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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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Ceux sur les revenus de qui retombent définitivement les contributions, sont les vrais<br />

contribuables, et les valeurs dont ils contribuent excèdent de beaucoup la somme des<br />

valeurs qui entrent véritablement aux mains des gouvernements, en y joignant même les<br />

frais de perception. Cet excédant de valeurs contribuées est d’autant plus considérable, que<br />

le pays est plus mal administré.<br />

Il est bon de rapprocher ce qui est dit ici des principes établis au chap 2 du livre ii, où<br />

l’on a vu la différence qui existe entre la cherté réelle et la cherté relative. La chertérésultant<br />

de l’impôt est une cherté réelle. C’est une moins grande quantité de produits obtenue pour<br />

une plus grande quantité de services productifs. Mais, indépendamment de cela, l’impôt<br />

occasionne ordinairement, et en même temps, un renchérissement des produits relativement<br />

à l’argent : c’est-à-dire qu’il fait payer les marchandises plus cher en monnaie. La raison en<br />

est que l’argent n’est point une production annuelle et courante comme celles qu’absorbe<br />

l’impôt. Sauf les cas où le gouvernement envoie de l’argent à l’étranger pour acquitter des<br />

subsides ou salarier des armées, il ne consomme pas de la monnaie : il reverse dans la<br />

société, par ses achats, la monnaie qu’il lève par l’impôt, sans y reverser la valeur de<br />

l’impôt 474 . Mais comme l’impôt paralyse une partie de la production, et opère une prompte<br />

destruction des produits qu’il n’empêche pas de naître, les impôts excessifs rendent les<br />

produits toujours plus rares par rapport à la monnaie, dont la quantité n’est pas diminuée par<br />

le fait de l’impôt. Or, toutes les fois que les marchandises en circulation deviennent plus<br />

rares par rapport à la quantité de monnaie en circulation, elles sont plus chères en argent.<br />

Il semblerait que cette surabondance de monnaie d’or et d’argent devrait contribuer à<br />

l’aisance publique. Point du tout ; car l’argent a beau être en plus grande proportion par<br />

rapport aux produits courans, chacun ne peut l’acquérir que par des produits de sa propre<br />

création, et c’est cette création même qui est dispendieuse et difficile.<br />

Au reste, quand les produits sont chers en argent, l’argent lui-même, ayant moins de<br />

valeur relative, ne tarde guère à s’écouler ; il devient plus rare qu’il n’était, parce qu’il se<br />

trouve moins de denrées à faire circuler ; et c’est ainsi qu’un pays écrasé d’impôts qui<br />

surpassent ses moyens de production, se trouve peu à peu privé d’abord de marchandises,<br />

ensuite d’argent, c’est-à-dire, de tout, et se dépeuple, comme il est arrivé en Espagne depuis<br />

200 ans ; à moins que des épargnes constantes ne balancent les capitaux qui s’altèrent, et<br />

qu’une industrie active ne fournisse plus de produits annuels que les consommations<br />

publiques n’en détruisent, comme en Angleterre.<br />

En étudiant avec soin ces principes, on comprendra comment les dépenses annuelles et<br />

véritablement gigantesques des gouvernements modernes, ont obligé les contribuables à un<br />

travail plus opiniâtre, puisque, indépendamment des productions que réclament leur<br />

entretien, celui de leurs familles, leurs plaisirs, les mœurs du pays, il faut qu’ils produisent<br />

encore ce que dévore le fisc, et ce que le fisc fait perdre sans le dévorer, valeur<br />

incontestablement énorme chez quelques grandes nations, mais impossible à évaluer.<br />

Cet excès, résultat graduel de systèmes <strong>politique</strong>s produire, en obligeant les hommes à<br />

tirer de plus grands services du concours des agents naturels ; et sous ce rapport, les impôts<br />

ont peut-être contribué au développement et au perfectionnement des facultés humaines ;<br />

aussi, lorsque les progrès de l’art social auront ramené les contributions publiques au niveau<br />

des véritables besoins des sociétés, on éprouvera un très grand bien-être résultant des<br />

progrès qui ont été faits dans l’art de produire. Mais si, par une suite des profusions où nous<br />

jettent des machines <strong>politique</strong>s abusives et compliquées, le système des impôts excessifs<br />

474 On en a vu la raison. Les achats qu’on fait avec l’argent de l’impôt sont des échanges, et non des<br />

restitutions.

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