Télécharger la revue - Ãglise Catholique d'Algérie
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pax<br />
concordia<br />
premier trimestre 2012 - n° 9<br />
Revue de l’église catholique d’Algérie<br />
ISSN : 2170-1709<br />
Dossier : Vivre le handicap en Algérie<br />
DIALOGUE : L’école de <strong>la</strong> différence<br />
évêques : Lettre aux étudiants
03 éditorial et mot de <strong>la</strong> rédaction<br />
05 église universelle<br />
25 e anniversaire de <strong>la</strong> rencontre d’Assise<br />
09 église au Maghreb<br />
Communiqué de <strong>la</strong> CERNA<br />
Nouvelles du Maroc<br />
11 Dialogue<br />
L’École de <strong>la</strong> différence à Mostaganem<br />
13 Dossier<br />
Vivre le handicap en Algérie<br />
21 Indépendance<br />
Libres propos de Mgr Henri Teissier et de<br />
Mgr Gabriel Piroird<br />
23 église d’Algérie<br />
Lettre des évêques aux étudiants<br />
25 Actualité des diocèses<br />
Alger, Oran, Constantine, Ghardaïa<br />
29 Des livres à lire<br />
J.P. Grangaud, R. & C. Marca, K. Efoui,<br />
B. Sansal<br />
31 Bloc-notes<br />
Bloc-notes et bulletin d’abonnement<br />
Chers amis de Pax et Concordia,<br />
merci pour votre <strong>revue</strong>, qui m’encourage<br />
moi dans mon aposto<strong>la</strong>t,<br />
nous « église des frontières ». Plusieurs<br />
fois, j’ai voulu réagir, vous<br />
encourager, vous exprimer ma profonde<br />
communion. Aujourd’hui,<br />
n’y étant pas encore parvenu (!), je me contente de<br />
vous envoyer cet écho -réchauffé quant à <strong>la</strong> date mais<br />
plus que jamais d’actualité quant à l’Esprit- de ce que<br />
notre Église a vécu lors de mon ordination épiscopale.<br />
En fraternelle communion.<br />
+ Henri Coudray, vicaire apostolique de Mongo<br />
(Tchad)<br />
Mgr Coudray, sj, a été ordonné évêque le 29 novembre<br />
2009, date également de l’accession de <strong>la</strong> Préfecture apostolique<br />
de Mongo au rang de Vicariat apostolique, dernière<br />
étape avant de devenir diocèse. Située au nord-est du<br />
Tchad, aux confins de <strong>la</strong> Libye, du Soudan et de <strong>la</strong> République<br />
Centrafricaine, cette circonscription ecclésiastique<br />
est dans une région à 95% musulmane. Les musulmans,<br />
très nombreux lors de l’ordination, étaient venus célébrer<br />
-selon le mot de l’un d’entre eux- « <strong>la</strong> beauté de <strong>la</strong> foi dans<br />
le respect de <strong>la</strong> différence, qui est un don de Dieu ».<br />
Un seul était ordonné en ce jour. Mais, avec lui, c’est tout<br />
un peuple qui l’est également. Tous « ordonnés à » donner<br />
consistance au Corps de Jésus-Christ en cette terre :<br />
Les chrétiens, par le double témoignage de leur foi et de<br />
leur unité dans <strong>la</strong> prière et le service sans frontières de<br />
leurs frères ; par <strong>la</strong> libération de l’angoisse du petit nombre,<br />
qui ouvre à l’urgence joyeuse de dire à tous, de mille<br />
manières : « Si tu savais le don de Dieu ! »<br />
Les musulmans, par leur transgression tranquille des murs<br />
d’intolérance et leur esprit de col<strong>la</strong>boration et de respect,<br />
plus fort que les clivages et que les exclusions.<br />
Chrétiens et musulmans par leur capacité à donner chair<br />
à l’incontournable solidarité active de croyants que l’Unique<br />
appelle et envoie.<br />
Aux abonnés<br />
Tout semble rentrer dans l’ordre au niveau du courrier,<br />
après tous les aléas de l’été. Mais nous conseillons<br />
vivement à tous ceux qui ont des adresses électroniques<br />
de nous les communiquer afin qu’ils reçoivent, de toute<br />
façon, <strong>la</strong> version internet de <strong>la</strong> <strong>revue</strong>.<br />
Voici l’adresse de <strong>la</strong> <strong>revue</strong> pour toute correspondance<br />
au sujet des abonnements :<br />
paxetconcordia.abonnements@gmail.com<br />
Encore merci pour votre fidélité qui nous encourage.<br />
P.S. Marie Danièle<br />
Trimestriel<br />
éditeur : Association diocésaine d’Algérie (ADA), n° d’agrément 18,<br />
en date du 16 novembre 1974, délivré par le ministère de l’Intérieur<br />
Adresse : Pax et Concordia, Archevêché d’Alger<br />
13 rue Khelifa Boukhalfa, 16000 Alger-Gare<br />
Dépôt légal : n° 2201-2010<br />
Directeur de publication : Mgr Ghaleb Bader<br />
équipe de rédaction : Dominique Lebon, Marie-Christine Rousseau,<br />
Marie-Danièle Ligouzat, Michel Guil<strong>la</strong>ud<br />
Coordinateur de <strong>la</strong> rédaction : Michel Guil<strong>la</strong>ud<br />
Gérante : Marie-Danièle Ligouzat<br />
Mise en page : Raphaël Watier<br />
Courriel rédaction : paxetconcordia@gmail.com<br />
Courriel abonnements : paxetconcordia.abonnements@gmail.com<br />
Site internet de l’église d’Algérie : http://eglise-catholique-algerie.org<br />
Dessins de couverture : Détail de <strong>la</strong> gare d’Oran et Les rues piétonnes<br />
de Tlemcen, dessins de Reno Marca, extraits avec l’aimable<br />
autorisation des auteurs de Algérie – Soyez les bienvenus – Voyages de<br />
<strong>la</strong> Méditerranée au Sahara, de C<strong>la</strong>ire et Reno Marca, Editions Aubanel,<br />
2008, pp. 49 & 71.
P. Cesare Baldi<br />
Directeur de Caritas Algérie<br />
La Caritas, action d’église<br />
pour l’homme en détresse<br />
Le 28 juin 1962, se constituait à Alger, au 5 rue Horace Vernet, <strong>la</strong><br />
première Caritas de l’Algérie indépendante. Nous fêterons cette<br />
année son 50 e anniversaire, même si l’ancien siège a été fermé et<br />
<strong>la</strong> rue s’appelle aujourd’hui rue Menani Noureddine, sise derrière<br />
l’hôpital Mustapha. Son identité aussi a changé : nommée à<br />
l’époque « Caritas Algérienne », elle a été agréée officiellement en 1966 et a<br />
œuvré pendant une décennie sous cette identité. Depuis 1977, <strong>la</strong> Caritas existe<br />
sous forme de service diocésain à travers différentes initiatives animées par les<br />
chrétiens, mais réalisées par tous ceux et celles qui croient dans <strong>la</strong> solidarité,<br />
dans l’amour fraternel, dans <strong>la</strong> charité. En effet, <strong>la</strong> Caritas est un instrument qui<br />
dépasse l’appartenance religieuse et les moyens de vie, il n’est pas question de<br />
donner simplement du surplus aux pauvres.<br />
La première lettre encyclique du Pape Benoit XVI en 2005 s’intitu<strong>la</strong>it en <strong>la</strong>tin<br />
« Deus Caritas est », qu’on traduit « Dieu est amour » : il expliquait le sens chrétien<br />
de l’amour, en disant qu’il n’est pas seulement un sentiment ou une pulsion<br />
physique mais se réalise dans des gestes concrets, se traduit dans l’exercice<br />
quotidien de <strong>la</strong> charité. Et, dans le domaine de <strong>la</strong> charité, toute foi religieuse est<br />
<strong>la</strong> bienvenue, on écoute les besoins de tous et on demande l’aide et le soutien<br />
de chacun. La charité ne fait pas de distinction ni ne peut être monopolisée<br />
et surtout ne doit pas être instrumentalisée à d’autres fins que l’amour du<br />
prochain, sans risquer de devenir hypocrite, contradictoire et fausse.<br />
Mais enfin, qu’est-ce que <strong>la</strong> Caritas une association de bienfaisance une ONG<br />
humanitaire une institution internationale Elle est un peu de tout ça, mais<br />
d’abord, elle est un service de l’Église, une action d’Église : un organisme issu<br />
de l’Église catholique, voulu et créé simplement pour « faire du bien », faire<br />
de <strong>la</strong> charité ou, plus précisément, pour organiser l’exercice de <strong>la</strong> charité. En<br />
effet, pour faire du bien, <strong>la</strong> Caritas n’est pas nécessaire (et l’Église non plus,<br />
d’ailleurs ! ) mais quand cette action commence à prendre de l’ampleur et qu’il<br />
faut l’organiser un peu plus, on peut choisir de le faire en toute autonomie ou<br />
bien de se concerter avec d’autres qui ont les mêmes idées, les mêmes valeurs,<br />
<strong>la</strong> même envie de faire ce type d’action. C’est à ce moment que <strong>la</strong> Caritas peut<br />
intervenir, quand l’action caritative se traduit en projet, en opération complexe<br />
et articulée qui regroupe plusieurs personnes.<br />
Récemment, les évêques d’Algérie ont signé un document qui précise le statut<br />
ecclésial de <strong>la</strong> Caritas en Algérie. On y lit dans le premier article que « <strong>la</strong> Caritas<br />
est l’organisme pastoral institué par les évêques afin de promouvoir, coordonner<br />
et soutenir le témoignage de charité de <strong>la</strong> communauté ecclésiale ». Dans ce<br />
sens l’ADA, l’association des diocèses d’Algérie, a précisé à l’article 12 de son<br />
règlement intérieur que Caritas Algérie est son « organe exécutif » pour l’action<br />
humanitaire prévue dans ses statuts. Chaque diocèse, en effet, promeut diverses<br />
initiatives de solidarité, d’aide et d’assistance, selon les capacités des différentes<br />
communautés, le personnel ou les amis qui les soutiennent. Ces activités sont<br />
édito<br />
pax concordia
édito<br />
Le dessin de couverture est un détail de celui ci-dessus<br />
coordonnées par un bureau diocésain Caritas, autour de l’évêque, qui envoie<br />
deux délégués au comité national, chargé d’accorder les différentes nécessités<br />
et de soutenir l’action de <strong>la</strong> Caritas au niveau interdiocésain.<br />
Qui sont donc les bénéficiaires des initiatives de Caritas <br />
La charité ne doit pas Bien que chaque action caritative s’adresse à tout homme<br />
servir à d’autres fins que et femme en détresse, les quelques actions organisées<br />
l’amour du prochain par <strong>la</strong> Caritas dans les différents diocèses sont regroupées<br />
en faveur des personnes handicapées, des femmes, des<br />
enfants et des migrants ou réfugiés. Le dossier central de ce numéro de <strong>la</strong><br />
<strong>revue</strong>, coordonné par <strong>la</strong> responsable du bureau diocésain Caritas de Ghardaïa,<br />
est consacré aux personnes handicapées. La promotion féminine compte<br />
plusieurs initiatives de formation et de production d’artisanat local dans les<br />
quatre diocèses, avec en particulier un instrument de promotion culturelle de<br />
<strong>la</strong> femme qui touche l’ensemble du territoire national, <strong>la</strong> <strong>revue</strong> Hayat. Toujours<br />
pour les femmes, depuis plusieurs années, Caritas soutient, en particulier dans<br />
les diocèses d’Alger et Ghardaïa, et récemment à Constantine, des cours de<br />
formation complémentaires très appréciés, pour les éducatrices de jardins<br />
d’enfants. L’accompagnement des migrants se traduit d’abord par l’accès<br />
aux soins et aux droits, mais aussi par des cours de formation professionnelle<br />
pour les réfugiés ou encore par l’insertion de femmes migrantes dans les<br />
ateliers de promotion féminine. Prochainement, nous allons ouvrir un<br />
centre d’écoute et de partage à Alger.<br />
Enfin, depuis des années, Caritas soutient des projets chez les réfugiés<br />
sahraouis dans les campements de Tindouf. Caritas s’engage également<br />
dans le soutien d’associations partenaires dans le secteur de <strong>la</strong> jeunesse,<br />
l’avenir du pays.<br />
Cesare Baldi, PIME<br />
4<br />
Le mot de <strong>la</strong> rédaction<br />
1962-2012<br />
A cinquante ans, est-on jeune ou vieux En fonction de<br />
notre âge et de notre expérience, nous jugerons. Ou<br />
plutôt nous apprendrons, à travers l’évocation par un<br />
certain nombre d’amis des rides et des é<strong>la</strong>ns de notre<br />
pays, de souvenirs, statistiques, rêves et projets, comment<br />
« être chrétien » est aussi « savoir être solidaire de l’histoire<br />
d’un peuple ». Y aurait-il une « manière chrétienne » de<br />
regarder l’histoire de son pays Les évêques émérites<br />
d’Alger et Constantine ouvrent cette rubrique, que<br />
nous poursuivrons tout au long de cette année du<br />
cinquantenaire de l’indépendance.<br />
S’il te p<strong>la</strong>ît, dessine-moi l’Algérie !<br />
Ce pourrait être un fennec plus encore qu’un mouton.<br />
C’est en choisissant parmi mille et un dessins et photos de<br />
notre ami Reno que nous illustrerons les couvertures des<br />
numéros de cette année 2012. Ces dessins sont tirés du<br />
bel ouvrage sur l’Algérie réalisé par C<strong>la</strong>ire et Reno Marca.<br />
On trouvera une présentation de celui-ci dans <strong>la</strong> rubrique<br />
« Des livres à lire ».<br />
A l’école de <strong>la</strong> différence<br />
Ce n°9 pourrait être p<strong>la</strong>cé sous ce titre. Le dossier de ce<br />
numéro montre comment l’Algérie essaie de vivre avec<br />
ses enfants atteints d’un handicap. C’était l’occasion de<br />
demander au directeur de Caritas-Algérie d’évoquer<br />
dans l’éditorial cette dimension de notre communauté.<br />
L’accueil de <strong>la</strong> différence, c’est aussi une des dimensions de<br />
« l’esprit d’Assise », stimulé par les initiatives du 27 octobre<br />
2011 ; nous rapportons quelques-unes d’entre elles.<br />
C’est bien évidemment l’expérience originale menée à<br />
Mostaganem, qui nous vaut ce titre et que nous racontent<br />
initiateur et participants. C’est encore l’expérience des<br />
étudiants sub-sahariens à qui les évêques d’Algérie<br />
adressent une deuxième lettre pastorale. Ils vivront pour<br />
<strong>la</strong> première fois cette année un rassemblement national<br />
pour <strong>la</strong> fête des Rameaux.<br />
Alors bonne lecture, et belle année à tous !
