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L'épopée des Harpes Camac - les harpes camac

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L’épopée <strong>des</strong> <strong>Harpes</strong> <strong>Camac</strong><br />

Comment une firme basée à Mouzeil, une petite localité de la campagne nantaise, a conquis en quelques années le marché<br />

de la harpe celtique avant de s’attaquer à celui de la harpe classique, au point d’en devenir l’un <strong>des</strong> leaders mondiaux.<br />

la voir si bien intégrée à la musique<br />

À bretonne, on serait en droit de penser<br />

que la harpe celtique y est utilisée depuis<br />

toujours. Pourtant, ce n’est véritablement<br />

qu’au début <strong>des</strong><br />

années 1950<br />

que la Bretagne<br />

découvre ou redécouvre,<br />

selon<br />

le point de vue<br />

adopté, la harpe<br />

dite « celtique »<br />

et la fait sienne<br />

définitivement.<br />

Ce n’est toutefois<br />

que deux<br />

décennies plus<br />

tard qu’elle<br />

devient véritablement<br />

populaire suite à l’arrivée sur la<br />

scène internationale d’un jeune musicien,<br />

Alan Stivell. La harpe celtique devient emblématique<br />

du grand mouvement d’intérêt<br />

qui se développe à ce moment-là pour une<br />

musique bretonne revisitée et modernisée,<br />

et qui prendra jusqu’à nos jours <strong>les</strong> formes<br />

<strong>les</strong> plus variées. Dans la foulée, le début<br />

<strong>des</strong> années 1970 voit s’éveiller un grand<br />

nombre de vocations pour la harpe celtique.<br />

Mais en ces années-là, se mettre à<br />

l’instrument ne va pas de soi. S’il est en effet<br />

relativement aisé de recevoir <strong>des</strong> cours<br />

d’un professeur de formation classique, la<br />

« irlandais ». C’est auprès d’elle que se<br />

sont approvisionnées dès 1954 <strong>les</strong> jeunes<br />

musiciennes de la Telenn Bleimor, premier<br />

ensemble breton de <strong>harpes</strong> celtiques, où<br />

Rozenn Guilcher, Mariannig Larc’hantec,<br />

Françoise Johannel, Kristen Noguès, entre<br />

autres, ont fait leurs classes. Quant à<br />

Georges Cochevelou, père d’Alan Stivell,<br />

sa démarche avait été de redonner vie à<br />

une très hypothétique « harpe bretonne »,<br />

achevée en 1953. Sa production demeura<br />

artisanale, et répondit à une demande<br />

émanant quasi exclusivement <strong>des</strong> milieux<br />

musicaux bretons. Elena Polonska, harpiste<br />

spécialisée dans <strong>les</strong> musiques anciennes,<br />

qui acquit l’un de ses modè<strong>les</strong> « bardiques<br />

», fut donc l’exception. À la vérité,<br />

personne n’aurait pu prévoir le succès<br />

connu par l’instrument dans <strong>les</strong> années 70.<br />

Aucun facteur d’instrument n’était donc à<br />

même de répondre à la demande qui se<br />

manifesterait alors.<br />

la fin <strong>des</strong> années 1960, ces « pionniers<br />

» voient arriver <strong>des</strong> artisans de<br />

À<br />

Plouisy, petite commune <strong>des</strong> Côtes-d’Armor<br />

proche de Guingamp. Michel et<br />

Claude Le Roux, deux frères installés comme<br />

ébénistes, venaient à leur tour de se<br />

lancer, par le plus grand <strong>des</strong> hasards, dans<br />

la fabrication de l’instrument. Claude, associé<br />

par la suite au luthier brestois Daniel<br />

quelques instruments produits outre-Manche<br />

sont bien importés à l’époque, mais en<br />

quantité très limitée, à <strong>des</strong> prix prohibitifs,<br />

et jamais en quantité suffisante pour satisfaire<br />

la demande. C’est ainsi que plus d’un<br />

aspirant harpiste n’a d’autre choix que de<br />

se lancer de soi-même, et avec plus ou<br />

moins de bonheur, dans la construction de<br />

sa propre harpe. Le contexte musical <strong>des</strong><br />

années 1970 lui facilite la tâche. C’est le<br />

temps de l’efflorescence du folk, un mouvement<br />

musical revivaliste venu <strong>des</strong> USA<br />

via la Grande-Bretagne, qui provoque à<br />

travers l’Europe un formidable intérêt pour<br />

tout ce qui touche aux musiques traditionnel<strong>les</strong><br />

de tous horizons. Parallèlement, on<br />

redécouvre <strong>les</strong> musiques anciennes. Partant,<br />

on retrouve et on remet à l’honneur<br />

nombre d’instruments, souvent communs<br />

à toutes ces traditions. Ateliers et stages<br />

d’initiation à la musique et à la lutherie<br />

traditionnel<strong>les</strong> font florès. Mais tout cela<br />

reste ponctuel, et ne peut en aucune façon<br />

répondre à une demande croissante<br />

d’instruments traditionnels. Il est alors évident<br />

que la pratique de la harpe celtique<br />

ne pourra se développer qu’à partir du<br />

moment où l’ère de la fabrication en série<br />

aura succédé à celle de l’artisanat. Et il y<br />

a fort à parier que sa pratique aurait encore<br />

longtemps stagné, si la firme <strong>Camac</strong><br />

n’était apparue, et ne s’était imposée sur<br />

