Rapport de Phase I - Le monde des Pyrénées
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Mais c’est également les conditions <strong>de</strong> vie et <strong>de</strong> travail qui sont bouleversées par la mise en œuvre<br />
<strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> protection. <strong>Le</strong> gardiennage permanent, dans <strong>de</strong>s conditions précaires est vécu<br />
comme un réel retour en arrière, à l’époque <strong>de</strong>s 35 heures. Par ailleurs, la menace et la prédation du<br />
loup change radicalement la signification <strong>de</strong> l’estive. D’un lieu représentant les vacances, « la paix, la<br />
plénitu<strong>de</strong> et la liberté » (Fabre et <strong>Le</strong>baudy, 2002) à la fois pour le gardien et son troupeau, l’estive<br />
<strong>de</strong>vient le lieu d’un stress permanent pour les hommes et les animaux. Ces professionnels ont le<br />
sentiment que le sens <strong>de</strong> leur métier est non seulement redéfini par d’autres acteurs mais que <strong>de</strong>s<br />
conditions <strong>de</strong> travail qu’ils jugent inadmissibles leur sont imposées par le truchement <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong><br />
protection, proposées par le gouvernement et prônées par les partisans du prédateur.<br />
L’impact <strong>de</strong> la prédation a, certes, une teneur technique et économique mais également sociale : la<br />
mort <strong>de</strong>s bêtes domestiques et leur prise en charge financière posent la question <strong>de</strong> la relation <strong>de</strong><br />
l’éleveur et du berger à leurs bêtes. Or, la référence aux in<strong>de</strong>mnisations comme juste compensation<br />
<strong>de</strong>s pertes interroge la considération <strong>de</strong> leur métier par la société. Ainsi, l’ensemble du travail <strong>de</strong><br />
sélection génétique, l’investissement professionnel ne sont pas comptabilisés. De même, la<br />
dimension affective et psychologique dans les attaques <strong>de</strong> loup, non quantifiable mais pourtant<br />
importante, ne peut être in<strong>de</strong>mnisée.<br />
De ces quelques pistes <strong>de</strong> réflexion, ressort le sentiment <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> l’élevage d’être incompris<br />
dans leur travail et dans les valeurs auxquelles ils se réfèrent. Mais cette incompréhension émane<br />
d’acteurs qui, leur semble-t-il, possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s intérêts et <strong>de</strong>s enjeux dominants dans cette société.<br />
‣ Procès du loup<br />
L’autre procès, dressé par les détracteurs du loup et portant sur le loup, met en lumière les<br />
divergences sur la manière d’appréhen<strong>de</strong>r la faune sauvage. <strong>Le</strong>urs arguments convergent vers une<br />
même idée, celle que le loup ne présente pas les caractéristiques d’un animal sauvage.<br />
La plus importante <strong>de</strong>s controverses, par l’ampleur prise sur la scène nationale, porte sur l’origine du<br />
retour du loup en France 73 . Pour ses partisans, le loup serait revenu spontanément d’Italie, profitant<br />
d’un contexte <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> l’environnement, <strong>de</strong> fermeture <strong>de</strong>s milieux et <strong>de</strong> populations d’ongulés<br />
importantes. A l’inverse, les détracteurs du loup soutiennent la thèse d’un retour artificiel, au moyen <strong>de</strong><br />
réintroductions clan<strong>de</strong>stines.<br />
Cette controverse impulse une série d’arguments visant à prouver que le loup n’a pas le<br />
comportement et les caractéristiques physiques d’un animal sauvage. En particulier, il n’aurait pas le<br />
comportement naturel décrit par ses partisans et tuerait <strong>de</strong>s brebis sans les manger ou la faune<br />
sauvage sans aucun discernement entre animaux mala<strong>de</strong>s ou en pleine santé. La présence du<br />
prédateur constituerait un réel problème pour le pastoralisme, en le mettant en péril. Or, les bienfaits<br />
écologiques et paysagers du pastoralisme seraient bien supérieurs à ceux générés par la présence du<br />
prédateur. En outre, le loup constituerait un danger pour l’homme.<br />
Pour ses partisans, le loup est un animal naturel, dont l’intérêt écologique est incontestable. Symbole<br />
<strong>de</strong> la naturalité <strong>de</strong>s milieux, il procé<strong>de</strong>rait à un nettoyage <strong>de</strong>s populations animales, en sélectionnant<br />
les proies les plus faibles.<br />
‣ Quelle interprétation du procès du loup <br />
73<br />
L’ampleur prise par cette controverse a été telle qu’une commission d’enquête parlementaire s’est saisie initialement <strong>de</strong> cette<br />
question (Estrosi C. et Spagnou D., 2003).<br />
ACTeon – Cemagref – Evaluation <strong>de</strong> l’impact socio économique du loup sur les systèmes pastoraux dans les Alpes<br />
Françaises<br />
<strong>Rapport</strong> <strong>Phase</strong> I - Dec 2009<br />
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