Assise 2011<br />
« Plus jamais <strong>la</strong> violence ! Plus jamais <strong>la</strong> guerre ! Plus jamais le terrorisme !<br />
Au nom de Dieu, que chaque religion apporte sur terre Justice et Paix,<br />
Pardon et Vie, Amour ! »<br />
(Benoît XVI)<br />
Le 27 octobre à Assise, ville de saint<br />
François, le pape Benoît XVI a invité, se<br />
référant à <strong>la</strong> rencontre qui s’y était tenue<br />
25 ans plus tôt, près de 300 responsables<br />
religieux venus du monde entier. Parmi<br />
eux, une cinquantaine de représentants de <strong>la</strong> religion<br />
musulmane. Des non-croyants étaient aussi conviés<br />
à ce pèlerinage vers <strong>la</strong> vérité et <strong>la</strong> paix. Extraits<br />
d’interventions.<br />
L’hypothèse de <strong>la</strong> destruction n’est pas <strong>la</strong><br />
seule possible<br />
Pour <strong>la</strong> première fois, Homo Sapiens est capable de<br />
détruire <strong>la</strong> terre et soi-même au nom de ses croyances,<br />
religions ou idéologies. […] La rencontre de nos<br />
diversités ici, à Assise, témoigne que l’hypothèse de<br />
<strong>la</strong> destruction n’est pas <strong>la</strong> seule possible. […] Face<br />
aux crises et menaces aggravées, voici venue l’ère<br />
du pari. Osons parier sur le renouvellement continu<br />
des capacités des hommes et des femmes à croire et<br />
à savoir ensemble. Pour que, dans le multivers bordé<br />
de vide, l’humanité puisse poursuivre longtemps son<br />
destin créatif. (Julia Kristeva, philosophe)<br />
Nous avons besoin des jeunes<br />
The faith communities […] need the young “Change<br />
Makers” of the world. […] A great obstacle to a just<br />
peace today is the high level of unemployment among<br />
young people all over the world. It feels as though<br />
we are gambling with the welfare and happiness of<br />
a generation. We need the vision and the courage of<br />
young people for the necessary changes. We see how<br />
young people lead processes of democratization<br />
and peace in many countries today. We have to<br />
acknowledge that we have not always been good<br />
at honoring and fostering the contributions young<br />
people can make in our religious communities. We<br />
elders standing here need to work together for peace<br />
between generations and to give young people<br />
throughout the world real hope for the future.<br />
(O<strong>la</strong>v Fykse Tveit, COE)<br />
La religion instrumentalisée<br />
Many times, the political authority’s interests are<br />
<strong>la</strong>beled as religious issues, whereas in fact its essence<br />
is far from that truth. In this regards, we must identify<br />
religion above all interests. Should religion be p<strong>la</strong>ced<br />
above such interests, then it will serve as a beacon<br />
of hope from its forefathers. On the other hand, if<br />
religions are p<strong>la</strong>ced below such interests, then the<br />
religious community will forever be at war. (Kyai Haji<br />
Hasyim Muzadi, Conférence internationale des écoles<br />
is<strong>la</strong>miques)<br />
Repentance<br />
Comme chrétien, je voudrais dire à ce sujet : oui, dans<br />
l’histoire, on a aussi eu recours à <strong>la</strong> violence au nom<br />
de <strong>la</strong> foi chrétienne. Nous le reconnaissons, pleins<br />
de honte. Mais il est absolument c<strong>la</strong>ir que ceci a été<br />
une utilisation abusive de <strong>la</strong> foi chrétienne, en évidente<br />
opposition avec sa vraie nature. (Benoît XVI)<br />
Quand le désir de bonheur dégénère<br />
L’adoration de l’argent, de l’avoir et du pouvoir,<br />
se révèle être une contre-religion, dans <strong>la</strong>quelle<br />
l’homme ne compte plus, mais, seulement, l’intérêt<br />
personnel. Le désir de bonheur dégénère, par<br />
exemple, dans une avidité effrénée et inhumaine<br />
qui se manifeste dans <strong>la</strong> domination de <strong>la</strong> drogue<br />
sous ses diverses formes. (Benoît XVI)<br />
église universelle<br />
pax concordia
église universelle<br />
Assise 2011 en Algérie<br />
Dans plusieurs villes d’Algérie, le vingt-cinquième anniversaire de<br />
l’événement d’Assise 1986 a été l’occasion d’autres rencontres.<br />
AGhardaïa, une trentaine de personnes,<br />
chrétiens et amis algériens musulmans<br />
mozabites et arabes ont partagé divers<br />
témoignages dont un sur « l’école de <strong>la</strong><br />
différence » (voir <strong>la</strong> rubrique Dialogue<br />
de ce numéro). L’échange a été suivi d’un temps de<br />
silence et de méditation. Le groupe a prié ensemble<br />
en écoutant, debout, le chant en arabe : Seigneur fais<br />
de moi un instrument de Paix.<br />
D’autres rencontres ont eu lieu sur le diocèse,<br />
notamment à Ouarg<strong>la</strong>.<br />
A Constantine, près de cent vingt personnes se sont<br />
retrouvées le vendredi 28 octobre après-midi, au<br />
centre diocésain du Bon Pasteur, assis sur les tapis<br />
pour les plus jeunes, nettement majoritaires, <strong>la</strong>issant<br />
les sièges aux anciens. Témoignages, vidéo sur Assise<br />
1986, prières chrétienne et musulmane, et fête<br />
multiculturelle le soir. Quatre-vingt jeunes chrétiens<br />
et musulmans, africains et algériens, ont passé tout<br />
le week-end ensemble sur le thème « Pèlerins de <strong>la</strong><br />
vérité, pèlerins de <strong>la</strong> paix ».<br />
A Alger, à <strong>la</strong> maison diocésaine, un petit groupe<br />
de musulmans et de chrétiens de différentes<br />
confessions s’est réuni pour prier et témoigner de<br />
<strong>la</strong> paix construite au quotidien. Simple, solennel et<br />
profond est ce moment partagé entre des personnes<br />
qui jusqu’ici ne se connaissaient pas. Lectures<br />
spirituelles, prières, chants, témoignages de vie<br />
permettent de partager ce qui fait vivre chacun, sa<br />
re<strong>la</strong>tion avec Dieu et avec ses frères. Le tout lié par<br />
différents symboles tels que boire à <strong>la</strong> même source<br />
et transmettre un rameau d’olivier… La soirée se<br />
termine autour d’un verre de thé avec des dattes.<br />
A Oran, l’anniversaire de <strong>la</strong> rencontre d’Assise a été<br />
marqué par un rassemblement animé par Hubert,<br />
frère capucin, avec le témoignage de jeunes,<br />
musulmans et chrétiens, vivant <strong>la</strong> rencontre et le<br />
partage : Centre aéré du mardi et des vacances<br />
sco<strong>la</strong>ires, participation à <strong>la</strong> semaine de « l’École<br />
de <strong>la</strong> différence » à Mostaganem cet été… Ils ont<br />
fait partager leur joie et leur enthousiasme, avant<br />
<strong>la</strong> proc<strong>la</strong>mation en français et en arabe d’une<br />
adaptation locale du « Décalogue d’Assise pour <strong>la</strong><br />
Paix » (cf. page suivante). Entre deux articles, un<br />
refrain était repris tandis qu’une branche d’olivier<br />
était accrochée sur un tronc d’arbre. Ce temps de<br />
réflexion, suivi du chant du Notre père en arabe et<br />
du chant de <strong>la</strong> Fatiha par de jeunes musulmanes,<br />
a ranimé cette conscience que chacun de nous<br />
est responsable de <strong>la</strong> construction de <strong>la</strong> paix. En<br />
Oranie aussi, <strong>la</strong> Paix se construit par des gestes<br />
simples et quotidiens.<br />
6
Engagement pour <strong>la</strong> justice et <strong>la</strong> paix (inspiré du « décalogue d’Assise »)<br />
1. Nous avons <strong>la</strong> ferme conviction que <strong>la</strong> violence et le terrorisme s’opposent au véritable esprit religieux et<br />
nous condamnons tout recours à <strong>la</strong> violence et à <strong>la</strong> guerre au nom de Dieu ou de <strong>la</strong> religion et de quelque<br />
idéologie que ce soit.<br />
2. Nous voulons promouvoir dans nos échanges avec les autres <strong>la</strong> culture du dialogue, afin que se développent<br />
<strong>la</strong> compréhension et <strong>la</strong> confiance réciproques entre les individus et entre les peuples, car telles sont les<br />
conditions d’une paix authentique.<br />
3. Nous voulons défendre le droit de toute personne humaine à mener une existence digne, conforme à son<br />
identité culturelle, et à fonder librement une famille.<br />
4. Nous voulons dialoguer avec sincérité et patience, ne considérant pas ce qui nous sépare comme un mur<br />
insurmontable, mais, au contraire, reconnaissant que <strong>la</strong> confrontation avec <strong>la</strong> différence des autres peut devenir<br />
une occasion de plus grande compréhension réciproque.<br />
5. Nous voulons être du côté de ceux qui souffrent de <strong>la</strong> misère et de l’abandon, et œuvrant concrètement<br />
pour surmonter de telles situations, convaincus que personne ne peut être heureux seul.<br />
6. Nous voulons être du côté de ceux qui ne se résignent pas à <strong>la</strong> violence et au mal, et nous désirons contribuer<br />
de toutes nos forces à donner à l’humanité de notre temps une réelle espérance de justice et de paix.<br />
7. Nous voulons encourager toute initiative qui promeut l’amitié entre les peuples, convaincus que, s’il manque<br />
une entente solide entre les peuples, le progrès technologique expose le monde à des risques croissants<br />
de destruction et de mort.<br />
8. Nous voulons respecter notre p<strong>la</strong>nète, éviter de polluer l’air, <strong>la</strong> terre et l’eau. Nous voulons protéger notre<br />
environnement pour que nos successeurs puissent vivre en paix.<br />
9. Nous voulons user avec mesure et pondération des biens de ce monde et ne pas aller au-delà de nos besoins<br />
corporels, intellectuels et spirituels par une consommation sans limites qui cherche toujours plus.<br />
10. Nous voulons veiller au partage des richesses entre les peuples avec une attention particulière pour ceux<br />
qui sont abandonnés sur le chemin du progrès.<br />
église universelle<br />
pax concordia 7
église universelle<br />
8<br />
Pakistan : des femmes au service du respect<br />
des minorités<br />
Au Pakistan, les minorités sont victimes de discriminations.<br />
Parmi les personnes et organisations œuvrant<br />
pour l’harmonie interreligieuse, des femmes jouent un<br />
rôle important.<br />
Christine Amjad-Ali, chrétienne, théologienne, est<br />
<strong>la</strong> nouvelle directrice du Christian Study Center de<br />
Rawalpindi (Pendjab), au service du dialogue interreligieux,<br />
spécialement is<strong>la</strong>mo-chrétien. A ses côtés, une<br />
autre chrétienne : Romana Bashir.<br />
Shehrbano Taseer, musulmane, est <strong>la</strong> fille de Salman<br />
Taseer, le gouverneur<br />
du Pendjab<br />
assassiné à cause<br />
de sa critique<br />
de l’interdiction<br />
du b<strong>la</strong>sphème.<br />
Journaliste au<br />
Newsweek Pakistan,<br />
elle défend les<br />
droits de l’homme<br />
au risque de<br />
sa vie ; comme<br />
Sherry Rehman, musulmane elle aussi, parlementaire<br />
et présidente du Jinnah Institute, un cercle qui milite<br />
en faveur d’un Pakistan démocratique et <strong>la</strong>ïc, tel que<br />
le vou<strong>la</strong>it Ali Jinnah, le fondateur du pays.<br />
Le Saint-Siège et <strong>la</strong> demande présentée à<br />
l’ONU par Mahmoud Abbas<br />
Mgr Dominique Mamberti, secrétaire pour les re<strong>la</strong>tions<br />
du Saint-Siège avec les États, s’est exprimé à <strong>la</strong> tribune<br />
de l’ONU au sujet de <strong>la</strong> demande de reconnaissance de<br />
<strong>la</strong> Palestine comme État membre des Nations Unies :<br />
« Le Saint-Siège considère cette initiative dans <strong>la</strong> perspective<br />
des tentatives de trouver une solution définitive,<br />
avec l’appui de <strong>la</strong> communauté internationale, à <strong>la</strong> question<br />
déjà affrontée par <strong>la</strong> Résolution 181 de l’Assemblée<br />
générale des Nations Unies, en date du 29 novembre<br />
1947. Ce document fondamental pose <strong>la</strong> base juridique<br />
pour l’existence de deux États. L’un d’entre eux a déjà<br />
vu le jour, alors que l’autre n’a pas encore été constitué.<br />
[…] Le Saint-Siège souhaite que les organes compétents<br />
des Nations Unies prennent une détermination qui aide<br />
En bref ...<br />
à mettre en œuvre effectivement<br />
l’objectif final,<br />
c’est-à-dire <strong>la</strong> réalisation<br />
du droit des Palestiniens<br />
à avoir leur propre État<br />
indépendant et souverain<br />
et du droit des Israéliens<br />
à <strong>la</strong> sécurité, les<br />
deux États étant munis<br />
de frontières reconnues internationalement. La réponse<br />
des Nations Unies, quoi qu’il en soit, ne constituera pas<br />
une solution complète et l’on ne pourra atteindre <strong>la</strong> paix<br />
durable que par des négociations de bonne foi entre<br />
Israéliens et Palestiniens, évitant actions ou conditions<br />
qui contredisent les déc<strong>la</strong>rations de bonne volonté. »<br />
En octobre dernier, le nouvel archevêque<br />
de Manille a visité <strong>la</strong> communauté philippine<br />
de Terre sainte<br />
Le nombre de migrants chrétiens augmente en Terre<br />
sainte depuis vingt ans et on compte, aujourd’hui, une<br />
popu<strong>la</strong>tion significative de citoyens israéliens chrétiens<br />
non-arabes qui, à l’inverse des arabes, sont pleinement<br />
assimilés à <strong>la</strong> majorité juive israélienne. Ainsi, les<br />
Philippins, qui étaient 5 000 en 1991, sont aujourd’hui<br />
40 000, baignés dans le milieu hébréophone par leur<br />
travail et par l’école des enfants. L’Église catholique accueille<br />
donc des milliers d’enfants par<strong>la</strong>nt l’hébreu comme<br />
première <strong>la</strong>ngue.<br />
© Ismaël C.<br />
Par ailleurs, comme toutes les Églises du Moyen-Orient,<br />
l’Église catholique fait face à une incertitude concernant<br />
l’avenir de ses communautés locales. Le nombre<br />
(110 000) de chrétiens arabes autochtones stagne : beaucoup<br />
de jeunes quittent en effet le pays pour l’Occident<br />
(Source : Patriarcat Latin de Jérusalem).