le marché.<br />

1<br />

question de l’instrument pose problème,<br />

tant il est difficile de s’en procurer un.<br />

On ne compte alors en France que deux<br />

fabricants « historiques », tous deux installés<br />

à Paris : la Maison Martin et Georges<br />

Cochevelou. La Maison Martin, installée<br />

boulevard Raspail, a longtemps joui d’une<br />

solide réputation dans le domaine de la<br />

harpe classique. Pendant <strong>les</strong> premières années<br />

du XXe siècle, exploitant un brevet<br />

concédé par un fabricant dublinois, elle<br />

s’est mise à produire <strong>des</strong> <strong>harpes</strong> de type<br />

Paris, poursuivra l’aventure jusqu’aux années<br />

1990. Mais cette nouvelle production<br />

ne répond pour autant toujours pas à une<br />

demande toujours croissante. D’excellente<br />

facture, ces <strong>harpes</strong> n’ont en effet pour seul<br />

défaut que de se faire attendre longtemps,<br />

parfois deux ans…<br />

On peut se dire que plus d’un apprenti<br />

harpiste aurait pu trouver son bonheur en<br />

Irlande, en Écosse, voire au pays de Gal<strong>les</strong>,<br />

où l’on n’avait jamais cessé de jouer de la<br />

harpe, et a fortiori d’en fabriquer. Certes,<br />

<strong>Camac</strong> ne sonne guère breton, pas<br />

davantage que « celtique » d’ailleurs,<br />

pour une firme qui a fondé sa réputation<br />

sur la harpe celtique. À la vérité, ce nom<br />

trouve son origine dans la passion que le<br />

fondateur de l’entreprise, Gérard Garnier<br />

(le frère de Joël Garnier), voue dans <strong>les</strong><br />

années 1960 à la musique sud-américaine,<br />

au point de se détourner de ses étu<strong>des</strong><br />

d’anglais pour tenir la flûte indienne


dans un groupe de musique andine promis<br />

à un certain avenir. La future <strong>Camac</strong><br />

n’aurait donc peut-être jamais vu le jour,<br />

si une tournée qui devait emmener ledit<br />

groupe en Allemagne n’avait été annulée à<br />

la dernière minute, son directeur artistique<br />

s’étant enfui avec la caisse, mésaventure<br />

qui fait dire aujourd’hui<br />

à Gérard Garnier que<br />

« l’histoire de <strong>Camac</strong><br />

est en quelque sorte<br />

celle d’un fiasco ». Il<br />

ne lui restait donc plus<br />

qu’à se reconvertir en<br />

se lançant début 1971<br />

dans la fabrication de<br />

flûtes indiennes.<br />

Le marché est prometteur,<br />

un certain<br />

engouement s’étant<br />

en effet développé en<br />

ces années-là pour le<br />

répertoire sud-américain.<br />

L’un <strong>des</strong> plus<br />

grands tubes n’est-il<br />

pas alors « El condor pasa », mélodie andine<br />

popularisée par Simon et Garfunkel <br />

Nombre de Sud-Américains ont élu domicile<br />

à Paris et se sont retrouvés au sein de<br />

groupes de musique traditionnelle. Le succès<br />

de ses flûtes indiennes dépasse rapidement<br />

toute attente, et Gérard Garnier propose<br />

à son frère aîné<br />

Joël de le seconder<br />

en prenant en main<br />

la partie commerciale<br />

de l’affaire. Celui-ci<br />

accepte, renonçant du<br />

même coup aux fonctions<br />

d’assistant en<br />

marketing qu’il occupe<br />

chez Singer (<strong>les</strong> machines<br />

à coudre) après<br />

avoir quitté la « Royale » dans laquelle il<br />

s’était engagé comme mousse à l’âge de<br />

seize ans et où il avait acquis le grade de<br />

quartier-maître chef radariste.<br />

Pendant l’hiver 1971-1972, Gérard et Joël<br />

Garnier, mettant eux-mêmes la main à la<br />

pâte, installent donc leur entreprise dans<br />

un grand hangar situé à La Richerais, hameau<br />

de la commune de Mouzeil, à michemin<br />

de Nort-sur-Erdre et d’Ancenis.<br />

Le 1 er avril 1972, ils fondent <strong>Camac</strong>, firme<br />

baptisée de la seconde composante de Pacha<strong>camac</strong>,<br />

dieu majeur du panthéon inca,<br />

dont le nom signifie « créateur, animateur<br />

». Gérard Garnier garde un souvenir<br />

aussi ému que précis de l’accueil que lui<br />

réserva le maire de Mouzeil de l’époque,<br />

tout heureux d’accueillir une nouvelle entreprise<br />

sur le territoire de sa commune, et<br />

prêt à faire tout son possible pour en assurer<br />

la réussite. Le téléphone n’étant pas<br />

encore en France ce qu’il est aujourd’hui,<br />

M. le Maire met ainsi spontanément le<br />

standard de la mairie au service <strong>des</strong> nouveaux<br />

arrivants, payant de sa personne en<br />

n’hésitant jamais à enfourcher son vélo<br />

pour venir leur transmettre l’appel d’un<br />

client arrivé à leur intention.<br />

Sous l’impulsion de Joël Garnier, la production<br />

de <strong>Camac</strong> commence à se diversifier.<br />

Afin de satisfaire la demande engendrée<br />

par le mouvement « folk », on se<br />

met à produire à Mouzeil, en sus <strong>des</strong> flûtes<br />

indiennes, viel<strong>les</strong> à roue, épinettes <strong>des</strong> Vosges,<br />

