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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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On voit que des produits très variés, parmi lesquels se trouvent même des produits que<br />

nous avons nommés immatériels, sont nécessaires à l’existence de l’homme, surtout dans<br />

les grandes sociétés ; que les produits dont la société a le plus besoin, dans l’état où elle se<br />

trouve, sont aussi ceux que les producteurs multiplient de préférence, parce que ce sont<br />

ceux-là même qui sont payés le plus cher relativement à leurs frais de production ; on voit<br />

enfin que, quelle que soit la cause qui borne la quantité des produits, cette quantité est la<br />

limite nécessaire de la population ; car les hommes n’existent qu’autant qu’ils ont à leur<br />

portée les moyens d’exister.<br />

Ces propositions générales reçoivent bien des modifications des circonstances<br />

particulières. Si les produits sont très inégalement distribués, si un homme en a plus qu’il ne<br />

lui en faut pour exister dans sa situation, la population sera moins grande que si le surplus<br />

de cet homme en faisait vivre un autre. Si les besoins d’une nation sont grands, la même<br />

quantité de produits n’y fera pas subsister autant de monde que dans une supposition<br />

contraire. Toujours est-il vrai que, toutes choses étant d’ailleurs égales, le nombre des<br />

hommes se proportionnera à la quantité des produits. C’est une vérité reconnue par la<br />

plupart des auteurs qui ont écrit sur l’économie <strong>politique</strong>, quelque variées que soient leurs<br />

opinions sur presque tout le reste 365 .<br />

Il me semble qu’on a pas tiré de là une conséquence qui était pourtant bien naturelle ;<br />

c’est que rien ne peut accroître la population que ce qui favorise la production, et que rien<br />

ne la peut diminuer, au moins d’une manière permanente, que ce qui attaque les sources de<br />

la production.<br />

Les juifs honorèrent la fécondité. Les Romains firent des règlements sans fin pour<br />

réparer les pertes d’hommes que leurs guerres continuelles et lointaines occasionnaient. Les<br />

censeurs recommandaient les mariages ; on était considéré en proportion du nombre de ses<br />

enfants. Tout cela ne servait à rien. La difficulté n’est pas de faire des enfants, mais de les<br />

entretenir. Il fallait créer des produits au lieu de causer des dévastations. Tant de beaux<br />

règlements n’empêchèrent point, même avant l’invasion des barbares, la dépopulation de<br />

l’Italie et de la Grèce 366 .<br />

Ce fut tout aussi vainement que Louis XIV, par son édit de 1666 en faveur du mariage,<br />

donna des pensions à ceux qui auraient dix enfants, et de plus fortes à ceux qui en auraient<br />

douze. Les primes que, sous mille formes diverses, il donnait au désœuvrement et à<br />

365 Voyez Steuart, De l’Économie <strong>politique</strong>, livre I chap. 4 ; Quesnay, article Grains ; dans l’Encyclopédie ;<br />

Montesquieu, Esprit des Lois, livre XVIII, chap. 10, et livre XXIII, chap. 10 ; Buffon, édition de Bernard, t. IV,<br />

page 266 ; Forbonnais, Principes et Observations, pages 39, 45 ; Hume, Essais, partie II, essai II ; Poivre, le<br />

volume de ses Œuvres, pages 145, 146 ; Condillac, Le Commerce et le Gouvernement, partie I, chap. 24-25 ; le<br />

comte de Verri, Réflexions sur l’Économie <strong>politique</strong>, ch. 21 ; Mirabeau, Ami des Hommes, t. I, chap. 2 ; Raynal,<br />

Histoire de l’Établissement, etc., livre XI, § 23 ; Chastellux, De la Félicité publique, t. II, page 205 ; Necker,<br />

Administration des Finances en France, ch. 9, et ses Notes sur l’Éloge de Colbert ; Condorcet, Notes sur<br />

Voltaire, édition de Kehl, t. XLV, p. 60 ; Smith, Richesse des Nations, livre I, chap. 8 et Il ; Garnier, Abrégé<br />

élémentaire, partie 1, ch. 3, et dans la Préface de sa traduction de Smith ; Herrenschwand, De l’Économie<br />

<strong>politique</strong> moderne, p. 2 ; Godwin, De la Justice <strong>politique</strong>, livre VIII, chap. 3 Jérémie Bentham, Théorie des<br />

peines et des récompenses, t. II, page 304 ; Clavière, De la France et des États-Unis, deuxième édition, pages 60<br />

et 315 Browne-Dignan, Essai sur les Principes de l’Économie publique, page 97 Londres, 1776 ; Beccaria,<br />

Elementi di Economia pubblica, parte prima, cap 2 et 3 ; Gorani, Recherches sur la Science du Gouvernement, t.<br />

II, ch. 7 ; de Sismondi, Nouveaux Principes d’Économie <strong>politique</strong>, livre VII, chap. I et suivants. Voyez surtout<br />

l’Essai sur la Population, de Malthus, ouvrage rempli de recherches et de raisonnements judicieux, et qui a<br />

résisté aux nombreuses critiques qu’on a dirigées contre lui, parce qu’il est fondé sur la méthode expérimentale<br />

et sur la nature des choses telles qu’elles sont.<br />

366 Voyez Tite-Live, livre VI ; Plutarque, Œuvres morales, Des Oracles qui ont cessé ; Strabon, livre VII.

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