Les évêques du Maghreb<br />
De l’incertitude de l’inconnu à <strong>la</strong><br />
dynamique de l’espérance<br />
La Conférence des Évêques de <strong>la</strong> Région Nord de l’Afrique (CERNA) s’est<br />
réunie à Tunis, du 13 au 16 novembre 2011. Un communiqué a été publié à<br />
l’issue de cette rencontre. On en trouvera ci-dessous quelques extraits. Texte<br />
complet sur le site http://www.eglise-catholique-algerie.org<br />
église au maghreb<br />
Les événements qui touchent le monde arabe<br />
Partout au Maghreb, <strong>la</strong> libération de <strong>la</strong><br />
parole, <strong>la</strong> volonté d’échanger à propos<br />
de tous les sujets qui structurent <strong>la</strong> vie<br />
sociale et politique dans un respect<br />
grandissant pour les opinions diverses,<br />
ont été relevées par les évêques. Il leur semble que<br />
trois défis essentiels émergent dans ces pays : un<br />
défi religieux, un défi politique et un défi socioéconomique.<br />
Les passages engendrés par ces défis semblent<br />
promesses d’avenir [...] :<br />
. passage de <strong>la</strong> crainte d’une récupération religieuse<br />
à l’affirmation tranquille de ses convictions croyantes<br />
dans le respect des autres valeurs, et au débat sans<br />
tabou sur l’importance de <strong>la</strong> promotion de toutes les<br />
libertés, y compris <strong>la</strong> liberté de conscience ;<br />
. passage d’une vie sociale habitée par <strong>la</strong> peur au<br />
risque de <strong>la</strong> liberté, quitte à se sacrifier pour que<br />
toute <strong>la</strong> nation puisse vivre avec plus de démocratie<br />
et de dignité ;<br />
. prise de parole et de responsabilité de beaucoup<br />
de femmes qui proc<strong>la</strong>ment leur volonté d’être mieux<br />
respectées dans leur dignité et leurs droits ;<br />
. cris des jeunes qui exigent des formations de bon<br />
niveau et débouchant sur un véritable avenir professionnel.<br />
L’Église dans ces mouvements<br />
Les membres de l’Église, généralement, ne sont pas<br />
acteurs directs de ces passages, mais ils se veulent<br />
« témoins émerveillés » –selon l’expression de <strong>la</strong><br />
lettre pastorale de l’archevêque de Tunis– de ce qui<br />
germe partout dans le Maghreb, de <strong>la</strong> promotion<br />
de valeurs dans lesquelles ils se reconnaissent<br />
pleinement. Ils partagent les joies et les espérances<br />
de ces peuples. Eux aussi sont appelés à dépasser<br />
l’incertitude de l’inconnu, pour entrer et durer dans<br />
cette dynamique de l’espérance, car « l’espérance ne<br />
déçoit pas » (Épître aux Romains 5,5).<br />
Les communautés chrétiennes sont heureuses de se<br />
voir si souvent bien accueillies par les popu<strong>la</strong>tions<br />
aux milieux desquelles elles vivent, surtout quand<br />
elles pratiquent <strong>la</strong> confiance, le respect, le service<br />
désintéressé. [...]<br />
Difficulté en Algérie<br />
Les évêques de <strong>la</strong> CERNA partagent <strong>la</strong> souffrance des<br />
évêques d’Algérie devant <strong>la</strong> non délivrance et parfois<br />
le refus de visas aux prêtres et religieux/ses, quelle<br />
que soit leur nationalité. Ils ressentent ce<strong>la</strong> comme<br />
une atteinte grave à <strong>la</strong> vie de leurs Églises. Ce<strong>la</strong> les<br />
peine d’autant plus lorsque ces personnes sont<br />
appelées à rejoindre des communautés d’Église qui<br />
–sans aucun esprit de prosélytisme– rendent de réels<br />
services au pays et entretiennent des re<strong>la</strong>tions très<br />
cordiales avec tous.<br />
Communion avec les chrétiens du Moyen-Orient<br />
La CERNA, qui avait participé à <strong>la</strong> session spéciale du<br />
Synode pour le Moyen-Orient, tient à exprimer sa<br />
communion avec ces Églises dans les évolutions que<br />
vivent leurs pays ; elle est attentive aux difficultés et<br />
souffrances que provoquent ces évolutions, et prie<br />
pour que les droits des chrétiens soient sauvegardés,<br />
que les fidèles du Christ puissent être reconnus<br />
comme des citoyens à part entière, acteurs pleins<br />
d’espérance de l’avenir de leurs peuples.<br />
Église du témoignage<br />
La CERNA a préparé sa participation au prochain<br />
synode d’octobre 2012 et a désigné son représentant.<br />
pax concordia<br />
9
église au maghreb<br />
Elle perçoit au Maghreb combien le témoignage<br />
rendu par les chrétiens est par<strong>la</strong>nt quand il est<br />
d’abord témoignage en actes de <strong>la</strong> charité<br />
évangélique, et quand ils se mettent au service<br />
de l’humanisation des personnes et de <strong>la</strong><br />
société : « vous êtes <strong>la</strong> lettre que Dieu écrit »<br />
aujourd’hui, pour reprendre une expression de<br />
saint Paul (2 e lettre aux Corinthiens 3,3).<br />
Maroc<br />
Inauguration du Fonds La Source<br />
Le 4 novembre 2011 a été inauguré, à<br />
<strong>la</strong> Bibliothèque Nationale du Royaume<br />
du Maroc, par monsieur Jemâa Beida,<br />
directeur des Archives du Maroc, un<br />
fonds documentaire provenant d’un<br />
centre de recherche et de documentation unique<br />
en son genre au Maroc : La Source.<br />
Ce centre fondé par l’Église a fermé ses portes, il y a<br />
quelques mois. Y ont travaillé, notamment, Jacques<br />
Levrat, Françoise Bogart, Françoise Crampon, René<br />
Pérez, Francis Gouin, Vincent Feroldi, Jacques et<br />
Thérèse Langhade. Des générations d’étudiants<br />
marocains y ont trouvé le matériau de leurs<br />
recherches, mais aussi un accueil chaleureux,<br />
des conditions qui manquaient cruellement dans<br />
certaines bibliothèques publiques de Rabat. Les<br />
choses ont heureusement changé depuis. En plus<br />
du service quotidien qu’elle offrait à ses lecteurs, La<br />
Source avait l’habitude d’organiser épisodiquement<br />
des conférences. Par La Source, plusieurs universitaires<br />
ont connu le GRIC -Groupe de Recherche Is<strong>la</strong>mo-<br />
Chrétien- espace de réflexion académique<br />
auquel bien des personnalités de renom,<br />
marocaines et étrangères, ont apporté<br />
quelque chose pour faire avancer <strong>la</strong><br />
connaissance et <strong>la</strong> reconnaissance<br />
mutuelle entre musulmans et chrétiens.<br />
La Source a marqué beaucoup de gens,<br />
sur le p<strong>la</strong>n scientifique comme sur le<br />
p<strong>la</strong>n personnel. A <strong>la</strong> BNRM, le « Fonds La<br />
Source » est voisin du « Fonds Edmond<br />
Amran El-Maleh ». Se trouvent ainsi, côte à<br />
côte, un fonds émanant de personnalités<br />
chrétiennes ayant longtemps servi au<br />
Maroc et un fonds légué à <strong>la</strong> BNRM par<br />
une personnalité marocaine juive… Le<br />
tout au service d’une majorité de lecteurs<br />
marocains musulmans.<br />
© Abdelhak Senna<br />
© Abdelhak Senna<br />
Inauguration du Fonds La Source à <strong>la</strong> Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc.<br />
Debout : Driss Khrouz, directeur de <strong>la</strong> BNRM ; à sa droite, Mgr Vincent Landel, archevêque de<br />
Rabat, président de <strong>la</strong> CERNA ; à sa gauche, P. Jacques Levrat, fondateur de La Source.<br />
Hommage à Denise Masson<br />
Le 10 novembre, à Marrakech, une<br />
cérémonie d’hommage réunissait<br />
des amis de Denise Masson (1901-<br />
1994), érudite is<strong>la</strong>mologue, écrivain,<br />
musicienne, intellectuelle engagée<br />
pour <strong>la</strong> justice, <strong>la</strong> compréhension entre chrétiens<br />
et musulmans, et dans sa foi chrétienne. Elle fut<br />
l’une des meilleures traductrices du Coran (1967).<br />
Son travail est une œuvre reconnue toujours<br />
éditée dans <strong>la</strong> prestigieuse bibliothèque de La<br />
Pléiade. Elle a vécu à Marrakech de 1938 à 1994.<br />
« Denise Masson est restée célibataire mais elle<br />
a réussi un beau mariage ; un mariage entre<br />
deux cultures, un mariage entre deux amours<br />
complémentaires : celui du Maroc et celui de <strong>la</strong><br />
France. » (Guerric Masson, son neveu).<br />
Présentation, par un cadre de <strong>la</strong> BNRM, de l’une des grandes salles de <strong>la</strong> bibliothèque<br />
réservée au Fonds La Source
école de <strong>la</strong> différence à Mostaganem<br />
L’idée m’est venue en participant à une marche de carême au désert : les<br />
thèmes et l’ambiance y étaient formidables ! Le cadre aussi : qu’elle est belle<br />
l’Algérie ! Une seule chose me chagrinait : j’aurais voulu partager une semaine<br />
aussi intense avec mes amis musulmans... Mais comment le faire Je me mets<br />
à réfléchir. Un jour je prends contact, grâce aux Maristes de Mostaganem, avec<br />
<strong>la</strong> tariqa soufie al-a<strong>la</strong>wiya... Ils acceptent tout de suite et mettent leur vaste<br />
centre de rencontres à notre disposition. J’en parle à des amis.<br />
F i n a l e m e n t , n o u s é t i o n s 2 1 p e r s o n n e s , g a r ç o n s e t f i l l e s , m u s u l m a n s e t<br />
chrétiens, d’Europe, d’Afrique et d’Amérique <strong>la</strong>tine, à vivre cette expérience<br />
unique. L’arabe et le français étaient les deux <strong>la</strong>ngues « co-officielles » de<br />
cette école. Après l’ouverture avec les responsables de <strong>la</strong> tariqa a<strong>la</strong>wiya et<br />
l’évêque d’Oran, nous avons tenté de profiter de chaque instant.<br />
Quelques grands moments <br />
Dialogue<br />
Je suis métis. Mettre en valeur tout ce qui dans notre<br />
histoire personnelle et collective a été enrichi grâce<br />
aux apports des autres cultures, modes de penser,<br />
<strong>la</strong>ngues, croyances, etc. qui, désormais, font partie de<br />
moi. Se découvrir, ainsi, relié « à l’autre » et avec un<br />
patrimoine commun avec des « cousins ignorés ».<br />
La communication non violente. Notre manière<br />
de parler véhicule notre pensée sur les autres et<br />
brise les barrières ou vient les perpétuer. Comment<br />
parlent les filles des garçons Et les noirs des b<strong>la</strong>ncs <br />
Et les arabes des européens Et les littéraires des<br />
scientifiques Un débat autour du film « Pocahontas »<br />
nous a aidé à en prendre davantage conscience.<br />
Biodiversité. Une visite au grand jardin et à <strong>la</strong><br />
pépinière de <strong>la</strong> tariqa nous rappelle que <strong>la</strong> diversité<br />
au sein de <strong>la</strong> nature est une grande richesse menacée.<br />
La diversité culturelle est aussi une richesse. Nous<br />
fabriquons des colliers et des bracelets avec des<br />
produits de récupération : nous voilà plus beaux en<br />
produisant moins de déchets. Fantastique !<br />
Spiritualité ouverte. La différence religieuse est<br />
de plus en plus présentée comme source de conflits<br />
au XXI e siècle. Or, l’attachement à <strong>la</strong> foi ne produit<br />
pas nécessairement le fanatisme : il conduit aussi à<br />
<strong>la</strong> compassion, à <strong>la</strong> réconciliation, à <strong>la</strong> col<strong>la</strong>boration<br />
entre croyants, au désir de pardon, à <strong>la</strong> recherche<br />
d’un avenir commun. Nous étudions le cas de l’émir<br />
Abdelkader qui après avoir combattu les Français en<br />
Algérie sauva 12 000 chrétiens en Syrie ; et aussi les<br />
prises de position du cardinal Duval, évêque d’Alger<br />
durant <strong>la</strong> guerre d’indépendance, intraitable avec les<br />
injustices et <strong>la</strong> torture.<br />
Nous avons aussi pris le temps de nous dire ce que<br />
chacun aime le plus dans sa religion... et aussi dans<br />
celle de l’autre. Ces jeunes sont témoins de leur foi<br />
partout !<br />
Moi… toi… LUI. A partir d’un reportage sur <strong>la</strong><br />
violence religieuse au Nigeria, chacun réfléchit à sa<br />
propre identité, aux liens qui l’unissent à sa patrie, sa<br />
communauté religieuse, à ses amis, à sa famille, etc.<br />
Impossible d’apporter quelque chose aux autres si<br />
soi-même on n’est pas au c<strong>la</strong>ir avec son identité. Si<br />
chaque communauté a besoin de pionniers, rien<br />
de solide ne peut se construire en dehors de nos<br />
communautés d’origine. A l’unanimité, alors que ce<br />
n’est pas prévu, il est décidé d’aller ensemble à <strong>la</strong><br />
pax concordia 11
Dialogue<br />
messe. Quelle joie de trouver en arrivant, à <strong>la</strong> chapelle,<br />
un grand panneau en arabe : Dieu est amour.<br />
Nous terminons par une journée de découverte de<br />
<strong>la</strong> ville de Mostaganem et prenons le temps de<br />
faire une longue évaluation.<br />
Il y a beaucoup des choses dont je n’ai pas parlé. Il n’y<br />
aurait pas sur terre assez de livres pour tout contenir !<br />
Mais, si vous voulez en être informé, tentez de vous<br />
inscrire à l’École de <strong>la</strong> différence 2. P<strong>la</strong>ces limitées !<br />
Merci à tous ceux qui m’ont soutenu. Sans vous, cette<br />
aventure n’aurait jamais eu lieu. Et moi, sans vous, je<br />
serais très malheureux.<br />
José Maria Cantal, père b<strong>la</strong>nc<br />
cantalrivas@hotmail.com<br />
Une heure de silence chaque jour <br />
D’abord, pour permettre aux participants d’accueillir intérieurement ce qui était vécu durant <strong>la</strong> journée.<br />
Parmi les participants, nombreux étaient ceux qui, chrétiens et musulmans, avaient une pratique<br />
religieuse régulière : il fal<strong>la</strong>it aménager un temps adéquat pour ce devoir mais aussi permettre à tous<br />
de prendre conscience que l’autre vit réellement une re<strong>la</strong>tion profonde avec ses racines spirituelles et<br />
qu’elles contribuent à <strong>la</strong> réussite du projet.<br />
Petit à petit, cette heure est devenue... plus longue, et sans doute l’une des activités qui a le plus<br />
contribué au succès de l’École.<br />
مدرسة االختالف... جتربة حياة<br />
التسامح القبول االحتاد كلها مبادئ عاشها طالب مدرسة<br />
االختالف في طبعتها األولى لوالية مستغامن والتي احتضنتها<br />
جنة العارف – حديقة دبدابة – على مجار أسبوع كامل<br />