dulcimers, voire, puisqu’on est quand<br />

même en Bretagne, bombar<strong>des</strong>, binious,<br />

et même cornemuses écossaises. C’est à<br />

la demande de certains de leurs clients<br />

que Gérard et Joël Garnier commencent<br />

à s’intéresser à la harpe celtique. Dans un<br />

premier temps, il n’est pas question pour<br />

eux de se lancer dans sa fabrication. Ils se<br />

font importateurs d’instruments fabriqués<br />

au Japon, pendant quelques années le plus<br />

important fournisseur du marché.<br />

En 1972 est proposé à la vente le premier<br />

modèle de harpe <strong>Camac</strong>, de type « bardique<br />

». Il s’agit d’un instrument au corps sonore<br />

parallélépipédique, plus petit, donc<br />

plus facilement transportable que la harpe<br />

« celtique » habituelle, et qui n’est pas sans<br />

rappeler la célèbre harpe de Brian Boru,<br />

la plus ancienne d’Irlande, conservée au<br />

Trinity College de Dublin. C’est d’un instrument<br />

inspiré de celle-ci qu’à l’époque<br />

Alan Stivell s’accompagne sur scène. Cette<br />

harpe, mise au point avec le concours<br />

d’André Glemin, ouvrier à la <strong>Camac</strong>, se<br />

présente sous deux versions : l’une « prête<br />

à jouer », et une seconde en kit. C’est en<br />

effet une spécialité de la maison que de<br />

proposer <strong>des</strong> instruments à monter par soimême,<br />

du dulcimer <strong>des</strong> Appalaches à la<br />

vielle à roue. La présentation de cette harpe<br />

à la foire de Francfort permet à <strong>Camac</strong><br />

de recevoir ses premières comman<strong>des</strong> de<br />

<strong>harpes</strong>. Quelques années plus tard, Joël<br />

Garnier portera toutefois un regard sans<br />

concession sur ce premier instrument :<br />

« Si la harpe n’était pas vilaine, la fiabilité<br />

de l’instrument laissait plutôt à désirer. Très<br />

honnêtement, elle était médiocre. On peut<br />

considérer que c’est à partir de ce moment<br />

que je me suis intéressé sérieusement à la<br />

harpe et à ses problèmes. J’ai alors pris la<br />

peine de rencontrer un maximum de harpistes.<br />

Petit à petit, j’ai découvert la harpe,<br />

sa musique, <strong>les</strong> harpistes eux-mêmes et<br />

j’en suis venu très sincèrement à <strong>les</strong> aimer.<br />

Par ailleurs, le fait qu’à cette époque, la<br />

harpe celtique était à 95% japonaise représentait<br />

pour moi une sorte de défi que<br />

j’ai eu envie de relever ».<br />

Ce n’est qu’après quelques années de<br />

production de cette harpe « bardique »<br />

qu’apparaît en 1976 la première harpe<br />

« celtique » <strong>Camac</strong>. Entendons par là un<br />

instrument dont la forme rappelle davantage<br />

ce qu’on a longtemps appelé « harpe<br />

irlandaise » : un modèle Mélusine, à trente-deux<br />

cor<strong>des</strong>, mis au point avec l’aide<br />

avisée de Mariannig Larc’hantec, l’une<br />

<strong>des</strong> pionnières de l’instrument en Bretagne,<br />

formée comme on l’a vu plus haut à<br />

l’école de la « Telenn Bleimor ».<br />

2


Dès lors, <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> de harpe<br />

celtique vont se multiplier.<br />

La gamme se compose de trois<br />

modè<strong>les</strong> de base : Mélusine,<br />

Morgane, Brocéliande. Mais, dans<br />

le souci de répondre favorablement<br />

aux deman<strong>des</strong> spécifiques de chaque<br />

client, chaque modèle peut être livré<br />

avec <strong>des</strong> cor<strong>des</strong> de nylon, <strong>des</strong> cor<strong>des</strong><br />

de boyau, voire <strong>des</strong> cor<strong>des</strong><br />

métalliques, qui varient de<br />

trente-deux à trente-six cor<strong>des</strong>.<br />

Quelques dizaines de modè<strong>les</strong><br />

forment ainsi une offre pléthorique qui<br />

a parfois pour conséquence de laisser<br />

perplexes certains clients. Sans parler <strong>des</strong><br />

difficultés que pareille situation entraîne<br />

dans <strong>les</strong> ateliers pour la construction<br />

<strong>des</strong> instruments ! Les harpistes bretons,<br />

y compris ceux qui au début étaient <strong>les</strong><br />

plus réticents, adoptent finalement <strong>les</strong><br />

instruments de la firme de Mouzeil. Leurs<br />

élèves leur emboîtent le pas, et ce d’autant<br />

plus facilement que <strong>Camac</strong> ne tarde pas à<br />

leur proposer un système de location-vente<br />

facilitant l’acquisition d’un instrument. En<br />

quelques années, la tendance s’inverse, et<br />

c’est bientôt au tour de <strong>Camac</strong> d’occuper<br />

95 %, voire davantage, du marché breton<br />

de la harpe celtique.<br />

En 2008, <strong>Camac</strong> propose huit modè<strong>les</strong><br />

de base de <strong>harpes</strong> celtiques. De la<br />

« Bardic » (remplaçant l’ancienne « Troubadour<br />

»), un instrument de vingt-deux ou<br />

vingt-sept cor<strong>des</strong> jusqu’à la « Mademoiselle<br />

», à l’allure fort peu « celtique » avec sa<br />

colonne droite, plutôt <strong>des</strong>tinée au marché<br />

de l’Europe du Nord et aux USA.<br />

Il arrive également que <strong>les</strong> techniciens de<br />

<strong>Camac</strong>, toujours ouverts aux deman<strong>des</strong> <strong>des</strong><br />

