15.01.2015 Views

Traité d'économie politique - Institut Coppet

Traité d'économie politique - Institut Coppet

Traité d'économie politique - Institut Coppet

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

des choses ; mais il peut assigner les causes générales et celles dont l’action est constante ;<br />

chacun peut ensuite, selon les cas qui se présentent, apprécier les odifications qui sont<br />

résultées ou qui doivent résulter des circonstances accidentelles.<br />

Cela pourra paraître extraordinaire au premier abord, mais on trouvera généralement vrai<br />

à l’examen, que les meilleurs profits ne se font pas sur les denrées les plus chères et sur<br />

celles dont on peut le mieux se passer, mais bien plutôt sur les plus communes et les plus<br />

indispensables. En effet, la demande de celles-ci se soutient nécessairement : elle est<br />

commandée par le besoin ; elle s’étend même à mesure que les moyens de production<br />

s’étendent ; car c’est surtout la production des denrées de première nécessité qui favorise la<br />

population. La demande, au contraire, des superfluités, ne s’élève pas à mesure que<br />

s’étendent les moyens de production de ces mêmes superfluités ; si une vogue<br />

extraordinaire en fait monter le prix courant fort au-dessus du prix naturel, c’est-à-dire du<br />

montant des frais de production, une vogue contraire le fait tomber fort au-dessous ; les<br />

superfluités ne sont, pour les riches eux-mêmes, que d’un besoin secondaire, et la demande<br />

qu’on en fait est bornée par le petit nombre de gens à l’usage de qui elles sont. Enfin,<br />

lorsqu’une cause accidentelle quelconque force les gens à réduire leurs dépenses, lorsque<br />

des déprédations, des impôts, des disettes, viennent diminuer les revenus de chacun, quelles<br />

sont les dépenses qu’on supprime les premières On retranche d’abord les consommations<br />

dont on peut le mieux se passer. Cela suffit pour expliquer pourquoi les services productifs<br />

qui se consacrent à la production des superfluités, sont en général plus faiblement payés que<br />

les autres.<br />

Je dis en général ; car dans une grande capitale, où les besoins du luxe se font sentir plus<br />

vivement que partout ailleurs, où l’on obéit quelquefois avec plus de soumission aux<br />

ridicules décrets de la mode qu’aux lois éternelles de la nature, et où tel homme se prive de<br />

dîner pour montrer des manchettes brodées, on conçoit que le prix des colifichets puisse<br />

quelquefois payer fort généreusement les mains et les capitaux qui s’appliquent à leur<br />

production. Mais, excepté dans certains cas, et en balançant toujours les profits d’une année<br />

par ceux d’une autre année et par les non-valeurs, on a remarqué que les chefs d’entreprises<br />

qui produisent des superfluités, font les profits les plus médiocres, et que leurs ouvriers sont<br />

les plus médiocrement payés. En Normandie et en Flandre, les plus belles dentelles sont<br />

travaillées par des gens très misérables, et les ouvriers qui fabriquent à Lyon des brocarts<br />

d’or sont souvent vêtus de guenilles. Ce n’est pas qu’on ne fasse occasionnellement sur de<br />

tels objets des bénéfices très considérables : on a vu des manufacturiers s’enrichir en<br />

fabriquant des chapeaux de fantaisie ; mais si l’on met ensemble tous les profits faits sur des<br />

superfluités, si l’on en déduit la valeur des marchandises qui ne se vendent pas, et celle des<br />

marchandises qui, s’étant bien vendues, ont été mal payées, on trouvera que ce genre de<br />

produits est celui qui donne au total les profits les plus médiocres. Les modistes les plus en<br />

vogue ont souvent fait banqueroute.<br />

Les marchandises d’un usage général conviennent à un plus grand nombre de personnes,<br />

et ont cours dans la plupart des situations de la société. Un lustre ne peut trouver sa place<br />

que dans de grandes maisons, tandis qu’il n’est si chétif ménage où l’on ne trouve des<br />

chandeliers ; aussi la demande des chandeliers est-elle toujours ouverte, toujours plus active<br />

que celle des lustres, et, même dans le pays le plus opulent, il se produit pour une valeur<br />

bien plus grande de chandeliers que de lustres.<br />

Les produits dont l’usage est le plus indispensable sont sans contredit les denrées qui<br />

nous servent d’aliments. Le besoin qu’on en a renaît chaque jour ; il n’y a pas de<br />

professions plus constamment employées que celles qui s’occupent de notre nourriture.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!