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09.01.2015 Views

64 LE PRIVILEGIUM FORI tion à laquelle finira par s'arrêter le droit canonique, mais non sans quelque hésitation. Le grand canoniste Jluguccio maintenait au clerc bigame son privilège de juridiclion pour deux raisons : et parce qu'il reste tenu de porter la tonsure, et parce que certains textes, précisément les canons espagnols dont il vient d'être question, autorisent même à les maintenir et à les promouvoir dans le clergé '. Mais Johannes Teutonicus le reprenait sur ce point : d'après lui le bigame perd son privilège ipso facto ". Entre ces deux opinions extrêmes une théorie intermédiaire fut produite : le bigame ne perd pas son privilège ipso facto, il doit en être dépouillé par sentence du juge ecclésiastique ^ Parmi les grands canonistes qui les premiers glosèrent les décrélales de Grégoire IX, l'opinion sévère paraît l'emporter. GoiTrcous déclare le bigame entièrement déchu du privilège *. Bernard de Parme déclare brièvement : « nullo piivilogio clericali gaudere débet » ^ Uostiensis dans sa Somme est aussi rigou- 1. Johannes Andréa, glose sur le mot allercalionis, c. 1, in VI", I, xii : « Dicebat Huguccio quotl biganius gaudebat privilégie clericali et canonis, quia tenebatur portare tonsurani, supra de vita et honeslate clericorum, clericus si tonsui'a (c. 6, X, III. ij et erat de foro ecclesiu!, argumentuin XXXI Dist. diclum (dictum final) et ad minores ordincs ascendere poterat, XXXIV Dist., siquis vidt(am2 (c. 13) in fine a contrario sensu (c'est le c. 18 des Apôtres, qui, à une époque antérieure à la multiplication des ordres niineurs, ne mentionne comme interdits aux bigames que l'épiscopat, la prêtrise et le diaconat), et c. leclor (c. l^) eadem Dislinclione (c. 3 du concile de Tolède) ». 2. « (viduam duxeril) Et ita non incidit in canonem qui eum verbcravit Hugo dicit quod incidit, quia iste coronam tenetur portare... Tu die quod, ubi contraxerit cum vidua vel corrupta, statim privatur omni privilegio ». Glose sur le c. 5, Dist. LXXXIV. 3. Argument du subjonctif denudetur du c. quisqtiis. Cette opinion est rapportée dans l'historique de la question que fait Johannes Andreae sur le c. 1, in VI°, de biqamis, 1, xn, sur le mot allercalionis. La glose de Johannes Teutonicus dit au contraire stalim privatur, c'est la perte ipso jure. 4. « Decretalis illa (c. 7, X, de clei'icis conjugal is, 111, m) potest intelligi in eo qui contraxit cum vidua, qui irrecuperabiliter a ciericatu recessit, ita ut ulterius ad clericatura redire non possit... et propterea exuitur omni privilegio clericali, ut LXXXIV dist. quisquis ». Goffredus, de clericis conjugatis, n» 3. 5. Glose sur le c. 7, X, de clericis conjugalis, III, iii.