جنة العارف كانت بأمت معنى الكلمة جنة على األرض بحدائقها<br />
وخضرتها واملنزل املبني على الطراز التركي القدمي... هده<br />
املدرسة والتي سبقها حتضيرات ومساهمات من جهات عدة’<br />
كان هدفها التعريف بني الطلبة قادمني من جهات عدة من<br />
داخل ومن خارج اجلزائر ومن فئات عمرية مختلفة وكدا ديانات<br />
مختلفة ومحاولة إقامة احلوار بني مسلمني ومسيحيني... ودلك<br />
من خالل أنشطة متنوعة على مدار اليوم األسبوع نذكر من<br />
بينها : احملاضرات التي قدمها ضيوف املدرسة بينهم : الشيخ<br />
محمد بن تونس احد مشايخ الطريقة العالوية وشهادات حية<br />
لتجارب عاشها طالبها وضيوفها للحوار بني الديانات ’ فتح<br />
النقاش حول أمثلة كانت فاعلة في هدا اجملال :دور األمير عبد القادر في حل النزاع بني املسيحيني واملسلمني في سوريا...<br />
ودور الكاردينال دوفال من خالل مساهمته مع اجلزائريني في نضالهم ضد االستعمار الفرنسي.<br />
عرض فيلم وثائقي حول احلرب العرقية في النيجيريا والنقاش حولها .طبع األسبوع زيارات سياحية لوالية مستغامن وكدا<br />
زاوية الشيخ العالوي...<br />
ساعات الصمت والصالة حيث كان كل مجتمع ديني يؤدي صالته على حدى وفي اليوم األخير أدى اجلميع طالبا وأساتذة<br />
ومنظمني ساعة صالة وابتهال معا بني مسحيني ومسلمني فكانت من اشد األوقات الروحانية عمقا...<br />
وفي األخير اقول ان التجربة كانت األولى والفريدة وتستحق منا الوقوف عندها وقفة تأمل والتوصية بإعادتها في السنوات<br />
املقبلة.<br />
أنها جتربة الحتكى... أنها جتربة تعاش.<br />
ب.حنيفة<br />
12
Vivre le handicap en Algérie<br />
Dossier coordonné par Marie-Christine Rousseau<br />
pax concordia<br />
13
DOSSIER<br />
Handicap en Algérie :<br />
état des lieux<br />
Dans tous les pays du monde, les personnes handicapées constituent un groupe<br />
social qui lutte pour ses droits à l’égalité des chances et à <strong>la</strong> citoyenneté.<br />
Les handicaps peuvent être mis en évidence dès <strong>la</strong> naissance (ma<strong>la</strong>dies<br />
génétiques, affections congénitales, etc.) ou, au contraire, apparaître après un<br />
certain nombre de jours ou de mois : séquelles d’une pathologie maternelle<br />
anténatale ; ou d’une pathologie néonatale liée à l’accouchement, à une<br />
affection contractée dans <strong>la</strong> période périnatale, ou au-delà de <strong>la</strong> naissance<br />
(infections ou traumatismes sévères). Cette situation explique <strong>la</strong> diversité des<br />
handicaps ainsi que <strong>la</strong> difficulté qu’il y a à identifier ce groupe de popu<strong>la</strong>tion<br />
qui relève de différents secteurs (santé, sécurité sociale, solidarité, monde de<br />
l’enseignement, etc.).<br />
14<br />
C<strong>la</strong>ssification des handicaps<br />
Une première c<strong>la</strong>ssification des handicaps oppose<br />
les handicaps « physiques » aux handicaps<br />
« mentaux ». Cette c<strong>la</strong>ssification connaît ses limites<br />
dans <strong>la</strong> mesure où les associations de handicaps<br />
physiques et mentaux ne sont pas exceptionnelles.<br />
Une seconde c<strong>la</strong>ssification, plus détaillée, envisage<br />
les différentes situations cliniques rencontrées ; le<br />
handicap peut être moteur, re<strong>la</strong>tionnel, sensoriel<br />
(malvoyants, non voyants, malentendants, non<br />
entendants), mental (déficiences intellectuelles et<br />
re<strong>la</strong>tionnelles durables), associé : multi-handicaps<br />
(cumul de plusieurs handicaps) ou poly-handicap<br />
(cumul de handicaps moteur, intellectuel et de <strong>la</strong><br />
communication). Il est aussi possible de c<strong>la</strong>sser<br />
les handicaps en fonction de leur cause. On peut<br />
distinguer des causes congénitales et héréditaires,<br />
des causes obstétricales, des causes infectieuses,<br />
des causes liées à <strong>la</strong> violence psychologique ou<br />
physique, des causes liées à un traumatisme<br />
accidentel et des causes liées à une ma<strong>la</strong>die<br />
chronique. Il existe, par ailleurs, une c<strong>la</strong>ssification<br />
internationale des handicaps, très détaillée, qui a<br />
été publiée par l’Organisation Mondiale de <strong>la</strong> Santé<br />
en 1980. Ce qu’il faut retenir de ces c<strong>la</strong>ssifications<br />
est leur diversité et, donc, <strong>la</strong> difficulté qu’il y a<br />
de disposer d’une bonne vision du monde du<br />
handicap. Par contre, elles nous montrent les pistes<br />
qui peuvent être suivies dans le domaine de <strong>la</strong><br />
prévention, en identifiant les facteurs de risques<br />
représentés par <strong>la</strong> consanguinité (près de 30% en<br />
Algérie selon les deux derniers recensements), les<br />
grossesses non surveillées, les accouchements, les<br />
infections et les traumatismes de toutes sortes.<br />
Quelle est <strong>la</strong> situation en Algérie <br />
Nous disposons de deux enquêtes récentes,
permettant d’avoir une vision d’ensemble<br />
concernant le handicap en Algérie.<br />
L’enquête MICS est une enquête à indicateurs<br />
multiples qui est pratiquée tous les cinq ans.<br />
L’enquête de 2006 (MICS3) a touché 29 476<br />
ménages, qui regroupaient 171 100 personnes.<br />
Dans ce groupe de personnes, <strong>la</strong> prévalence du<br />
handicap était de 2,5% (0,1% chez les sujets âgés<br />
de moins de 20 ans, de 2,8% pour les sujets de 20<br />
à 59 ans, et de 13,2% pour les sujets de plus de<br />
soixante ans). Cette prévalence était nettement<br />
plus élevée pour les hommes (3,9%) que pour les<br />
femmes (1,1%). Elle variait selon les régions : elle<br />
était de 2,7% au Centre, de 2,4% à l’Est et à l’Ouest,<br />
et de 2,2% au Sud. Le handicap était plus fréquent<br />
dans le groupe des ménages les plus pauvres (20%<br />
de l’échantillon) avec 3,1% de prévalence contre<br />
2,5% pour l’ensemble de l’échantillon. 44% des<br />
handicaps étaient de type moteur, 32% étaient de<br />
type lié à <strong>la</strong> compréhension et à <strong>la</strong> communication,<br />
24% étaient de type visuel, et 16% étaient de type<br />
auditif, ces différents types de handicap pouvant être<br />
associés entre eux. 16% de ces handicapés disaient<br />
qu’il leur était difficile d’accomplir, seuls, leurs soins<br />
personnels. Le handicap était d’origine congénitale<br />
ou héréditaire (28,5%), dû à un accident (16,7%), à une<br />
infection (14,5%), à une ma<strong>la</strong>die chronique (12,5%),<br />
à des violences psychologiques ou physiques (7,5%)<br />
ou à un traumatisme obstétrical (2,0%).<br />
En 2010, une enquête a été réalisée par l’Office<br />
National des Statistiques à <strong>la</strong> demande du ministère<br />
de <strong>la</strong> Solidarité et ses résultats ont été présentés en<br />
décembre 2010. Elle a rapporté le chiffre de 1 945 707<br />
handicapés, dont 131 966 étaient âgés de moins<br />
de cinq ans, 319 946 étaient âgés de 5 à 19 ans, et<br />
1 493 795 avaient 20 ans et plus ainsi que l’on peut le<br />
constater à <strong>la</strong> lecture du tableau suivant.<br />
Handicap \ Âge 0-4 5-19 20 et + Total<br />
Moteur 44 569 44 889 194 560 284 018<br />
Auditif 3 285 15 627 55 084 73 996<br />
Visuel 1 919 30 522 140 857 173 298<br />
Mental 2 726 35 994 128 560 167 280<br />
Poly-handicap 2 267 20 010 63 311 85 588<br />
Ma<strong>la</strong>die chronique 63 975 80 623 482 139 626 737<br />
Autres 9 432 83 552 412 425 505 409<br />
Non déc<strong>la</strong>ré 3 793 8 729 16 859 29 381<br />
Total 131 966 319 946 1 493 795 1 945 707<br />
Source : ministère de <strong>la</strong> Solidarité nationale et de <strong>la</strong> Famille<br />
Répartition de <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion handicapée<br />
par type de handicap<br />
Les personnes handicapées représentent donc, selon<br />
cette enquête, près de 6% de <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion.<br />
Les ressources existantes<br />
Pour répondre à ces besoins, le pays dispose, en<br />
termes de structures, de 42 écoles de jeunes sourds<br />
prenant en charge 4 003 enfants, 24 écoles de<br />
jeunes aveugles prenant en charge 1 639 enfants, 6<br />
centres pour insuffisants respiratoires (316 enfants),<br />
6 centres médico-pédagogiques pour handicapés<br />
moteurs (316 enfants), et de 104 centres médicopédagogiques<br />
pour enfants inadaptés mentaux<br />
(9 394 enfants). Ces établissements d’éducation<br />
et d’enseignement spécialisés accueillent un total<br />
de 15 668 enfants handicapés, au titre de l’année<br />
sco<strong>la</strong>ire 2010-2011. Il faut ajouter à ces structures<br />
l’existence de 119 établissements gérés par des<br />
associations agréées.<br />
En termes de personnel, les enfants sont encadrés<br />
par un personnel spécialisé. Le nombre de ces<br />
travailleurs sociaux s’élève à 3 157 (éducateurs<br />
spécialisés, maîtres d’enseignements spécialisés,<br />
professeurs d’enseignements spécialisés,<br />
psychologues cliniciens, psychopédagogues,<br />
orthophonistes, assistants<br />
sociaux).<br />
Encadrement réglementaire<br />
La Loi n°02-09 du 8 mai 2002 re<strong>la</strong>tive<br />
à <strong>la</strong> protection et à <strong>la</strong> promotion des<br />
personnes handicapées est <strong>la</strong> référence en<br />
matière de prise en charge des personnes<br />
handicapées. Elle présente de nombreux<br />
décrets d’application.<br />
Au terme de ce bref état des lieux, on peut<br />
établir le constat suivant : Il existe une<br />
volonté politique de prendre en charge<br />
les personnes handicapées. Notamment,<br />
pax concordia<br />
15<br />
DOSSIER
DOSSIER<br />
l’Algérie a signé, en 2009, <strong>la</strong><br />
Convention internationale<br />
re<strong>la</strong>tive aux droits des personnes<br />
handicapées, mais :<br />
• Le système d’information<br />
concernant les personnes<br />
handicapées est insuffisamment<br />
développé.<br />
• Il existe un net déficit en<br />
structures fonctionnelles<br />
susceptibles d’accueillir et de<br />
prendre en charge les handicapés<br />
dans les domaines<br />
de l’accueil et de l’hébergement,<br />
des p<strong>la</strong>teaux techniques<br />
adaptés, des structures<br />
d’appareil<strong>la</strong>ge fournissant<br />
des équipements répondant<br />
aux progrès technologiques actuels.<br />
• Il existe un déficit important en personnel<br />
qualifié, qu’il s’agisse du domaine de l’éducation<br />
au sens <strong>la</strong>rge ou du médical et paramédical.<br />
• L’approche interdisciplinaire est défail<strong>la</strong>nte :<br />
l’idée de se mobiliser autour d’un projet<br />
individuel pour chaque personne handicapée<br />
n’a pas encore véritablement émergé.<br />
• Il n’existe pas réellement de normes définies<br />
pour codifier <strong>la</strong> prise en charge des personnes<br />
handicapées.<br />
• De nombreuses associations agréées sont impliquées<br />
dans <strong>la</strong> prise en charge des différentes<br />
personnes handicapées, mais leurs actions<br />
sont peu soutenues.<br />
Il est souhaitable qu’une étude soit menée au<br />
niveau de ces associations, afin d’identifier quels<br />
sont leurs besoins, et quels aspects réglementaires<br />
devraient être renforcés afin de favoriser une<br />
col<strong>la</strong>boration harmonieuse entre ces associations<br />
et l’État.<br />
Jean-Paul Grangaud<br />
Jean-Paul Grangaud<br />
Le Professeur Jean-Paul Grangaud est né et a fait ses études<br />
à Alger. Étudiant en médecine à Alger pendant <strong>la</strong> guerre<br />
d’indépendance, il choisit de poursuivre sa carrière médicale en<br />
Algérie. Pédiatre, il participera à <strong>la</strong> mise en p<strong>la</strong>ce de structures<br />
médicales de l’Algérie indépendante : instal<strong>la</strong>tion du service de<br />
pédiatrie à Béni Messous, puis à Ain Taya (années 70). Passionné<br />
de santé publique, il part compléter sa formation au Canada et devient directeur de <strong>la</strong><br />
prévention au ministère de <strong>la</strong> Santé à partir de 1995. Retraité depuis 2008, il reste un<br />
conseiller fréquemment sollicité du ministère de <strong>la</strong> Santé.<br />
16
Quand <strong>la</strong> société civile prend le re<strong>la</strong>is<br />
Seida Korriche, directrice de centre : transmettre une passion<br />
DOSSIER<br />
Directrice des centres de l’association en<br />
faveur des handicapés mentaux fondée<br />
par Marie-Thérèse Brau. Licenciée en<br />
psychologie, titu<strong>la</strong>ire d’un DEA de <strong>la</strong> faculté<br />
de Paris VII en psychologie clinique,<br />
Seida s’est très vite engagée professionnellement<br />
auprès des handicapés : dans une association pour<br />
déficients mentaux à Béjaïa tout d’abord, puis en tant<br />
que responsable des programmes de pédagogie et<br />
directrice de <strong>la</strong> formation à <strong>la</strong> Fédération nationale<br />
des parents d’enfants inadaptés enfin à l’AEPFHM,<br />
comme responsable des programmes de psychopédagogie<br />
(1997-2003) et, depuis, comme directrice<br />
de l’association.<br />
« Depuis les années 1980, <strong>la</strong> société a beaucoup évolué,<br />
s’intéresse aux handicapés<br />
; les familles les<br />
cachent moins, les <strong>la</strong>issent<br />
venir dans les centres,<br />
ont pris conscience<br />
des droits que leur<br />
offre <strong>la</strong> loi. Peu à peu, le<br />
travail de l’association<br />
et sa façon de fonctionner<br />
(pas d’internat) ont<br />
été connus et appréciés<br />
des parents. La demande<br />
est telle maintenant<br />
qu’il nous faut de<br />
nouveaux locaux. »<br />
Ce militantisme<br />
qui l’anime, elle le<br />
communique au<br />
personnel qui travaille<br />
dans l’association. Ceux qui restent -malgré<br />
des sa<strong>la</strong>ires souvent inférieurs à ceux d’établissements<br />
publics- partagent sa passion : faire en<br />
sorte que les jeunes handicapés deviennent aussi<br />
autonomes et responsables que possible : « Si je<br />
travaille aujourd’hui ici, si j’ai accepté de remp<strong>la</strong>cer<br />
M.-Th. Brau, c’est parce nos deux volontés se<br />
sont rencontrées pour poursuivre ce travail de<br />
qualité auprès des handicapés. Chrétiens et musulmans,<br />
nous travaillons ensemble et cette rencontre<br />
