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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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telle marchandise, ou de l’argent, qui n’est lui-même qu’une marchandise ; ce qu’on prête<br />

est une valeur accumulée et consacrée à un placement.<br />

Celui qui veut prêter, réalise en monnaie la somme de valeur qu’il destine à cet usage, et<br />

à peine l’emprunteur l’a-t-il à sa isposition, qu’il échange cet argent contre autre chose ;<br />

l’argent qui a servi à cette opération s’en va servir à une autre opération pareille, ou à toute<br />

autre opération ; que sais-je, au paiement de l’impôt, à la solde de l’armée. La valeur prêtée<br />

n’a été que momentanément sous forme de monnaie, de même que nous avons vu un<br />

revenu, qu’on reçoit et qu’on dépense, se montrer passagèrement sous une forme semblable,<br />

et les mêmes pièces de monnie servir cent fois dans une année à payer autant de portions de<br />

revenus.<br />

De même, lorsqu’une somme d’argent a fait passer une valeur capitale (une valeur<br />

faisant office de capital) de la main d’un prêteur à celle d’un emprunteur, le même argent<br />

peut aller, après plusieurs échanges, servir à un autre prêteur pour un autre emprunteur, sans<br />

que le premier soit pour cela dessaisi de la valeur qu’il a empruntée. Celle-ci a déjà changé<br />

de forme ; il en a peut-être acheté des matières premières pour ses fabriques, et c’est alors<br />

de la valeur de ces matières premières qu’il paie l’intérêt, et non de la somme d’argent qui<br />

n’appartient plus ni à son prêteur, ni à lui. Si la même somme d’argent doit servir à un<br />

nouveau prêt, il faut auparavant que le nouveau prêteur l’acquierre au prix de la valeur<br />

capitale qui est en sa possession, et c’est cette dernière valeur, fruit d’une autre<br />

accumulation, qui est la valeur prêtée. La même somme ne représente jamais deux capitaux<br />

à la fois.<br />

On peut prêter ou emprunter en toute espèce de marchandise de même qu’en argent, et ce<br />

n’est pas cette circonstance qui fait varier le taux de l’intérêt. Rien même n’est plus<br />

commun dans le commerce que de prêter et emprunter autrement qu’en argent. Lorsqu’un<br />

manufacturier achète des matières premières à terme, il emprunte réellement en laine ou en<br />

coton ; il se sert dans son entreprise de la valeur de ces marchandises, et la nature de ces<br />

marchandises n’influe en rien sur l’intérêt qu’il bonifie à son vendeur 342 . L’abondance ou la<br />

rareté de la marchandise prêtée n’influe que sur son prix relativement aux autres<br />

marchandises, et n’influe en rien sur le taux de l’intérêt. Ainsi, quand l’argent est venu à<br />

baisser en Europe au sixième de son ancienne valeur, il a fallu, pour prêter le même capital,<br />

donner six fois plus d’argent ; mais l’intérêt est resté le même. La quantité d’argent<br />

342 Il se fait beaucoup de prêts à intérêt qui n’en portent pas le nom et qui n’entraînent pas de transports<br />

d’argent. Lorsqu’un marchand en détail remplit sa boutique en achetant au manufacturier ou au marchand en<br />

gros, il emprunte à intérêt, et rembourse, soit au terme, soit avant le terme, en retenant l’escompte, qui est la<br />

restitution qu’on lui fait de l’intérêt qu’on avait ajouté au prix en lui vendant les marchandises. Lorsqu’un<br />

négociant de province fait une remise à un banquier de Paris, et, plus tard, fait une traite sur ce banquier, il lui<br />

prête pendant le temps qui s’écoule entre l’échéance de sa remise et le paiement de sa traite. L’intérêt de cette<br />

avance est payé par le compte d’intérêt que le banquier joint au compte courant du négociant.<br />

On lit dans le Cours d’Économie <strong>politique</strong> que M. Henri Storch a fait pour l’usage des grands-ducs de Russie,<br />

et qui est imprimé à Pétersbourg (tome VI, page 103), que les négociants ou commissionnaires anglais qui<br />

trafiquent en Russie accordent à leurs acheteurs des crédits de douze mois, dont les Russes profitent pour acheter<br />

des marchandises d’un débit prompt et facile, et pour réaliser le prix de leurs achats longtemps avant le moment<br />

de les payer. Ils se servent ensuite des fonds jusqu’au terme qu’on leur a -laissé ; et l’on voit des négociants de ce<br />

pays-là faire entre eux des affaires avec des capitaux réellement anglais, qu’on ne leur a pas prêtés dans ce but.<br />

Les Anglais retrouvent bien, je présume, les loyers de leurs capitaux dans le haut prix qu’ils vendent leurs<br />

marchandises ; mais les profits des capitaux sont si élevés en Russie que, malgré cette manière onéreuse<br />

d’emprunter, les négociants russes peuvent encore faire de bonnes affaires à l’aide de ces emprunts.

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