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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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d’argent ; à une autre époque il fallait six livres tournois de notre monnaie pour faire une<br />

once. Un objet qui coûtait trois livres à la première époque, etsix livres à la seconde, coûtait<br />

le même prix en argent : nominalement il avait doublé.<br />

Le prix en argent d’une chose dépend du rapport qui se trouve entre les frais de<br />

production de l’argent et ceux de la chose. Si cinq hectolitres de blé coûtent cent grammes<br />

d’argent, c’est probablement parce que cent grammes d’argent coûtent autant à produire que<br />

cinq hectolitres de blé ; car s’ils coûtaient moins, en achetant le blé avec de l’argent, on<br />

l’aurait à moins de frais que le cultivateur n’en fait pour le produire. Le cultivateur perdrait<br />

à ce marché ; il ne continuerait pas un métier où il donnerait plus pour recevoir moins.<br />

C’est pour cette raison qu’à mesure que le métal d’argent est devenu plus abondant et<br />

que les frais de sa production ont diminué, il en a fallu donner une plus grande quantité pour<br />

obtenir une même quantité de blé.<br />

Et si, comme on a lieu de le croire, le blé a toujours coûté à peu près les mêmes frais de<br />

production, la quantité d’argent plus grande qu’il a fallu, à différentes époques, donner pour<br />

obtenir une même quantité de blé, est pour nous une indication de la dépréciation de<br />

l’argent, de ce qu’il a perdu en valeur réelle.<br />

La dépréciation de l’argent et de l’or depuis l’antiquité jusqu’à nous, jouant un fort grand<br />

rôle dans l’économie des nations, cherchons à nous en former quelque idée d’après la<br />

quantité qu’ils ont pu acheter à chaque époque, d’une denrée dont il est probable que la<br />

valeur réelle a moins varié que la plupart des autres. J’ai déjà, d’après cette méthode,<br />

cherché à donner des idées plus exactes de la valeur de quelques sommes historiques. Elle<br />

nous servira en ce moment à évaluer la perte de valeur que les métaux précieux ont subie<br />

jusqu’à nos jours.<br />

La mesure grecque appelée médimne, est, suivant les antiquaires, égale à 52 litres ; et<br />

l’on voit, dans un plaidoyer de Démosthènes, que j’ai déjà cité, que le prix ordinaire du blé<br />

était de 5 drachmes par médimne. Or 5 drachmes, suivant les médailles athéniennes que<br />

l’on possède encore, contenaient 1571 sur 2 grains d’argent pur. Par conséquent 52 de nos<br />

litres coûtaient 1571 sur 2 grains d’argent, et notre hectolitre qui contient cent litres, en<br />

coûtait 303.<br />

À Rome, au temps de César, la mesure de blé appelée modius valait communément trois<br />

sesterces, et trois sesterces, selon les antiquaires, contenaient 23 5 sur 8 grains d’argent<br />

fin 300<br />

. Le blé contenu dans un modius pesait 14 de nos livres de 16 onces ; 14 livres, poids<br />

de marc, s’échangeaient donc communément à Rome contre 235 sur 8 grains d’argent ; et<br />

par conséquent notre hectolitre de froment, qui pèse 160 livres, se payait en argent 270<br />

grains, environ un septième de moins qu’à Athènes, ce qui peut s’expliquer par les<br />

circonstances particulières aux deux capitales.<br />

Comme il ne peut être question en ceci que d’approximations, pour avoir le prix du blé<br />

en argent dans l’antiquité, nous prendrons le prix moyen entre ces deux-là, qui est 289<br />

grains.<br />

Passons au moyen-âge :<br />

Charlemagne fit un réglement qui défendit de jamais vendre le modius de blé au-dessus<br />

de quatre deniers. Or, le denier de Charlemagne était une monnaie d’argent du poids de 284<br />

sur 5 grains d’argent, poids de marc, portant un vingt-quatrième d’alliage 301 . Mais quelle<br />

était la capacité du modius Nous l’ignorons. Ce n’était pas le modius des Romains qui ne<br />

300 On en trouvera la preuve dans les ouvrages spécialement consacrés à ce genre d’érudition, notamment dans<br />

Garnier, Histoire des Monnaies, tome II, p. 333 et p. 341.<br />

301 Garnier, Histoire des Monnaies, tome II, p. 342.

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