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Cardio N° 4 - Septembre 2005 & Sp rt LA REVUE PRATIQUE DE LA CARDIOLOGIE DE L’EFFORT ÉVÉNEMENT Le suivi cardiovasculaire des tennismen MISE AU POINT Pathologie vasculaire et sport : revue pour une démarche clinique ANALYSE D’ARTICLE Dépistage cardiovasculaire : consensus européen CONGRÈS XV e Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie Dossier pratique ALTITUDE ET SPORT ADAPTATION, PATHOLOGIES ET PRISE EN CHARGE ■ Physiologie de l’hypoxie d’altitude : adaptations cardiovasculaires ■ Médicaments cardiovasculaires : peut-on prédire leur effet en altitude ? ■ Pathologies cardiaques en altitude : risques ■ Prise en charge sur le terrain d’un accident cardiaque grave

<strong>Cardio</strong><br />

N° 4 - Septembre 2005<br />

& Sp rt<br />

LA REVUE PRATIQUE DE LA CARDIOLOGIE DE L’EFFORT<br />

ÉVÉNEMENT<br />

Le suivi<br />

cardiovasculaire<br />

des tennismen<br />

MISE AU POINT<br />

Pathologie vasculaire<br />

<strong>et</strong> sport : revue pour<br />

une démarche clinique<br />

ANALYSE D’ARTICLE<br />

Dépistage<br />

cardiovasculaire :<br />

consensus européen<br />

CONGRÈS<br />

XV e Journées<br />

Européennes de<br />

la Société Française<br />

de <strong>Cardio</strong>logie<br />

Dossier<br />

pratique<br />

ALTITUDE ET SPORT<br />

ADAPTATION, PATHOLOGIES ET PRISE EN CHARGE<br />

■ Physiologie de l’hypoxie d’altitude : adaptations cardiovasculaires<br />

■ Médicaments cardiovasculaires : peut-on prédire leur eff<strong>et</strong> en altitude ?<br />