a donné lieu à quelque chose de très beau,<br />
de très fort. »<br />
Le plus grand défi<br />
pour elle maintenant,<br />
c’est d’arriver<br />
à développer<br />
des structures pour<br />
accueillir les handicapés<br />
devenus<br />
adultes : « Je les vois<br />
depuis des années<br />
capables de mener<br />
à bien -à leur rythme<br />
bien sûr- des activités<br />
ou un travail répondant à des normes de qualité<br />
et de production, alors je continuerai à me battre<br />
pour que ce<strong>la</strong> soit connu et valorisé dans <strong>la</strong> société algérienne.<br />
Ce que nous cherchons ce n’est pas à développer<br />
une entreprise économique avec des sa<strong>la</strong>riés,<br />
c’est faire valoir ce qu’ils savent faire et leur permettre<br />
de travailler, au service d’entreprises partenaires. Notre<br />
expérience, unique en Algérie, a été présentée au<br />
Ministère pour qu’elle puisse être reproduite ailleurs<br />
en Algérie. L’association a déjà quarante ans d’existence,<br />
mais elle a de beaux jours devant elle quand<br />
on voit tous les domaines où elle peut continuer d’innover<br />
pour accompagner les handicapés. »<br />
Propos recueillis par M.-Ch. R.<br />
pax concordia<br />
17
DOSSIER<br />
Souad et Aki<strong>la</strong> : Merci les enfants !<br />
Écrire pour cette <strong>revue</strong> est une merveilleuse occasion<br />
d’évoquer avec émotion notre expérience auprès des<br />
enfants handicapés infirmes<br />
moteurs cérébraux (on parle<br />
plutôt maintenant de « paralysie<br />
cérébrale ») du centre de<br />
Bordj El Kiffan - Alger.<br />
Nous nous rappelons du jour<br />
où nous avons rencontré Marie-<br />
Thérèse Brau et élisabeth de<br />
Laborde. Nous partagions <strong>la</strong><br />
même vocation, celle de servir<br />
les êtres les plus démunis et les<br />
plus fragiles. Nous avons tout<br />
de suite dit oui pour faire partie<br />
d’une équipe motivée, prête à<br />
donner le meilleur d’elle-même<br />
pour ces enfants.<br />
Et pour les parents, quel bonheur<br />
de pouvoir trouver une institution qui accueille leurs<br />
enfants.<br />
Sans grande expérience professionnelle dans le<br />
domaine des enfants en situation de handicap et surtout<br />
en difficulté motrice importante, nos débuts ont été<br />
difficiles ; il fal<strong>la</strong>it apprendre à connaître chaque enfant.<br />
Les mamans nous montraient comment les positionner,<br />
nous disaient quels étaient leurs habitudes alimentaires<br />
et leurs problèmes de déglutition, les rituels des<br />
changes, comment les habiller... Chaque jour était fait<br />
d’expériences qui nous ont permis de nous surpasser, de<br />
découvrir nos capacités. Les formateurs étrangers que<br />
nous recevions périodiquement, notre<br />
pédiatre le docteur Jean‐Paul Grangaud,<br />
ont mis leur expérience professionnelle<br />
à notre disposition dans tous les<br />
domaines.<br />
Soucieuses d’améliorer <strong>la</strong> prise en<br />
charge des enfants, d’assurer un projet<br />
individualisé et de leur apporter l’aide<br />
nécessaire, nous étions tout le temps à<br />
l’écoute des enfants, présentes à chaque<br />
demande de leur part : il fal<strong>la</strong>it être<br />
attentives à tout.<br />
Même s’il nous p<strong>la</strong>it, ce travail est pénible<br />
; on est quotidiennement confronté<br />
au handicap des enfants. Prendre en<br />
charge les enfants handicapés est un<br />
travail de longue haleine, un perpétuel<br />
combat. Notre passage à <strong>la</strong> CAIM (Centre d’Aide pour<br />
Infirmes Moteurs) marquera à jamais notre vie. C’est une<br />
expérience qui <strong>la</strong>issera des traces sur notre personnalité.<br />
Nous y avons vécu souffrance et amour, joie, espoir, réflexion<br />
continue pour faire face et continuer le combat<br />
de <strong>la</strong> vie, chaque fois que nous nous sentions désarmées<br />
devant le handicap lui‐même.<br />
Merci les enfants !<br />
Aki<strong>la</strong> (puéricultrice) et Souad (psychologue)<br />
Marie-Thérèse Brau<br />
Le nom de « l’association Entraide Popu<strong>la</strong>ire Familiale » est sans doute moins<br />
connu des lecteurs que celui de Marie-Thérèse Brau, « cheville ouvrière » de cette<br />
association. Née en Algérie, elle s’est très vite engagée dans l’action auprès des plus<br />
défavorisés après l’obtention d’un diplôme d’éducatrice de jeunes enfants. D’abord<br />
en 1960 à Oued Ouchaya, bidonville des environs d’Alger, où elle participe aux soins<br />
et à <strong>la</strong> sco<strong>la</strong>risation des jeunes enfants dans le cadre de « l’association d’entraide<br />
popu<strong>la</strong>ire ». Elle découvre les problèmes des familles de ce secteur, notamment<br />
l’absence de prise en charge des enfants handicapés. Elle crée alors, en 1970, un<br />
premier centre associatif où des jeunes de 5 à 13 ans sont pris en charge. C’est en<br />
1973 qu’elle aidera à mettre en route l’AEPFHM (Association d’Entraide Popu<strong>la</strong>ire Familiale en Faveur des<br />
Handicapés Mentaux) et à assurer <strong>la</strong> formation d’éducatrices spécialisées, en tandem avec sa col<strong>la</strong>boratrice<br />
et amie Elisabeth de Laborde. Au fur et à mesure, elle a su adapter les structures initiales de prise en charge<br />
d’enfants au besoin de ceux qui devenaient adultes. Actuellement, cinq établissements assurent le suivi de l’âge<br />
de 5 ans jusqu’à une insertion professionnelle en milieu « normal » ou adapté. 375 handicapés sont accueillis<br />
dans ces structures fournissant un travail sa<strong>la</strong>rié pour 102 personnes.<br />
18
Sétif : Quand les parents s’en mêlent<br />
DOSSIER<br />
A Sétif, des parents se mobilisent pour une prise en charge de leurs enfants<br />
handicapés. Dans le local de l’association, au cœur d’un jardin public du centre<br />
ville, deux responsables nous accueillent.<br />
Comment avez-vous démarré <br />
Une petite fille IMC était née dans <strong>la</strong> famille de l’un de<br />
nous. Les médecins disaient aux parents : « Laissez-<strong>la</strong><br />
dans un coin. Il n’y a rien à faire. » Mais eux pensaient<br />
que leur fille était intelligente et qu’il y avait quelque<br />
chose à faire. Ayant appris l’existence d’une association<br />
à Toulouse, le papa, M. Bouabdal<strong>la</strong>h, y a passé<br />
quinze jours. Au retour, il a invité des parents dans <strong>la</strong><br />
même situation. Ensemble, ils ont créé l’Association<br />
des Parents d’enfants IMC (APIMC) de Sétif, présidée<br />
par le docteur Sadaoui.<br />
IMC, ça veut dire quoi <br />
L’Infirmité Motrice Cérébrale<br />
est un handicap moteur,<br />
conséquence d’un accident<br />
cérébral causé par une infection,<br />
un manque d’apport en<br />
oxygène ou une hémorragie<br />
pendant <strong>la</strong> grossesse, au moment<br />
de <strong>la</strong> naissance ou dans<br />
les deux premières années<br />
de l’enfant. Pour <strong>la</strong> moitié<br />
des 900 personnes connues<br />
aujourd’hui par notre association,<br />
il y a aussi un handicap<br />
mental.<br />
Quel est le but de votre association <br />
Faire quelque chose pour le développement de nos<br />
enfants : favoriser leur développement physique<br />
par une rééducation fonctionnelle appropriée ; 70%<br />
de ceux que nous avons accompagnés arrivent à<br />
marcher. On peut aussi stimuler leur développement<br />
intellectuel et leur aptitude à communiquer, à lire et à<br />
parler. Sur 900, 100 ont pu aller à l’école ; 4 ont réussi<br />
le bac.<br />
Quelles sont les activités de l’association <br />
Nous avons trois activités : le dialogue avec les<br />
parents et le suivi médico-social ; l’initiation sco<strong>la</strong>ire<br />
et informatique qui prépare l’intégration sco<strong>la</strong>ire<br />
ou pré-professionnelle des enfants ; et <strong>la</strong> formation<br />
complémentaire de techniciens de <strong>la</strong> santé :<br />
kinésithérapeutes, psychologues, orthophonistes,<br />
psycho-pédagogues et éducateurs ou éducatrices.<br />
Comment avez-vous pu développer tout ce<strong>la</strong> <br />
Dès le début des années 1990, des parents médecins<br />
ou psychologues ont donné des consultations gratuitement,<br />
après leur travail. En 2000, Maurice, médecin<br />
qui arrivait à <strong>la</strong><br />
retraite (et par<br />
ailleurs curé de<br />
Sétif) s’est engagé<br />
à plein temps<br />
et a pu réunir<br />
une équipe qui<br />
a ouvert un centre<br />
pour préparer<br />
des enfants IMC<br />
sans handicap<br />
mental à l’école.<br />
Aujourd’hui, une<br />
petite dizaine de permanents font de l’ergothérapie,<br />
de <strong>la</strong> psychomotricité, de l’orthophonie, etc. En 2004,<br />
l’association a obtenu l’ouverture à l’université de<br />
Sétif d’une formation de psycho-orthophonistes qui,<br />
jusque-là, n’existait qu’à Alger. En 2011, 15 des 20 daïras<br />
de <strong>la</strong> wi<strong>la</strong>ya de Sétif ont des binômes de psychologues<br />
cliniciennes et orthophonistes qui interviennent<br />
dans les familles et les écoles, après des stages à<br />
l’association où leur faculté les avait envoyés.<br />
Quels sont vos projets <br />
Des projets de formation avec des partenaires<br />
algériens et étrangers. Nous avons constitué une<br />
Fédération Nationale pour l’Insertion des Personnes<br />
IMC avec d’autres associations semb<strong>la</strong>bles à Batna,<br />
Oran, Constantine, Alger, Tizi Ouzou, Tiaret et Annaba.<br />
Nous avons ouvert un site web (www.apimc.setif.org)<br />
et nous aimerions que se créent d’autres associations<br />
locales, des centres d’État (le premier a ouvert à<br />
Batna en 2010), des centres avec internat, et qu’on<br />
développe <strong>la</strong> formation des personnels de santé.<br />
Propos recueillis par M.G.<br />
pax concordia 19
DOSSIER<br />
Des religieuses au service des personnes<br />
handicapées<br />
20<br />
Sœur Jeanne : « Tout simplement, par amour »<br />
Auprès des handicapés, je rencontre des<br />
professionnels pleins d’humanité. Tous<br />
ne sont pas tels, mais j’ai beaucoup appris<br />
au contact de chacun. J’essaie de<br />
rendre service auprès d’insuffisants<br />
mentaux et de quelques multi-handicapés.<br />
Dans un des deux centres où je me rends, même si <strong>la</strong><br />
majorité des professionnels sont peu formés ou spécialisés,<br />
ils croient à leur métier. Ils m’ont demandé de<br />
faire des ateliers pratiques, couture et autre, en tandem<br />
avec des éducateurs. J’apprécie ce partage de<br />
compétences.<br />
Dans l’autre centre, deux jeunes autistes, déjà <strong>la</strong>rgement<br />
en âge de marcher, restaient au lit. Un jeune<br />
médecin a eu le courage de dire qu’elles pouvaient acquérir<br />
une certaine autonomie. Un travail long a commencé<br />
ensemble, surtout avec un psychoclinicien passionné,<br />
travail<strong>la</strong>nt avec les parents ou les éducateurs<br />
pour que les efforts puissent se poursuivre durant <strong>la</strong><br />
semaine, très humain et doux avec chacun, ne cessant<br />
de se former lui-même. Aujourd’hui, les deux petites<br />
handicapées marchent et commencent à s’ouvrir.<br />
Ce n’est pas toujours facile pour les jeunes professionnels<br />
; tous n’ont pas <strong>la</strong> même conviction que le handicapé<br />
est une personne respectable et riche. Parfois,<br />
on se sent « en plus », pas du tout indispensable, voire<br />
même gênante. On peut aussi s’entendre dire : « Ne<br />
t’en va pas, j’ai besoin de ta présence pour tenir ». Je<br />
crois qu’il est important d’être là, tout simplement, par<br />
amour.<br />
Sœur Zawadi : « Je prépare demain ! »<br />
Originaire du Congo démocratique, Zawadi vit en<br />
Algérie depuis 2002. Un an<br />
à Alger (initiation à l’arabe<br />
dialectal et à <strong>la</strong> culture<br />
arabo-musulmane), puis<br />
trois ans à El Goléa,<br />
au service d’enfants<br />
handicapés, l’ont conduite<br />
à entreprendre des études<br />
de kinésithérapie à Alger.<br />
A El Goléa, j’ai découvert<br />
les immenses<br />
besoins des enfants<br />
handicapés et de<br />
leurs familles, et mes<br />
aptitudes pour accompagner<br />
et aider<br />
ces familles.<br />
Je commence ma troisième<br />
année d’études<br />
à Alger. Dans cette<br />
école, je suis l’unique chrétienne et <strong>la</strong> seule « africaine<br />
noire ». Malgré toutes ces différences, je me sens bien<br />
intégrée.<br />
Se former en Algérie dans le domaine de <strong>la</strong> santé demande<br />
de connaître <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue arabe : les cours sont<br />
en français, mais parfois les professeurs donnent des<br />
explications en arabe. Quelle surprise quand ils voient<br />
que je peux comprendre ce qu’ils expliquent ! Et puis<br />
comment comprendre et répondre aux besoins de<br />
ceux et celles qui viennent confier leur corps fragilisé<br />
entre mes mains si je ne connais pas leur <strong>la</strong>ngue <br />
Pour répondre aux attentes de ceux qui me côtoient,<br />
il me faut devenir toujours davantage disciple de Jésus.<br />
J’essaie, jour après jour, de relever ce défi. Je suis<br />
émerveillée des re<strong>la</strong>tions fraternelles qui se tissent en<br />
faisant le bien ensemble : je découvre de l’intérieur<br />
les valeurs de <strong>la</strong> foi qui font vivre mes compagnons<br />
musulmans.<br />
Être formée en Algérie me permet de connaître ce qui y<br />
est possible, les ressources humaines, thérapeutiques,<br />
légis<strong>la</strong>tives qui peuvent être mises ici au service<br />
des handicapés. Le savoir faire que je suis en train<br />
d’acquérir, je le dois à l’élite algérienne. Ce<strong>la</strong> me réjouit<br />
et me donne de l’assurance pour l’avenir.<br />
Souvent, j’entends des responsables dire : « On a<br />
besoin de gens comme vous… Votre p<strong>la</strong>ce est déjà<br />
réservée pour vous, ici, dans notre hôpital ».<br />
Comment ne pas être sensible à pareille invitation <br />
Propos recueillis par M.-Ch. R.
