Les attitudes face à la contrainte légale - rimhe

Les attitudes face à la contrainte légale : L’exemple de l’intégration professionnelle des personnes handicapées
Yvan BAREL et Sandrine FREMEAUX
handicap 3 , l’entreprise a l’obligation d’associer les partenaires sociaux ; et
dans l’hypothèse d’une convention entre la Direction de l’entreprise et
l’Agefiph, l’aval d’un partenaire social n’est pas obligatoire, mais souhaitable.
Ces objectifs législatifs ne deviennent pas nécessairement les objectifs de
tous les acteurs, et il se peut que les pratiques des entreprises en matière
d’intégration professionnelle des personnes handicapées soient fortement
différenciées selon la lecture de la loi. Ewick et Silbey (1998) présentent
trois approches possibles du droit : la conformité, le jeu et la résistance. Se
focalisant sur la loi de 2005, Point et al. (2010) distinguent deux attitudes :
l’attitude « réactive » qui vise à répondre uniquement à l’obligation légale, et
l’attitude « proactive » qui consiste à mettre en œuvre une véritable politique
handicap. Dans la continuité de ces travaux, et à partir de trente entretiens
semi-directifs menés auprès de directeurs des ressources humaines (DRH) et
de chargés de mission handicap, notre étude soulève la question du lien entre
les approches du droit et les attitudes à l’égard de la loi de 2005. La première
partie présente les travaux portant sur les approches du droit et les attitudes
des responsables des ressources humaines 4 (RRH) dans le domaine de
l’intégration professionnelle des personnes handicapées, et propose une
problématique bâtie à partir d’une analyse du lien possible entre ces deux
concepts théoriques. Après une explication des choix méthodologiques, nous
analysons les résultats portant sur le lien entre les approches du droit et les
attitudes des RRH à l’égard de la loi de 2005 sur le handicap. La section
suivante propose une typologie des attitudes et envisage les prolongements
possibles de la recherche.
1. Cadre théorique sur le rapport à la contrainte légale
La littérature académique portant sur la diversité met souvent en avant les
motifs d’intérêt économique pour lesquels les directions des ressources
humaines sont respectueuses de la contrainte légale. La gestion de la diversité
est alors présentée comme une source de performance économique (Frimousse
et Peretti, 2007), favorisant la fidélisation des salariés et des clients (Barth,
2007), la créativité et l’innovation (Habib, 2006), et améliorant le climat social
(Hislaire, 2006), la cohésion sociale (Sabeg et Charlotin, 2006) ou encore la
responsabilité sociale (Carroll, 2000). Les résultats des études relatives à
l’incidence de la responsabilité sociale de l’entreprise sur la performance ne
3 - La loi du 11 février 2005 permet de nouer un accord collectif pour l’emploi de personnes handicapées au
niveau d’une branche, d’un groupe, d’une entreprise ou d’un établissement. Cet accord doit prévoir la mise en
œuvre d’un programme annuel ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés, comportant obligatoirement
un plan d’embauche en milieu ordinaire dont le nombre peut être inférieur à celui qui résulterait de l’obligation
d’emploi. Pour être jugé pertinent, ce plan devra mettre en œuvre un certain nombre d’actions concrètes, telles
que l’adaptation des fiches de poste ou la parution d’offres d’emploi dans des structures spécialisées. Outre le
plan d’emploi, l’accord doit prévoir au moins deux autres actions parmi les trois mentionnées par la loi : un
plan d’insertion et de formation, un plan d’adaptation aux mutations technologiques, un plan de maintien dans
l’entreprise en cas de licenciements.
4 - La terminologie RRH regroupe dans cette étude les DRH et chargés de mission handicap interrogés.
36 RIMHE, Revue Interdisciplinaire sur le Management et l’Humanisme
n°2 - NE - mai-juin-juillet 2012 - VARIA