15.01.2015 Views

Traité d'économie politique - Institut Coppet

Traité d'économie politique - Institut Coppet

Traité d'économie politique - Institut Coppet

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

La Pensylvanie, qui, bien que ce fût avant la révolution d’Amérique, agissait en cela<br />

comme éat indépendant, ordonna en 1722 qu’une livre sterling passerait pour 1 livre 5 sous<br />

sterling 248 ; et les états-Unis, la France même, après s’être déclarés républiques, ont depuis<br />

fait pis encore. « Si l’on voulait, dit Steuart, entrer dans le détail de tous les artifices<br />

inventés pour brouiller les idées des nations relativement aux monnaies, dans le but de<br />

déguiser ou de faire paraître utiles, justes ou raisonnables, les altérations qu’en ont faites<br />

presque tous les princes, on en composerait un gros livre 249 . » Steuart aurait pu ajouter que<br />

ce gros livre aurait peu d’utilité, et n’empêcherait pas qu’un artifice nouveau ne pût être<br />

pratiqué dès le lendemain. Ce qu’il faut éclaircir, c’est la fange au sein de laquelle germent<br />

ces abus ; car si l’on parvient à la transformer en une eau limpide, chaque abus, dès sa<br />

naissance, pourra être découvert et déconcerté.<br />

Et qu’on ne s’imagine pas que les gouvernements perdent un avantage précieux en<br />

perdant le plaisir de tromper. L’astuce ne leur sert que pendant un temps bien court, et finit<br />

par leur causer plus de préjudice qu’elle ne leur a fait de profit. Nul sentiment dans<br />

l’homme ne tient son intelligence éveillée autant que l’intérêt personnel ; il donne de<br />

l’esprit aux plus simples. De tous les actes de l’administration, ceux en conséquence dont<br />

on est le moins la dupe, sont ceux qui touchnt à l’intérêt personnel. S’ils tendent à procurer,<br />

par la finesse, des ressources à l’autorité, les particuliers ne s’y laisseront pas prendre ; s’ils<br />

font un tort dont les particuliers ne puissent se garantir, comme lorsqu’ils renferment un<br />

manquement de foi, quelque artistement déguisé qu’on le suppose, on s’en apercevra<br />

bientôt ; dans l’opinion qu’on se formera d’un tel gouvernement, l’dée de la ruse se joindra<br />

à celle de l’infidélité, et il perdra la confiance, avec laquelle on fait de bien plus grandes<br />

choses qu’avec un peu d’argent acquis par la fraude. Souvent même ce sont les seuls agents<br />

du gouvernement qui tirent parti de l’injustice qu’on a commise envers les peuples. Le<br />

gouvernement perd la confiance, et ce sont eux qui font le profit ; ils recueillent le fruit de la<br />

honte qu’ils ont fait rejaillir sur l’autorité.<br />

Ce qui convient le mieux aux gouvernements, c’est de se procurer, non des ressources<br />

factices et malfaisantes, mais des ressources réellement fécondes et inépuisables. C’est donc<br />

les bien servir que de les écarter des unes, et de leur indiquer les autres.<br />

L’effet immédiat de l’altération des monnaies est une réduction des dettes et des<br />

obligations payables en monnaie, des rentes perpétuelles ou remboursables, payables par<br />

l’état ou par les particuliers, des traitements et des pensions, des loyers et fermages, de<br />

toutes les valeurs enfin qui sont exprimées en monnaie ; réduction qui fait gagner au<br />

débiteur ce qu’elle fait perdre au créancier. C’est une autorisation donnée à tout débiteur<br />

dont la dette est exprimée en une certaine quantité de monnaie, de faire banqueroute du<br />

montant de la diminution du métal fin employé sous cette même dénomination.<br />

Ainsi, un gouvernement qui a recours à cette opération, ne se contente pas de faire un<br />

gain illégitime ; il xcite tous les débiteurs de sa domination à faire le même gain.<br />

Cependant nos rois, en diminuant ou en augmentant la quantité de métal fin contenue<br />

sous une même dénomination, n’ont pas toujours voulu que leurs sujets, dans les relations<br />

qu’ils avaient entre eux, se prévalussent de cette circonstance pour leur profit particulier. Le<br />

gouvernement a bien toujours entendu payer moins ou recevoir plus d’argent fin qu’il ne<br />

devait en payer ou en recevoir ; mais il a quelquefois obligé les particuliers, au moment<br />

248 Smith, Richesses des Nations, livre II, ch. 2,<br />

249 Steuart, tome I, page 553.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!