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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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Beccaria, dans un cours public à Milan 22 , analysa pour la première fois les vraies fonctions<br />

des capitaux productifs. Le comte de Verri, compatriote et ami de Beccaria, et digne de<br />

l’être, à la fois grand administrateur et bon écrivain, dans ses Meditazioni sull’economia<br />

politica, publiées en 1771, s’est approché plus que personne avant Smith, des véritables lois<br />

qui dirigent la production et la consommation des richesses. Filangieri, quoiqu’il n’ait<br />

donné qu’en 1780 son Traité des lois <strong>politique</strong>s et économiques, paraît n’avoir pas eu<br />

connaissance de l’ouvrage de Smith, publié quatre années auparavant. Il suit les principes<br />

de Verri, et même leur donne un degré de développement de plus ; mais il ne va point,<br />

guidé par le flambeau de l’analyse et de la déduction, des plus heureuses prémisses aux<br />

conséquences immédiates qui les confirment en même temps qu’elles en montrent<br />

l’application et l’utilité.<br />

Tous ces écrits ne pouvaient conduire à un grand résultat. Comment, en effet, connaître<br />

les causes qui procurent l’opulence aux nations, quand on n’a pas des idées claires sur la<br />

nature des richesses elles-mêmes Il faut connaître le but avant de chercher les moyens. En<br />

1776, Adam Smith, sorti de cette école écossaise qui a donné tant de littérateurs,<br />

d’historiens, de philosophes et de savants du premier ordre, publia son livre intitulé :<br />

recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations. Il démontra que la richesse<br />

était la valeur échangeable des choses ; qu’on était d’autant plus riche qu’on avait plus de<br />

choses qui eussent de la valeur ; et que, comme la valeur pouvait être donnée, ajoutée à une<br />

matière, la richesse pouvait se créer, se fixer dans des choses auparavant dépourvues de<br />

valeur, s’y conserver, s’accumuler, se détruire 23 .<br />

Cherchant ce qui donne aux choses cette valeur, Smith trouve que c’est le travail de<br />

l’homme, qu’il aurait dû appeler industrie, parce que le mot industrie embrasse des parties<br />

que le mot travail n’embrasse pas. Il tire de cette démonstration féconde, des conséquences<br />

multipliées et importantes sur les causes qui, nuisant au développement des facultés<br />

productives, nuisent à la multiplication des richesses ; et comme ce sont des conséquences<br />

rigoureuses d’un principe incontestable, elles n’ont été attaquées que par des personnes trop<br />

légères pour avoir bien conçu le principe, ou par des esprits naturellement faux, et par<br />

conséquent incapables de saisir la liaison et le rapport de deux idées. Lorsqu’on lit Smith<br />

comme il mérite d’être lu, on s’aperçoit qu’il n’y avait pas avant lui d’économie <strong>politique</strong>.<br />

Dès lors l’argent et l’or monnayés ne sont devenus qu’une portion, et même une petite<br />

portion de nos richesses, une portion peu importante en ce qu’elle est peu susceptible de<br />

s’accroître, et parce que ses usages peuvent être plus facilement suppléés que ceux de<br />

beaucoup d’autres choses également précieuses ; d’où il résulte que la société, de même que<br />

les particuliers, ne sont nullement intéressés à s’en procurer par-delà ce qu’exigent les<br />

besoins bornés qu’ils en ont. On conçoit que ces vues ont mis Smith en état de déterminer le<br />

premier, dans toute leur étendue, les vraies fonctions de la monnaie dans la société ; et les<br />

22 Voyez ses cahiers, qui ont été imprimés pour la première fois en 1804, dans l’estimable recueil publié à<br />

Milan par Pietro Custodi, sous le titre de Scrittori classici italiani di economia politica. Je n’en ai eu<br />

connaissance qu’après la première publication de cet ouvrage-ci, qui a eu lieu en 1803.<br />

23 La même année où parut l’ouvrage de Smith, et immédiatement avant sa publication, Browne Dignan publia<br />

à Londres, en français, un Essai sur les principes de l’économie publique, où l’on trouve ce passage<br />

remarquable : « La classe des reproducteurs renferme ces hommes qui, associant leur travail à celui de la<br />

végétation de la terre, ou modifiant les Productions de la nature par l’exercice des arts et des métiers, créent en<br />

quelque sorte une nouvelle valeur, dont la somme totale forme ce qu’on appelle la reproduction annuelle. »<br />

Ce passage, où la reproduction est plus clairement caractérisée qu’elle ne l’est dans aucun endroit de Smith, ne<br />

conduit à rien son auteur, qui n’enfante que des idées éparses. Le défaut de liaison dans les pensées et de<br />

précision dans les termes, donne à son ouvrage quelque chose de vague et d’obscur, d’où il ne peut sortir aucune<br />

instruction.

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