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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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Chez les animaux qui sont incapables de mettre aucune prévoyance dans la satisfaction<br />

de leurs appétits, les individus qui naissent, lorsqu’ils ne deviennent pas la proie de<br />

l’homme ou des autres animaux, périssent du moment qu’ils éprouvent un besoin<br />

indispensable qu’ils ne peuvent satisfaire. Chez l’homme, la difficulté de pourvoir à des<br />

besoins futurs, fait entrer la prévoyance pour quelque chose dans l’accomplissement du vœu<br />

de la nature ; et cette prévoyance préserve seule l’humanité d’une partie des maux qu’elle<br />

aurait à supporter, si le nombre des hommes devait perpétuellement être réduit par des<br />

destructions violentes 363 .<br />

Encore, malgré la prévoyance attribuée à l’homme, et la contrainte que la raison, les lois<br />

et les mœurs lui imposent, il est évident que la multiplication des hommes va toujours non<br />

seulement aussi loin que leurs moyens d’exister le permettent, mais encore un peu au-delà.<br />

Il est affligeant de penser, mais il est vrai de dire que, même chez les nations les plus<br />

prospères, une partie de la population périt tous les ans de besoin. Ce n’est pas que tous<br />

ceux qui périssent de besoin meurent positivement du défaut de nourriture, quoique ce<br />

malheur soit beaucoup plus fréquent qu’on ne le suppose<br />

n’ont pas à leur disposition tout ce qui est nécessaire pour vivre, et que c’est parce qu’ils<br />

manquent de quelque chose qui leur serait nécessaire, qu’ils périssent.<br />

Tantôt c’est un malade ou un homme affaibli, qu’un peu de repos remettrait, ou bien à<br />

qui il ne faudrait que la consultation d’un médecin et un remède fort simple, mais qui ne<br />

peut ni prendre du repos, ni consulter le médecin, ni faire le remède.<br />

Tantôt c’est un petit enfant qui réclame les soins de sa mère ; mais sa mère est forcée au<br />

travail par l’indigence ; l’enfant périt ou par accident ou par malpropreté, ou par maladie.<br />

C’est un fait constaté par tous ceux qui s’occupent d’aritmétique <strong>politique</strong>, que, sur un égal<br />

nombre d’enfants, pris dans la classe aisée et dans la classe indigente, il en meurt dans la<br />

seconde incomparablement plus que dans la première.<br />

Enfin, une nourriture trop peu abondante ou malsaine, l’impossibilité de changer souvent<br />

de linge, de se vêtir plus chaudement, de se sécher, de se chauffer, affaiblissent la santé,<br />

altèrent la constitution, exposent beaucoup d’êtres humains à un dépérissement tantôt lent,<br />

tantôt rapide ; et l’on peut dire que tous ceux qui périssent à la suite d’un besoin que leur<br />

fortune ne leur a pas permis de satisfaire, meurent de besoin.<br />

364<br />

; je veux dire seulement qu’ils<br />

363 Les préjugés de mœurs ou de religion qui s’opposent à la réserve que les hommes mettent dans la<br />

multiplication de leur espèce, ont ce fâcheux effet que les réductions nécessaires portent alors sur des êtres plus<br />

développés et susceptibles de souffrir. En Turquie, où des crieurs publics parcourent de nuit toutes les rues pour<br />

avertir les époux de faire des sujets au sultan, ce sont des massacres et des épidémies qui réduisent les hommes<br />

au nombre que l’industrie du pays peut faire subsister ; et quand la population n’est pas réduite ainsi, elle l’est<br />

par la misère, comme chez les juifs et les chrétiens ; procédé qui ne cause pas moins de douleurs.<br />

364 L’hospice de Bicêtre, près Paris, renferme habituellement cinq à six mille pauvres ; en 1795, année où il y<br />

eut une disette, l’administration ne put pas leur donner la même nourriture que dans un temps ordinaire ;<br />

l’économe de cette maison m’a assuré qu’à cette époque ils moururent presque tous.<br />

Je trouve dans M. John Barton (Observations on the condition of Me labouring classes) un tableau qui montre<br />

que, dans sept districts manufacturiers de l’Angleterre, le nombre des décès a été en proportion de la cherté,<br />

c’est-à-dire de la rareté des subsistances. En voici un extrait :<br />

Années. Prix moyen du blé par quarter. Nombre des décédés.<br />

1801 118 shillings 3 den. 55 965<br />

1804 60 shillings 1 den 44 794<br />

1807 75 shillings 3 den 48 108<br />

1810 106 shillings 2 den 54 864<br />

Dans les mêmes tables, on voit que la disette a causé moins de mortalité dans les cantons ruraux. La raison en<br />

est évidente : outre que les ouvriers y sont plus généralement payés en nature, le haut prix de ce qu’on. vendait<br />

permettait de payer cher ce qu’on achetait.

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