le tribunal des peuples cameroun - rinoceros

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P réface Pourquoi un tribunal d'opinion pour le projet de pipeline Le projet de pipeline Tchad-Cameroun conduit par le Consortium Exxon - Pétronas - Chevron, a pour ambition affichée de ne pas apparaître comme une violence faite aux droits des peuples riverains de sa zone d'exécution, et une batterie de mesures de contrôle a été mise en place à cet effet. Le projet a été d'ailleurs parmi ceux sur lesquels s'est appuyée la revue des industries extractives de la Banque Mondiale. On le sait, les Entreprises Multinationales (ou Transnationales) sont des acteurs de premier plan dans le nouvel ordre mondial issu de l'effondrement de l'Union soviétique et de la chute du mur de Berlin. Ce rôle accru sur la scène internationale pose la question de leur responsabilité qui est désormais fortement engagée sur le plan du respect des droits humains, civils, politiques, sociaux, économiques, culturels et environnementaux. ON COMPREND MAL QUE LE CONSORTIUM TRAÎNE LES PIEDS À " TRAITER " LES RÉSERVES ÉMISES PAR LES POPULA- TIONS ET CONSIGNÉES DANS LES DOCUMENTS SIGNÉS DE CLÔTURE SOCIALE ALORS QUE CELA EN ÉTAIT LA CONDITION, LA SIGNA- TURE OBTENUE SEM- BLANT SONNER LE GLAS DES NÉGOCIATIONS. La responsabilité des entreprises multinationales peut être exigée soit directement auprès des entreprises concernées, soit indirectement auprès des Etats dans lesquels elles opèrent et surtout auprès de ceux où leur siège est établi. Une telle responsabilité peut être exigée au travers d'actions en justice, aux niveaux national, régional et international. Un certain nombre d'obstacles rend toutefois les actions difficiles, tant celles visant à obtenir réparation pour des abus, passés ou présents, d'entreprises multinationales que celles visant à une plus grande responsabilité à l'avenir, notamment : La collusion entre les multinationales et les Etats, qui n'ont pas la volonté ou la capacité de faire respecter les lois existantes ou qui offrent la possibilité aux multinationales de déroger à leur système juridique national, souvent sous la pression de leurs propres besoins économiques; Les lois et modèles de système juridique en provenance du Nord, où les sociétés ont leur siège central, qui font ainsi pencher le système en faveur de ceux qui détiennent déjà le plus de pouvoir; - La pratique suivant laquelle les entreprises incriminées se battent pour empêcher que le procès ne se déroule dans un pays favorable aux plaignants (généralement le pays d'origine) et pour le faire renvoyer dans un lieu qui leur est favorable (généralement le pays d'accueil) ; BIEN QUE L'EXPLOITA- TION DU BRUT AIT COM- MENCÉ DEPUIS FIN 2003, DE NOMBREUX PROBLÈ- MES DE LA PHASE DE CONSTRUCTION DU PRO- JET CONTINUENT D'ÊTRE POSÉS PAR LES POPULA- TIONS RIVERAINES DU PIPELINE Les techniques de dissimulation des entreprises : les ambiguïtés que les entreprises multinationales entretiennent par rapport à leur nationalité et la séparation très nette qu'elles opèrent entre la société mère et les filiales afin d'échapper à leur responsabilité légale dans tous les pays où elles sont actives ; Les règles de l'OMC, qui sont d'un piètre secours pour les demandeurs et ne s'intéressent pas vraiment aux droits des travailleurs; L'accès limité de la société civile à l'OMC et à d'autres institutions internationales; Les codes de conduite internes, qui permettent aux entreprises de se donner bonne conscience tout en éludant toute responsabilité légale; codes qui ne s'intéressent pas non plus aux demandes des victimes; Les mécanismes de mise en application peu efficaces de la plupart des instruments internationaux de réglementation. ; F O C A R F E - N o v e m b r e 2 0 0 5 Page 7
