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122 LE PRIVILEGIUM FORI dans l'Eglise de France, au moins dans un certain nombre de diocèses, une coutume interdisant la dégradation et la livraison même des clercs mariés ou bigames. Le pape pouvait présenter comme une concession au pouvoir séculier, comme un régime exceptionnel et spécial à des clercs indignes, ce qui était encore peu de temps auparavant le droit commun canonique et particulièrement le droit ecclésiastique français. En 1274, la cour du roi eut à résoudre la question pour le comté de Toulouse récemment réuni au domaine. Le roi, succédant aux droits du comte, avait à cœur de n'en rien laisser perdre. et il Maintes contestations s'élevèrent cependant, fallut, en 4273, que Philippe IH expédiât « deux de ses clercs, Foulques de Laon et Thomas de Paris, pour connaître des réclamations * ». Or parmi les réclamants se trouvait l'archevAque de Toulouse, et parmi les questions litigieuses celle de la répression des crimes des clercs. Les deux enquêteurs du roi ne se jugèrent pas assez éclairés pour décider. Ils référèrent à la cour, qui répondit par une consultation en 9 articles aux 9 questions touchant la compétence respective des deux juridictions que les enquêteurs leur avaient posées ^. L'article 3 concernait la punition des clercs homicides. A qui, demandaient les deux enquêteurs, de l'évêque ou du juge royal, doit être remis le clerc ayant commis un homicide dans le territoire de la justice du roi ^ La cour ne dumtaxat criminibus deprehensos, que sanguinis penara requirunt, eis primitus clericali gradu previa ratione privatis, puniant, secundum quod justitia suadebit, consuetudine contraria non obstante », 31 janv. 1260, Trésor des Chartes, n» 4380. 1. Langlois, Philippe III le Hardi, p. 110 et suiv. 2. Ord. I, 301 ; Isambert, 1, p. 655 ; Hist. du Languedoc, X pr. , col. 133. 3. « Ex quo clerici interficientes homines in jurisdictione nostra, cui committi debeant, nobis videlicet an episcopo, recurri volumus ad jus scriptum, nisi quid agi debeat consuetudo deciaret ». Ord. I, p. 30i. Les termes de la question : cui commilti debeant pourraient faire croire que la difficulté portait sur le droit de detenlio. Mais si la captio appartient parfois à une autre justice que celle qui a compétence pour juger, la detentio appartient tou-

DEUXIÈME PARTIE 123 répond pas nettement. Il faut, dit-elle, s'en référer sur ce point au droit écrit, s'il n'y a coutume contraire. Mais la cour ne dit pas ce que prescrit sur ce point le droit écrit, ni même quel est ce droit écrit auquel elle se réfère. L'expression pourrait à la rigueur s'entendre du droit canonique des décrétales. Cependant, si l'on remarque que nous sommes en pays de droit écrit, que la cour parlant, dans l'article suivant, du droit canonique, emploie une expression différente : hoc videntur sentire canones, il devient évident que la cour parle ici du droit romain '. Mais si les deux clercs du roi ont dû bien comprendre que la cour les renvoyait au Corpus juris civilù, ils ont pu encore se trouver assez embarrassés. Ils y pouvaient lire, dans la novelle 123, et dans l'authentique clericus^ qui en est tirée, que le juge séculier et le juge ecclésiastique peuvent l'un ou l'autre être indifféremment saisis et que, de quelque manière que commence la procédure, elle aboutit nécessairement à une dégradation et une peine temporelle. Mais ils lisaient aussi dans l'authentique Statidmiis que le droit civil était désormais conforme au droit ecclésiastique. Ramenés ainsi aux textes contradictoires des décrétales de Grégoire IX, ils ne pouvaient guère se décider que par la communis opinio doctorum^ qui déjà alors était assez bien fixée : trois la tradition, interdite en principe, peut avoir lieu dans ou quatre cas limitativement déterminés. L'incertitude des commissaires n'était pas encore levée par là. Il leur fallait de plus s'enquérir si une coutume conjours, sauf emprunt de prison, à la justice qui doit instruire l'affaire et juger le criminel. C'est donc bien de la compétence pour juger qu'il s'agit. D'ailleurs l'article 5 suppose que l'évêque peut, en refusant de condamner l'homicide, priver le roi de son droit de confiscation. C'est donc bien l'évêque qui juge et la difficulté porte dans l'article 3 sur les droits qui appartiennent, à côté de l'évêque, à la justice du roi. 1. L'art. 1 vise également \e jus scriptum. Mais comme il renvoie à la règle aclor sequitiir forum rei, on ne peut savoir s'il se réfère au droit romain ou au droit canonique, qui a emprunté la règle romaine (c. 5, X, II, n). 2. Sur la 1. 31, C. I. m. La glose sur la novelle 123 dit en effet que l'authentique corrige le droit ancien. Voir plus haut, p. 38.