uns et <strong>des</strong> autres, acceptent de répondre à<br />

une commande spécifique. <strong>Camac</strong> a ainsi<br />

collaboré avec Alan Stivell pour mettre au<br />

point un modèle tout à fait particulier de<br />

harpe électrique, qu’il utilise en concert. La<br />

harpe « Stivell » que l’on trouve dans le catalogue<br />

<strong>Camac</strong> est en fait la version acoustique<br />

de cet instrument. Réalisée en érable<br />

et en épicéa, elle a trente-huit cor<strong>des</strong> de<br />

boyau, et est pourvue d’une double table<br />

d’harmonie. Mais pour ses débuts, elle a<br />

séduit davantage d’acquéreurs étrangers<br />

que bretons. Il n’y a pas que <strong>les</strong> Bretons<br />

à solliciter <strong>Camac</strong> pour <strong>des</strong> comman<strong>des</strong><br />

particulières. Un modèle a ainsi été conçu<br />

pour <strong>les</strong> harpistes gallois traditionnellement<br />

adeptes <strong>des</strong> cor<strong>des</strong> en boyau, à la<br />

demande du distributeur de la marque à<br />

Cardiff. Un autre encore a été mis au point<br />

à la demande de la harpiste irlandaise Janet<br />

Harbison pour son Irish Harp Center<br />

de Limerick : un instrument <strong>des</strong>tiné plus<br />

spécialement à l‘exécution de la musique<br />

irlandaise ancienne, et dont la particularité<br />

principale est peut-être de présenter<br />

<strong>des</strong> espacements de cor<strong>des</strong> réduits. L’un<br />

comme l’autre de ces instruments n’aurait<br />

toutefois aucune chance de rencontrer le<br />

moindre succès sur le marché breton, tant<br />

ils répondent à <strong>des</strong> exigences et <strong>des</strong> goûts<br />

musicaux bien particuliers.<br />

À l’heure à laquelle ces lignes sont écrites,<br />

il est encore question d’une harpe « rock »,<br />

assez légère, <strong>des</strong>tinée à Deborah Henson-<br />

Conant, harpiste américaine qui pour ses<br />

prestations jazzistiques, utilise depuis plusieurs<br />

années une électroharpe <strong>Camac</strong><br />

qu’elle porte en bandoulière à l’aide d’un<br />

harnais de son invention. Un prototype<br />

devrait voir le jour en 2008.<br />

Il arrive également que <strong>les</strong> <strong>harpes</strong> celtiques<br />

<strong>Camac</strong> bénéficient <strong>des</strong> innovations techniques<br />

mises au point originellement pour<br />

une harpe de concert puisque, on le sait,<br />

<strong>Camac</strong> s’est mise un jour à produire ses<br />

propres <strong>harpes</strong> à péda<strong>les</strong>. En 1985, apparaît<br />

l’ « électroharpe celtique », instrument<br />

de trente-six cor<strong>des</strong>, toutes équipées de<br />

capteurs piezzo-électriques. C’est à Kristen<br />

Noguès, disparue en 2007, qu’il revient de<br />

la tester, puis de la présenter en public lors<br />

d’un festival d’Edimbourg. Jakez François<br />

a alors l’occasion d’en jouer en compagnie<br />

<strong>des</strong> cornemuses et <strong>des</strong> bombar<strong>des</strong> de<br />

l’un <strong>des</strong> meilleurs ensemb<strong>les</strong> traditionnels<br />

bretons, le Bagad Bleimor. Il parle en ces<br />

termes de l’instrument : « L’électroharpe<br />

m’apparut comme un instrument électrique<br />

permettant d’obtenir un niveau sonore<br />

fabuleux sans perdre ni en pureté ni en<br />

fidélité du son, et en éliminant totalement<br />

<strong>les</strong> risques de larsen dus aux retours ou à<br />

la caisse de résonance. Quel plaisir que de<br />

pouvoir équilibrer une harpe, sans problèmes,<br />

avec un Bagad, une guitare électrique,<br />

une boîte à rythmes et un synthé ! »<br />

3


Si dans un premier temps, le nom de<br />

<strong>Camac</strong> est devenu synonyme de harpe<br />

celtique, il ne tarde pas à le devenir également<br />

pour <strong>les</strong> <strong>harpes</strong> classiques. En fait,<br />

la harpe est très vite devenue l’apanage<br />

du seul Joël Garnier, ce qui se concrétise<br />

finalement par la séparation commerciale<br />

<strong>des</strong> deux frères en 1985. Cette année-là,<br />

Gérard et Joël Garnier décident de scinder<br />

<strong>Camac</strong> en deux sociétés. Les rô<strong>les</strong><br />

<strong>des</strong> deux frères se sont inversés au fil du<br />

temps. Arrivé pour prendre en main la partie<br />

financière de l’affaire, Joël Garnier n’a<br />

en effet pas tardé à s’intéresser plutôt aux<br />

questions techniques. Il continuera donc<br />

à développer la fabrication d’instruments<br />

avec « <strong>Camac</strong> Productions », dans <strong>les</strong> locaux<br />