Préface Les contre-offensives des entreprises multinationales, par exemple les actions en diffamation contre les organisations qui mènent campagne contre elles; Le coût des actions en justice, qui peuvent paralyser une ONG, parfois même en cas de victoire, surtout lorsqu'elle doit se défendre contre la contre-offensive d'une entreprise. Bien que l'exploitation du brut ait commencé depuis fin 2003, de nombreux problèmes de la phase de construction du projet continuent d'être posés par les populations riveraines du pipeline. La FOCARFE a recensé près de 400 cas dans les 242 villages traversés par le projet. Les problèmes signalés sont variés : surfacturation des ouvrages réalisés en guise de compensation pour les populations, destruction des ressources en eau (rivières, puits, etc.), destruction d'infrastructures préexistantes au projet, compensations non payées, contrats non respectés, travailleurs spoliés de leurs droits, etc. Pour 354 cas présentés le 30 juin 2005 dans les locaux de COTCO (Exxon) à Yaoundé en présence d'un représentant du CPSP (organisme étatique en charge du suivi du projet au Cameroun), le consortium a fait la réponse suivante : 19 cas pour lesquels COTCO n'a pas tenu à ses engagements ; 111 cas pour lesquels COTCO a tenu à ses engagements, mais la population n'est pas satisfaite et COTCO apportera des solutions d'atténuation au cas par cas; 205 cas pour lesquels la responsabilité de COTCO est dégagée; 18 cas qui ne concernent pas COTCO. De l'examen de la base de données mise à disposition par le consortium pour justifier ses positions, il ressort de nombreux arguments diamétralement opposés à ceux fournis par les plaignants. La " L'IMPRESSION QUI SE DÉGAGE EST QUE LE CONSORTIUM N'A PAS SUIVI EN TEMPS RÉEL LA RÉALISATION DES OUVRAGES DONNÉS EN COMPEN- SATIONS AUX POPULATIONS, OU A FERMÉ LES YEUX SUR LA - MAUVAISE- QUALITÉ DE CETTE MISE EN ŒUVRE ; CE QUI A DÉBOUCHÉ SUR DES ÉQUIPE- MENTS INADÉQUATS DISTRIBUÉS UN PEU PARTOUT AUX POPULATIONS, À DES SURFACTURATIONS GROS- SIÈRES D'OUVRAGES, ETC. recommandation " émise par le GIC (Groupe International Consultatif) dans son très récent rapport de mission statutaire (9e mission), prend toute son importance: Il conseille de " s'accorder sur quoi on s'entend et sur quoi on ne s'entend pas, de constater les points de vue inconciliables et de signer la clôture sociale ", ce qui laisse entrevoir que l'objectif de la Banque Mondiale est de simplement obtenir que les différentes parties se soient assises et aient échangé leurs points de vue, quelle que soit la manière et l'issue des débats, et de se " débarrasser " de la Page 8 F O C A R F E - N o v e m b r e 2 0 0 5 clôture sociale, en un ponce pilatisme totalement consommé, alors qu'elle se posait au début du projet comme le garant de l'équité et du respect de la bonne norme. De nombreux droits sont à ce jour bafoués sans réparations : droit à la dignité humaine, à un environnement salubre, droit à la participation publique, droit à l'alimentaire, droit au consentement et à la participation avertie, respect de la souveraineté nationale, etc. L'impression qui se dégage est que le Consortium n'a pas suivi en temps réel la réalisation des ouvrages donnés en compensations aux populations, ou a fermé les yeux sur la - mauvaise- qualité de cette mise en œuvre ; ce qui a débouché sur des équipements inadéquats distribués un peu partout aux populations, à des surfacturations grossières d'ouvrages, etc. On comprend mal que le Consortium traîne les pieds à " traiter " les réserves émises par les populations et consignées dans les documents signés de clôture sociale alors que cela en était la condition, la signature obtenue semblant sonner le glas des négociations. L'impact des actions du Constructeur n'apparaît donc pas positif, et semble même franchement négatif. Les risques perçus et relevés par les ONG au début du projet s'avèrent à plus d'un titre être exacts : le projet s'est effectivement posé comme une enclave, perturbant les fragiles économies des régions traversées, le tout
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