PREMIÈRE PARTIE 65 reiix *. Toutefois dans sa Lectura Hostiensis, tout en déclarant le bigame déchu du privilège de for, n'ose pas, étant donnés les termes si généraux et si formels du c. si guis suadente \ le tenir pour déchu du 'privilegiimi canonis \ Le bigame pourra donc être jugé par le juge séculier, mais celui-ci ne pourra ni le contraindre, ni l'exécuter, ou du moins il ne le pourrait qu'après dégradation. La solution d'Uuguccio, le maintien absolu de l'un et de l'autre privilège, n'avait plus de partisans parmi les canonistes. C'était cependant la coutume, du moins en France. En effet, dans le même temps que les canonistes discutaient le privilège du bigame et que les plus grands d'entre eux se mettaient d'accord pour le lui dénier, la coutume ecclésiastique française le leur accordait généralement. Les témoignages n'en manquent pas. Johannes Andréa^ lui-même dans son commentaire sur la décrétale altercationis, cîte, comme exemple de coutume favorable aux bigames, la coutume de plusieurs diocèses de France Et '*. cette coutume ecclésiastique était respectée des tribunaux séculiers, comme en témoigne un jugement de l'échiquier de Normandie en 4258. « Item bona cujusdam clerici conjugati, efiam bigami, qui se suspendit, eidem episcopo fuerunt reddita, praesentibus Odone Hothomagensi archiepiscopo, Juliano milite cum mnltis aliis » ^ 1. « Utrum autem possit habere simplex beneficium, distingue, an habeat spem rodeundi ad clericatuni vel non habeat spem, ut quia contraxit cum vidua, in quo casu subjacet quaestis et talliis et temporali jurisdictioni ». Hostiensis, Summa aurea, de clericis conjugatis, § quam pœnam, vers, ulrum autem. 2. c. 29, C. XVII, q. 4. 3. « In uxorem, quam si duxisset in minoribus ordinibos, esset omni privilégie denudatus,... salvo privilegio canonis 17, q. 4, si quis suadente, quod per generalem sermonem non audeo asserere revocatum ». Hostiensis, Lectura, sur le c. 7, X, de bigamis, I, xxi. 4. Consuetudine, quae erat in quibusdam locis Franciae » Glose sur le c. d, in Vl», de bigamis, I, xii. 5..L. Delisle, Jugements de Véchiquier de Normandie, n" 806.

PREMIÈRE PARTIE 65<br />

reiix *. Toutefois dans sa Lectura Hostiensis, tout en déclarant<br />

le bigame déchu du privilège de for, n'ose pas, étant<br />

donnés les termes si généraux et si formels du c. si guis<br />

suadente \ le tenir pour déchu du 'privilegiimi canonis \ Le<br />

bigame pourra donc être jugé par le juge séculier, mais<br />

celui-ci ne pourra ni le contraindre, ni l'exécuter, ou du<br />

moins il ne le pourrait qu'après dégradation. La solution<br />

d'Uuguccio, le maintien absolu de l'un et de l'autre privilège,<br />

n'avait plus de partisans parmi les canonistes.<br />

C'était cependant la<br />

coutume, du moins en France.<br />

En effet, dans le même temps que les canonistes discutaient<br />

le privilège du bigame et que les plus grands d'entre<br />

eux se mettaient d'accord pour le lui dénier, la coutume<br />

ecclésiastique française le leur accordait généralement. Les<br />

témoignages n'en manquent pas. Johannes Andréa^ lui-même<br />

dans son commentaire sur la décrétale altercationis, cîte,<br />

comme exemple de coutume favorable aux bigames, la coutume<br />

de plusieurs diocèses de France Et '*. cette coutume<br />

ecclésiastique était respectée des tribunaux séculiers, comme<br />

en témoigne un jugement de l'échiquier de Normandie en<br />

4258.<br />

« Item bona cujusdam clerici conjugati, efiam bigami,<br />

qui se suspendit, eidem episcopo fuerunt reddita,<br />

praesentibus<br />

Odone Hothomagensi archiepiscopo, Juliano milite cum<br />

mnltis aliis » ^<br />

1. « Utrum autem possit habere simplex beneficium, distingue, an habeat<br />

spem rodeundi ad clericatuni vel non habeat spem, ut quia contraxit<br />

cum vidua, in quo casu subjacet quaestis et talliis et temporali jurisdictioni<br />

». Hostiensis, Summa aurea, de clericis conjugatis, § quam pœnam,<br />

vers, ulrum autem.<br />

2. c. 29, C. XVII, q. 4.<br />

3. « In uxorem, quam si duxisset in minoribus ordinibos, esset omni privilégie<br />

denudatus,... salvo privilegio canonis 17, q. 4, si quis suadente, quod<br />

per generalem sermonem non audeo asserere revocatum ». Hostiensis, Lectura,<br />

sur le c. 7, X, de bigamis, I, xxi.<br />

4. Consuetudine, quae erat in quibusdam locis Franciae » Glose sur le c. d,<br />

in Vl», de bigamis, I, xii.<br />

5..L. Delisle, Jugements de Véchiquier de Normandie, n" 806.

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