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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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pesait que 14 de nos livres, et qui, taxé à 4 deniers ou 1151 sur 5 grains d’argent fin, aurait<br />

fait revenir le prix de notre hectolitre à plus de 1200 grains d’argent fin. Ce n’était pas notre<br />

ancien muid de 12 setiers qui pesait 2880 livres ; ce qui aurait réduit le prix en argent de<br />

notre hectolitre à 60 grains.<br />

Cherchons par une autre voie la capacité de ce modius de Charlemagne.<br />

On voit dans ce même réglement que le pain de froment est taxé à raison d’un denier<br />

pour douze pains, de deux livres chaque ; ce qui fait un denier pour 24 livres de pain. On<br />

sait par l’expérience que le poids de l’humidité qu’on introduit dans le pain, balance les<br />

frais de panification et les déchets de la mouture. Une livre de pain et une livre de froment<br />

vont ordinairement de pair pour le prix. Or, en même temps que l’on fixait le prix du pain à<br />

un denier les 24 livres, on fixait le prix du froment à 4 deniers le modius ; le modius devait<br />

donc peser, à peu de chose près, quatre fois 24 livres, ou 96 livres de poids du temps de<br />

Charlemagne, qui équivalent à 72 livres, poids de marc. Telle est la quantité de blé taxée<br />

quatre deniers.<br />

Le denier de Charlemagne pesait 284 sur 5 grains, dont il faut déduire 1 sur 24 d’alliage ;<br />

il y reste donc 273 sur 5 grains d’argent fin. Quatre deniers par conséquent en contenaient<br />

1102 sur 5. Voilà le prix en argent de 72 livres de froment, poids de marc. À ce compte<br />

notre hectolitre, qui pèse 160 de ces livres, aurait coûté 2451 sur 3 grains d’argent fin.<br />

Dans l’antiquité, il en valait 289 ; sous Charlemagne, 245 : on donnait moins d’argen<br />

pour la même quantité de blé ; il semble Dès lors que l’argent était devenu plus précieux. Je<br />

ne peux pas répondre que cette différence ne vienne pas en partie de l’imperfection des<br />

bases sur lesquelles nous nous sommes appuyés, à défaut de meilleures ; néanmoins, après<br />

tous les pillages qui suivirent l’invasion de l’empire romain et les destructions qui en<br />

résultèrent, après l’abandon probable des mines de l’Attique et de l’Espagne pendant six ou<br />

sept cents ans, après les spoliations commises par les normands d’un côté et par les arabes<br />

de l’autre, avec la déperdition constante subie par les ustensiles d’argent, l’argent tombé<br />

dans les rivières et dans la mer, celui qui fut caché sans être retrouvé, etc., peut-on s’étonner<br />

que le métal d’argent fût devenu plus rare et plus précieux d’un sixième environ <br />

Près de 700 ans plus tard, sous Charles Vii, le prix moyen du blé, suivant Dupré de<br />

Saint-Maur, étant de 12 sous 10 deniers le setier, et cette somme contenant 328 grains<br />

d’argent fin, l’hectolitre revient à 219 grains ; ce qui est 26 grains de moins encore que sous<br />

Charlemagne, où le même hectolitre valait 245 grains. Il semble que l’argent est devenu<br />

encore un peu plus rare et plusprécieux. Mais voici le moment où il va se montrer avec une<br />

abondance que rien ne pouvait faire présager, et produire des effets qui surprenaient les<br />

gouvernements et le vulgaire, sans que les uns plus que les autres fussent en état de les<br />

expliquer.<br />

L’Amérique fut découverte en 1492. Les premières dépouilles des peuples du Mexique<br />

etdu Pérou, apportées en Europe, y firent paraître des quantités d’or et d’argent trop peu<br />

considérables pour en affecter sensiblement la valeur durant quelques années, mais par cela<br />

même fort profitables pour les aventuriers espagnols et leur gouvernement, parce qu’ils en<br />

tirèrent parti au plus haut terme de leur valeur. Bientôt les entrailles des cordilières furent<br />

déchirées par les malheureux péruviens ; et chaque année de nouveaux galions, lestés par<br />

les trésors du nouveau-monde, arrivaient dans les ports espagnols, sans compter ce qui se<br />

répandait de métaux précieux par la contrebande.<br />

C’est par les dépenses que firent les conquérans de ces trésors qu’ils se répandirent dans<br />

l’Europe et dans le monde.

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