AXE 1 - HISTOIRE ET ARCHEOLOGIE - Iulm
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Lettres électronique — N° 3 — printemps 2005<br />
Sorbonne, 1998, 288 p. (Cultures et civilisations<br />
médiévales).<br />
Quelle perception l’homme médiéval avait-il du<br />
temps qu’il fait La publication des travaux du<br />
séminaire de 1996/1997 dirigé par Claude Thomasset<br />
à Paris IV-Sorbonne tente de répondre à cette<br />
question. De tout temps, l’homme a observé le ciel,<br />
cherchant à comprendre les phénomènes atmosphériques.<br />
Les contributions réunies par Joëlle Ducos et<br />
Claude Thomasset montrent que la météorologie<br />
recèle des mystères féconds dans le développement<br />
de l’imaginaire médiéval. L’ouvrage propose des<br />
approches multiples, interrogeant les textes scientifiques,<br />
des univers culturels différents comme la Bible<br />
ou le Coran, la littérature et le traitement cinématographique<br />
du Moyen Age au travers des films dont<br />
l’action se situe à l’époque médiévale. On apprécie<br />
tout particulièrement cette diversité des articles qui se<br />
révèle enrichissante, car elle met l’accent sur l’ampleur,<br />
la complexité et l’importance du sujet abordé.<br />
Plusieurs domaines des sciences médiévales sont<br />
étudiés : médecine et diététique, textes encyclopédiques,<br />
météorologie et théorie des climats. À son<br />
origine, la diététique s’intéresse à l’influence des<br />
saisons : c’est une conception météorologique de la<br />
médecine. Peu à peu, les textes laissent de côté la<br />
question des saisons. La fin du Moyen Age, confrontée<br />
aux épidémies, a concentré son attention sur<br />
la corruption de l’air, fait majeur par rapport à l’influence<br />
des saisons qui paraissait alors plus marginale.<br />
La météorologie médiévale pose la question des<br />
relations entre théorie et pratique, fait notable car<br />
habituellement, au Moyen Age, la scientia naturalis se<br />
passe de l’examen des realia, qui ne sont pas nécessaires<br />
à la mise en place d’un modèle abstrait d’explication.<br />
Au cours des XIII e et XIV e siècles, le réel se<br />
voit intégré dans le système théorique aristotélicien et<br />
on constate notamment l’importance de l’expérience<br />
des marins dans cette prise en compte de l’observation.<br />
Les textes encyclopédiques, à vocation vulgarisatrice,<br />
proposent une explication à la violence des<br />
météores pour effacer la peur des ignorants. Sous<br />
l’emprise de la pensée aristotélicienne, la science<br />
médiévale cherche des causes rationnelles, loin de<br />
ceux qui voient dans les phénomènes atmosphériques<br />
la manifestation de la puissance divine. Les<br />
psaumes se rattachent à cette dernière idée. Des<br />
textes historiographiques attribuent les événements<br />
climatiques à la volonté divine, comme le tonnerre,<br />
voix de Dieu ; des faits de l’histoire des hommes sont<br />
souvent présentés en relation avec des météores,<br />
ainsi rencontre-t-on souvent l’association déterministe<br />
entre comète et famine. Le désordre du climat peut<br />
être considéré comme le signe de la colère divine. À<br />
cette conception religieuse s’ajoutent les croyances et<br />
les rituels pour conjurer le mauvais temps ou pour<br />
provoquer certains phénomènes comme la pluie ; ces<br />
pratiques proviennent d’un fond païen plus ou moins<br />
christianisé, signalons par exemple les invocations à<br />
des saints réputés avoir une influence sur le temps.<br />
Le paysage idéal de la littérature médiévale<br />
propose des jardins merveilleux où il fait toujours<br />
beau, où le cycle de la nature est suspendu, c’est un<br />
climat statique, nous sommes en dehors de la réalité.<br />
La littérature se nourrit aussi des théories scientifiques,<br />
comme on le perçoit dans la poésie latine,<br />
chez Dante et Eustache Deschamps. Les textes<br />
littéraires n’hésitent pas non plus à voir dans le temps<br />
qu’il fait la manifestation du divin : le Conte du Graal,<br />
Parzival ou les poèmes d’Eustache Deschamps le<br />
montrent. Les auteurs accordent une charge symbolique<br />
aux météores. Évoquer le temps qu’il fait<br />
participe d’un projet esthétique, les notations météorologiques<br />
traduisent une recherche stylistique et<br />
donnent lieu à une utilisation métaphorique. Le temps<br />
qu’il fait peut traduire un état subjectif, ce que l’on<br />
éprouve. Le renvoi aux phénomènes atmosphériques<br />
correspond à l’expérience de tout un chacun, est immédiatement<br />
compris par tous et atteint la sensibilité<br />
de tout lecteur.<br />
De différentes manières, les études rassemblées<br />
montrent comme le temps qu’il fait touche les<br />
hommes, réalité que notre époque moderne oublie<br />
parfois et que la nature lui rappelle alors par quelque<br />
catastrophe. La météorologie implique de s’interroger<br />
sur la vision que l’on a de l’homme au sein du cosmos,<br />
sur ses rapports avec la nature et bien sûr, à<br />
l’époque médiévale, avec Dieu. Depuis le Moyen Age,<br />
l’homme questionne les perturbations du temps en se<br />
demandant avec inquiétude si elles ne sont pas le<br />
signe de la fin du monde. Les phénomènes atmosphériques,<br />
suscitant la curiosité ou la peur, demandent<br />
à être expliqués et la science se charge de<br />
réfléchir à l’ordre de l’univers. Science et littérature ne<br />
sont pas des domaines étanches, les textes littéraires<br />
s’abreuvent des connaissances scientifiques qui<br />
alimentent un imaginaire riche de multiples images.<br />
Une fusion s’opère entre données scientifiques, pensée<br />
religieuse et littérature. Cet ouvrage ouvre des<br />
pistes de réflexion sur des points fondamentaux de la<br />
relation de l’homme au monde et révèle ainsi un<br />
grand sujet d’étude qui n’avait pas encore été abordé<br />
(Compte rendu de Fleur VIGNERON, Univ. Angers)<br />
FABRE Nicole, L’Inconscient de Descartes, Paris,<br />
Ed. Bayard, 3, rue Bayard, 75008 Paris 2003, ISBN 2-<br />
227-47308-6, 21 €.<br />
Descartes est sans conteste un des philosophes<br />
les plus populaires et comme on l’a dit, à tort ou à<br />
raison, un des plus français. Les biographies sont<br />
nombreuses, et les détails de sa vie connus : qui ne<br />
s’est jamais imaginé Descartes lisant dans son lit, isolé<br />
dans son « poêle » ou en campagne militaire Et<br />
pourtant, connaissons-nous vraiment l’homme Des-<br />
42 Association Recherche sur l’Image — DIJON