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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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Mais je suppose qu’on insiste, et que, pour mettre à l’épreuve la justesse du principe, on<br />

pousse la supposition à l’extrême : si d’économies en économies, dira-t-on, les frais de<br />

production se réduisaient à rien, il est clair qu’il n’y aurait plus ni rente pour les terres, ni<br />

intérêts pour les capitaux, ni profits pour l’industrie : Dès lors plus de revenus pour les<br />

producteurs. Dans cette supposition, je dis qu’il n’y aurait plus même de producteurs. Nous<br />

serions, relativement à tous les objets de nos besoins, comme nous sommes relativement à<br />

l’air, à l’eau, que nous consommons sans que personne soit obligé de les produire, et sans<br />

que nous soyons obligés de les acheter. Tout le monde est assez riche pour payer ce que<br />

coûte l’air ; tout le monde serait assez riche pour payer ce que coûteraient tous les produits<br />

imaginables : ce serait le comble de la richesse. Il n’y aurait plus d’économie <strong>politique</strong> ; on<br />

n’aurait plus bsoin d’apprendre par quels moyens se forment les richesses : on les aurait<br />

toutes formées.<br />

Quoiqu’il n’y ait pas de produits dont le prix soit tombé à rien et ne vaille pas plus que<br />

l’eau commune, il y en a néanmoins dont le prix a éprouvé des baisses prodigieuses, comme<br />

le combustible aux lieux où l’on a découvert des houillères ; et toute baisse analogue est sur<br />

le chemin de l’état d’abondance complète dont je viens de parler.<br />

Si diverses choses ont baissé diversement, les unes plus, les autres moins, il est évident<br />

qu’elles ont dû varier dans leurs valeurs réciproques. Celle qui a baissé, comme les bas, a<br />

changé de valeur relativement à celle qui n’a pas baissé, comme la viande ; et celles qui ont<br />

baissé autant l’une que l’autre, comme les bas et le sucre dans notre supposition,<br />

quoiqu’elles aient changé de valeur réelle, n’ont pas changé de valeur relative.<br />

Telle est la différence qu’il y a entre les variations réelles et les variations relatives. Les<br />

premières sont celles où la valeur des choses change avec les frais de leur production ; les<br />

secondes sont celles où la valeur des choses change par rapport à la valeur des autres<br />

marchandises.<br />

Les baisses réelles sont favorables aux acheteurs sans être défavorables aux vendeurs, et<br />

les hausses réelles produisent un effet opposé ; mais dans les variations relatives, ce que le<br />

vendeur gagne est perdu par l’acheteur, et réciproquement. Un marchand qui a dans ses<br />

magasins cent milliers de laines à un franc la livre, possède cent mille francs : si, par l’effet<br />

d’un besoin extraordinaire, les laines montent à deux francs la livre, cette portion de sa<br />

fortune doublera ; mais toutes les marchandises appelées à s’échanger contre de la laine<br />

perdront autant de leur valeur relative que la laine en a gagné. En effet, celui qui a besoin de<br />

cent livres de laine, et qui aurait pu les obtenir en vendant quatre setiers de froment, pour<br />

cent francs, sera désormais obligé d’en vendre huit. Il perdra les cent francs que gagnera le<br />

marchand de laine ; la nation n’en sera ni plus pauvre ni plus riche 298 .<br />

précisément le contraire. Une baisse dans les salaires, qui ne provient que d’une baisse dans les denrées, ne<br />

diminue point l’aisance des ouvriers, et la baisse des salaires, permettant à l’entrepreneur de produire à moins de<br />

frais, favorise puissamment le débit des produits du travail.<br />

Melon, Forbonnais, et tous les écrivains du système exclusif, ou de la balance du commerce, sont en ceci<br />

d’accord avec les économistes pour se tromper.<br />

M. de Sismondi a reproduit les mêmes erreurs dans ses Nouveaux principes d’Économie <strong>politique</strong>, livre IV,<br />

chap. 8, où il regarde la baisse du prix des produits comme un profit fait sur le producteur par le consommateur ;<br />

il ne fait pas attention que le producteur, l’ouvrier compris, ne perd rien à donner à meilleur marché S’il a moins<br />

de frais à faire.<br />

298 Le comte de Lauderdale a publié en 1807 un livre intitulé Recherches sur la nature et l’origine de la<br />

richesse publique, et sur les causes qui concourent à son accroissement. il est tout entier fondé sur cette<br />

proposition erronée, que la disette d’une denrée qui diminue les ressources de la société, prise en masse,<br />

augmente celle des particuliers, en augmentant la valeur de cette denrée entre les mains de ceux qui en<br />

possèdent. L’auteur en tire la fausse conséquence que les principes de la richesse générale sont différents des<br />

principes de la richesse des particuliers. Il ne s’aperçoit pas que chaque fois qu’un acheteur est obligé, pour

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