de Mouzeil. Cette société poursuivra<br />

encore quelque temps la production <strong>des</strong><br />

instruments <strong>les</strong> plus divers, avant de se<br />

consacrer exclusivement à la harpe. De<br />

son côté, Gérard ne s’occupera plus que<br />

de négoce, notamment d’importation,<br />

avec la firme « <strong>Camac</strong> » basée à Thouarésur-Loire.<br />

On connaît la problématique de la<br />

harpe celtique. Pour <strong>les</strong> uns, elle est<br />

un but en soi, un instrument à part entière.<br />

Pour <strong>les</strong> autres, elle est en revanche considérée<br />

comme un instrument d’étude, passage<br />

obligé vers la « grande » harpe classique.<br />

De plus en plus, <strong>Camac</strong> reçoit ainsi<br />

de la part de harpistes souhaitant aborder<br />

cette dernière, <strong>des</strong> deman<strong>des</strong> qu’elle est<br />

bien incapable d’honorer. Voyant s’annoncer<br />

un marché prometteur, Joël Garnier ne<br />

tarde pas à relever le nouveau défi technique<br />

qu’il y voit. Dans un premier temps,<br />

il commence toutefois par répondre aux<br />

premières deman<strong>des</strong> en proposant à la<br />

vente <strong>des</strong> <strong>harpes</strong> américaines fabriquées à<br />

Chicago, ainsi que <strong>des</strong> <strong>harpes</strong> russes fabriquées<br />

à St Petersbourg. Puis il passe à la<br />

fabrication de ses propres <strong>harpes</strong>.<br />

S’inspirant de modè<strong>les</strong> existants, il commence<br />

par se faire la main sur une harpe<br />

de type tyrolien, à simple mouvement de<br />

péda<strong>les</strong>. Très vite, il va brûler <strong>les</strong> étapes.<br />

Car l’un <strong>des</strong> grands traits de caractère de<br />

Joël Garnier a toujours été de faire progresser<br />

techniquement, et parfois de façon<br />

drastique, ses instruments. En 1981,<br />

constatant que « la fabrication de la harpe<br />

de concert est plutôt archaïque et qu’on<br />

peut certainement la faire évoluer », lui<br />

vient l’idée d’un instrument véritablement<br />

révolutionnaire : une harpe à mémoire<br />

commandée par ordinateur avec un mécanisme<br />

par fluide. Sur une harpe classique,<br />

<strong>les</strong> demi-tons sont obtenus grâce aux<br />

sept péda<strong>les</strong> placées à l’arrière de la caisse<br />

de résonance, dans le socle. Ce que Joël<br />

Garnier imagine à ce moment n’est rien<br />

moins qu’un système permettant de programmer<br />

l’ensemble <strong>des</strong> altérations d’un<br />

morceau : « La mécanique traditionnelle<br />

est remplacée par une transmission par<br />

fluide, <strong>les</strong> fourchettes sont devenues <strong>des</strong><br />

micro-pinces de robotique découpées<br />

au laser, <strong>les</strong> péda<strong>les</strong> sont remplacées par<br />

un pédalier comportant <strong>des</strong> interrupteurs<br />

électroniques et enfin, un micro-ordinateur<br />

permettra aux harpistes de mouvementer<br />

sept notes en manœuvrant une<br />

seule pédale, sans parler d’un programme<br />

“spécial jazz” ».<br />

On imagine facilement <strong>les</strong> conséquences<br />

que cela aurait eues en concert pour un<br />

harpiste, de même que pour la pédagogie<br />

de l’instrument. Mais sans doute Joël<br />

Garnier, qui ne connaît pas encore véritablement<br />

le monde de la harpe, a-t-il voulu<br />

aller trop loin et trop vite. L’entreprise ne<br />

peut que tourner court pour ce que Jakez<br />

François qualifie de « Concorde de la harpe<br />

». Un « Concorde » qui jamais ne prendra<br />

son envol. Présenté à Jérusalem lors<br />

du Congrès mondial de la harpe de 1985,<br />

le prototype, dont le budget a dépassé le<br />

million de francs, fait sensation. Mais au<br />

bout du compte, il s’avère commerciale-<br />

4


ment inexploitable. S’il représente une indéniable<br />

prouesse technologique, il n’est<br />

cependant guère fiable, et son coût de<br />

fabrication est exorbitant. La technologie<br />

embarquée alourdit aussi considérablement<br />

le poids de l’instrument, le rendant<br />

du même coup difficilement transportable<br />

et utilisable. Jakez François a récemment<br />

fait don au Musée de la musique de Paris<br />

de cette harpe qui, pour révolutionnaire<br />

qu’elle fût, n’en a pas pour autant marqué<br />

durablement l’histoire de l’instrument. On<br />

devrait la voir prochainement exposée<br />

dans la section « Instruments du XX e siècle<br />

» dudit musée.<br />

Face à cet échec commercial, Joël Garnier<br />

se voit contraint de revenir à une conception<br />

plus traditionnelle de la harpe, et il<br />

présente en 1987 sa première harpe classique<br />

au Congrès Mondial de la harpe de<br />

Vienne. On est en droit de se demander<br />

comment <strong>les</strong> gran<strong>des</strong> <strong>harpes</strong> <strong>Camac</strong> furent<br />

reçues dans un premier temps par le monde<br />

<strong>des</strong> artistes classiques. Furent-el<strong>les</strong> vraiment<br />

