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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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tisserandn’ont besoin, dans aucun cas, d’un produit qui ne saurait onvenir qu’au seul<br />

manufacturier en coutellerie, lequel ne saurait donner en échange, de la viande ou du pain,<br />

puisqu’il n’en produit point ; il faut donc qu’il donne une marchandise que, suivant la<br />

coutume du pays, on puisse espérer d’échanger facilement contre la plupart des autres<br />

denrées.<br />

C’est ainsi que la monnaie est d’autant plus nécessaire que le pays est plus civilisé, que<br />

la séparation des occupations y est poussée plus loin. Cependant l’histoire offre des<br />

exemples de nations assez considérables où l’usage d’une marhandise-monnaie a été<br />

inconnu ; tels étaient les Mexicains 223 . Encore, à l’époque où des aventuriers espagnols les<br />

ubjugèrent, commençaient-ils à employer, comme monnaie, dans les menus détails du<br />

commerce, des grains de cacao.<br />

J’ai dit que c’est la coutume et non pas l’autorité du gouvernement qui fait qu’une<br />

certaine marchandise est monnaie plutôt qu’une autre ; car la monnaie a beau être frappée<br />

en écus, le gouvernement (du moins dans les temps où la propriété est respectée) ne force<br />

personne à donner sa marchandise contre des écus. Si, en faisant un marché, on consent à<br />

recevoir des écus en échange d’une autre denrée, ce n’est point par égard pour l’empreinte.<br />

On donne et l’on reçoit la monnaie aussi librement que toute autre marchandise, et l’on<br />

troque, toutes les fois qu’on le juge préférable, une denrée contre une autre, ou contre un<br />

lingot d’o ou d’argent non frappé en monnaie. C’est donc uniquement parce qu’on sait par<br />

expérience que les écus conviendront aux propriétairs des marchandises dont on pourra<br />

avoir besoin, que soi-même on reçoit des écus préférablement à toute autre marchandise.<br />

Cette libre préférence est la seule autorité qui donne aux écus l’usage de monnaie ; et si l’on<br />

avait des raisons de croire qu’avec une marchandise autre que des écus, avec du blé, par<br />

exemple, on pût acheer plus aisément les choses dont on suppose qu’on pourra avoir besoin,<br />

on refuserait de donner sa marchandise contre des écus, on demanderait du blé en<br />

224<br />

échange .<br />

La même liberté qu’a tout homme de donner oo de ne pas donner sa marchandise contre<br />

de la monnaie, à moins d’une spoliation arbitraire, d’un vol, fait que la valeur de la monnaie<br />

ne saurait être fixée par les lois ; elle est déterminée par le libre accord qui se fait entre le<br />

vendeur et l’acheteur. Elle vaut plus quand le vendeur consent à livrer une plus grande<br />

quantité de quelque marchandise que ce soit pour la même somme de monnaie, ou bien à<br />

recevoir une moindre somme pour la même quantité de marchandise. Elle vaut moins dans<br />

le cas contraire. La loi ajoute cependant aux motifs qu’on a de recevoir de l monnaie et de<br />

lui accorder de la valeur, en déterminant certains cas où elle impose l’obligation de<br />

s’acquitter en monnaie, notammn ans le paiement des contributions publiques.<br />

Tel est le fondement de l’usage de la monnaie. Il ne faut pas croire que ces<br />

considérations soient une spéculation purement curieuse : tous les raisonnements, toutes les<br />

lois, tous les règlements, pour être bons, doivent prendre en considération la nature des<br />

choses auxquelles ils s’appliquent ; or, telle me paraît être la nature desmonnaies.<br />

223 Raynal, Hist. philos. et polit., livre VI.<br />

224 Lorsque les nègres des bords de la Gambie commencèrent à traiter avec les Européens, la chose dont ils<br />

faisaient le plus de cas était le fer, parce qu’il leur servait à fabriquer des instruments de guerre et de labour. Le<br />

fer devint la valeur avec laquelle ils comparèrent toutes les autres ; bientôt il n’intervint plus que par supposition<br />

dans les marchés, et l’on échangea, dans ces contrées, une barre de tabac, composée de vingt ou trente feuilles,<br />

contre une barre de rhum, composée de quatre ou cinq pintes, suivant le plus ou moins d’abondance de la<br />

marchandise. Toutes les marchandises, en ce pays-là, font office de monnaie, l’une relativement à l’autre ; mais<br />

cela ne sauve d’aucun des inconvénients des échanges en nature, qui sont principalement de ne pouvoir offrir<br />

une Marchandise qui soit toujours de facile défaite, et qui puisse se proportionner, en quantité et en valeur, à la<br />

valeur de tous les produits. (Voyez le Voyage de Mungo Park en Afrique, tome I, ch. 2.)

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