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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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À considérer les ressources d’un gouvernement, il mérite plus de confiance qu’un<br />

particulier. Les revenus d’un particulier peuvent lui manquer tout à coup, ou du moins en si<br />

grande partie, qu’il demeure hors d’état d’acquitter ses engagements. Des faillites<br />

nombreuses dans le commerce, des événements majeurs, des fléaux, des procès, des<br />

injustices, peuvent ruiner un particulier, tandis que les revenus d’un gouvernement se<br />

fondent sur des tributs imposés à un si grand nombre de contribuables, que les malheurs<br />

particuliers de ceux-ci ne peuvent compromettre qu’une faible portion du revenu public.<br />

Mais ce qui favorise singulièrement les emprunts que font les gouvernements, est bien<br />

moins la confiance qu’ils méritent ou qu’on leur accorde, que quelques autres circonstances<br />

accessoires qui sont dignes de toute l’attention des publicistes.<br />

Les fonds publics sont un placement plus connu, plus accessible qu’aucun autre. Tout le<br />

monde est admis à y porter ses épargnes. Nul placement n’exige moins de formalités, moins<br />

de précautions, moins de capacité dans le prêteur, et ne l’expose moins aux chicanes de la<br />

mauvaise foi. On en fait usage sans être obligé de mettre le public dans sa confidence, et<br />

sans autres frais que le paiement d’un courtage. On a de plus investi les placements dans les<br />

fonds publics, de tous les privilèges que peut conférer l’autorité souveraine. Pendant que le<br />

génie de la fiscalité exploite avec avidité les sources de presque tous les revenus, celle-ci a<br />

été mise à l’abri de ses atteintes. Nulle contribution n’est assise sur les rentes payées par<br />

l’état. Leur transmission a été affranchie des droits, aussi bien que des formalités qui<br />

accompagnent toute autre transmission. Ce fonds, aussi bien que ses intérêts, ont été<br />

déclarés insaisissables ; tellement qu’un créancier de l’état, criblé de dettes, peut<br />

tranquillement consommer ses revenus en bravant ses créanciers. S’il conçoit quelques<br />

inquiétudes sur la solvabilité du trésor, s’il arrive qu’il ait besoin de ses fonds, si quelque<br />

autre emploi les appelle, il lui suffit de vingt-quatre heures pour les réaliser ; il peut le faire<br />

obscurément ; la possibilité de vendre, lui fait regarder comme nul le danger de garder.<br />

Cependant tous ces privilèges, et ces moyens accessoires d’attirer les accumulations des<br />

particuliers dans le gouffre des dépenses publiques, se sont trouvés insuffisans dans<br />

beaucoup de cas. Il n’est personne qui ne sente que les gouvernements sont des débiteurs<br />

trop puissants pour n’être pas toujours un peu dangereux. Dans les conventions conclues<br />

entre eux et les particuliers, ils sont nécessairement juges en même temps que parties :<br />

comme dépositaires du pouvoir de faire des lois, ils peuvent déterminer l’époque et la<br />

manière dont, en leur qualité de débiteurs, ils devront s’acquitter ; le recours aux tribunaux<br />

est insuffisant contre eux, puisque les tribunaux sont les organes de l’autorité et les<br />

exécuteurs de la règle qu’il lui plaît d’établir ; enfin nulle contrainte ne peut être exercée<br />

contre le gouvernement, et, en dépit de sa bonne volonté, les tempêtes de la <strong>politique</strong><br />

peuvent le mettre hors d’état de s’acquitter.<br />

Ces considérations expliquent pourquoi, malgré tous les moyens employés pour soutenir<br />

leur crédit, ou plutôt pour y suppléer, ils ne trouvent pas en général des fonds à des<br />

conditions aussi avantageuses que de solides hypothèques ou une maison de commerce du<br />

premier rang. Plusieurs états auraient même été dans l’heureuse impossibilité de<br />

dépenserleurs revenus par anticipation, si l’Angleterre ne leur avait fourni un moyen d 4<br />

emprunter qui l 4 emporte en puissance sur tous les autres. Je veux parler du mode usité<br />

maintenant partout, de négocier les emprunts par souscription à des compagnies de traitants<br />

qui achètent les rentes de l’état en gros pour les revendre en détail 483 .<br />

483 Il parait que ce mode a été employé d’abord par Pitt, ministre à qui l’humanité a plus de reproches à faire<br />

qu’on ne pense.

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