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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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consommation est une jouissance, on peut s’en consoler ; mais quand elle-même est un mal,<br />

il faut convenir qu’un semblable système est déplorable.<br />

C’est ce qui arrive partout où l’on complique la législation. Le travail des gens de loi,<br />

devenant plus considérable et plus difficile, occupe plus de monde et se paie plus cher. Qu’y<br />

gagne-t-on D’avoir ses droits mieux défendus Non, certes : la complication des lois est<br />

bien plutôt favorable à la mauvaise foi, en lui offrant de nouveaux subterfuges, tandis<br />

qu’elle n’ajoute presque jamais rien à la solidité du bon droit. On y gagne de plaider plus<br />

souvent et plus longtemps.<br />

On peut appliquer le même raisonnement aux places superflues instituées dans<br />

l’administration publique. Administrer ce qui devrait être abandonné à soi-même, c’est faire<br />

du mal aux administrés, et leur faire payer le mal qu’on leur fait comme si c’était un bien 106 .<br />

107<br />

Il est donc impossible d’admettre l’opinion de Garnier , qui conclut de ce que le travail<br />

des médecins, des gens de loi et autres personnes semblables, est productif, qu’il est aussi<br />

avantageux à une nation de le multiplier que tout autre. On est heureux sans doute de<br />

pouvoir se procurer un bon médecin lorsqu’on n’a pu éviter une maladie ; mais il vaut<br />

mieux encore n’être pas malade. Compliquer les lois pour les faire débrouiller par les<br />

légistes, c’est se donner un mal pour prendre la peine de le guérir. Les produits immatériels,<br />

comme les autres, ne sont des produits qu’autant que l’avantage qui en résulte ne peut être<br />

acquis à moins de frais ; or, la voie la plus simple d’être affranchi d’un inconvénient, c’est<br />

de ne pas s’y soumettre de propos délibéré.<br />

Les produits immatériels sont le fruit de l’industrie humaine, puisque nous avons appelé<br />

industrie toute espèce de travail productif. On voit moins clairement comment ils sont en<br />

même temps le fruit d’un capital. Cependant la plupart de ces produits sont le résultat d’un<br />

talent ; tout talent suppose une étude préalable, et aucune étude n’a pu avoir lieu sans des<br />

avances.<br />

Pour que le conseil du médecin ait été donné et reçu, il a fallu que le médecin ou ses<br />

parents aient fait, pendant plusieurs années, les frais de son instruction ; il a fallu que<br />

l’étudiant ait été entretenu tout le temps qu’ont duré ses études ; il a fallu acheter des livres,<br />

faire des voyages peut-être : ce qui suppose l’emploi d’un capital précédemment<br />

accumulé 108 .<br />

Il en est de même de la consultation de l’avocat, de la chanson du musicien, etc. : ces<br />

produits ne peuvent avoir lieu sans le concours d’une industrie et d’un capital. Le talent<br />

d’un fonctionnaire public lui-même est un capital accumulé. Les frais nécessaires pour<br />

élever un ingénieur civil ou militaire sont du même genre que les avances qu’il a fallu faire<br />

pour élever un médecin. Il est même à supposer qu’on trouve bien placés les fonds qui<br />

mettent un jeune homme en état de devenir fonctionnaire public, et bien payés les travaux<br />

qui composent son industrie, puisqu’il y a dans presque toutes les parties de l’administration<br />

plus de postulants que de places, dans les pays même où les places sont plus multipliées<br />

qu’elles ne devraient l’être.<br />

106 Que penser, d’après cela, de tant de phrases qu’on entend prononcer, analogues à celle-ci : Telle formalité,<br />

tel impôt produisent toujours un bien, qui est de faire vivre un bon nombre d’employés, de percepteurs <br />

107 Traduction de Smith, note 20.<br />

108 Pour ne pas anticiper sur ce que je dois dire en traitant des profits de l’industrie et des capitaux, je me<br />

bornerai à faire remarquer, en passant, que ce capital est placé à fonds perdu sur la tête du médecin, et que ses<br />

honoraires ne sont pas équitablement réglés, s’ils ne comprennent pas, outre la récompense de son travail actuel<br />

et celle de son talent (qui est un agent dont la nature l’a gratifié), un intérêt du capital qui fut consacré à son<br />

instruction ; et que cet intérêt ne doit pas être simple, mais viager.

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