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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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C’est ainsi que les capitaux amassés par l’industrie et l’économie des particuliers dans<br />

tous les coins du monde, sont pompés par les traitants et livrés aux puissances ; c’est ainsi<br />

que des puissances qui n’avaient aucun crédit, ont pu cependant emprunter à des conditions<br />

que n’obtiennent pas toujours les particuliers les plus solvables : le roi de Naples à 94, en<br />

reconnaissant au prêteur un capital de 100 ; la Russie à 95 ½ ; l’Autriche à 96 ; la Prusse à<br />

99 ½ 485 .<br />

Il faut bien, dira-t-on, que l’état ait du crédit pour résister à une agression injuste, pour<br />

affermir son indépendance. Ce serait fort désirable assurément ; mais c’est précisément dans<br />

les occasions où les états ont besoin d’affermir leur indépendance ou d’asseoir leurs<br />

institutions, qu’ils peuvent le moins compter sur les traitants. Dans les querelles qu’on<br />

suscite aux nations, la cause la plus juste est, en général, la plus faible. Quiconque n’a pas<br />

pour soi la force est obligé d’avoir la raison. Ce n’est point cette cause qui sourit aux<br />

hommes uniquement animés d’intérêts pécuniaires ; ils se rangent du parti qui paie le<br />

mieux ; or, c’est celui qui dispose des forces matérielles de la société. Ils n’examinent point<br />

si un gouvernement respecte ou non les droits de l’humanité, s’il agit dans un sens opposé<br />

aux lumières acquises, s’il cherche à replonger les nations dans l’ignorance, la superstition<br />

et les désordres qui signalent, sans exception, les siècles précédents ; mais ils examinent si<br />

ce gouvernement a des législateurs complaisants pour donner un vernis légitime à l’impôt,<br />

et des soldats bien disciplinés pour le faire payer.<br />

En 1776, l’Angleterre trouvait des secours pour l’aider à soutenir ses injustes prétentions<br />

contre les états-Unis, et les états-Unis n’en trouvaient point pour défendre leur<br />

indépendance. En 1792, les puissances coalisées trouvaient de l’argent pour dicter des lois à<br />

la France ; et la France, poussée au désespoir, n’aurait pas conservé son indépendance sans<br />

les mesures violentes dont elle a eu tant à gémir plus récemment on a trouvé des millions<br />

pour plonger dans la dégradation les compatriotes du Cid ; et la partie mitoyenne, vertueuse<br />

et éclairée de ce peuple, a été livrée en proie à la partie fanatique et barbare.<br />

L’abus qu’on a fait du crédit, ou plutôt des moyens qui suppléent a crédit, a conduit le<br />

véritable publiciste, celui qui s’occupe des intérêts du public, à se demander à quoi tout cet<br />

appareil si vanté pouvait être bon. Il a jeté les yeux sur l’Angleterre, et il a vu une nation<br />

tellement obérée par les intérêts de sa dette, et les objets de la consommation tellement<br />

renchéris par les impôts, que le travail chez elle ne suffit plus à la classe indigente pour la<br />

faire subsister ; et qu’au sein de la plus admirable industrie et de l’activité la plus soutenue,<br />

la plupart des citoyens y sont constamment en butte aux plus cruelles privations 486 .<br />

paie ne lui coûte rien, parce qu’étant acheteuse et vendeuse tout à la fois, elle reçoit, par les mains d’un de ses<br />

agents, ce qu’un autre a déboursé pour elle. Pendant que le cours s’établit ainsi, d’autres capitalistes, dans le but<br />

de spéculer sur la hausse de cette rente, ou simplement de placer leurs accumulations, achètent et ne revendent<br />

pas. La même manœuvre s’exécute sur les différences places de l’Europe, jusqu’à ce que l’emprunt napolitain<br />

soit entièrement placé, et que la compagnie Samuel ait réalisé plusieurs millions de bénéfice.<br />

485 Voyez le cours des effets publics aux bourses de Londres et de Paris, au mois de juin 1824.<br />

486 On demande quelquefois comment, avec des frais de production aggravés par l’impôt, les Anglais peuvent<br />

vendre au-dehors à meilleur marché que des peuples moins surchargés. En premier lieu il y a des draw-backs, ou<br />

restitution de droits sur presque tous les grands objets d’exportation ; en second lieu, les droits d’entrée que les<br />

marchandises paient aux douanes étrangères, sont plus modérés pour les Anglais que pour d’autres nations, grâce<br />

aux soins de leur gouvernement ; enfin ce qui, pour le consommateur anglais, renchérit le plus les produits, sont<br />

les impôts qu’ils doivent supporter dans les dernières façons qu’ils reçoivent, et -notamment de la part des<br />

dérailleurs. Le prix du pain doit payer, indépendamment de sa part de l’impôt foncier, de la dixme, de la taxe des<br />

pauvres, de celle des chemins, etc., les impôts directs et indirects du meunier et du boulanger ; le prix des<br />

vêtements est souvent moins élevé par ce que coûte l’étoffe que par les énormes impôts de consommation que<br />

paient le marchand en détail, le tailleur, etc. Les acheteurs étrangers sont affranchis de cette portion des frais de<br />

production.

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