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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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ne le paie pas en totalité), je ne me suis point arrêté à remarquer à quel période de la<br />

production le droit avait été demandé, et quels effets devaient résulter de cette circonstance,<br />

qui cependant mérite de nous arrêter quelques instants.<br />

Les produits augmentent successivement de valeur en passant entre les mains de leurs<br />

différents producteurs ; car les plus simples produits subissent bien des façons avant d’être<br />

au point de pouvoir être consommés. Un impôt n’est donc en proportion avec la valeur d’un<br />

produit que lorsqu’il est assis sur ce produit au moment seulement où il a acquis sa plus<br />

grande valeur, où il a subi toutes ses façons productives.<br />

Que si l’on fait payer dès l’origine à la matière première une contribution proportionnée,<br />

non pas à sa valeur actuelle, mais à celle qu’elle doit acquérir, alors on force le producteur<br />

aux mains de qui elle se trouve, à faire l’avance d’un impôt disproportionné avec la valeur<br />

qu’il manie ; avance gênante, remboursée avec peine par le producteur qui suit, et par les<br />

autres, jusqu’au dernier producteur, qui est à son tour imparfaitement remboursé par le<br />

consommateur.<br />

Il y a dans cette avance d’impôt un autre inconvénient : c’est que l’industrie, qui en est<br />

grevée, ne peut être conduite qu’au moyen de capitaux plus considérables que ne l’exige la<br />

nature de la production ; et que l’intérêt de ces capitaux, payé en partie par les producteurs,<br />

et en partie Pr les consommateurs, est une addition d’impôt dont le fisc ne profite pas 468 .<br />

L’expérience et le raisonnement conduisent ainsi à cette conséquence, opposée à celle<br />

des économistes, que la portion de l’impôt qui doit peser sur le revenu du consommateur, y<br />

retombe toujours avec d’autant plus de surcharge, que l’impôt est levé plus près des<br />

premiers producteurs.<br />

Les impôts directs et personnels, comme la capitation, assis sur les producteurs des<br />

denrées nécessaires, et les impôts qui portent sur les denrées nécessaires elles-mêmes, ont<br />

cet inconvénient au plus haut degré ; ils obligent chaque producteur à faire l’avance de<br />

l’impôt personnel de tous les producteurs qui l’ont précédé ; la même quantité de capitaux<br />

entretient Dès lors une industie moindre, et les contribuables paient l’impôt, accru d’un<br />

intérêt composé dont le fisc n’a point profité.<br />

L’impôt en nature prélève, sur le terrain même, une partie de la récolte au profit du trésor<br />

public.<br />

Il a cela de bon, qu’il ne demande au cultivateur qu’une valeur qu’il a, et sous la forme<br />

même où il la possède. La Belgique, après avoir été conquise par les français, s’est touvée, à<br />

certaines époques, hors d’état de payer ses contributions, quoiqu’elle eût de belles récoltes.<br />

La guerre et les défenses d’exporter l’empêchaient de vendre, et le fisc voulait qu’elle<br />

vendît, puisqu’il demandait de l’argent : elle aurait facilement supporté les charges<br />

publiques, si le gouvernement avait levé en nature les produits qu’il lui demandait.<br />

Il a cela de bon, que le gouvernement est aussi intéressé que le cultivateur aux bonnes<br />

récoltes, et par conséquent à favoriser l’agriculture ; et peut-être l’impôt en nature, perçu à<br />

la Chine, est-il l’origine de cette protection spéciale que le gouvernement de ce pays<br />

468 En France, en 1812, les droits d’entrée sur le coton en laine allaient environ à mille francs par balle, l’une<br />

portant l’autre ! Plusieurs manufactures étaient montées pour consommer deux de ces balles par chaque jour de<br />

travail. Il fallait qu’elles fissent l’avance de cet impôt depuis le moment de l’achat de leur matière première<br />

jusqu’au moment de la réalisation des ventes. En supposant cet espace d’une année, elles avaient besoin d’un<br />

capital de six cent mille francs plus fort que si le droit n’eût pas existé, et, pour ne pas y perdre, il fallait qu’elles<br />

retrouvassent sur la vente des produits l’intérêt de ce capital. C’était un renchérissement du produit, une addition<br />

à l’impôt, perdue par les Français, sans pour cela qu’elle entrât au fisc de leur gouvernement. A la même époque,<br />

les plus fortes charges supportées par les Français n’étaient pas celles qui figuraient dans leur budget. lis<br />

souffraient, sans savoir bien souvent à quoi attribuer leurs maux. On le voit par cet exemple.

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