■ Pathologies cardiaques en altitude : risques<br />

■ Prise en charge sur le terrain d’un accident cardiaque grave


édito<br />

L’été est fini<br />

Les belles journées à Roland Garros,<br />

Wimbledon <strong>et</strong> Flushing Meadow sont<br />

maintenant terminées.<br />

Avec elles, les conditions climatiques<br />

si propices aux jeux de ballons, à<br />

la baignade ou aux randonnées en<br />

montagne. Ces dernières sont de plus en<br />

plus prisées par nos contemporains.<br />

Mais si les cordées vers les somm<strong>et</strong>s<br />

enneigés ou les simples promenades<br />

familiales en moyenne montagne<br />

existent depuis longtemps, les<br />

cardiologues du sport se trouvent<br />

confrontés depuis peu à une nouvelle<br />

population : les coureurs <strong>et</strong> cyclistes<br />

d’altitude, qui recherchent électivement<br />

les cumuls de dénivelés les plus<br />

importants, dans des conditions<br />

météorologiques très sollicitantes <strong>et</strong><br />

souvent bien loin de la première USIC.<br />

Intégrer l’hypoxie, le froid, la fatigue <strong>et</strong><br />

la déshydratation dans notre décision<br />

d’aptitude, voilà un joli challenge cardiologique…<br />

<strong>et</strong> médico-légal…<br />

Mais revenons à nos beaux jours.<br />

L’été a donc incité la plupart d’entre nous<br />

à pratiquer c<strong>et</strong>te activité physique qui,<br />

depuis la fin des années 80, en prévention<br />

primaire comme en prévention secondaire,<br />

accumule patiemment les preuves de ses<br />

bienfaits.<br />

Comme souvent, il aura fallu du temps<br />

pour que nous prenions conscience de<br />

l’évidence : l’effort , à certaines conditions,<br />

est souhaitable pour chacun d’entre nous,<br />

coronarien ou non, insuffisant cardiaque<br />

ou non, valvulaire ou non.<br />

Et le bénéfice est sans commune mesure<br />

avec le reste de nos thérapeutiques.<br />

Car enfin, quel médicament, quelle<br />

prothèse perm<strong>et</strong> à la fois de lutter contre<br />

le stress <strong>et</strong> d’améliorer la variabilité<br />

sinusale, la pression artérielle, l’index de<br />

masse corporelle, l’insulino-sensibilité,<br />

le HDL-cholestérol ?<br />

Et au vu des dernières publications, il<br />

paraît clair que le champ des bénéfices<br />

est loin d’être exploré en totalité.<br />

SOMMAIRE<br />

ÉVÉNEMENT p. 4<br />

Le suivi cardiovasculaire des joueurs de tennis de haut niveau<br />

● Entr<strong>et</strong>ien avec Dany-Michel Marcad<strong>et</strong>, médecin cardiologue<br />

référent de la FFT<br />

Pr François Carré (Rennes)<br />

DOSSIER<br />

Altitude <strong>et</strong> <strong>Sport</strong><br />

Adaptations, pathologies <strong>et</strong> prise en charge<br />

Introduction<br />

p. 9<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Strasbourg)<br />

Physiologie de l’hypoxie d’altitude : adaptations<br />

cardiovasculaires<br />

Pr Jean-Paul Richal<strong>et</strong> (Bobigny)<br />

Médicaments cardiovasculaires : peut-on prédire leur eff<strong>et</strong> en<br />

altitude ?<br />

Dr Laurent Monassier (Strasbourg)<br />

Pathologies cardiaques en altitude : risques, traitements <strong>et</strong> prise<br />

en charge<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Strasbourg)<br />

<strong>Sport</strong> en altitude : que faire avant un trekking ?<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Strasbourg)<br />

MISE AU POINT p. 25<br />

Pathologie vasculaire <strong>et</strong> sport : revue pour<br />

une démarche clinique<br />

Dr Pierre Abraham (Angers)<br />

ANALYSE D’ARTICLE p. 31<br />

Dépistage cardiovasculaire : consensus européen<br />

pour les jeunes sportifs<br />

Pr François Carré (Rennes)<br />

Dernier point, il n’est jamais trop tard, en<br />

prévention primaire comme en<br />

prévention secondaire, pour encaisser<br />

les dividendes d’une activité physique.<br />

Alors, pour paraphraser un de nos<br />

grands auteurs, nous pourrions dire<br />

« Rien ne sert de partir à point, il faut<br />

courir ».<br />

Vous avez couru, nagé, sauté, gambadé…<br />

C’était l’été… Mais en automne <strong>et</strong> en<br />

hiver, continuez…<br />

Dr Laurent Chevalier<br />

Clinique du <strong>Sport</strong>, Bordeaux-Mérignac<br />

CONGRÈS p. 35<br />

XV e Journées Européennes de la Société Française<br />

de <strong>Cardio</strong>logie, Paris 2005<br />

Dr Marc Ferrière (Montpellier), Pr Hervé Douard (Pessac)<br />

AGENDA p. 38<br />

<strong>Cardio</strong><br />

&Sp rt<br />

•Rédacteur en Chef : Pr François Carré. Rédacteur en chef adjoint : Pr Hervé Douard.<br />

•Comité de rédaction : Dr Laurent Chevalier, Dr Stéphane Doutreleau, Dr Marc Ferrière, Dr Jean-Claude Verdier.<br />

•Comité scientifique : Dr Jacques Tricoire, Dr Pascal Poncel<strong>et</strong>, Dr Richard Brion, Dr Alain Ducardonn<strong>et</strong>, Dr Elisa Pedroni, Dr Jean-Michel Chevallier, Dr Thierry<br />

Laporte, Pr Dominique Midy, Dr Pierre Dumoulin, Pr Philippe Mabo, Dr Catherine Montpère, Dr Philippe Vernoch<strong>et</strong>, Dr Sonia Corone, Pr Alain Cohen-Solal,<br />

Pr Patrice Virot, Dr François Marçon, Pr Jean-Paul Broust<strong>et</strong>, Dr Vincent Lafay, Dr Jean Gauthier, Dr Dany Marcad<strong>et</strong>, Dr Richard Amor<strong>et</strong>ti.<br />