1962-2012 : L’Algérie indépendante<br />
a cinquante ans<br />
Au long de cette année du cinquantenaire de l’Algérie indépendante,<br />
Pax et Concordia ouvre une rubrique « Indépendance ». Les premiers<br />
invités à y donner leur contribution sont l’archevêque émérite d’Alger<br />
et l’évêque émérite de Constantine et Hippone.<br />
Mgr Henri Teissier a été ordonné prêtre pour le diocèse d’Alger en 1955.<br />
Il en a été archevêque coadjuteur en 1980 puis archevêque en titre de<br />
1988 à 2008. Il réside aujourd’hui à Tlemcen.<br />
indépendance<br />
Impossible d’évoquer les cinquante années<br />
de l’Algérie indépendante sans revenir à ces<br />
premiers jours de juillet vécus au quartier du<br />
1 er mai, à Alger. Trois souvenirs habitent ma<br />
mémoire.<br />
Le premier c’est, dans ces mois de mai à juillet 62, le<br />
départ de toute <strong>la</strong> communauté européenne, celle<br />
que je servais, depuis mon retour d’Égypte, dans ce<br />
quartier popu<strong>la</strong>ire de Belcourt. En quelques semaines,<br />
mes paroissiens avaient pratiquement tous quitté<br />
l’Algérie. C’était l’échec d’une coexistence qui n’avait<br />
pas su choisir les voies de l’avenir.<br />
Mon deuxième souvenir est celui de <strong>la</strong> rue Trollier,<br />
petite rue où était notre église paroissiale. En mai et<br />
juin 62, trois attentats de l’O.A.S. avaient endeuillé<br />
trois familles algériennes habitant <strong>la</strong> rue, causant le<br />
départ du quartier de tous ses habitants musulmans.<br />
J’ai moi-même emprunté une voiture pour aider <strong>la</strong><br />
dernière famille algérienne de <strong>la</strong> rue à se rendre dans<br />
un quartier plus sûr. Ces ultimes violences n’étaient<br />
que le signe du prix que <strong>la</strong> société algérienne avait dû<br />
payer pour obtenir son indépendance.<br />
Mon troisième souvenir, c’est celui de <strong>la</strong> marche que<br />
j’ai voulu faire, seul, de Belcourt à Bab el Oued, en ce<br />
premier jour de l’indépendance, pour savoir si j’avais<br />
ma p<strong>la</strong>ce dans cette Algérie indépendante. Je n’ai pas<br />
perçu, ce jour là, un seul regard malveil<strong>la</strong>nt. Je prenais<br />
confiance dans un avenir possible pour notre petite<br />
communauté… jusqu’à ce qu’à cinq heures du soir<br />
<strong>la</strong> fête s’arrête quand on a reçu les nouvelles des<br />
violences qui venaient d’ensang<strong>la</strong>nter Oran.<br />
Après l’été, ce fut <strong>la</strong> rentrée sco<strong>la</strong>ire. Des milliers de<br />
coopérants arrivaient. Les institutions de l’Église se<br />
trouvaient mises, avec enthousiasme, au service<br />
de <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion algérienne assoiffée de savoir et<br />
de formation. Algériens et étrangers étaient engagés<br />
dans une reconstruction au profit de tous. L’Algérie<br />
délivrait, alors, un message d’espérance particulièrement<br />
aux peuples qui attendaient encore leur indépendance<br />
ou leur développement, notamment<br />
en Afrique. Elle promettait aussi à ses enfants <strong>la</strong> justice<br />
pour tous. Hé<strong>la</strong>s, quelques décennies plus tard,<br />
c’étaient les attentats du boulevard Amirouche et<br />
d’ailleurs. Ces violences prouvaient que <strong>la</strong> construction<br />
du pays ne s’était pas faite vraiment au bénéfice<br />
de tous. L’idéologie qui justifiait ces violences prouvait<br />
aussi que le retour à <strong>la</strong> culture originelle du pays<br />
n’avait pas été guidé par des hommes de sagesse et<br />
de paix.<br />
Dans cette histoire tourmentée, une joie demeure.<br />
Celle d’avoir, grâce aux appels du cardinal Duval,<br />
de Mgr Scotto et de beaucoup d’autres, pu faire en<br />
Algérie une Église de <strong>la</strong> solidarité avec un peuple<br />
de tradition musulmane. Cette joie habite toujours<br />
notre Église, celle des chrétiens algériens comme des<br />
étrangers, au-delà des épreuves à surmonter. C’est le<br />
don que nous voulons renouveler, d’année en année,<br />
à <strong>la</strong> famille algérienne, car elle est devenue notre<br />
famille.<br />
+ Henri Teissier<br />
© Didier Lucas<br />
pax concordia
indépendance<br />
22<br />
Un survol du demi-siècle écoulé<br />
Prêtre du Prado, Mgr Gabriel Piroird a été curé de Béjaïa de 1968 à 1983,<br />
tout en travail<strong>la</strong>nt comme ingénieur à <strong>la</strong> Direction de l’Hydraulique de<br />
<strong>la</strong> Wi<strong>la</strong>ya. évêque de Constantine et Hippone de 1983 à 2009, il réside<br />
aujourd’hui à Hippone (W. Annaba).<br />
Cinquante ans d’indépendance, ce<strong>la</strong><br />
compte dans l’histoire d’un peuple, ellemême<br />
liée à l’histoire universelle. La<br />
question du développement est un de<br />
ces liens.<br />
En 1955, <strong>la</strong> conférence de Bandung marque, de<br />
fait, l’émergence internationale du Tiers-Monde.<br />
En 1962, Jean XXIII ouvre le concile Vatican II. Six<br />
mois plus tard, il rappelle, dans une encyclique, les<br />
quatre fondements de <strong>la</strong> paix : « <strong>la</strong> vérité, <strong>la</strong> justice,<br />
l’amour et <strong>la</strong> liberté ». Il présente aussi l’émergence<br />
du Tiers-Monde comme un « signe des temps », une<br />
réalité nouvelle à prendre en compte pour construire<br />
l’avenir.<br />
En 1967, Paul VI invite le monde à prendre conscience<br />
que « le développement est le nouveau nom de <strong>la</strong><br />
paix ». En 1974, le Président Boumediene <strong>la</strong>nce, lors<br />
de l’assemblée générale de l’ONU, l’idée d’un « Nouvel<br />
Ordre Économique International ».<br />
Comme toute aventure, celle-ci connaît des réussites<br />
et des échecs. En 1989, <strong>la</strong> chute du mur de Berlin signe<br />
l’échec de l’économie socialiste adoptée par nombre<br />
de pays du Tiers-Monde. En 2008, <strong>la</strong> dernière crise<br />
financière montre que l’économie de marché de type<br />
néolibéral a été incapable de conjuguer le plein emploi<br />
et <strong>la</strong> croissance mais elle souligne l’interdépendance<br />
des nations. Le développement n’a été, de fait, pensé<br />
que dans sa dimension économique.<br />
« Pèlerins de <strong>la</strong> vérité, pèlerins de <strong>la</strong> paix », tel est le<br />
thème du 25 e anniversaire de <strong>la</strong> journée d’Assise du<br />
27 octobre 1986. Dans son mot d’accueil, Benoit XVI<br />
relève que <strong>la</strong> cause <strong>la</strong> plus profonde des échecs est<br />
l’accent mis uniquement sur l’aspect économique du<br />
développement et <strong>la</strong> quasi-négation de <strong>la</strong> dimension<br />
spirituelle de l’homme. « Je voudrais parler… d’un<br />
changement du climat spirituel. L’adoration de<br />
l’argent, de l’avoir et du pouvoir, se révèle être une<br />
contre-religion, dans <strong>la</strong>quelle l’homme ne compte<br />
plus, mais seulement l’intérêt personnel… L’absence<br />
de Dieu conduit à <strong>la</strong> déchéance de l’homme et de<br />
l’humanisme ».<br />
Avec toutes les délégations présentes, Benoît XVI<br />
invite tous les hommes de bonne volonté à devenir<br />
« pèlerins de <strong>la</strong> vérité, pèlerins de <strong>la</strong> paix ». Qui dit<br />
pèlerinage dit marche vers un but auquel on aspire<br />
de tout son cœur car il correspond au désir le plus<br />
profondément ancré dans le cœur de l’homme. Pour<br />
le dire autrement, l’humanité est une dans son origine.<br />
Dans l’histoire, elle vit une unité brisée, mais elle est<br />
toujours en marche vers une cité de paix qu’elle ne<br />
peut atteindre sans <strong>la</strong> participation et le respect de<br />
tous, cité dont précisément les fondations sont : « <strong>la</strong><br />
vérité, <strong>la</strong> justice, l’amour et <strong>la</strong> liberté ».<br />
Un demi-siècle, ce<strong>la</strong> compte dans <strong>la</strong> vie d’un peuple<br />
mais compte encore plus dans <strong>la</strong> vie d’un homme.<br />
Pourtant qu’est-ce qu’un demi-siècle à l’échelle de<br />
l’histoire Ce demi-siècle, il nous a été donné de<br />
le vivre en partageant « les joies et les espoirs, les<br />
tristesses et les angoisses » d’un peuple qui retrouvait<br />
son indépendance et avec une Église qui retournait<br />
boire à sa source. Ainsi, avons-nous inscrit notre<br />
pèlerinage personnel vers <strong>la</strong> vérité et vers <strong>la</strong> paix dans<br />
celui plus vaste de toute l’humanité.<br />
Nous en rendons grâce à Dieu !<br />
+ Gabriel Piroird
Cher jeune frère,<br />
Chère jeune sœur,<br />
« Vous serez mes témoins... » 1<br />
Lettre des évêques de l’Église catholique d’Algérie<br />
aux jeunes africains chrétiens venus étudier en Algérie — septembre 2011<br />
Bienvenue en Algérie et dans notre Église si tu es de ceux ou celles qui viennent d’arriver. Très<br />
bonne année universitaire et pastorale, si tu entames une nouvelle année d’étude.<br />
Ta venue et ta présence sont une grâce, un don du Ciel pour l’Église d’Algérie et, nous le croyons,<br />
pour le pays qui t’accueille pour ce temps d’étude. Ensemble, vous êtes du sang neuf, jeune,<br />
dynamique de notre Église. Vous constituez le nombre le plus important des fidèles <strong>la</strong>ïcs dans <strong>la</strong><br />
majorité des paroisses. Prenant le re<strong>la</strong>is des appels du Saint Père à Madrid, nous vous transmettons l’appel du<br />
Christ qui est pour chacun et chacune d’entre vous : « Vous serez mes témoins... » (Ac 1,8)<br />
Des échos enthousiastes ont dû te parvenir de Madrid, via <strong>la</strong> TV, Internet, ou par les heureux participants de<br />
ton Église d’origine. Ici tu as déjà dû rencontrer ou rencontreras très vite l’un, l’une ou l’autre membre de notre<br />
petite délégation qui y est allée. Les uns et les autres ont à cœur de faire partager <strong>la</strong> joie qui fut celle de toute <strong>la</strong><br />
jeunesse réunie à Madrid autour du Christ et de son Vicaire. Ils sauront nous transmettre<br />
les paroles fortes du Saint Père invitant les jeunes à dépasser les peurs, à être fiers de<br />
leur foi et savoir en témoigner.<br />
Dès le début de cette année pastorale, tu vas être associé(e) à <strong>la</strong> célébration du vingtcinquième<br />
anniversaire de <strong>la</strong> Rencontre d’Assise. Le 27 octobre 1986, le Saint Père avait<br />
invité les représentants de toutes les religions à une journée de jeûne et de prière pour<br />
<strong>la</strong> Paix. Tu n’étais pas né(e) lors de cette journée prophétique. Mais son sens et sa portée<br />
se continuent aujourd’hui. Faire mémoire, dans l’Église, c’est recevoir aujourd’hui une<br />
grâce d’hier dont les fruits sont toujours à cueillir. Cette rencontre des représentants de<br />
toutes les religions, à l’initiative du Saint Père, est un beau signe de l’unité de toute <strong>la</strong><br />
famille humaine au service de <strong>la</strong>quelle chaque religion est appelée à contribuer. Pour un<br />
chrétien, cette unité est aussi celle du Salut apporté par le Christ. Tout homme, toute femme, est un frère, une<br />
sœur « pour lequel le Christ est mort » (1 Co 8, 11), « quels que soient <strong>la</strong> couleur de sa peau, l’horizon historique<br />
et géographique dans lequel il vit et agit, <strong>la</strong> culture dans <strong>la</strong>quelle il a grandi et dans <strong>la</strong>quelle il s’exprime » (cf.<br />
Discours du Pape Jean-Paul Il aux Cardinaux de <strong>la</strong> Curie le 22-12-86). Cette célébration te situe bien au cœur de<br />
notre Église catholique, universelle, désirant vivre une rencontre fraternelle avec tous. L’occasion t’est donnée<br />
de devenir un peu plus, à l’exemple du Bienheureux Charles de Foucauld, frère universel.<br />
Pour les plus jeunes, le début du séjour est souvent un temps<br />
d’épreuve. Il te faut t’adapter à un autre pays, une autre culture,<br />
d’autres <strong>la</strong>ngues. Tu ne seras pas toujours compris dans ta différence<br />
de couleur de peau, de culture, de religion. L’éloignement familial te<br />
fera connaître <strong>la</strong> solitude affective. Sur ce chemin, les anciens aideront<br />
les plus jeunes. Tu seras aussi accompagné par des aumôniers, et<br />
soutenu par <strong>la</strong> communauté paroissiale dans <strong>la</strong>quelle tu prends ta<br />
p<strong>la</strong>ce.<br />
Nous t’invitons à te faire des amis aussi parmi les étudiants algériens.<br />
Tu trouveras peut-être ce<strong>la</strong> quasi impossible au début. Des anciens<br />
église d’algérie<br />
pax concordia
église d’algérie<br />
te montreront que c’est possible. Car l’amitié vient<br />
souvent après quelques années, et c’est toujours un<br />
beau cadeau. II te situe bien au cœur de ce que veut<br />
vivre l’Église ici. « L’amitié est révolutionnaire » aimait<br />
à répéter un de nos anciens qui a marqué notre Église,<br />
pendant <strong>la</strong> guerre d’indépendance et après, le cardinal<br />
Duval. Avec tes collègues algériens, tu pourras t’associer<br />
aux célébrations du cinquantième anniversaire de l’indépendance du pays. Ce sera une manière pour toi de<br />
mieux connaître ton pays d’accueil. Notre Église aussi s’associera à cet anniversaire.<br />
A <strong>la</strong> suite du Synode africain, notre Église a écrit son propre message, adaptant à notre situation le message<br />
du Synode. Reprenant l’appel du Synode, elle l’a intitulé : « Algérie lève-toi ». Nous t’invitons à relire avec<br />
quelques-uns et tes aumôniers ce message. Tu n’ignores pas les défis nombreux devant lesquels se trouve<br />
chaque pays d’Afrique, dans un contexte international difficile. L’Afrique et l’Église en Afrique ont besoin de<br />
toi, comme l’Église en Algérie a besoin de toi. Fais de bonnes études, deviens vraiment compétent dans <strong>la</strong><br />
matière que tu étudies. Ton temps de formation est une bonne préparation à servir ton pays et l’Église, où<br />
que tu sois. Parmi les anciens, certains ont découvert leur vocation ici durant ce temps<br />
propice à se poser des questions essentielles : quel est le sens de ma vie et qu’est-ce<br />
que je veux en faire N’écarte pas cette question quand elle monte en toi.<br />
Nous t’invitons à <strong>la</strong> liberté et à <strong>la</strong> confiance. Dans l’Église tu vas rencontrer beaucoup<br />
de diversités. Tu es invité(e) à faire Église avec des frères et des sœurs de nombreuses<br />
nationalités, avec des mentalités contrastées et typées, avec des sensibilités<br />
culturelles qui doivent en permanence s’ajuster. Cette diversité va te faire découvrir<br />
en profondeur l’universalité de l’Église. Tu as déjà rencontré et tu rencontreras aussi<br />
