Didactique, philosophie, transparence et séduction - Depositum

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122 littéral de certains mots du texte (praelect/o) et en marge des notes constituant un véritable dossier sur le sujet (lecture proprement dite) pouvant servir d'autorité par ses références aux textes et sentences patristiques. Cette technique. soutient Lemoine (1992, p. 797). «jouera un grand rôle dans l'enseignement de la philosophie. même si elle a été conçue d'abord pour la théologie». Abélard (1 079-1142) poussera plus loin cette méthode en y ajoutant des textes patristiques contradictoires invitant au débat public et permettant à l'occasion de présenter des idées condamnées par les autorités religieuses. Ce penseur montrera avec beaucoup de brio comment les contradictions peuvent être résolues en prenant en considération différents facteurs comme l'intervention des copistes, la polysémie d'un terme. l'importance relative du passage dans la pensée globale. Ce recours «à la discussion publique (disputatio), souligne Lemoine (1992, p. 797-798). crée une situation neuve pour les maîtres contraints de figurer dans un véritable tournoi public. où l'assistance fait fonction d'arbitre; auparavant. dans les écoles ecclésiastiques, le maître était un personnage incontesté ... Dorénavant avec la disputatio, il doit être le plus fort sans quoi les étudiants risquent de l'abandonner». La «quaestio», qui constitue le privilège du maître seul. comprend l'énoncé d'un problème sous forme d'une question ou d'une alternative. la présentation d'auteurs qui portent à conclure dans un sens puis de ceux qui inclinent à conclure dans un sens différent. la solution du problème. la réfutation des arguments de la thèse non retenue.

123 4.4.2 La séduction au sein de la scolastique Pour donner une idée de l'impact de cette scolastique montante, référons nous à la perception que pouvait avoir le public de l'époque. Comment considérait-il cette Faculté des arts de l'Université de Paris où s'organisaient ces discussions publiques Si cette institution d'enseignement secondaire attire plus que les autres les étudiants. «c'est que. nous dit Durkheim (1969, p. 123). la discipline qu'elle enseignait presque à l'exclusion de tout autre était la dialectique, alors regardée comme la sciences des sciences. comme la clef qui ouvre toutes les autres serrures». Ne retrouvons-nous pas ici un des aspects qui soulevait l'intérêt des athéniens pour les sophistes C'est à Paris. dans le cadre de l'Université, qu'Abélard donnait ses cours. Idole aussi bien des étudiants que des gens ordinaires. il représentait. selon Durkheim (1969, p.85), tout ce que le Moyen Age aimait: «la dialectique brillante. la foi raisonneuse. ce curieux mélange d'ardeur religieuse et d 'enthousiasme scientifique». Palmèro (1958) avance que les cours d'Abélard attirèrent jusqu'à cinq mille auditeurs. Enseigner, dans ce contexte. consiste d'un c6té à offrir en spectacle sa maîtrise de la dialectique tout en s'attachant. d'un autre c6té. à en révéler les secrets techniques. Comme Gorgias. Protagoras et Hippias. Abélard fascine par cette virtuosité où s'allient force et beauté et qu'il exhibe à notre convoitise. mobilisant, par là, notre intérêt pour un apprentissage pratique. Les remarques de Durkheim nous permettent d'introduire un autre élément caractéristique de la didactique du philosopher à cette époque. Il nous parle d' «ardeur» religieuse et d'«enthousiasme» scientifique qui caractérisent Abélard. Pour séduire. l'enseignant ne doit-il pas être l'incarnation d'une conviction et non le simple véhicule neutre et

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4.4.2 La séduction au sein de la scolastique<br />

Pour donner une idée de l'impact de c<strong>et</strong>te scolastique montante, référons<br />

nous à la perception que pouvait avoir le public de l'époque. Comment<br />

considérait-il c<strong>et</strong>te Faculté des arts de l'Université de Paris où s'organisaient ces<br />

discussions publiques Si c<strong>et</strong>te institution d'enseignement secondaire attire plus que<br />

les autres les étudiants. «c'est que. nous dit Durkheim (1969, p. 123). la discipline<br />

qu'elle enseignait presque à l'exclusion de tout autre était la dialectique, alors<br />

regardée comme la sciences des sciences. comme la clef qui ouvre toutes les<br />

autres serrures». Ne r<strong>et</strong>rouvons-nous pas ici un des aspects qui soulevait l'intérêt des<br />

athéniens pour les sophistes C'est à Paris. dans le cadre de l'Université,<br />

qu'Abélard donnait ses cours. Idole aussi bien des étudiants que des gens<br />

ordinaires. il représentait. selon Durkheim (1969, p.85), tout ce que le Moyen Age<br />

aimait: «la dialectique brillante. la foi raisonneuse. ce curieux mélange d'ardeur<br />

religieuse <strong>et</strong> d 'enthousiasme scientifique». Palmèro (1958) avance que les cours<br />

d'Abélard attirèrent jusqu'à cinq mille auditeurs.<br />

Enseigner, dans ce contexte. consiste d'un c6té à offrir en spectacle sa<br />

maîtrise de la dialectique tout en s'attachant. d'un autre c6té. à en révéler les<br />

secr<strong>et</strong>s techniques. Comme Gorgias. Protagoras <strong>et</strong> Hippias. Abélard fascine par<br />

c<strong>et</strong>te virtuosité où s'allient force <strong>et</strong> beauté <strong>et</strong> qu'il exhibe à notre convoitise.<br />

mobilisant, par là, notre intérêt pour un apprentissage pratique. Les remarques de<br />

Durkheim nous perm<strong>et</strong>tent d'introduire un autre élément caractéristique de la<br />

didactique du philosopher à c<strong>et</strong>te époque. Il nous parle d' «ardeur» religieuse <strong>et</strong><br />

d'«enthousiasme» scientifique qui caractérisent Abélard. Pour séduire. l'enseignant<br />

ne doit-il pas être l'incarnation d'une conviction <strong>et</strong> non le simple véhicule neutre <strong>et</strong>

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