FRANCK LOZAC'H ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION

18.12.2014 Views

De la critique de soi Qui peut se prévaloir d’avoir obtenu un résultat digne de sa compétence, qui peut ? On est rarement soi-même, on travaille en dessous. Il y a une constance de déception, une vérité critique à l’intérieur de soi qui murmure : “ Tu étais capable d’accéder à quelque chose de bien meilleur. Regarde, observe où tu en es à présent ! Le temps, ton ennemi, aura bien su te ronger et te détruire lentement. ” Pourtant l’analyse se veut impartiale. Elle ne recherche pas à distribuer des éloges, ou à rosser à coups de trique. Quand on a la certitude d’avoir accompli correctement sa tâche, l’on peut encore se dire : “ Oui, j’aurais pu toutefois ajouter ceci, j’avais la potentialité pour trouver cela, hélas, le temps m’a détruit. ” Il est pénible de se déplaire, mais il est détestable de faire preuve d’une avidité maladive. Certains hommes toutefois recherchent des caresses et des flatteries. Les littéraires sont des gens de politesse et de courtoisie, toujours enclins à obtenir quelque faveur. Mais tout est gratuité, et cela ne coûte rien de s’entendre dire : “ Monsieur, 116

vous êtes un grand poète ”, ou encore “ Ce jeune artiste a un bel avenir. ” Certains rétorqueront que la belle critique est agréable à l’oreille, et peut engendrer un vif élan d’actions. Il est pourtant plus puissant de se nourrir de soi-même et d’extirper de sa propre négation de l’énergie et de la volonté de gains. D’ailleurs l’outil de mesure qu’emploie autrui est rarement le vôtre. Il détermine votre suffisance en fonction de sa propre aptitude à agir. Ainsi des poètes peu féconds condamnent votre opulence et votre générosité. Et ceci vous porte encore préjudice. L’on appelle excès ce qui fait votre force, et votre abondance se transforme en obésité. Il faut parfois penser en égoïste car ce n’est pas toujours mal pensé. Faut-il être aux yeux d’autrui ? Faut-il que l’autre se pose en tant que juge ? Je ne saurais condamner l’acuité critique, cette sorte de lucidité qui fait souvent défaut à l’homme qui ne peut être et se voir sous toutes ses dimensions. Je conseillerai toutefois de se fier à son propre sérieux, qui est le plus souvent un superbe ange gardien. Certains appellent cette sorte d’allégorie, la conscience, tout simplement. 117

vous êtes un grand poète ”, ou encore “ Ce jeune artiste a un bel<br />

avenir. ” Certains rétorqueront que la belle critique est agréable à<br />

l’oreille, et peut engendrer un vif élan d’actions. Il est pourtant<br />

plus puissant de se nourrir de soi-même et d’extirper de sa propre<br />

négation de l’énergie et de la volonté de gains.<br />

D’ailleurs l’outil de mesure qu’emploie autrui est<br />

rarement le vôtre. Il détermine votre suffisance en fonction de sa<br />

propre aptitude à agir. Ainsi des poètes peu féconds condamnent<br />

votre opulence et votre générosité. Et ceci vous porte encore<br />

préjudice. L’on appelle excès ce qui fait votre force, et votre<br />

abondance se transforme en obésité.<br />

Il faut parfois penser en égoïste car ce n’est pas toujours<br />

mal pensé. Faut-il être aux yeux d’autrui ? Faut-il que l’autre se<br />

pose en tant que juge ? Je ne saurais condamner l’acuité critique,<br />

cette sorte de lucidité qui fait souvent défaut à l’homme qui ne<br />

peut être et se voir sous toutes ses dimensions. Je conseillerai<br />

toutefois de se fier à son propre sérieux, qui est le plus souvent un<br />

superbe ange gardien. Certains appellent cette sorte d’allégorie, la<br />

conscience, tout simplement.<br />

117

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!