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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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Après avoir observé, dans le premier livre, comment se forment les produits qui satisfont<br />

aux besoins de la société, et, dans celui-ci, comment ils se répandent parmi ses différents<br />

membres, observons de plus quelle influence ils exercent sur le nombre des personnes dont<br />

la société se compose, c’est-à-dire sur la population.<br />

Dans ce qui concerne les corps organisés, la nature semble mépriser les individus, et<br />

n’accorder sa protection qu’à l’espèce. L’histoire naturelle présente des exemples très<br />

curieux des soins qu’elle prend pour la conversation des espèces ; mais le moyen le plus<br />

puissant qu’elle emploie pour y parvenir consiste à multiplier les germes avec une profusion<br />

telle, que, quelque nombreux que soient les accidents qui les empêchent d’éclore, ou qui les<br />

détruisent étant éclos, il en subsiste toujours un nombre plus que suffisant pour que l’espèce<br />

se perpétue. Et si les accidents, les destructions, le défaut des moyens de développement,<br />

n’arrêtaient pas la multiplication des êtres organisés, il n’est pas un animal, pas une plante<br />

qui ne parvînt en peu d’années à couvrir la face du globe.<br />

L’homme partage avec tous les autres êtres organisés cette faculté ; et, quoique son<br />

intelligence supérieure multiplie pour lui les moyens d’exister, il finit toujours, comme les<br />

autres, par en atteindre la limite.<br />

Les moyens d’exister pour les animaux sont presque uniquement les subsistances ; pour<br />

l’homme la faculté qu’il a d’échanger les produits les uns contre les autres, lui permet d’en<br />

considérer, non pas tant la nature que la valeur. Le producteur d’un meuble de cent francs<br />

est possesseur de tous les aliments qu’on peut avoir pour ce prix-là. Et quant aux prix des<br />

deux produits (c’est-à-dire à la quantité de l’un et de l’autre qu’on donne en échange), il<br />

dépend de l’utilité du produit dans l’état actuel de la société. On ne peut pas supposer que<br />

les hommes en général consentent à donner, troc pour troc, ce qui leur est plus nécessaire<br />

pour avoir ce qui l’est moins. Dans la disette, on donnera une moins grande quantité de<br />

subsistances pour le même meuble ; mais toujours restera-t-il vrai que le meuble vaut la<br />

denrée, et qu’avec l’un on pourra obtenir l’autre.<br />

Cette faculté de pouvoir faire des échanges n’est pas bornée aux hommes du même lieu,<br />

ni même d’un seul pays. La Hollande se procure du blé avec ses épiceries et ses toiles.<br />

L’Amérique septentrionale obtient du sucre et du café en échange des maisons de bois<br />

qu’elle envoie toutes faites aux Antilles. Il n’y a pas jusqu’aux produits immatériels, qui,<br />

bien qu’ils ne soient pas transportables, procurent à une nation des denrées alimentaires.<br />

L’argent payé par un étranger pour voir un artiste éminent, ou pour consulter un praticien<br />

célèbre, peut être renvoyé à l’étranger pour y acheter des denrées plus substantielles 362 .<br />

Les échanges et le commerce approprient, comme on voit, les produits à la nature des<br />

besoins généraux. Les denrées, quelles qu’elles soient, pour la nourriture, ou pour le<br />

vêtement, ou pour le logement, dont le besoin se fait plus sentir, sont le plus demandées,<br />

donnent de plus gros profits et sont produites de préférence. Chaque famille satisfait<br />

d’autant plus de besoins, qu’elle peut acheter davantage. Elle peut acheter d’autant plus, que<br />

sa propre production est plus grande, ou, en termes vulgaires, ses revenus plus<br />

considérables. Ainsi, en résultat définitif, les familles, et la nation qui se compose de toutes<br />

les familles, ne subsistent que de leurs produits, et l’étendue des produits borne<br />

nécessairement le nombre de ceux qui peuvent subsister.<br />

362 Quoique tous les produits soient nécessaires à l’existence sociale de l’homme, le besoin de nourriture étant<br />

le plus impérieux de tous, le plus constant et celui qui se renouvelle le plus promptement, on n’en doit pas moins<br />

mettre au premier rang des moyens d’existence les substances alimentaires. Mais les substances alimentaires ne<br />

sont pas toutes des produits du sol ; on se les procure par le commerce aussi bien que par l’agriculture, et il y a<br />

plusieurs contrées qui nourrissent bien plus d’habitants que n’en peuvent alimenter les produits de leurs terres.

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