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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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On voit que les moyens d’étendre et d’accroître ses richesses sont, pour chaque nation,<br />

bien moins bornés que ne l’imaginaient les économistes. Une nation, selon eux, ne pouvait<br />

produire annuellement d’autres valeurs que le produit net de ses terres, et il fallait que làdedans<br />

se trouvassent, non seulement l’entretien des propriétaires et des oisifs, mais celui<br />

des négociants, des manufacturiers, des artisans, et les consommations du gouvernement ;<br />

tandis qu’on vient de voir que le produit annuel d’une nation se compose non seulement du<br />

produit net de son agriculture, mais du produit brut de son agriculture, de ses manufactures<br />

et de son commerce réunis. N’a-t-elle pas, en effet, à consommer la valeur totale, c’est-àdire,<br />

la valeur brute de tout ce qu’elle a produit Une valeur produite en est-elle moins une<br />

richesse parce qu’elle doit être nécessairement consommée Sa valeur ne vient-elle même<br />

pas de ce qu’elle doit être consommée 56 <br />

L’anglais Steuart, qu’on peut regarder comme le principal écrivain du système exclusif,<br />

du système qui suppose que les uns ne s’enrichissent que de ce que les autres perdent,<br />

Steuart ne s’est pas moins mépris de son côté, lorsqu’il a dit qu’une fois que le commerce<br />

extérieur cesse, la masse des richesses intérieures ne peut être augmentée. Il semblerait que<br />

la richesse ne peut venir que du dehors. Mais au dehors, d’où viendrait-elle Encore du<br />

dehors. Il faudrait donc, en la cherchant de dehors en dehors, et en supposant les mines<br />

épuisées, sortir de notre globe ; ce qui est absurde.<br />

C’est sur ce principe évidemment faux que Forbonnais, aussi, bâtit son système<br />

58<br />

prohibitif , et, disons-le franchement, qu’est fondé le système exclusif des négociants peu<br />

éclairés, celui de tous les gouvernements de l’Europe et du monde. Tous s’imaginent que ce<br />

qui est gagné par un particulier est nécessairement perdu par un autre, que ce qui est gagné<br />

par un pays est inévitablement perdu par un autre pays ; comme si les choses n’étaient pas<br />

susceptibles de croître en valeur, et comme si la propriété de plusieurs particuliers et des<br />

nations ne pouvait pas s’accroître sans être dérobée à personne. Si les uns ne pouvaient être<br />

riches qu’aux dépens des autres, comment tous les particuliers dont se compose un état<br />

pourraient-ils en même temps être plus riches à une époque qu’à l’autre, comme ils le sont<br />

évidemment en France, en Angleterre, en Hollande, en Allemagne, comparativement à ce<br />

qu’ils étaient Comment toutes les nations en même temps seraient-elles de nos jours plus<br />

opulentes et mieux pourvues de tout, qu’elles ne l’étaient au septième siècle D’où<br />

auraient-elles tiré les richesses qu’elles possèdent maintenant, et qui alors n’étaient nulle<br />

part Serait-ce des mines du nouveau-monde Mais elles étaient déjà plus riches avant que<br />

l’Amérique fût découverte. D’ailleurs, qu’ont produit les mines du nouveau-monde Des<br />

valeurs métalliques. Mais les autres valeurs que possèdent les nations de plus qu’au moyenâge,<br />

d’où les ont-elles tirées Il est évident que ce sont des richesses créées.<br />

Concluons donc que les richesses, qui consistent dans la valeur que l’industrie humaine,<br />

à l’aide des instruments qu’elle emploie, donne aux choses, que les richesses, dis-je, sont<br />

susceptibles d’être créées, détruites, d’augmenter, de diminuer dans le sein même de chaque<br />

nation, et indépendamment de toute communication au dehors, selon la manière dont on s’y<br />

prend pour opérer de tels effets. Vérité importante, puisqu’elle met à la portée des hommes<br />

les biens dont ils sont avides avec raison, pourvu qu’ils sachent et qu’ils veuillent employer<br />

les vrais moyens de les obtenir. Le développement de ces moyens est le but de cet ouvrage.<br />

57<br />

56 Voir l’Épitomé qui termine cet ouvrage, au mot Produit net.<br />

57 De l’Économie <strong>politique</strong>, livre II, chap. 26.<br />

58 Éléments de Commerce.

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