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Traité d'économie politique - Institut Coppet

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sur les revenus des administrés, leur permetten d’autant mieux de multiplier leurs<br />

économies, qui deviennent des capitaux productifs.<br />

C’est ainsi que, même avec peu de capitaux originaires, les produits annuels des colonies<br />

excèdent promptement leurs consommations. De là cet accroissement rapide de richesses et<br />

de population qu’on y remarque ; car à mesure qu’il se forme des capitaux, le travail<br />

industriel de l’homme y devient recherché, et l’on sait que les hommes naissent partout où il<br />

en est besoin 202 .<br />

On peut maintenant s’expliquer pourquoi les progrès de ces colonies sont si rapides.<br />

Chez les anciens, éphèse et Milet dans l’Asie-Mineure, Tarente et Crotone en Italie,<br />

Syracuse et Agrigente en Sicile, paraissent avoir surpassé en peu de temps leurs métropoles.<br />

Les colonies anglaises de l’Amérique septentrionale, qui dns nos temps modernes<br />

ressemblent le plus aux colonies des grecs, ont offert un spectacle de prospérité peut-être<br />

moins éclatant, mais non moins digne de remarque, et qui n’est pas terminé.<br />

Il est de l’essence des colonies fondées sur ce principe, c’est-à-dire sans projet de retour<br />

dans l’ancienne patrie, de se donner un gouvernement indépendant de leur métropole ; et<br />

lorsque la métropole conserve la prétention de leur imposer des lois, la force des choses<br />

l’emporte tôt ou tard, et opère ce que la justice et l’intérêt bie entendu conseillaient de faire<br />

dès l’origine.<br />

Je passe aux colonies formée suivant le système colonial des modernes.<br />

Ceux qui les fondèrent furent, pour la plupart, des aventuriers qui cherchèrent, non une<br />

patrie adoptive, mais une fortune qu’ils pussent rapporter, pour en jouir, dans leur ancien<br />

pays 203 .<br />

Les premiers d’entre eux trouvèrent d’un côté aux Antilles, au Mexique, au Pérou, et<br />

plus tard au Brésil, et d’un autre côté aux Indes orientales, de quoi satisfaire leur cupidité,<br />

toute grande qu’elle était. Après avoir épuisé les ressources antérieurement amassées par les<br />

indigènes, ils furent obligés de recourir à l’industrie pour exploiter les mines de ces pays<br />

nouveaux, et les richesses bien plus précieuses de leur agriculture. De nouveaux colons les<br />

remplacèrent, dont la plupart conservèrent plus ou moins l’esprit de retour, le désir, non de<br />

vivre dans l’aisance sur leurs terres, et d’y laisser en mourant une famille heureuse et une<br />

réputation sans tache, mais le désir d’y gagner beaucoup pour aller jouir ailleurs de la<br />

fortune qu’ils y auraient acquise ; ce motif y a introduit des moyens violens d’exploitation,<br />

au premier rang desquels il faut placer l’esclavage.<br />

Des écrivains philanthropes ont cru ne pouvoir mieux détourner les hommes de cette<br />

odieuse pratique qu’en prouvant qu’elle est contraire à leurs intérêts. Steuart, Turgot, Smith,<br />

s’accordent à penser que le travail de l’esclave revient plus cher et produit moins que celui<br />

de l’homme libre. Leurs raisonnements se réduisent à ceci : un homme qui ne travaille pas<br />

et ne consomme pas pour son propre compte, travaille le moins et consomme le plus qu’il<br />

peut ; il n’a aucun intérêt à mettre dans ses travaux l’intelligence et le soin qui peuvent en<br />

assurer le succès ; le travail excessif dont on le surcharge abrége ses jours, et oblige son<br />

maître à des remplacements coûteux ; enfin le serviteur libre a l’administration de son<br />

propre entretien, tandis que le maître a l’administration de l’entretien de son esclave ; et<br />

202 Voyez plus loin ce qui a rapport à la population.<br />

203 J’en excepte toujours les fondateurs de plusieurs États dans l’Amérique septentrionale, et quelques autres.<br />

Les colonies espagnoles et portugaises du continent de l’Amérique ont participé des deux systèmes. Quelques<br />

Européens y sont allés avec l’esprit de retour, d’autres pour s’y fixer, ainsi que leurs descendants. Mais ces<br />

combinaisons ont subi de grands changements depuis que ces colonies sont devenues indépendantes, et il est<br />

probable que dorénavant on ne s’y établira plus que pour s’y fixer.

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