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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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Parmi tous les producteurs d’un même produit, les uns peuvent plus aisément que<br />

d’autres se soustraire à l’effet de l’impôt. Le capitaliste dont les fonds ne sont pas engagés<br />

dans cette affaire, les retire et les place ailleurs si l’on ne peut plus lui payer le même<br />

intérêt, ou si le paiement de ce qu’on lui doit devient plus précaire. L’entrepreneur peut,<br />

dans certains cas, liquider et porter ailleurs son intelligence et ses travaux ; mais le<br />

propriétaire foncier ou le capitaliste dont les capitaux ne peuvent se dégager promptement,<br />

n’ont pas le même avantage 463 . La quantité de vin ou de blé que produit une terre, reste à<br />

peu près la même, quel que soit l’impôt dont la terre est grevée ; l’impôt lui enlèverait la<br />

moitié, les trois quarts même de son produit net, ou, si l’on veut, de son fermage, que la<br />

terre serait néanmoins exploitée pour en retirer la moitié ou le quart que l’impôt<br />

n’absorberait pas 464 . Le taux du fermage, c’est-à-dire la part du propriétaire, baisserait :<br />

voilà tout. On en sentira la raison, si l’on considère que, dans le cas supposé, la quantité de<br />

denrées produites par la terre et envoyées au marché, reste néanmoins la même. D’un autre<br />

côté, les motifs qui établissent la demande de la denrée restent les mêmes aussi 465 . Or, si la<br />

quantité des produits qui est offerte, si la quantité qui est demandée, doivent, malgré<br />

l’établissement ou l’extension de la contribution foncière, rester néanmoins les mêmes, les<br />

prix ne varient pas, le consommateur des produits ne paie pas la plus petite portion de cet<br />

impôt 466 .<br />

Le propriétaire ne peut, même par la vente de son fonds, se soustraire au fardeau de<br />

l’impôt ; car le fonds n’est payé en principal qu’en proportion de ce que l’impôt lui laisse<br />

valoir en revenu. Un homme qui acquiert une terre, n’en évalue le revenu qu net de frais et<br />

d’impositions. Si le taux de ce genre de placement est dans le pays de cinq pour cent, et<br />

qu’il ait à acheter une terre de cent mille francs, il ne la paiera plus que quatre-vingt mille<br />

du moment qu’un nouvel impôt viendra à charger cette terre d’un tribut annuel de mille<br />

francs ; car elle ne produira plus alors que quatre mille francs.<br />

463 Voyez livre II, chap. 5, comment le propriétaire foncier concourt à la production par sa terre, et doit par<br />

conséquent être considéré comme un des producteurs.<br />

464 Il ne convient d’abandonner la culture qu’autant que l’impôt enlève au-delà du produit net, ou, si l’on veut,<br />

du fermage. Alors il ne convient à personne d’exploiter la terre ; non seulement le propriétaire n’en tirerait rien :<br />

l’impôt serait substitué au fermage ; mais le fermier, en payant l’impôt, paierait le fermage au-delà de sa valeur.<br />

465 Les produits de l’industrie agricole ont même cela de particulier, qu’ils ne deviennent pas plus chers en<br />

devenant plus rares, parce que la population décroît toujours en même temps que les produits alimentaires<br />

diminuent ; et que, par conséquent, la quantité de ces produits qui est demandée diminue en même temps que la<br />

quantité offerte. Aussi ne remarque-t-on pas que le blé soit plus cher là où il y a beaucoup de terres en friche, que<br />

dans un pays complètement cultivé. Le blé n’est réellement pas plus cher en Espagne qu’au temps où régnaient<br />

Ferdinand et Isabelle, quoique l’Espagne en produise aujourd’hui bien moins qu’alors. Il s’y trouve aussi bien<br />

moins de bouches pour le manger. L’Angleterre, la France, au contraire, étaient beaucoup moins bien cultivées<br />

au Moyen Age que de nos jours ; elles produisaient beaucoup moins de céréales, et néanmoins, autant qu’on en<br />

peut juger par comparaison avec quelques autres valeurs, le blé ne s’y vendait pas plus cher. Si le produit était<br />

moindre, la population l’était aussi : la faiblesse de la demande compensait la faiblesse de l’approvisionnement.<br />

466 Dira-t-on que le fermier, celui qui fournit l’industrie et les capitaux, partage avec le propriétaire le fardeau<br />

de l’impôt On se trompera ; car la circonstance de l’impôt n’a pas diminué le nombre des biens à louer, et n’a<br />

pas multiplié le nombre des fermiers. Dès qu’en ce genre aussi les quantités offertes et demandées sont restées<br />

les mêmes, le taux des fermages a dû rester le même aussi.<br />

L’exemple du manufacturier de sel, qui ne peut faire supporter à ses consommateurs qu’une partie de l’impôt,<br />

et celui du propriétaire foncier, qui ne peut s’en faire rembourser la plus petite partie, prouvent l’erreur de ceux<br />

qui soutiennent, en opposition avec les Économistes, que tout impôt retombe définitivement sur les<br />

consommateurs.

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