Distribué par les Laboratoires Menarini France.<br />

1, rue du Jura, SILIC 528, 94633 Rungis Cedex - Tél. : 01 45 60 77 20 - Fax : 01 46 87 94 31<br />

Edition Expressions Santé S.A. - Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier •Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu •Rédacteur : Marjorie Andrès<br />

•Secrétaire de rédaction : Annaïg Bévan •Chef de Production <strong>et</strong> Fabrication : Gracia Bejjani •Maqu<strong>et</strong>te : Christine Lecomte<br />

Photo de couverture : DPPI •Impression : Imprimerie de Compiègne, 60205 Compiègne - ISSN : en cours.<br />

3<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


événement<br />

Le suivi cardiovasculaire<br />

des joueurs de tennis<br />

de haut niveau<br />

Entr<strong>et</strong>ien avec Dany-Michel Marcad<strong>et</strong>,<br />

médecin cardiologue référent<br />

de la Fédération Française de Tennis<br />

La saison de tennis terminée, <strong>Cardio</strong> <strong>et</strong> <strong>Sport</strong> fait le point, dans un entr<strong>et</strong>ien avec le Dr Dany-Michel Marcad<strong>et</strong>, cardiologue<br />

référent de la Fédération Française de Tennis, sur le suivi médical <strong>et</strong> plus particulièrement cardiovasculaire, des<br />

“tennismen” en France.<br />

Propos recueillis par le Pr François Carré, Hôpital Pontchaillou, Rennes<br />

<strong>Cardio</strong> & <strong>Sport</strong> : Dr Marcad<strong>et</strong>, pouvezvous<br />

