Béton armé : la construction d'une image - CDH - EPFL

SHS – Histoire sociale et culturelle des technologies
Béton armé : la construction d’une image
Finalement, en 1903, le Comité central 34 nous présente l’aboutissement de cette année de travail en un
projet de réglementations provisoires distribué aux différentes sections. Pour l’heure, il est dit que la
Confédération n’intervient pas, villes et cantons s’aident mutuellement. Par contre, nous apprenons
que la société des fabricants de chaux et de ciment est entrée en collaboration pour participer
financièrement aux essais théoriques qui seront encore planifiés les années suivantes.
Désormais les cimentiers, premiers maillons de la chaîne de production, se sont organisés en
associations, augmentant leur force d’action. Ils peuvent participer avec influence au développement
du matériau, se positionnant entre les intérêts du constructeur et du théoricien et donc assurer leur
marché.
Quant à la « Jeune Confédération », outre sa présence à travers le laboratoire d’essais de l’Ecole
Polytechnique Fédérale de Zürich (EPFZ), il faudra effectivement attendre deux années pour la voir
participer pleinement à cette réglementation.
Suite à une requête lancée à nouveau par la SIA, la Confédération répondra :
« [...] Disons d’emblée que, étant données les applications et l’importance toujours plus
considérable du béton armé, nous approuvons naturellement le désir de faire des essais
étendus avec cette matière. Le fait que la Confédération a continuellement en exécution
des constructions importantes, qu’elle se fait de plus un devoir de s’occuper de questions
d’intérêt général, qu’elle est enfin propriétaire du laboratoire fédéral d’essais des
matériaux, nous dispose à participer activement à de tels essais.[...] » 35
C’est enfin la prise de conscience par le pouvoir public des responsabilités liées à la croissance forte
du béton armé. La Confédération prend alors en charge les essais « dans toute leur étendue » pour une
période de 4 ans, à la suite desquels elle produit d’importantes prescriptions. 36
5.4 Les commanditaires
Aux débuts de l’émergence du béton, les commanditaires étaient en grande majorité des promoteurs
privés car, la Confédération n’ayant pas encore reconnu ce nouveau procédé de construction, cela
posait la nécessaire question de la prise de responsabilités sans le couvert de normes… C’est ainsi que,
par exemple, la Compagnie privée de chemin de fer Jura-Simplon se lance, au tournant du siècle, dans
un double « défi » : celui d’employer le béton armé pour ses ouvrages d’art et entrepôts en plus du défi
d’expansion des voies ferrées.
Dans ce contexte, les différentes expériences menées par S. de Mollins dont celle de 1893, ont
convaincu la « jeune » Compagnie des chemins de fer Jura-Simplon 37 à tester les systèmes
Hennebique avant de les généraliser à l’ensemble de leur ligne. Ainsi, chaque ouvrage réalisé était
accompagné d’une série d’essais.
Nous pouvons ainsi lire dans le Bulletin Technique de la Suisse Romande, une série d’articles relayant
ces essais 38 :
« […] Essayé avec beaucoup de soin et en présence de nombreux ingénieurs du dehors
le 21 mars 1898, puis avec le mêmes précautions le 12 janvier 1900, inspecté
minutieusement dès lors à plusieurs reprises, ce petit pont n’a donné lieu qu’à une seule
retouche insignifiante : un montant du garde-corps.
34 « Rapport de gestion du Comité central sur les années 1902-1903 », in BTSR, n°17, 1903, pp.233-234.
35 (voir Annexe 6) GEISER A., « SIA Rapport de gestion du Comité central sur les années 1903-1905 », in BTSR, n° 15,
1905, pp. 192-195.
36 « Circulaire du Comité central aux sections », in BTSR, n°35, 1909, p. 202.
37 La compagnie du Jura Simplon est constituée en 1891 par la fusion des principales compagnies ferroviaires de Suisse, et
joua un rôle important dans la réalisation des transversales Alpines.
38 E., « Béton armé, Encore quelques faits nouveaux, notes sur les ponts sous rails en béton armé construits dès 1894 par la
Compagnie des chemins de fer Jura-Simplon », in BTSR, n°15, 1903, pp. 202-203.
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