DEUXIÈME PARTIE 123<br />

répond pas nettement. Il faut, dit-elle, s'en référer sur ce<br />

point au droit écrit, s'il n'y a coutume contraire. Mais la<br />

cour ne dit pas ce que prescrit sur ce point le droit écrit, ni<br />

même quel est ce droit écrit auquel elle se réfère. L'expression<br />

pourrait à la rigueur s'entendre du droit canonique<br />

des décrétales. Cependant, si l'on remarque que nous<br />

sommes en pays de droit écrit, que la cour parlant, dans<br />

l'article suivant, du droit canonique, emploie une expression<br />

différente : hoc videntur sentire canones, il devient évident<br />

que la cour parle ici du droit romain '.<br />

Mais si les deux clercs du roi ont dû bien comprendre<br />

que la cour les renvoyait au Corpus juris civilù, ils ont pu<br />

encore se trouver assez embarrassés. Ils y pouvaient lire,<br />

dans la novelle 123, et dans l'authentique clericus^ qui en<br />

est tirée, que le juge séculier et le juge ecclésiastique peuvent<br />

l'un ou l'autre être indifféremment saisis et que, de quelque<br />

manière que commence la procédure, elle aboutit nécessairement<br />

à une dégradation et une peine temporelle. Mais ils<br />

lisaient aussi dans l'authentique Statidmiis que le droit<br />

civil était désormais conforme au droit ecclésiastique.<br />

Ramenés ainsi aux textes contradictoires des décrétales de<br />

Grégoire IX, ils ne pouvaient guère se décider que par la<br />

communis opinio doctorum^ qui déjà alors était assez bien<br />

fixée :<br />

trois<br />

la tradition, interdite en principe, peut avoir lieu dans<br />

ou quatre cas limitativement déterminés.<br />

L'incertitude des commissaires n'était pas encore levée<br />

par là. Il leur fallait de plus s'enquérir si une coutume conjours,<br />

sauf emprunt de prison, à la justice qui doit instruire l'affaire et<br />

juger le criminel. C'est donc bien de la compétence pour juger qu'il s'agit.<br />

D'ailleurs l'article 5 suppose que l'évêque peut, en refusant de condamner<br />

l'homicide, priver le roi de son droit de confiscation. C'est donc bien l'évêque<br />

qui juge et la difficulté porte dans l'article 3 sur les droits qui appartiennent,<br />

à côté de l'évêque, à la justice du roi.<br />

1. L'art. 1 vise également \e jus scriptum. Mais comme il renvoie à la<br />

règle aclor sequitiir forum rei, on ne peut savoir s'il se réfère au droit romain<br />

ou au droit canonique, qui a emprunté la règle romaine (c. 5, X, II, n).<br />

2. Sur la 1. 31, C. I. m. La glose sur la novelle 123 dit en effet que l'authentique<br />

corrige le droit ancien. Voir plus haut, p. 38.

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