prises au sérieux par <strong>des</strong> musiciens<br />

pour qui la harpe celtique n’était sans doute<br />

pas un instrument à part entière Toujours<br />

est-il que c’est le jour où un harpiste<br />

gagne le concours Lily Laskine « Junior »<br />

sur l’un de ces nouveaux instruments que<br />

<strong>les</strong> harpistes commencent à <strong>les</strong> regarder<br />

d’un autre œil. Dès lors, <strong>les</strong> <strong>harpes</strong> <strong>Camac</strong><br />

se posent vraiment en riva<strong>les</strong> de cel<strong>les</strong> <strong>des</strong><br />

gran<strong>des</strong> firmes historiques.<br />

Technicien <strong>des</strong> plus inventifs, Joël Garnier<br />

n’a jamais rien eu d’un musicien.<br />

Et <strong>Camac</strong> ne serait sans doute pas devenue<br />

ce qu’elle est à présent s’il n’avait reconnu<br />

en Jakez François, engagé en 1988, son alter<br />

ego. Celui-ci est né dans une famille de<br />

musiciens traditionnels. Sa mère comme<br />

son père jouent de la cornemuse écossaise,<br />

et le second a longtemps fait partie<br />

du Bagad Bleimor. Jakez lui-même a tâté<br />

de la bombarde, et sonné en quelques occasions<br />

au sein de cet ensemble. C’est dire<br />

que la musique bretonne, de même que<br />

la harpe celtique d’Alan Stivell qui, rappelons-le,<br />

dirigea pendant quelques années<br />

ledit ensemble, ont de tout temps fait<br />

partie de son univers musical. Il se tourne<br />

donc très tôt vers la musique, abordant la<br />

harpe celtique à Nantes auprès d’Annick<br />

Vollard, avant de passer à la harpe classique,<br />

qu’il étudie successivement à Nantes,<br />

à Tours, puis à Boulogne-Billancourt. Par la<br />

suite, il se tournera vers le jazz, tournant<br />

pendant quelques années avec son propre<br />

trio, tout en menant une certaine activité<br />

de pédagogue.<br />

Joël Garnier et lui fréquentent <strong>les</strong> mêmes<br />

lieux, <strong>les</strong> mêmes manifestations tournant<br />

autour de la harpe. Ils ne peuvent donc<br />

que se rencontrer et sympathiser au point<br />

que Joël Garnier propose un jour à Jakez<br />

François de l’assister en qualité d’essayeur<br />

régleur de <strong>harpes</strong> classiques. S’il s’agit<br />

principalement pour le jeune harpiste de<br />

régler <strong>les</strong> instruments sortant <strong>des</strong> ateliers, il<br />

lui revient aussi d’enseigner à Joël Garnier<br />

l’art de régler <strong>les</strong> instruments. Cela se fait<br />

dans une parfaite complémentarité. Joël<br />

Garnier axe son travail sur l’innovation<br />

technique. Jakez François, musicien de formation,<br />

s’intéresse en priorité au son. C’est<br />

au cours de ces années-là que Joël Garnier<br />

met au point la « Harpe Bleue », une harpe<br />

électrique particulièrement prisée par le<br />

monde du jazz, qui va donner naissance à<br />

une gamme de six instruments.<br />

Ensemble, Joël Garnier et Jakez François<br />

mettent au point une nouvelle gamme de<br />

<strong>harpes</strong> à péda<strong>les</strong>, <strong>les</strong> « <strong>Harpes</strong> nouvelle génération<br />

», lancée en 1996 : Clio, Athéna,<br />

Atlantide Prestige. Il s’agit là d’instruments<br />

repensés dans leur totalité afin de résoudre<br />

5


<strong>les</strong> principaux problèmes communs aux<br />

<strong>harpes</strong> fabriquées de façon traditionnelle.<br />

Le but recherché par ses concepteurs est<br />

de livrer un instrument à la bonne réponse<br />

acoustique et la meilleure facilité de jeu.<br />

Les recherches menées permettent de leur<br />

donner un accord particulièrement stable,<br />

et de <strong>les</strong> doter d’une mécanique douce<br />

et silencieuse, facile à régler. De surcroît,<br />

l’utilisation de la fibre de carbone pour la<br />

colonne leur permet de gagner en rigidité<br />

et en stabilité. En 1999, <strong>les</strong> <strong>harpes</strong> « Grand<br />

concert nouvelle génération » qui complètent<br />

la gamme, sont à leur tour présentées<br />

au Congrès Mondial de la harpe de Prague<br />

: Trianon et Oriane.<br />

Peu à peu, Jakez prend du galon dans<br />

la firme de Mouzeil, faisant ses classes<br />

d’homme d’affaires auprès de Joël Garnier.<br />

Après avoir été directeur, puis directeur<br />

général de <strong>Camac</strong>, il est tout désigné pour<br />

succéder à Joël Garnier à la tête de l’affaire,<br />

lorsque celui-ci disparaît en septembre<br />

2000. Il va être secondé dans ses nouvel<strong>les</strong><br />

fonctions par Eric Piron, qui a travaillé plusieurs<br />

années dans la maroquinerie, pour<br />

Hermès. Initialement, il est entré chez<br />

<strong>Camac</strong> afin de s’occuper de la fabrication.<br />

Mais ses fonctions évoluent rapidement,<br />

et il en devient le directeur commercial.<br />

Totalement étranger au monde de la harpe<br />

à son arrivée, il se prend bientôt au jeu,<br />

et prend une large part au développement<br />

de la firme, contribuant puissamment à en<br />

renouveler l’image.<br />

À partir de 2000, le binôme Jakez François<br />

- Eric Piron donne véritablement un nouveau<br />

départ à <strong>Camac</strong>, dont la production<br />

entre dans une phase de synthèse. La gamme<br />

<strong>des</strong> instruments est progressivement<br />

refondue, conjuguant l’esprit de novation<br />

systématique hérité de Joël Garnier avec<br />

<strong>les</strong> exigences musica<strong>les</strong> de Jakez François.<br />

