Béton armé : la construction d'une image - CDH - EPFL
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SHS – Histoire sociale et culturelle des technologies<br />
<strong>Béton</strong> <strong>armé</strong> : <strong>la</strong> <strong>construction</strong> d’une <strong>image</strong><br />
En octobre 30 , le BTSR dévoile le contenu d’un important rapport présenté au directeur du département<br />
des travaux de Bâle-ville où notamment les Professeurs Ritter et Schüle exposent les conditions pour<br />
l’exécution des <strong>construction</strong>s suivant les différents systèmes. On y apprend par exemple combien <strong>la</strong><br />
suprématie du système Hennebique se heurte à <strong>la</strong> concurrence d’autres procédés, concurrence qui, plus<br />
qu’économique se joue désormais au niveau des garanties en sécurité. En effet, il est précisé qu’en<br />
cherchant <strong>la</strong> compétitivité économique, <strong>la</strong> société Hennebique a opéré des changements dans son<br />
système de <strong>construction</strong> qui ont contribué à affaiblir <strong>la</strong> sécurité des bâtiments. De plus, ce système a<br />
particu<strong>la</strong>rité d’être exclusivement mis en œuvre sur le chantier et donc <strong>la</strong> sécurité des <strong>construction</strong>s ne<br />
peut se faire en amont (contrairement à d’autres systèmes qui usent de <strong>la</strong> préfabrication d’éléments), il<br />
implique un « contrôle régulier du travail » des ouvriers qui d’ailleurs seront les seuls mis en cause<br />
dans <strong>la</strong> catastrophe de Bâle...<br />
Ainsi, cette période de réflexion sur les normes permet de soulever les effets préoccupants qui se<br />
cachent derrière <strong>la</strong> concurrence des différentes sociétés de <strong>construction</strong>.<br />
Les mois suivants, le Comité central demande l’avis des sections sur les « règlements de <strong>la</strong> police des<br />
<strong>construction</strong>s en béton <strong>armé</strong> de cinq villes allemandes » qu’il propose en soutien. La section vaudoise<br />
répond :<br />
« [...] nous ne pouvons conseiller d’imiter <strong>la</strong> réglementation des villes allemandes.<br />
Celle-ci nous paraît très prématurée et beaucoup plus propre à entraver ce système de<br />
<strong>construction</strong> (le béton <strong>armé</strong>) qu’à assurer ses progrès et sa sécurité publique. [...] » 31<br />
Cette année 1902 dévoile donc une véritable effervescence au sein de <strong>la</strong> SIA pour établir ces<br />
réglementations mobilisant rapidement les grands professeurs, <strong>la</strong> diversité des avis qu’offrent les<br />
différentes sections réparties dans les cantons al<strong>la</strong>nt même jusqu’à puiser dans les règlements de<br />
l’Allemagne, déjà mis en p<strong>la</strong>ce... Certes, le climat d’instabilité et d’incertitude issu de ces accidents<br />
hante certains professionnels qui aimeraient se décharger de quelques responsabilités, comme le<br />
<strong>la</strong>issent penser ces propos :<br />
« [...] Quelques malheureux plus exposés que d’autres aux tracasseries du béton<br />
<strong>armé</strong>, demandent à grands cris qu’on établisse immédiatement des normes<br />
provisoires, en attendant les travaux définitifs de MM. les professeurs. On éviterait<br />
ainsi beaucoup d’ennuis aux administrations et aux entrepreneurs eux-mêmes, qui<br />
s’entre-dévorent, et on préviendrait peut-être des accidents.<br />
Tous les constructeurs et avec eux, sans doute, les représentants de toutes les nuances<br />
recommandables de béton <strong>armé</strong> verront avec p<strong>la</strong>isir cette réglementation sans autre<br />
apparat que l’assentiment des ingénieurs et architectes du pays [...]» 32 .<br />
Toutefois, <strong>la</strong> SIA se trouve dans une situation complexe et ambiguë, partagée entre le devoir de<br />
sécurité publique et le souhait de ne pas entraver le progrès technique. Quant bien même, elle pense<br />
qu’avec une surveil<strong>la</strong>nce précise de <strong>la</strong> <strong>construction</strong>, l’innovation peut continuer son chemin, les grands<br />
acteurs de ce progrès tels que <strong>la</strong> firme Hennebique sont là pour les convaincre du contraire... 33<br />
29 E. , « Assemblée des délégués de <strong>la</strong> Société des Ingénieurs et des Architectes, à Berne le 25 Mai 1902 », in BTSR, n°11,<br />
1902, p.148<br />
30 « Rapport sur les <strong>construction</strong>s en béton <strong>armé</strong> et sur les <strong>construction</strong>s de p<strong>la</strong>nchers présenté au Directeur du Département<br />
des Travaux de Bâle-ville. », in BTSR, n°19, 1902, pp.256-259<br />
31 A. VAUTIER, « Section Vaudoise de <strong>la</strong> Société suisse des Ingénieurs et des Architectes. Commission du béton <strong>armé</strong>.<br />
Rapport. », in BTSR, n°23, 1902, pp. 314-316<br />
32 E. , « Assemblée des délégués de <strong>la</strong> Société des Ingénieurs et des Architectes, à Berne le 25 Mai 1902 », in BTSR, n°11,<br />
1902, p.148.<br />
33 (voir Annexe 5) « VIIème Congrès du <strong>Béton</strong> Armé. Communication de M. de Mollins sur <strong>la</strong> réglementation des<br />
<strong>construction</strong>s en <strong>Béton</strong> Armé, en Allemagne et en Suisse. », in Le <strong>Béton</strong> Armé, n°57, février 1903, pp. 149-152.<br />
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