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24 LE PRIVILEGIUM FORI qu'un conflit avec Henri II ne fît passer à son adversaire l'obédience de l'Angleterre. Il pensait assurément qu'avec un peu de bonne volonté et de souplesse, Thomas Becket pouvait accepter l'article, sans compromettre irrémédiablement les droits de l'Église. Si le pape évite ainsi de se prononcer pendant le conflit, nous ne pouvons supposer que la décrétale ait été écrite avant que la mort de Thomas ait obligé le roi à une soumission sans réserve (H 72). On pourrait d'ailleurs trouver dans la décrétale elle-même quelque raison d'en placer la composition vers H77. Alexandre déclare, en efTet, dans le préambule de sa réponse à l'archevêque de Saierne que, plus occupé que jamais d'affaires nombreuses et variées, il n'aurait pas trouvé le temps de lui répondre, s'il ne l'avait tenu en particulière estime et affection \ Le pontificat d'Alexandre fut assez agité pour qu'il ait pu à tout moment se dire avec vérité occupé de nombreuses affaires. Mais il n'est pas impossible de trouver à quel moment il a eu des raisons particulières d'estimer et de chérir l'archevêque de Saierne. Celui-ci s'appelait Romuald. Il occupa le siège pendant toute la durée du pontificat d'Alexandre. Dans la chronique même qu'il a laissée des événements contemporains, nous voyons qu'il eut en H 77 l'occasion de rendre au pape des services éminents dont celui-ci lui témoigna sa reconnaissance. Sur l'ordre du roi de Sicile il accompagna le pape à Venise, où il négocia pour lui la paix avec l'empereur. Le pape, pour le récompenser, lui octroya le privilège de faire porter partout dans son diocèse la croix devant lui ^ Ces 1. « Licet prseter solitum et amplius solitis multis simus et variis negotiis prœpediti, ita quod non sit nobis facile aliquorum consultationibus respondere, illa tamen spécial! gratia quam ad personam tuam habemus et caritate cogimur fraterna, quid sentiamus de his super quibus consuluit nos prudentia tua tibi, quantumcumque alii simus intenti, praesentibus litteris aperire », c. 3, X, de sponsa duoruni, IV, iv. ^. Monumenta Germaniae historien, Scriptores, XIX, p. 459,

DEUXIÈME PARTIE 25 relations entre Alexandre et Romuald justifient les termes de la décrétale. Ces considérations sur la date de la décrétale amènent donc à penser que le pape a attendu la mort de Thomas Becket pour adopter et imposer au droit canonique 1^ thèse, contraire à toute la doctrine antérieure, que l'archevêque a su faire triompher. La similitude d'arguments chez Becket d'une part et dans la décrétale de l'autre est une présomption de plus. Si l'on ne trouve pas dans le c. at si clerici la citation même qu'aimait à faire Becket, « non judicabit Deus bis in id ipsum » \ du moins y rencontre-t-on, à-côté d'un argument qui vient du droit romain, une formule qui paraît bien tirée du même passage de Nahum, mais lu dans la vulgate et non dans la version des Septante. Le juge, dit d'abord le pape, épuise ses pouvoirs par la condamnation -. La règle vient d'un fragment de Paul ^ Donc en prononçant et en exécutant la dégradation, le juge ecclésiastique a épuisé ses pouvoirs et ne peut aggraver après coup la sentence en livrant le condamné au bras séculier. Le second argument est que le juge ne peut « duplici eum contritione conterere », Ceci semble bien venir du Nahum de la Vulgate « afïlixi te et non afïligam te ultra. Et conteram virgam ejus de dorso tuo et vincula tua disrumpam ». Balde en commentant la décrétale at si clerici ne manque pas de faire le rapprochement : « Tertio quapritur utrum episcopus qui deposuit clericum debeat ipsum tradere judici seculari. Respondetur quod non, duplici ratione : prima quia est perfunctus officio suo, secunda quia non débet addere alïlictionem alïlicto ». 1. Nahum, f, 12, dans la version des Septante. Willelmus Gantuariensis, Vila Thomae, 19, Materials, l, p. 18; Anonymus II, Materials, l\, p. 96; Summa causse, Materials, IV, p. 202. 2. « Quum suo sit functus officio ». 3. « Judex, posteaquam semel sententiam dixit, postea judex esse desinit. Et hoc jure utimur ut judex qui semel pluris vel minoris condemnavit, amplius corrigere sententiam suam non possit. Semel enim raale seu bcne officio functus est ». Paul, I. 55, Dig., XLII, 1.

24 LE PRIVILEGIUM FORI<br />

qu'un conflit avec Henri II ne fît passer à son adversaire<br />

l'obédience de l'Angleterre. Il pensait assurément qu'avec<br />

un peu de bonne volonté et de souplesse, Thomas Becket<br />

pouvait accepter l'article, sans compromettre irrémédiablement<br />

les droits de l'Église.<br />

Si le pape évite ainsi de se prononcer pendant le conflit,<br />

nous ne pouvons supposer que la décrétale ait été écrite<br />

avant que la mort de Thomas ait obligé le roi à une soumission<br />

sans réserve (H 72).<br />

On pourrait d'ailleurs trouver dans la décrétale elle-même<br />

quelque raison d'en placer la composition vers H77. Alexandre<br />

déclare, en efTet, dans le préambule de sa réponse à<br />

l'archevêque de Saierne que, plus occupé que jamais<br />

d'affaires nombreuses et variées, il n'aurait pas trouvé le<br />

temps de lui répondre, s'il ne l'avait tenu en particulière<br />

estime et affection \ Le pontificat d'Alexandre fut assez<br />

agité pour qu'il ait pu à tout moment se dire avec vérité<br />

occupé de nombreuses affaires. Mais il n'est pas impossible<br />

de trouver à quel moment il a eu des raisons particulières<br />

d'estimer et de chérir l'archevêque de Saierne.<br />

Celui-ci s'appelait Romuald. Il occupa le siège pendant<br />

toute la durée du pontificat d'Alexandre. Dans la chronique<br />

même qu'il a laissée des événements contemporains, nous<br />

voyons qu'il eut en H 77 l'occasion de rendre au pape des<br />

services éminents dont celui-ci lui témoigna sa reconnaissance.<br />

Sur l'ordre du roi de Sicile il accompagna le pape à<br />

Venise, où il négocia pour lui la paix avec l'empereur. Le<br />

pape, pour le<br />

récompenser, lui octroya le privilège de faire<br />

porter partout dans son diocèse la croix devant lui ^ Ces<br />

1. « Licet prseter solitum et amplius solitis multis simus et variis negotiis<br />

prœpediti, ita quod non sit nobis facile aliquorum consultationibus respondere,<br />

illa tamen spécial! gratia quam ad personam tuam habemus et caritate<br />

cogimur fraterna, quid sentiamus de his super quibus consuluit nos prudentia<br />

tua tibi, quantumcumque alii simus intenti, praesentibus litteris aperire »,<br />

c. 3, X, de sponsa duoruni, IV, iv.<br />

^. Monumenta Germaniae historien, Scriptores, XIX, p. 459,

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