Voir le dossier de presse "Ménard / Laurier" (pdf ... - Les Subsistances
Voir le dossier de presse "Ménard / Laurier" (pdf ... - Les Subsistances
Voir le dossier de presse "Ménard / Laurier" (pdf ... - Les Subsistances
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
JANVIER<br />
2008<br />
CIRQUE-<br />
CONTORSION<br />
16 5 MAXI<br />
LA SOIRÉE<br />
MÉNARD /<br />
LAURIER<br />
ÀPARTIR<br />
DE12ANS<br />
CRÉA<br />
TION<br />
MENTIONS<br />
Production : Compagnie Angela Laurier<br />
Coproduction et rési<strong>de</strong>nce :<br />
<strong>Les</strong> <strong>Subsistances</strong> / Lyon / France<br />
Coproductions : La Verrerie d’Alès, Pô<strong>le</strong><br />
cirque Languedoc-Roussillon ; Court Toujours<br />
Scène nationa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Poitiers, Centre<br />
Régional <strong>de</strong>s Arts du Cirque <strong>de</strong> Basse-Normandie,<br />
Cherbourg, Le Parc <strong>de</strong> la Vil<strong>le</strong>tte,<br />
Paris ; L’agora, scène conventionnée, Boulazac<br />
Avec <strong>le</strong> soutien <strong>de</strong> : Espace périphérique<br />
<strong>de</strong> la Vil<strong>le</strong>tte, Paris Fondation Beaumarchais,<br />
SACD, Centre National du Théâtre<br />
INTERVIEW<br />
Où en êtes-vous <strong>de</strong>puis janvier 2007 et la présentation d’une première forme aux <strong>Subsistances</strong> Comment imaginez-vous<br />
continuer votre travail pour créer une forme longue <br />
Pour continuer ce travail, j’essaie maintenant <strong>de</strong> rentrer un peu dans la peau <strong>de</strong>s femmes <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong>, pour tenter <strong>de</strong> me retrouver<br />
moi. Pour commencer, j’ai dû passer à travers <strong>le</strong>s mots du père, du frère. Maintenant, je vais passer par <strong>le</strong>s mots <strong>de</strong> la mère. Je l’ai<br />
filmée <strong>de</strong>rnièrement au Québec, el<strong>le</strong> par<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’enfantement, <strong>de</strong> tout ce que je n’ai pas vécu, <strong>de</strong> ce que je rejette, moi qui n’ai pas voulu<br />
avoir d’enfant. J’ai besoin <strong>de</strong> <strong>le</strong>s entendre beaucoup, tous, pour essayer <strong>de</strong> comprendre où j’ai été dans cette histoire, c’est comme si<br />
j’avais été spectatrice <strong>de</strong> tout ça. Ce spectac<strong>le</strong> c’est un moyen d’entrer. Il fallait que je reprenne un rapport avec mon père, là où j’en<br />
étais, ou je l’assassinais ou j’essayais <strong>de</strong> <strong>le</strong> comprendre. Et je voulais reprendre un autre rapport avec mon frère schizophrène.<br />
La place aux femmes alors <br />
J’ai choisi <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r dans <strong>le</strong>s premières quarante minutes du rapport père-fils, du conflit, <strong>de</strong>s médicaments. <strong>Les</strong> paro<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la mère vont<br />
s’ajouter, et puis d’autres images <strong>de</strong> notre voyage dans l’ouest canadien, où il a y eu <strong>de</strong>s moments d’émerveil<strong>le</strong>ment. Après plusieurs jours<br />
sur la route à traverser <strong>le</strong> Canada d’est en ouest, nous nous sommes retrouvés sur notre lieu <strong>de</strong> naissance. Je n’y étais pas retournée <strong>de</strong>puis<br />
trente-sept ans, c’était très émouvant d’entendre par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> mon père, comment il était lorsqu’il était jeune, lui qui avait choisi d’al<strong>le</strong>r faire<br />
sa vie dans <strong>le</strong>s bois, d’al<strong>le</strong>r défricher, creuser <strong>de</strong>s puits, faire venir l’é<strong>le</strong>ctricité sur <strong>de</strong>s terres où il n’y avait rien et où <strong>de</strong>s petites<br />
communautés s’entraidaient au début <strong>de</strong>s années 50. Moi j’y suis restée jusqu’à 5 ans, mon frère Dominique jusqu’à 9 ans.<br />
C’est un retour aux origines <br />
J’ai réalisé que je faisais ce spectac<strong>le</strong> pour trouver ma place… sans doute parce que je n’ai pas créé ma propre famil<strong>le</strong>… et puis pour<br />
trouver ma paro<strong>le</strong>, parce que eux, tous, ils par<strong>le</strong>nt beaucoup, beaucoup. Ils sont très bavards et moi je suis cel<strong>le</strong> qui ne par<strong>le</strong> pas. Je<br />
commence à sortir <strong>de</strong> cette obsession confuse. Après ça, je crois que je vais passer à autre chose. Ça fait plus <strong>de</strong> dix ans que je veux<br />