avec bonheur quelques frères et sœurs Algériens chrétiens. Ils ont une p<strong>la</strong>ce unique<br />
dans notre Église. Ils sont une lumière sur son chemin. Sur ta route, tu as peut-être<br />
déjà été appelé à « rendre compte de l’Espérance qui est en toi » à un frère, à une soeur<br />
qui te le demandait. Notre Église est appelée à témoigner de l’Amour du Père pour tous ses enfants, même<br />
pour ceux qui <strong>la</strong> refusent. Cette diversité dans notre Église est une richesse,<br />
mais aussi parfois source de malentendus. N’attends pas <strong>la</strong> fin de ton séjour<br />
pour oser exprimer ce qui te fait question, telle ou telle incompréhension ou<br />
déception dans tes attentes, toute chose qui, à l’occasion, peut parfois te blesser.<br />
N’appelons pas ce<strong>la</strong> trop vite racisme. Nous croyons que tu sauras contribuer,<br />
par tes dons propres, à faire de ton Église une communauté fraternelle dans<br />
<strong>la</strong>quelle tu as toute ta p<strong>la</strong>ce. [...]<br />
Cher jeune frère, chère jeune sœur, comme le rappe<strong>la</strong>it le Saint Père à Madrid :<br />
« Dieu t’aime. En demeurant dans l’Amour du Christ, enraciné dans <strong>la</strong> foi, tu<br />
rencontreras, même au milieu des contradictions et des souffrances, <strong>la</strong> source<br />
de <strong>la</strong> joie et de l’allégresse. » [...]<br />
Merci pour ta prière, nous t’accompagnons de <strong>la</strong> nôtre.<br />
En <strong>la</strong> fête de <strong>la</strong> Nativité de Marie, le 8 septembre 2011<br />
Tes frères évêques de l’Église catholique d’Algérie :<br />
A <strong>la</strong> suite des Journées Mondiales de <strong>la</strong> Jeunesse,<br />
l’Église catholique d’Algérie propose des<br />
Journées Algériennes de <strong>la</strong> Jeunesse<br />
Rassemblement national des étudiants chrétiens<br />
en <strong>la</strong> Fête des Rameaux 2012<br />
Renseignements et inscriptions dans les paroisses<br />
+ Ghaleb Bader, archevêque d’Alger<br />
+ Alphonse Georger, évêque d’Oran<br />
+ C<strong>la</strong>ude Rault, évêque de Laghouat-Ghardaïa<br />
+ Paul Desfarges, évêque de Constantine et<br />
Hippone<br />
1 Texte complet sur le site de l’Église d’Algérie
Diocèse d’Alger<br />
Le métro d’Alger<br />
Le 1 er novembre, anniversaire du début<br />
de <strong>la</strong> révolution, a revêtu cette année<br />
un caractère très particulier à Alger.<br />
Le président Bouteflika a inauguré le<br />
nouveau métro, le deuxième sur le<br />
continent africain après celui du Caire.<br />
Les algérois sont heureux et fiers de<br />
pouvoir l’emprunter. Les travaux ont<br />
rencontré beaucoup de difficultés à<br />
cause du sous-sol et surtout des années<br />
de terrorisme qui ont tout interrompu<br />
pendant 10 ans. Mais, il est en fonction. Il<br />
ne reste que le problème du coût très élevé<br />
pour les petites bourses. Nous donnons le<br />
témoignage d’un jeune ami pour qui c’est<br />
bien sûr le principal problème.<br />
En 1978 (je venais de naître), il y a eu<br />
l’accord du projet de métro en Algérie.<br />
Les travaux commencent en 1980, j’avais 2<br />
ans. En 1984, l’Algérie décide de construire<br />
« Riadh El Feth », pour célébrer les trente<br />
ans du début de <strong>la</strong> Révolution. Après son inauguration,<br />
ils se sont dit : « Tiens ! Et si on reprenait les travaux »,<br />
bref, ils commencent à creuser, et voilà que tous les<br />
rats de <strong>la</strong> ville sortent et inondent tous les HLM (ma<br />
tante habitait ceux-là : des rats sortent de partout chez<br />
elle). Du coup, interruption des travaux pour 3 ou 4 ans,<br />
mais ce n’est pas fini, ils décident, enfin, de reprendre.<br />
Mais, dommage, tout se bouscule en Algérie <strong>la</strong> b<strong>la</strong>nche<br />
qui rencontre un nouveau phénomène et devient<br />
Algérie <strong>la</strong> noire. Devinez... le FIS fait son apparition et<br />
vous connaissez les détails concernant les 10 ans de<br />
période noire... Notre président démissionne, nous<br />
cherchons un remp<strong>la</strong>çant, Mohamed Boudiaf que<br />
nous avions tous accepté. Il apportait de l’espoir, mais<br />
voilà, il est assassiné (Dieu ait son âme). La venue de<br />
« Boutef » offre un nouveau départ à ce peuple qui a<br />
tant souffert…<br />
Et nous voici en 2011, 31 ans sont passés. Le métro<br />
démarre enfin à « Alger <strong>la</strong> capitale » mais, actuellement,<br />
juste pour 11 stations et coûtera, pour les usagers, 50<br />
dinars le ticket. Une famille de c<strong>la</strong>sse moyenne ne peut<br />
bénéficier de ces services, même avec les réductions<br />
des abonnements. 70% de <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion algérienne<br />
est composée de familles de c<strong>la</strong>sse moyenne... Vous<br />
imaginez les travaux qui restent à faire <br />
Je m’appelle Hamid Fadhel, j’ai eu mes 33 ans en<br />
2011... Et, je n’en veux plus de ces projets. Nos enfants<br />
se trouveront devant les mêmes problèmes.<br />
Père Gilles Nico<strong>la</strong>s<br />
Le père Gilles Nico<strong>la</strong>s nous a quittés le<br />
dimanche 18 septembre à Lyon, où il était<br />
allé pour se soigner. Les obsèques présidées<br />
par Mgr Gabriel Piroird, ont eu lieu dans <strong>la</strong><br />
chapelle du Prado le vendredi 23 septembre.<br />
Mgr Teissier, qui a travaillé de longues années avec lui,<br />
fut délégué par le diocèse d’Alger pour y participer,<br />
ainsi que Jean-Pierre Henry, son successeur comme<br />
économe diocésain. Une messe fut ensuite célébrée à <strong>la</strong><br />
Basilique Notre-Dame d’Afrique le 30 septembre, et tout<br />
le diocèse s’est retrouvé autour d’Odile et Jean Lacour,<br />
sa sœur et son beau-frère, ainsi que de nombreux amis<br />
pour un dernier adieu. Cinquante ans de prêtrise bien<br />
remplis et qui<br />
se sont arrêtés<br />
brusquement, nous<br />
surprenant tous.<br />
Un livret est disponible<br />
à l’archevêché<br />
et téléchargeable<br />
sur le site<br />
internet de l’église<br />
d’Algérie.<br />
P.S. Marie-Danièle<br />
actualité des diocèses<br />
pax concordia
ACTUALITÉ DES DIOCÈSES<br />
Diocèse d’Oran<br />
De nouvelles religieuses maliennes<br />
Sœur Viviane Traoré a reçu une nouvelle affectation<br />
dans son pays, le Mali, elle va se<br />
préparer à son engagement définitif dans <strong>la</strong><br />
congrégation des Filles du Cœur Immaculé<br />
de Marie et deux nouvelles religieuses sont<br />
arrivées avec une postu<strong>la</strong>nte et une étudiante. C’est<br />
vivifiant pour notre communauté que <strong>la</strong> présence de<br />
ces jeunes joyeuses et simples qui se sont rapidement<br />
impliquées dans les activités possibles : <strong>la</strong> chorale paroissiale,<br />
les bibliothèques, le Centre Diocésain comme<br />
adjointe de <strong>la</strong> nouvelle directrice, sœur Maïsy Reding,<br />
l’attention aux ma<strong>la</strong>des, le Centre aéré du mardi,<br />
<strong>la</strong> présence au quartier, l’université.<br />
Une journée diocésaine<br />
Le vendredi 28 octobre, les communautés<br />
de l’intérieur ont rejoint les paroissiens<br />
d’Oran pour une célébration festive et<br />
ample : <strong>la</strong> « rentrée » diocésaine. Tous les<br />
prêtres entouraient notre évêque avec Mgr<br />
Henri Teissier, heureux de célébrer pour <strong>la</strong> première<br />
fois dans <strong>la</strong> cathédrale rénovée, comble ce jourlà.<br />
Les textes de <strong>la</strong> fête des apôtres Simon et Jude,<br />
commentés par le P. Georger, fondaient dans <strong>la</strong> foi<br />
notre rencontre. Son homélie fut suivie d’une <strong>la</strong>rge<br />
présentation de <strong>la</strong> vie dans le diocèse pour l’information<br />
et <strong>la</strong> communion de tous, du Conseil de Pastorale<br />
qui se réunit autour du thème de <strong>la</strong> mission de notre<br />
église, ici aux conférences mensuelles, sans oublier <strong>la</strong><br />
formation féminine, les bibliothèques, l’aumônerie<br />
des étudiants, l’attention aux migrants, <strong>la</strong> visite des<br />
prisonniers, les activités caritatives, <strong>la</strong> rencontre des<br />
travailleurs expatriés, l’accueil des pentecôtistes et des<br />
coptes. Et, bien sûr, chaque communauté religieuse,<br />
chaque famille, chacune et chacun ont des voisins<br />
et des amis avec lesquels se tissent des re<strong>la</strong>tions<br />
d’attention, d’échanges et de respect qui préparent le<br />
Royaume de Dieu. La prière universelle, en ang<strong>la</strong>is et<br />
en français, était construite à <strong>la</strong> manière des louanges<br />
de saint François. Un pique-nique de sandwiches<br />
et fruits fut un bon moment de convivialité avant le<br />
rassemblement dans <strong>la</strong> salle de conférences pour une<br />
commémoration de l’événement d’Assise.<br />
Les travailleurs expatriés<br />
Autour de <strong>la</strong> petite ville côtière de Mers<br />
el Hadjadj, que ses habitants appellent<br />
toujours Port-aux-Poules, à cinquante<br />
kilomètres d’Oran sur <strong>la</strong> route de<br />
Mostaganem, se sont imp<strong>la</strong>ntées des<br />
sociétés multinationales qui transforment les jolies<br />
p<strong>la</strong>ges en immenses complexes industriels : Daewoo<br />
construit une fabrique d’ammoniac et une usine de<br />
liquéfaction du gaz, Saipem une digue, une société<br />
singapourienne une usine de dessalement d’eau de<br />
mer. Les travailleurs expatriés y sont peut-être six<br />
mille, Pakistanais, Bengalis, Népa<strong>la</strong>is, Indiens, Italiens,<br />
Coréens… pour <strong>la</strong> plupart enfermés dans leur base de<br />
vie. Les Philippins ont pris contact avec <strong>la</strong> paroisse et<br />
ont demandé <strong>la</strong> messe : un vendredi par mois, ils sont<br />
deux cents dans un camp, cinq cents dans un autre à<br />
se rassembler pour une célébration joyeuse et dense,<br />
animée par une chorale, qui est un moment intense<br />
de foi et de communion.<br />
P. Thierry Becker<br />
« Chrétiens et Musulmans : une vie ensemble à partager sur les deux rives de <strong>la</strong> Méditerranée »<br />
Le père Christophe Roucou, directeur du Secrétariat des évêques de France pour les Re<strong>la</strong>tions avec l’Is<strong>la</strong>m (SRI),<br />
a effectué fin octobre une tournée de conférences-débats à l’invitation du réseau des Centres Culturels Français,<br />
principalement en Oranie et dans le Constantinois, où il était également invité à donner une conférence à<br />
l’Université is<strong>la</strong>mique. On trouvera sur le site de l’Église d’Algérie le texte de cette dernière conférence.
Diocèse de Constantine et Hippone<br />
Après <strong>la</strong> pause de l’été, le diocèse n’a pas tardé à reprendre ses activités. Les<br />
réunions se sont succédées à bon rythme : évaluations des activités de l’été,<br />
conseil restreint de l’évêque, réunion des animateurs en pastorale, conseil<br />
épiscopal, groupe de partage des prêtres…<br />
Du côté des étudiants<br />
Les nombreux étudiants zambiens venus<br />
étudier le français à Constantine ayant enfin<br />
eu leur transfert dans les villes universitaires<br />
du pays où ils doivent continuer leurs<br />
études, un nouveau groupe venant de<br />
Tanzanie a pris le re<strong>la</strong>is.<br />
Les différentes facultés ayant à peine fait leur rentrée,<br />
tous les étudiants du diocèse étaient invités à<br />
une rencontre à Constantine du 27 au 29 octobre<br />
sous <strong>la</strong> devise « Pèlerins de <strong>la</strong> vérité, Pèlerins de <strong>la</strong><br />
paix ». La réponse fut massive car ils furent plus de<br />
quatre-vingt à répondre à l’invitation autour des<br />
cinq aumôniers des étudiants du diocèse. On se<br />
demande encore comment tout ce monde a trouvé<br />
à se loger dans notre modeste Bon Pasteur !<br />
La nouveauté fut que les étudiants avaient euxmêmes<br />
pris en charge l’organisation de <strong>la</strong> rencontre.<br />
Une quinzaine s’était réunie à Skikda au mois<br />
de septembre pour en prévoir le déroulement et<br />
se charger d’organiser les différents services. Tous<br />
les participants ont apprécié l’implication d’un plus<br />
grand nombre.<br />
Le père Francis témoigna jeudi soir de ce que signifiait le<br />
pèlerinage et le père Jean-Marie apporta quelques éc<strong>la</strong>irages<br />
personnels, le vendredi matin, sur le lien entre <strong>la</strong><br />
vérité et <strong>la</strong> paix. La pause de midi ce jour-là fut consacrée<br />
au jeûne et au silence pour entrer dans ce climat<br />
de paix.<br />
L’après-midi du même jour fut consacrée à l’accueil<br />
d’amis musulmans dont il est rendu compte dans une<br />
autre partie de ce numéro.<br />
La veillée fut l’occasion d’entendre les témoignages des<br />
représentants du diocèse aux journées mondiales de <strong>la</strong><br />
jeunesse de Madrid, en août dernier et de recevoir <strong>la</strong><br />
lettre que les évêques ont adressée aux étudiants pour<br />
cette rentrée universitaire, avant une soirée culturelle et<br />
artistique représentative de tout le continent.<br />
L’auteur de ces lignes est encore admiratif de <strong>la</strong> participation<br />
des étudiants passant spontanément, selon ce<br />
qui leur était proposé de vivre, du recueillement le plus<br />
impressionnant à l’expression déchaînée de leur vitalité.<br />
Merci aux uns et aux autres pour leur participation.<br />
La vie des paroisses<br />
À Constantine, <strong>la</strong> paroisse s’est dotée d’un conseil paroissial<br />
qui organise, surtout le samedi, les activités les<br />
plus variées : cours d’arabe, taikido, communication,<br />
liturgie, formation, du sport et de <strong>la</strong> culture ainsi qu’un<br />
groupe Caritas.<br />
Il publie même une lettre d’information intitulée « <strong>la</strong> voix<br />
du Bon Pasteur ».<br />
À Béjaïa, en attendant que le prêtre pressenti pour assumer<br />
<strong>la</strong> tâche du curé obtienne son visa, les prêtres du<br />
diocèse parcourent des centaines de kilomètres, chaque<br />
vendredi, pour assurer l’eucharistie et les formations nécessaires<br />
aux catéchumènes et aux néophytes. Un comité<br />
paroissial est en train de se mettre en route pour<br />
coordonner les activités indispensables.<br />
P. Jean-Marie Jehl<br />
actualité des diocèses<br />
pax concordia
ACTUALITÉ DES DIOCÈSES<br />
Diocèse de Laghouat Ghardaïa<br />
Du nouveau au Centre Culturel et de Documentation Saharienne<br />
(CCDS) de Ghardaïa<br />
Des travaux …<br />
De grands travaux sont en cours pour accroître<br />
<strong>la</strong> capacité d’accueil de <strong>la</strong> bibliothèque de<br />
recherche. Spécialisée dans le domaine<br />
du Sahara, elle était devenue trop petite<br />
