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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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(1552800 francs). « Exemple mémorable, dit Smith, qui montre avec combien peu de frais<br />

trois millions d’hommes peuvent être, non seulement gouvernés, mais bien gouvernés 412 . »<br />

Les causes purement <strong>politique</strong>s, et la forme du gouvernement qui en dérive, influent sur<br />

les frais de traitement des fonctionnaires civils et judiciaires, sur ceux de représentation, et<br />

enfin sur ceux qu’exigent les institutions et les établissements publics. Ainsi, dans un pays<br />

despotique, où le prince dispose des biens de ses sujets, lui seul réglant son traitement,<br />

c’est-à-dire, ce qu’il consomme de deniers publics pour son utilité personnelle, ses plaisirs,<br />

l’entretien de sa maison, ce traitement peut être fixé plus haut que dans les pays où il est<br />

débattu entre les représentants du prince et ceux des contribuables.<br />

Le traitement des magistrats subalternes dépend également, soit de leur influence<br />

particulière, soit du système général du gouvernement.<br />

Les services qu’ils rendent sont coûteux ou à bon marché, non seulement en proportion<br />

du prix qu’on les paie, mais encore selon que les fonctions sont moins bien ou mieux<br />

remplies. Un service mal rendu est cher, quoique fort peu payé ; il est cher s’il est peu<br />

nécessaire. Il en est de cela comme d’un meuble qui ne remplit pas bien l’office auquel il<br />

est destiné, ou dont on n’avait pas besoin, et qui embarrasse plutôt qu’il ne sert. Tels étaient,<br />

sous l’ancienne monrchie, les charges de grand-amiral, de grand-maître, de grand-échanson,<br />

de grand-veneur, et une foule d’autres qui ne servaient pas même à relever l’éclat de la<br />

couronne, et dont plusieurs n’étaient que des moyens employés pour répandre des<br />

gratifications et des faveurs.<br />

Par la même raison, lorsque l’on complique les ressorts de l’administration, on fait payer<br />

au peuple des services qui ne sont pas indispensables pour le maintien de l’ordre public :<br />

c’est une façon inutile donnée à un produit qui n’en vaut pas mieux pour cela, et qui<br />

communément en vaut moins 413 . Sous un mauvais gouvernement qui ne peut soutenir ses<br />

empiétements, ses injustices, ses exaction, qu’au moyen de nombreux satellites, d’un<br />

espionnage actif et de prisons multipliées ; ces prisons, ces espions, ces soldats coûtent au<br />

peuple, qui certes n’en est pas plus heureux.<br />

Par la raison contraire, un service public peut n’être pas cher, quoiqu’il soit<br />

généreusement payé. Si un faible salaire est perdu en totalité quand il est donné à un homme<br />

incapable de remplir so emploi, si les pertes que cause son impéritie vont même beaucoup<br />

au-delà de son salaire, les services que rend un homme recommandable par ses<br />

connaissances et son jugement, sont un riche équivalent qu’il donne en échange du sien ; les<br />

pertes dont il préserve l’état, ou les avantages qu’il lui procure, excèdent bientôt la<br />

récompense qu’il en reçoit, quelque libérale qu’on la suppose.<br />

On gagne toujours à n’employer, en toutes choses, que les bonnes qualités, dût-on les<br />

payer davantage. On n’a presque jamais des gens de mérite à très bas prix, parce que le<br />

mérite s’applique à plus d’un emploi. Il ne faut pas lui donner lieu de se dégoûter d’une<br />

carrière où il sent qu’il ne reçoit pas une équitable récompense de ses soins. En<br />

412 Il est vrai que la défense du pays, si ce n’est contre les sauvages, ne lui coûtait rien. Elle reposait sur les<br />

forces navales d’Angleterre.<br />

Dans un compte rendu par M. Galatin, secrétaire de la trésorerie des États-Unis, des recettes et des dépenses en<br />

1806, on voit que le total des dépenses ne s’élève pas à 12 millions de dollars, sur lesquels 8 millions sont pour<br />

acquitter les intérêts de la dette publique ; restent donc 4 millions de dollars (un peu plus de 21 millions de notre<br />

monnaie) pour les frais de gouvernement de cette république à cette époque.<br />

413 Je pourrais citer une ville de France, très doucement, très paternellement administrée avant 1789 pour mille<br />

écus, et qui, sous le gouvernement impérial, payait trente mille francs par an pour sa seule administration<br />

municipale, qui ne la protègeait pas du tout contre les volontés du prince.

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