arrêter mais j’avais besoin <strong>de</strong> donner un sens à ma contorsion. J’espère qu’après ça, j’arriverai à al<strong>le</strong>r vers quelque chose <strong>de</strong> moins<br />
extrême parce que l’entraînement est toujours aussi vio<strong>le</strong>nt même après plus <strong>de</strong> vingt-cinq ans <strong>de</strong> travail. Mais avec ce projet j’ai<br />
retrouvé du plaisir à m’entraîner et <strong>le</strong> plaisir <strong>de</strong> jouer.<br />
Bourdieu dit qu’il a passé sa vie à vouloir “rendre justice à l’enfant qu’il a été”. Je pense souvent à<br />
cette phrase à propos <strong>de</strong> votre travail, qu’en pensez-vous <br />
J’ai envie plutôt qu’on nous ren<strong>de</strong> justice à tous, à tous <strong>le</strong>s frères et sœurs, à toute la fratrie. On se soutenait<br />
beaucoup, mon père était très dur. Et au fond <strong>de</strong> moi je me souviens que je me disais, “même s’il est <strong>le</strong> plus fort, il<br />
ne me changera pas”. Mon père, c’était la terreur, mais il a travaillé toute sa vie pour que nous, <strong>le</strong>s neuf enfants,<br />
vivions. Souvent il nous disait “faire <strong>de</strong>s enfants c’est perpétuer la misère”. Et cette vio<strong>le</strong>nce ordinaire, el<strong>le</strong> a fait<br />
notre vie. Il disait aussi que j’étais sa préférée, parce que je réussissais. A quatorze ans je gagnais ma vie, j’étais déjà<br />
artiste, je chantais. Mais j’ai toujours refusé cette place, eu honte. Et puis, après toutes ces années, j’ai besoin <strong>de</strong><br />
comprendre ce qui nous est arrivé. En ce moment, lorsque je pense à l’enfance je pense beaucoup au suici<strong>de</strong> <strong>de</strong> ma<br />
sœur, que j’ai appris il y a peu. El<strong>le</strong> avait coupé <strong>le</strong>s ponts avec la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>puis quinze ans, alors qu’el<strong>le</strong> avait été<br />
comme ma jumel<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> a un jumeau, mais nous étions <strong>le</strong>s jumel<strong>le</strong>s toujours dans la même chambre. Moi j’étais la<br />
dure, j’avais <strong>le</strong> pouvoir sur el<strong>le</strong>, j’étais très physique, el<strong>le</strong> était très fragi<strong>le</strong>, vulnérab<strong>le</strong> et très bel<strong>le</strong>, toujours à la<br />
maison à ai<strong>de</strong>r maman, à s’occuper <strong>de</strong>s petits. Moi j’étais la peste, et el<strong>le</strong> était la douce Fanchon.<br />
Par ce spectac<strong>le</strong> vous vou<strong>le</strong>z vous battre contre l’ordre qu’imposait votre père <br />
Me battre non, je crois que je tiens beaucoup <strong>de</strong> lui, j’avais peur <strong>de</strong> cette vio<strong>le</strong>nce, peur <strong>de</strong> lui ressemb<strong>le</strong>r alors que<br />
sans cesse on me disait : “toi, t’es papa”. La contorsion m’a évité <strong>de</strong> plonger dans la vio<strong>le</strong>nce. Je me rappel<strong>le</strong>, j’étais<br />
gymnaste, j’avais dix-huit ans quand tout d’un coup j’ai décidé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> la contorsion. J’avais <strong>de</strong>s dispositions mais<br />
j’ai commencé à m’entraîner seu<strong>le</strong>. Après l’éco<strong>le</strong>, j’allais au gymnase, je p<strong>le</strong>urais, je ne comprenais pas pourquoi je<br />
faisais ça. Je me pliais, je ne savais qu’une chose : je voulais faire quelque chose que personne ne fait. J’étais fol<strong>le</strong>,<br />
je m’entraînais six fois par semaine. Il pouvait venir n’importe qui dans <strong>le</strong> gymnase, je ne me <strong>le</strong>vais pas pour dire<br />
bonjour, c’étaient mes moments sacrés. Plus tard mes sœurs me l’ont reproché. A travers ce spectac<strong>le</strong> je crois que je<br />
règ<strong>le</strong> <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> ma place, mon problème <strong>de</strong> ne pas avoir d’enfant. Je vais filmer mes neveux et nièces. J’en ai invité<br />
cinq en France. Et je vais filmer <strong>le</strong>s cinquante ans <strong>de</strong> mariage <strong>de</strong> mes parents. Pour <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong>, j’aimerais une bel<strong>le</strong><br />
image <strong>de</strong> fin avec <strong>de</strong>s enfants, <strong>de</strong> la vie.<br />
Dossier <strong>de</strong> <strong>presse</strong> 2 créations en janvier / Dossier réalisé en novembre 2007 7