pour répondre aux nombreuses demandes<br />
des universitaires de Ghardaïa et d’un peu partout en<br />
Algérie. Malgré les travaux, une nouvelle année de travail<br />
a commencé tant à <strong>la</strong> bibliothèque de prêt que pour les<br />
cours de <strong>la</strong>ngues et <strong>la</strong> poursuite de <strong>la</strong> numérisation de <strong>la</strong><br />
photothèque.<br />
Bienvenue à tous !<br />
Krzysztof Sto<strong>la</strong>rski (Pères B<strong>la</strong>ncs)<br />
La mise en valeur de <strong>la</strong> photothèque<br />
Nous recevons au Centre Culturel et de<br />
Documentation Saharienne (CCDS) une jeune<br />
architecte faisant une thèse sur l’urbanisme et<br />
l’habitat dans les villes du Mzab. Elle recherche<br />
des photos pour illustrer son travail et pense<br />
le compléter par une exposition. Elle repart avec un DVD<br />
contenant les aperçus de 450 photos de <strong>la</strong> fin du XIX e à <strong>la</strong><br />
fin du XX e siècle, à partir desquels elle pourra sélectionner<br />
les photos à publier. Si nécessaire, elle pourra poursuivre sa<br />
recherche sur le site www.photoccdsGhardaïa.org.<br />
Ce scénario est encore de <strong>la</strong> fiction mais c’est le résultat<br />
auquel nous aimerions<br />
arriver d’ici quelques<br />
temps. La collection de<br />
photos est bien réelle.<br />
Environ 28 000 clichés<br />
dont les plus anciens sont<br />
de 1895, sur différents<br />
supports : des p<strong>la</strong>ques de<br />
verre (5 600),<br />
des négatifs<br />
Ksar de Ghardaïa (1899)<br />
(6 500), des<br />
tirages papier<br />
(9 000) et des diapositives (7 000). Tous ces<br />
clichés réalisés par des pères ou des frères<br />
ont été rassemblés à l’évêché.<br />
Un trésor qui dort dans une armoire en bois<br />
au fond d’une bibliothèque ! De quoi faire<br />
rêver historiens, ethnologues, géographes,<br />
et certainement bien d’autres encore qui<br />
s’intéressent au Sahara, à ses popu<strong>la</strong>tions,<br />
son mode de vie,<br />
ses coutumes.<br />
Les responsables<br />
du CCDS ont<br />
formé le projet<br />
de numériser les<br />
photos.<br />
Le projet a trois<br />
aspects : <strong>la</strong> numérisation<br />
et<br />
l’archivage des fichiers,<br />
<strong>la</strong> conservation<br />
des originaux<br />
dans des<br />
Dans <strong>la</strong> palmeraie de Bounoura (1899)<br />
supports adaptés et enfin <strong>la</strong> mise à disposition avec des<br />
moyens de recherche efficaces.<br />
Toutes les photos ont été référencées par le père<br />
Colignon et ont chacune un numéro, une légende et<br />
pour certaines une date. Cependant, avant de se <strong>la</strong>ncer<br />
dans le travail de numérisation, il est nécessaire de cerner<br />
tous les aspects techniques liés aux matériels nécessaires<br />
(scanners, stockage des fichiers, ordinateurs). Des<br />
connaissances sur <strong>la</strong> numérisation sont aussi à acquérir<br />
pour obtenir une qualité en rapport avec <strong>la</strong> valeur de<br />
<strong>la</strong> collection. Et rien ne sert d’avoir numérisé 28 000<br />
clichés s’ils ne sont pas organisés de manière qu’on<br />
puisse facilement trouver les photos qui répondent à<br />
une demande précise. Ce<strong>la</strong> nécessite d’avoir un logiciel<br />
adapté et d’avoir saisi toutes les informations connues<br />
sur chacune des photos : légende, date, lieu, mots clés,<br />
etc.<br />
Lorsque tout ce<strong>la</strong> aura été fait, <strong>la</strong> collection pourrait<br />
continuer à dormir. Pour éviter ce<strong>la</strong>, il faudra <strong>la</strong> faire<br />
connaître aux personnes qui peuvent être intéressées,<br />
<strong>la</strong> mettre en ligne sur<br />
internet… Et s’il y a<br />
des demandes, ce que<br />
nous espérons, régler<br />
les questions juridiques<br />
de propriété, de<br />
tarifs, …<br />
Alors, notre jeune<br />
architecte pourra<br />
présenter une thèse<br />
richement illustrée !<br />
Patrick de Boissieu<br />
P<strong>la</strong>ce du marché de Ghardaïa (1899)
C’est un couple d’artistes dans un vil<strong>la</strong>ge de Bretagne. De sa<br />
plume, l’un écrit, l’autre dessine. Régulièrement, ils prennent<br />
<strong>la</strong> route et vont à <strong>la</strong> rencontre d’un pays et d’un peuple. L’un<br />
questionne du regard en prenant des photos ; au retour, il<br />
dessine et peint à partir de celles-ci. L’autre questionne aussi<br />
et quête des réponses à leur curiosité ; au retour, elle rédige.<br />
C<strong>la</strong>ire et Reno ont fait plusieurs voyages en Algérie, dans <strong>la</strong> plupart de ses<br />
régions. Plusieurs de nos lecteurs les ont rencontrés, guidés parfois. En<br />
retour nous est offert ce magnifique ouvrage, qui tient tout à <strong>la</strong> fois du<br />
carnet de voyage, de l’album photo et du recueil de croquis et dessins.<br />
On y retrouve l’Algérie éternelle -ses monuments et paysages urbains<br />
ou ruraux- et l’Algérie vivante -ses fêtes et ses scènes de rue, souks et<br />
personnages pris sur le vif. De nombreuses cartes permettent de se repérer,<br />
dans chacune des sept parties : Alger, l’Oranie, Sur <strong>la</strong> route des ksour, les<br />
Aurès, le Constantinois, <strong>la</strong> Kabylie et le Grand Sud.<br />
Le texte ne vient pas seulement éc<strong>la</strong>irer les illustrations. Informatif sans<br />
tomber dans l’érudition, vivant sans en rester à l’anecdote, agrémenté de<br />
temps à autre par les impressions de l’auteur, bien écrit, il est de lecture<br />
intéressante et agréable.<br />
De présentation originale, l’ouvrage d’art renferme aussi de <strong>la</strong>rges pages à<br />
déployer et des petits livrets à déguster.<br />
Bref, un très beau cadeau à faire à d’autres … ou à vous-même !<br />
Michel Guil<strong>la</strong>ud<br />
Algérie « Soyez les<br />
bienvenus »<br />
Voyages de <strong>la</strong> Méditerranée au<br />
Sahara<br />
C<strong>la</strong>ire & Reno MARca<br />
avec <strong>la</strong> participation de Maïssa Bey<br />
Aubanel, 2008<br />
des livres à lire<br />
Voici un livre qui dénonce <strong>la</strong> manipu<strong>la</strong>tion des mots, les euphémismes<br />
qu’on emploie en politique pour masquer les choses cruelles<br />
qu’on inflige aux hommes, propres à les bercer, à les berner, à leur<br />
faire accepter l’inacceptable. Camp de concentration, disparition,<br />
guerre, ennemis ne sont jamais nommés comme tels par exemple.<br />
C’est pourtant le motif qui va déterminer un homme de 21 ans à quitter son<br />
pays. Un jeune homme dont l’enfance a été brisée par l’envoi de son père en<br />
déportation autant que par son retour, où il a à peine apparence humaine. De ce<br />
père revenu « taiseux », le fils découvre peu à peu l’humanité mystérieuse, invisible,<br />
profonde, sous un silence absolu. Son père mort, le fils s’apprête à affronter<br />
les avanies de l’errance.<br />
Un autre aspect de ce livre est celui que pose, à <strong>la</strong> conscience du jeune homme,<br />
<strong>la</strong> réalité du mal en face de ce qui lui semble le silence de Dieu. Il a des mots durs<br />
à l’égard de certaines notions religieuses : le Dieu biblique refusé car « il ne rit<br />
jamais », <strong>la</strong> mort du Christ présentée comme un mythe, le courage du marin plus<br />
efficace que <strong>la</strong> prière.<br />
Il me semble que ce livre est imprégné de valeurs religieuses profondes et universelles<br />
: l’amour familial, le désintéressement et le dévouement, <strong>la</strong> solidarité<br />
des pauvres, l’intelligence responsable du marin qui emmène le fugitif et l’admiration<br />
du narrateur pour ceux qui se sont <strong>la</strong>issés tuer : Socrate, Giordano Bruno,<br />
Gandhi, l’homme du Golgotha…<br />
La question que je pose et qui mérite échange entre nous : Dieu est-t-il silence<br />
en face du mal Ou bien parle-t-il, agit-t-il ici aujourd’hui et comment <br />
Chantal Laurette<br />
L’ombre des choses<br />
à venir<br />
Seuil, 2011<br />
pax concordia<br />
Kossi EFOUI<br />
29
des livres à lire<br />
Rachid-Helmut appelé Rachel et Malek-Ulrich appelé Malrich<br />
sont deux frères de mère algérienne et de père allemand. Ils ont<br />
été élevés en France dans une cité par l’un de leurs oncles et y<br />
vivent toujours. En 1994, leurs parents, restés au bled, meurent<br />
égorgés par des terroristes. Ils découvrent alors, que leur père,<br />
devenu un respectable et respecté moudjahid, a aussi été un nazi actif dans<br />
les camps de concentration.<br />
Même si, comme le dit l’un des personnages du roman, « nous ne sommes<br />
pas responsables ni comptables des crimes de nos parents », il est difficile à<br />
l’un comme à l’autre de continuer à vivre comme si de rien n’était.<br />
Le livre nous fait suivre le parcours des deux frères en entre<strong>la</strong>çant leurs<br />
journaux. L’aîné n’aura de cesse de décortiquer le système nazi pour ressentir<br />
au plus profond de lui l’horreur qui s’est jouée à cette époque.<br />
Le second, fort de l’expérience de son frère, ne peut s’empêcher de<br />
rapprocher nazisme et intégrisme et de comparer les deux systèmes. L’un<br />
efficace, « industriel », l’autre émergeant et proliférant insidieusement dans<br />
nos sociétés sous couvert de respect des différences et de liberté individuelle.<br />
Il nous interpelle face à <strong>la</strong> montée des intégrismes et se demande comment<br />
résister, comment alerter, faire prendre conscience au plus grand nombre du<br />
mal qui se répand et lutter pacifiquement contre ces idées.<br />
Son parallèle entre nazisme et intégrisme est saisissant et toujours d’actualité.<br />
Le livre date de 2008.<br />
Le vil<strong>la</strong>ge de<br />
l’Allemand<br />
ou le journal des frères<br />
Schiller<br />
Boualem SANSAL<br />
Gallimard, 2008<br />
Marie-Laure Watier<br />
Né en 1938 à Alger, Jean-Paul Grangaud vit toujours dans <strong>la</strong> capitale<br />
aujourd’hui nommée El-Djazair.<br />
Il se livre ici à A. Djelfaoui dans un récit autobiographique qui<br />
intéressera non seulement ses enfants et petits-enfants, mais<br />
beaucoup de lecteurs et à différents titres :<br />
• L’itinéraire du « Professeur Grangaud », pédiatre, praticien dans divers hôpitaux<br />
de <strong>la</strong> capitale et directeur aujourd’hui de <strong>la</strong> prévention au ministère<br />
de <strong>la</strong> Santé, permet de partager sa passion pour les questions de santé publique<br />
et de suivre les évolutions du monde médical algérien depuis 50 ans.<br />
• Le livre est aussi une relecture de l’évolution du pays sur cette période, et<br />
se veut explicitement un encouragement à ce que d’autres fassent semb<strong>la</strong>ble<br />
anamnèse pour générer de nouveaux é<strong>la</strong>ns.<br />
• Il témoigne enfin de l’insertion d’un homme, pragmatique plus que politique,<br />
chrétien protestant engagé, européen d’origine algérien de plusieurs<br />
générations, dans l’Algérie musulmane indépendante, de sa foi, de ses émotions,<br />
de ses amitiés.<br />
Le ton est simple et modeste nonobstant l’impressionnante qualité du<br />
parcours ; <strong>la</strong> relecture retrace bien les enthousiasmes comme les difficultés,<br />
retenant le positif sans jamais cultiver l’amertume. Le réalisme n’empêche<br />
pas l’espérance. On lui souhaite de garder longtemps le même souffle,<br />
pour son pays l’Algérie, comme pour ses autres passions : <strong>la</strong> médecine, sa<br />
famille… le bridge ou le foot !<br />
Michel Guil<strong>la</strong>ud<br />
Grangaud<br />
D’Alger à El Djazaïr<br />
Abderrahman<br />
DJELFAOUI<br />
Editions Casbah, 2000
Nouvelle adresse du site de l’Église d’Algérie<br />
Vous trouverez, désormais, le site internet de l’Église<br />
d’Algérie à l’adresse suivante :<br />
http://www.eglise-catholique-algerie.org<br />
Ben Smen : Repères sur les religions et<br />
médecines traditionnelles<br />
Du lundi 6 février à 14 h au jeudi 9 février à 14 h :<br />
Session pour donner des repères sur les religions,<br />
les croyances et les médecines traditionnelles, aide<br />
à comprendre certains liens vécus par les personnes<br />
dans nos différentes cultures. Animée par un spécialiste<br />
de ces questions, d’Afrique sub-saharienne, à<br />
Ben Smen, centre spirituel des jésuites à Alger.<br />
Renseignements : bensmendz@yahoo.fr<br />
Is<strong>la</strong>m et modernité : enjeux aujourd’hui,<br />
surtout en Algérie<br />
Session organisée à Ghardaïa par le diocèse du<br />
Sud, du 9 au 11 février 2012. Renseignements et<br />
inscriptions : sec.evGhardaïa@yahoo.fr<br />
Retraite-pèlerinage pour bons marcheurs<br />
Sur les traces de Charles de Foucauld, de Tamanrasset<br />
à l’Assekrem, du 17 au 27 mars, pour les nouveaux<br />
arrivants de moins de 50 ans. Renseignements<br />
et inscriptions : sec.evGhardaïa@yahoo.fr<br />
Dialogue interreligieux et liturgie dominicale<br />
Il y a plus d’un an déjà, nous nous sommes <strong>la</strong>ncés dans<br />
l’aventure, merveilleuse et profondément spirituelle,<br />
de faire ressortir dans <strong>la</strong> liturgie dominicale tout ce qui<br />
pourrait avoir un lien avec le dialogue interreligieux.<br />
Pèlerinage à travers <strong>la</strong> prière catholique mais qui nous<br />
conduit aux frontières de notre église, de nos dogmes<br />
et de nos habitudes. Les indications que vous trouverez,<br />
ici, visent à être un point de départ.<br />
Sous format numérique, le fascicule pour l’année<br />
B // 2011-2012 est sorti. Nos amis pères b<strong>la</strong>ncs qui<br />
ont rédigé <strong>la</strong> 1 ère partie vous l’enverront. Ils seront<br />
heureux de col<strong>la</strong>borations pour poursuivre.<br />
S’adresser à : pbprovmaghreb@yahoo.fr<br />
bloc-notes<br />
CERNA<br />
La CERNA a procédé au renouvellement de son bureau. A compter du 1 er mars 2012, seront :<br />
Président : Mgr Maroun LAHHAM, archevêque de Tunis<br />
Vice-président : Mgr Paul DESFARGES, évêque de Constantine et Hippone<br />
Membre du Bureau : Mgr Vincent LANDEL, archevêque de Rabat.<br />
Le père Daniel NOURISSAT a été confirmé comme secrétaire général.<br />
Elle a désigné Mgr Vincent LANDEL comme délégué à <strong>la</strong> CEFTL (Commission Épiscopale Francophone pour<br />
les Traductions Liturgiques) et Mgr Paul DESFARGES délégué au SCEAM (Symposium des Conférences<br />
Épiscopales d’Afrique et de Madagascar). La prochaine réunion de <strong>la</strong> CERNA aura lieu à Mazara del Vallo<br />
(Italie) du 17 au 22 novembre 2012.<br />
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d’échéance de votre abonnement<br />
mentionnée sur l’étiquette-adresse<br />
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pour une année (4 numéros)<br />
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