C’est dans cet esprit que <strong>Camac</strong> travaille<br />

actuellement à la mise au point d’une harpe<br />

« midi » dont un premier prototype a<br />

été présenté en 2006. Entendons par là un<br />

instrument à partir duquel il sera possible<br />

de piloter <strong>les</strong> divers effets de scène, ou encore<br />

éditer une partition tout en jouant.<br />

Une douzaine de modè<strong>les</strong> composent<br />

à présent le catalogue classique, de la<br />

« Clio », le modèle de base, aux fleurons<br />

de la production que sont <strong>les</strong> modè<strong>les</strong><br />

« Atlantide Prestige » et « Élysée ». Ce<br />

dernier instrument, une nouveauté 2008,<br />

inspiré de modè<strong>les</strong> Empire, a été conçu,<br />

pour reprendre <strong>les</strong> termes de Jakez François,<br />

« dans la plus pure tradition française,<br />

en un vibrant hommage à leurs aînées, <strong>les</strong><br />

mythiques <strong>harpes</strong> Erard ».<br />

La gamme de prix <strong>des</strong> modè<strong>les</strong> de base<br />

s’échelonne de 10 500 à 35 000 euros. Ils<br />

peuvent naturellement être adaptés aux<br />

<strong>des</strong>iderata <strong>des</strong> musiciens, étant bien entendu,<br />

comme le dit Jakez François qu’« on<br />

peut toujours faire plus cher » en fonction<br />

<strong>des</strong> bois retenus et <strong>des</strong> décorations souhaitées.<br />

Un grand nombre de harpistes<br />

françaises jouent aujourd’hui sur <strong>Camac</strong>.<br />

Les murs <strong>des</strong> bureaux de Mouzeil s’ornent<br />

de photos du studio Harcourt prenant<br />

pour sujets quelques-unes <strong>des</strong> harpistes<br />

«⁄maison » : Anne-Sophie Bertrand, Marie-<br />

Claire Jamet, Annie Lavoisier, Germaine<br />

Lorenzini, Isabelle Moretti, Isabelle Perrin,<br />

Gaëlle Thouvenin, Florence Sitruk… Les<br />

orchestres qui de par le monde <strong>les</strong> ont<br />

adoptées ne se comptent plus : orchestre<br />

6


7<br />

du Capitole de Toulouse, orchestre de la<br />

Fenice de Venise, Opéra de Berlin, Orchestre<br />

national de France, Orchestre présidentiel<br />

du Kremlin, entre autres.<br />

Redonnant vie à une tradition française sur<br />

le point de s’éteindre dans <strong>les</strong> années 1970<br />

avec la disparition de la Maison Erard, <strong>Camac</strong><br />

se présente aujourd’hui comme l’unique<br />

fabricant français de <strong>harpes</strong> de taille<br />

internationale. Ses instruments sont désormais<br />

distribués dans l’ensemble de l’hémisphère<br />

nord, de même qu’en Australie :<br />

« La plus au Nord <strong>des</strong> <strong>harpes</strong> <strong>Camac</strong> se<br />

trouve à Winnipeg, la plus au Sud en Tasmanie<br />

», aime à préciser Jakez François.<br />

Aujourd’hui, <strong>Camac</strong> emploie une<br />

soixantaine de personnes, la plupart<br />

travaillant sur le site de production de Mouzeil.<br />

Depuis novembre 2004, la maison<br />

dispose également d’un espace commercial<br />

rue Petit, dans le XIXe arrondissement<br />

de Paris. Succédant à celui, quelque peu<br />

excentré, de Chaville, il se trouve à deux<br />

pas de la Porte de la Villette, où se concentrent<br />

la Cité de la Musique, le Conservatoire<br />

national supérieur de Musique où<br />

Isabelle Moretti, à la ville Mme Jakez François,<br />

enseigne la harpe, et où devrait se<br />

construire prochainement la Philharmonie<br />

de Paris. Les amateurs de harpe, que celle-ci<br />

soit celtique ou classique, peuvent y<br />

découvrir et choisir l’instrument de leurs<br />

rêves dans l’une <strong>des</strong> cabines individuel<strong>les</strong><br />

prévues à cet effet. On trouve également<br />

là une petite salle où sont organisés régulièrement<br />

classes de maître et concerts.<br />

L’inauguration de cet espace avait donné<br />

lieu à trois jours de concerts et de classes<br />

de maître où l’on avait pu entendre successivement<br />

Marie-Claire Jamet, Isabelle<br />

Moretti, Florence Sitruk ou Isabelle Perrin,<br />

et avait été marqué par la création de Vol<br />

d’étincel<strong>les</strong>, premier quatuor pour <strong>harpes</strong><br />

