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. REVUE DE PRESSE - La Strada et compagnies

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Les cerises au kirsch ou itinéraire d'un enfant sans ombre<br />

du 23 Février au 20 Mars 2011 au Théâtre de la Vieille Grille<br />

par EVELYNE TRAN, THEATRE AU VENT<br />

27.02.11<br />

Écrit <strong>et</strong> interprété par <strong>La</strong>urence Sendrowicz. Mise en scène de Nafi Salah Musique originale : Yaacov Salah<br />

- Costumes : Méïr Salah — Lumière : Pascal Noël. Au Théâtre de la Vieille Grille, 1, rue Puits de l’Ermite<br />

75 005 Paris. Réservations 01.47.07.22.11. Du 23 Février au 20 Mars 2011 du mercredi au samedi à 21 h.<br />

Dimanche à 17 h 30.<br />

On les appelle des fous ceux qui entendent des voix dans leur tête, ces voix qui surviennent souvent à<br />

l’adolescence <strong>et</strong> accaparent l’être sans qu’il puisse saisir pourquoi. Les histoires familiales ne se déclinent<br />

pas toujours sur un joli album de photos ou à l’aide d’un arbre généalogique pimpant. Parfois, elles<br />

pourraient se comparer à un escalier découvert par inadvertance, en soulevant un rideau censé le cacher.<br />

Et à côté de marches encore propres, en avançant un peu, ce sont des plus anciennes ébréchées <strong>et</strong><br />

poussiéreuses que l’enfant découvre en tremblant comme s’il venait de pénétrer dans un lieu interdit. Si<br />

l’enfant spontanément soulève le rideau, favorisant un courant d’air, en s’engageant dans l’escalier,<br />

l’angoisse le gagne parce qu’il devient prisonnier de l’obscurité sans pouvoir se raccrocher à la rampe.<br />

Ces impressions sont indicibles <strong>et</strong> solitaires, elles empoignent l’enfant plus perméable, plus disponible<br />

aussi que l’adulte. Il est né le divin enfant, il est fêté, adulé, on astique la maison pour son arrivée.<br />

Comment dire que la naissance d’un enfant, ce n’est pas seulement une histoire de reproduction.<br />

Il n’y a pas de génération spontanée aussi bien pour les légumes, les plantes que les humains. Nous ne<br />

naissons pas de rien. Ça fait très étrange de se le dire. Certaines femmes pourraient se demander si ce n’est<br />

pas pour conjurer la mort qu’elles ont souhaité donner la vie. Que la naissance puisse faire écho à la mort,<br />

c’est vraiment trop lourd comme idée <strong>et</strong> pourtant…<br />

Dans c<strong>et</strong>te histoire familiale à travers trois générations, <strong>La</strong>urence Sendrowicz ne se perd pas en<br />

considérations métaphysiques ou religieuses, elle parcourt un chemin de voix qui se répondent à travers le<br />

tissu léger, tangible de vies presque parallèles, oui toujours sur la même route, séparée seulement par<br />

quelques années. Comme elle interprète chacune de ces voix, parfois l’on ne sait plus si c’est l’enfant de la<br />

3e génération qui parle ou celui de la première. L’histoire est captivante, car elle est racontée par des<br />

enfants que l’on entend réellement vivre, converser, se disputer. Comment tromperait-on l’absence des<br />

parents qui ne sont jamais revenus Les paroles se traversent, elles s’unissent non pas pour conjurer le<br />

sort, mais pour lui apporter de la lumière, de l’espérance. On peut construire sur du vide dit le jeune enfant<br />

devenu grand-père. On s’aperçoit alors que la douleur est immense, irrationnelle alors même qu’il prétend<br />

être rationnel. Il s’agit d’une histoire banale d’enfants juifs, arrachés à leurs parents, dit <strong>La</strong>urence<br />

Sendrowscz. J’ajouterai qu’elle est tellement banale qu’elle peut toucher n’importe quel humain qu’il soit<br />

juif ou non.<br />

Elles sont parmi nous ces voix parce qu’elles ont des choses à dire. C’est aussi ça le théâtre, donner la<br />

possibilité à une auteure interprète, aussi naturelle, juste <strong>et</strong> pudique que <strong>La</strong>urence Sendrowcz de<br />

s’exprimer. Parfois, il faut oser parler de ses douleurs enfouies. Ce travail est salutaire pour nous adultes<br />

qui nous rappellent comment enfants, nous tournions autour de l’arbre avant de recueillir au vol, ravi,<br />

l’une de ses feuilles. C’était un signe de bonheur.<br />

Évelyne Trân<br />

Paris, le 27 Février 2011<br />

- L E S C E R I S E S A U K I R S C H -

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