Didactique, philosophie, transparence et séduction - Depositum

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46 surdétermination théorique peut avoir un effet inverse de ce que, initialement, elle devait atteindre: l'individu perd de vue l'aspect global de la réalité dans laquelle il est englouti. Il est absorbé, dira Baudrillard, dans l'obscène, dans un excès de déterminations. Il est évident que baliser un apprentissage n'est pas toujours le banaliser mais la frontière entre l'excès et la mesure n'est pas toujours si évidente surtout si nous sommes subjugués par une mystification technicienne. Astolfi (1994) nous met en garde contre cette hystérie de la détermination qui peut nous guetter et nous apparenter à Big Brother au nom du savoir. Pierre Angenot ( 1990, p.205-223), dans un Colloque sur La formation fondamentale, dénonce trois dérives des fondamentalistes de la culture qui conçoivent cette dernière comme une «adhérence» et non comme une «adhésion» librement consentie et erratique: «le phantasme de la grande culture qui invite à coller au savoir .. ., le phantasme de l'autochtonie qui invite à coller au pays .. ., le phantasme de l'organicisme qui colle à un modèle d'intégration du divers... (pour en assurer) la purification et l'homogénéisation». Tous ces phantasmes s'interdisent de considérer le savoir comme un «questionnement où le pluralisme est fondateur». Et il ajoute: «Le tâtonnement n'est oeuvre d'aveugle que pour celui qui reconnaît au maître seul le pouvoir de produire de la lumière». Pour revaloriser une rhétorique discréditée par le positivisme logique, Perelman (1952), posait une critique similaire. Si, en logique, disait-il, l'argumentation se veut contraignante, dans une rhétorique qui ne resplendit qu'aux époques d'humanisme, "on ne peut être obligé d'adhérer à une proposition" (p.26). "La condition même de l'argumentation contraignante est l'univocité "(p.31) alors qu'en

47 rhétorique l'indétermination. le flou et le caractère discutable des concepts sont "indispensables"."Là où il n'y a ni possibilité de choix ni alternative, nous n'exerçons pas notre liberté. C'est la délibération qui distingue l'homme de l'automate" (p.42). L'éducateur peut donc, dans certains excès de déterminations théoriques, chercher inconsciemment «l 'adhérence» de l'élève et non son «adhésion» libre qui implique nécessairement résistance. obstacle, obscurité. Il y a donc dans le discours éducationnel une certaine mise en garde contre une transparence-fusion qui. sous prétexte de gérer le processus d'apprentissage pour aider l'élève, l'emprisonne dans une réalité fonctionnelle, unique. qui cherche à taire tout ailleurs et à mettre fin au secret. au privé, au jeu de l'adhésion libre. La séduction refuse cettre transparence sans risque, sans obscurités. 2.2.3 La séduction constitue un processus, un jeu de l'ambiguïté qu'on ne peut asservir à une technique stéréotypée reproductible Si la séduction n'est pas de l'ordre de la production et de la transparence pornographique. c'est qu'elle revêt une forme mouvante et fluide. La séduction est un fait qui se défait sans cesse. Elle n'est pas un phénomène stable. Elle constitue plut6t un processus au sens de quelque chose «qui se développe» du fait de tensions internes (objet éventuel d'un procès, d'une remise en question), et donc aussi de quelque chose qui «s'en va» comme l'étymologie du mot le suggère. Processus. en effet, dérive de cesser qui. plus qu'une fin signifie un départ . Cesser c'est «s'en aller». L'idée a son importance car la séduction ne finit pas, elle s'en va ailleurs de par le jeu de la réversibilité des signes. Ce qui était au départ un

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surdétermination théorique peut avoir un eff<strong>et</strong> inverse de ce que, initialement, elle<br />

devait atteindre: l'individu perd de vue l'aspect global de la réalité dans laquelle<br />

il est englouti. Il est absorbé, dira Baudrillard, dans l'obscène, dans un excès de<br />

déterminations.<br />

Il est évident que baliser un apprentissage n'est pas toujours le banaliser<br />

mais la frontière entre l'excès <strong>et</strong> la mesure n'est pas toujours si évidente surtout si<br />

nous sommes subjugués par une mystification technicienne. Astolfi (1994) nous m<strong>et</strong><br />

en garde contre c<strong>et</strong>te hystérie de la détermination qui peut nous gu<strong>et</strong>ter <strong>et</strong> nous<br />

apparenter à Big Brother au nom du savoir.<br />

Pierre Angenot ( 1990, p.205-223), dans un Colloque sur La formation<br />

fondamentale, dénonce trois dérives des fondamentalistes de la culture qui<br />

conçoivent c<strong>et</strong>te dernière comme une «adhérence» <strong>et</strong> non comme une<br />

«adhésion» librement consentie <strong>et</strong> erratique: «le phantasme de la grande culture<br />

qui invite à coller au savoir .. ., le phantasme de l'autochtonie qui invite à coller au<br />

pays .. ., le phantasme de l'organicisme qui colle à un modèle d'intégration du<br />

divers... (pour en assurer) la purification <strong>et</strong> l'homogénéisation». Tous ces<br />

phantasmes s'interdisent de considérer le savoir comme un «questionnement où le<br />

pluralisme est fondateur». Et il ajoute: «Le tâtonnement n'est oeuvre d'aveugle que<br />

pour celui qui reconnaît au maître seul le pouvoir de produire de la lumière». Pour<br />

revaloriser une rhétorique discréditée par le positivisme logique, Perelman (1952),<br />

posait une critique similaire. Si,<br />

en logique, disait-il, l'argumentation se veut<br />

contraignante, dans une rhétorique qui ne resplendit qu'aux époques<br />

d'humanisme, "on ne peut être obligé d'adhérer à une proposition" (p.26). "La<br />

condition même de l'argumentation contraignante est l'univocité "(p.31) alors qu'en

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