celtiques du compositeur rennais Pierick<br />

Houdy, dédié à Anne Le Signor.<br />

Si l’on considère la liste <strong>des</strong> grands événements<br />

harpistiques mondiaux, on<br />

est certain d’y voir associé le nom de la<br />

firme <strong>Camac</strong>, qui patronne ou sponsorise<br />

nombre de manifestations de tous genres<br />

à travers le monde, qu’il s’agisse du Festival<br />

d’été de Gargi<strong>les</strong>se, <strong>des</strong> Journées de la<br />

Harpe en Ar<strong>les</strong>, du Symposium européen<br />

de la Harpe, et bien entendu du Congrès<br />

mondial de la Harpe, sans oublier <strong>les</strong><br />

« Journées <strong>Camac</strong> » organisées à Londres,<br />

Lyon, Varsovie, Tokyo, Pekin, Richmond,<br />

Atlanta, Budapest, ou encore Stockholm.<br />

Depuis 2004, il existe un concours Jakez<br />

François, entièrement dévolu à la harpe<br />

celtique ou plus précisément, à la lever<br />

harp, la harpe à leviers, terme employé<br />

dans le monde anglo-saxon pour désigner<br />

la « petite harpe ». En l’occurrence, il s’agit<br />

pour son créateur de mettre l’accent sur<br />

le fait que la harpe en question est bien<br />

un instrument à part entière, une fois faite<br />

abstraction de ce qu’on pourrait qualifier<br />

de son côté « folklorique » : « J’ai voulu ce<br />

concours international pour découvrir et<br />

récompenser de jeunes harpistes qui, par<br />

leur exigence et leur talent, démontrent<br />

que la harpe celtique est un instrument<br />

à part entière, au-delà de l’image folklorique<br />

dans laquelle elle est trop souvent<br />

cantonnée ».<br />

La première édition de ce concours a eu<br />

lieu en mai 2004 au Conservatoire de musique<br />

de Nantes. Une trentaine de concurrents<br />

venus d’un peu partout en France<br />

comme d’Écosse, du pays de Gal<strong>les</strong> et<br />

d’Italie, s’y étaient présentés. Un jury international<br />

présidé par Isabelle Moretti au<br />

sein duquel se côtoyaient Janet Harbison,<br />

Kora Wuthier ou encore Dominig Bouchaud<br />

avait consacré l’Écossaise Catriona<br />

MacKay et, pour la catégorie junior, Louis<br />

Salkin. La deuxième édition se déroulera<br />

en mai 2009. Les finalistes devront donner<br />

une composition commandée spécialement<br />

à Pierick Houdy : une pièce en trois<br />

mouvements pour harpe et quatuor à cor<strong>des</strong>,<br />

créée en avant-première par Nathalie<br />

Chatelain au Congrès mondial d’Amsterdam<br />

de 2008.<br />

Jakez François tient également un rôle<br />

de mécène dans le domaine de la harpe<br />

classique : « Les circonstances<br />

qui ont fait de moi un<br />

facteur de <strong>harpes</strong> m’offrent<br />

<strong>les</strong> moyens financiers d’apporter<br />

ma pierre à l’ouvrage<br />

et de passer commande de<br />

nouvel<strong>les</strong> œuvres pour harpe. C’est surtout<br />

pour moi la meilleure façon de retourner<br />

aux artistes un peu de la confiance qu’ils<br />

m’accordent lorsqu’ils choisissent de jouer<br />

l’un <strong>des</strong> instruments sorti <strong>des</strong> ateliers <strong>des</strong><br />

<strong>Harpes</strong> <strong>Camac</strong>. C’est enfin un privilège de<br />

pouvoir apporter aux compositeurs, lorsque<br />

l’occasion s’en présente, le soutien,<br />

ô combien nécessaire, du mécénat. » Ces<br />

dernières années, deux concertos pour<br />

harpe et orchestre ont ainsi été composés<br />

à l’invitation de Jakez François. Le premier,<br />

signé de la compositrice Michèle Reverdy<br />

a été créé le 27 octobre 2006 par Isabelle<br />

Moretti et l’Orchestre national de Lille dirgé<br />

par Paul Polivnick. Plus récemment, le<br />

17 mai 2008, dans le cadre du festival de<br />

Katowice, ce fut au tour d’Isabelle Perrin<br />

de donner en première mondiale South<br />

Shore, concerto pour « harpe bleue » et<br />

orchestre, de la compositrice polonaise<br />

Elzbieta Sikora. Pour la circonstance, Isabelle<br />

Perrin était accompagnée par l’Orkiestra<br />

Muzyki Nowej dirigé par Szymon<br />

Bywalec.<br />

C<br />

’est donc tout logiquement que le 15<br />

mars 2007, <strong>Camac</strong> se voit attribuer le<br />

label « Entreprise du patrimoine vivant »,<br />

réservé aux entreprises dont le savoir-faire<br />

« fonde l’identité économique et culturelle<br />

de la France » et qui vient donc récompenser<br />

le travail trentenaire de la firme de<br />

Mouzeil.<br />

Mais la plus belle récompense pour <strong>les</strong><br />

artisans de <strong>Camac</strong> ne peut bien sûr venir<br />

que d’une harpiste. Laissons donc le mot<br />

de la fin à Isabelle Moretti : « Je me délecte<br />

littéralement de ce timbre très français, savant<br />

mélange de définition, de rondeur,<br />

et de projection du son. Je suis toujours<br />

émue par la réceptivité de ces <strong>harpes</strong> qui<br />

répondent instantanément à la plus petite<br />

variation de jeu permettant ainsi d’obtenir<br />

une infinie richesse de sonorité. »<br />

Armel Morgant<br />

Crédit photographique :<br />

© Xavier Dubois / Coopimages 2008<br />

contact : 06 63 02 36 41<br />

contact@coopimages.com

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