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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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C’est comme si le gouvernement prenait un cinquième de la terre ; le consommateur des<br />

produits territoriaux ne s’en apercevrait pas 467 .<br />

Il y a une exception à faire pour les maisons d’habitation : l’impôt qu’on fait payer au<br />

propriétaire enchérit les loyers ; c’est qu’à proprement parler, une maison, ou plutôt la<br />

joussance d’une maison, est un produit manufacturier, et non pas un produit foncier, et que<br />

le haut prix des loyers diminue la consommation et la production des maisons comme celle<br />

des étoffes. Les bâtisseurs de maisons, y trouvant de moins bons profits, en font moins, et<br />

les consommateurs, payant ce produit plus cher, se logent plus à l’étroit.<br />

On voit, d’après ce qui précède, combien il est téméraire d’affirmer comme un principe<br />

général que tout impôt tombe définitivement sur telle classe de la société, ou sur telle autre.<br />

Les impôts tombent sur ceux qui ne peuvent pas s’y soustraire, parce qu’ils sont un fardeau<br />

que chacun éloigne de tout son pouvoir ; mais les moyens de s’y soustraire varient à l’infini,<br />

suivant les différentes formes de l’impôt, et suivant les fonctions qu’on exerce dans la<br />

machine sociale. Il y a plus, ils varient selon les temps, pour les mêmes professions. Quand<br />

une marchandise est fort demandée, son détenteur ne la cède qu’autant que tous ses frais<br />

sont bien payés ; l’impôt fait partie de ses frais ; il a soin de se le faire rembourser en<br />

totalité et sans miséricorde. Une circonstance imprévue fait-elle baisser le même produit, il<br />

se trouve heureux de supporter l’impôt tout entier pour en faciliter la vente. Rien n’est plus<br />

incertain, rien n’est plus variable que les proportions suivant lesquelles les diverses classes<br />

de la société supportent l’impôt. Les auteurs qui les font porter sur telle ou telle classe, et<br />

suivant des proportions constantes, raisonnent sur des suppositions que l’observation des<br />

faits ément à chaque instant.<br />

Ajoutons que les effets que je fais remarquer, et qui sont conformes à l’expérience aussi<br />

bien qu’expliqués par le raisonnement, durent autant que les circonstances qui les ont<br />

occasionnés. Un propriétaire foncier ne pourra jamais faire supporter à ses consommateurs<br />

aucune part de sa contribution foncière : il n’en sera pas de même d’un manufacturier. La<br />

consommation d’une denrée, toutes choses d’ailleurs égales, sera constamment bornée par<br />

un impôt qui en élèvera le prix, et il y aura moins de gains faits dans sa production. Un<br />

homme qui n’est ni producteur ni consommateur d’une derée de luxe, ne supportera jamais<br />

la moindre part d’un impôt mis sur cette denrée. Que penser en conséquence d’une doctrine<br />

qui a malheureusement obtenu l’approbation d’une société illustre trop étrangère à ce genre<br />

de connaissances, doctrine où l’on établit qu’il importe peu que l’impôt pèse sur une<br />

branche de revenu ou sur une autre, pourvu qu’il soit anciennement établi ; que tout impôt,<br />

à la longue, se puise dans tous les revenus, comme le sang qu’on tire d’un bras sô pompe<br />

sur tout le corps Cette comparaison n’est nullement analogue à la nature de l’impôt. Les<br />

richesses sociales ne sont point un fluide qui cherche son équilibr. Une atteinte portée à<br />

l’une des branches de l’arbre social peut la tuer, sans que l’arbre périsse ; elle est plus<br />

fâcheuse, si elle porte sur une branche productive que sur une autre qui ne l’est pas. Il faut<br />

que les blessures se multiplient, que l’arbre entier soit attaqué, pour qu’il devienne<br />

complétement strile et qu’il meure. Cette similitude représente mieux l’effet de l’impôt que<br />

ne le fait la circulation du sang ; mais ni l’une ni l’autre ne tiennent lieu du raisonnement.<br />

Une comparaison n’est point une preuve : elle n’est qu’un moyen de faire comprendre une<br />

vérité qui doit être prouvée sans cela.<br />

Jusqu’à présent, lorsque j’ai parlé d’un droit imposé sur un produit quelconque (droit que<br />

j’ai quelquefois appelé impôt sur les consommations, quoique le consommateur du produit<br />

467 Les Économistes avaient raison de dire que l’impôt foncier portait tout entier sur le produit net, et par<br />

conséquent sur les propriétaires des terres ; mais ils avaient tort de soutenir que tous les autres impôts<br />

retombaient en totalité sur les mêmes propriétaires des terres.

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