br />
une des composantes de base du<br />
projet. À partir des découvertes réalisées<br />
au cours des inventaires et avec<br />
l’aide de Daniel Steenhaut (le scénographe<br />
de l’Aquascope Virelles),<br />
<strong>Natagora</strong> exerce aussi une mission<br />
de conseil en ce qui concerne les<br />
aménagements touristiques.<br />
De plus, l’esprit qui caractérise notre<br />
implication dans ce projet intègre une<br />
composante socio-dynamique. Ce<br />
sont en effet la motivation des volontaires<br />
et le soutien donné par les communes<br />
qui assureront une réelle<br />
dynamique citoyenne nécessaire à la<br />
valorisation à long terme de ces<br />
espaces naturels.<br />
Michèle Vangeebergen, de la commune<br />
de Saint-Nicolas, coordonne le<br />
projet « Route des terrils ».<br />
« Le projet regroupe 12 partenaires :<br />
les communes belges de Soumagne,<br />
Chaudfontaine, Flémalle, Fléron,<br />
Plombières, Welkenraedt, Lontzen et<br />
Saint-Nicolas et la commune allemande<br />
de Hückelhoven ainsi que les<br />
asbl Ardenne & Gaume et <strong>Natagora</strong><br />
et le domaine touristique de Blegny-<br />
Mine. La commune de Saint-Nicolas<br />
veille au bon déroulement financier<br />
du projet. Elle s'entoure d'experts<br />
appropriés, défend des positions<br />
communes et préside aussi le Comité<br />
de pilotage régional. »<br />
X<br />
Pour en savoir plus :<br />
Si vous avez des questions concernant<br />
les inventaires biologiques,<br />
contactez Pascal Hauteclair<br />
(0486/27 46 44).<br />
Pour toute question sur le projet<br />
« Route des terrils », Michèle<br />
Vangeebergen (04/252 98 90).<br />
natagora 23