nous préciser votre fonction <strong>et</strong><br />

vos responsabilités au sein de la Fédération<br />

Française de Tennis ?<br />

Dany-Michel Marcad<strong>et</strong> : Le service<br />

médical de la Fédération Française de<br />

Tennis a été restructuré il y a trois ans.<br />

Je suis chargé des bilans cardiologiques<br />

annuels, suivant la réglementation<br />

actuelle pour les joueurs de<br />

haut niveau, mais le service reste<br />

ouvert aux joueurs professionnels.<br />

Bien entendu, j’interviens aussi sur<br />

demande devant l’apparition de<br />

symptômes, par exemple.<br />

C&S : Comment est structuré le suivi<br />

médical des “tennismen” actuellement,<br />

en particulier dans le<br />

domaine cardiovasculaire ?<br />

DMM : Le service médical comprend<br />

des médecins salariés à temps partiel<br />

(endocrinologue, nutritionniste, psychologue,<br />

rhumatologue) <strong>et</strong> des médecins<br />

vacataires (dentiste, ophtalmologiste,<br />

cardiologue). Le directeur médical<br />

<strong>et</strong> les kinésithérapeutes sont<br />

salariés. Une fois les bilans réalisés, nous<br />

nous réunissons avec les entraîneurs à<br />

l’occasion d’un staff pour faire le point<br />

sur l’état de santé des joueurs.<br />

Le centre médical est dans l’enceinte<br />

du stade Roland Garros, sous le court<br />

Suzanne Lenglen. Nous disposons de<br />

plusieurs salles de consultations <strong>et</strong> le<br />

cabin<strong>et</strong> de cardiologie est équipé d’un<br />

matériel d’épreuve d’effort avec ergocycle,<br />

tapis roulant, matériel d’analyse<br />

des échanges gazeux <strong>et</strong> d’un échocardiographe<br />

qui nous est prêté pendant<br />

les périodes de bilan. Les locaux des<br />

kinésithérapeutes sont équipés de tout<br />

le matériel nécessaire à la rééducation<br />

post-traumatique <strong>et</strong> à l’exploration de la<br />

force musculaire, en particulier isocinétique.<br />

Un laboratoire d’analyses biologiques<br />

est aussi rattaché au centre,<br />

mais il se trouve à l’extérieur du stade<br />

Roland Garros. Pendant les Internationaux<br />

de Roland Garros, un autre poste<br />

médical est ouvert sous le court central.<br />

C&S : Quel est le contenu de base<br />

<strong>et</strong> la périodicité du suivi cardiovasculaire<br />

des “tennismen” ?<br />

DMM : Le bilan cardiovasculaire<br />

comprend un interrogatoire, un examen<br />

physique, un ECG de repos 12<br />

dérivations, une échocardiographie<br />

<strong>et</strong> une épreuve d’effort avec analyse<br />

des gaz expirés, pour dépister<br />

d’éventuelles pathologies <strong>et</strong> vérifier<br />

l’absence de contre-indication à la<br />

pratique du tennis de haut niveau.<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

4


Nous voyons les joueurs au moins une<br />

fois par an, mais nous sommes parfois<br />

amenés à les contrôler après une interruption<br />

prolongée pour une blessure,<br />

pour réévaluer une anomalie cardiaque<br />

éventuelle ou dès qu’ils présentent<br />

un symptôme particulier. Si<br />

besoin, je prends en charge le joueur<br />

pour la réalisation d’examens complémentaires<br />

lorsqu’ils sont indiqués.<br />

Ma deuxième fonction est de communiquer<br />

avec les entraîneurs <strong>et</strong> les<br />

préparateurs physiques, pour leur<br />

transm<strong>et</strong>tre les données de l’épreuve<br />

d’effort <strong>et</strong>, en particulier, les paramètres<br />

utiles pour individualiser l’entraînement,<br />

c’est-à-dire la vitesse<br />

maximale aérobie (VMA) <strong>et</strong> les valeurs<br />

de fréquence cardiaque aux “seuils”.<br />

Nous comptons beaucoup sur les<br />

entraîneurs <strong>et</strong> les préparateurs physiques<br />

pour appliquer les recommandations<br />

que nous donnons en<br />

fonction des résultats du bilan. Ces<br />

recommandations concernent aussi<br />

les règles élémentaires d’hygiène de<br />

vie <strong>et</strong>, en particulier, la nutrition. Il faut<br />

encore se battre pour réduire le<br />

nombre de pizzas <strong>et</strong> de “Mac do” <strong>et</strong><br />

c’est souvent l’entraîneur qui vérifie<br />

les plateaux au self <strong>et</strong> ce qu’il y a dans<br />

les armoires ! Nous constatons, malheureusement,<br />

que même dans c<strong>et</strong>te<br />

population, il est très difficile d’avoir<br />

une alimentation équilibrée <strong>et</strong> les<br />

fruits, les légumes <strong>et</strong> les protides sont<br />

souvent oubliés. Il a ainsi fallu un<br />

énorme travail pour modifier les idées<br />

fortement ancrées dans les esprits,<br />

comme par exemple ne jamais manger<br />

de viande la veille d’un match.<br />

C&S : Quels sont les “tennismen”<br />

concernés par ce suivi ?<br />

DMM : Nous nous occupons de tous<br />

les joueurs de haut niveau, c’est-à-dire<br />

des joueurs qui ont été proposés par le<br />

Directeur Technique National <strong>et</strong> mis sur<br />

une liste par le ministère de la Jeunesse,<br />

Test d’effort avec mesure des gaz expirés chez une jeune joueuse du groupe Espoir.<br />

des <strong>Sport</strong>s <strong>et</strong> de la Vie Associative. Nous<br />

suivons aussi les groupes “Espoirs”, les<br />

joueurs de Coupe Davis <strong>et</strong> les joueuses<br />

de la Fed Cup.<br />

C&S : Qu’en est-il des professionnels ?<br />

En eff<strong>et</strong>, au même titre que les autres<br />

sports professionnels, ils ne sont pas<br />

concernés par le suivi obligatoire<br />

récemment instauré par le ministère<br />

de la Jeunesse, des <strong>Sport</strong>s <strong>et</strong> de la<br />

Vie Associative (arrêté de février<br />

2004). Ont-ils un suivi cardiovasculaire<br />

minimal imposé par l’ATP<br />

ou le WTA, comme celui que la ligue<br />

de football professionnel est en train<br />

de m<strong>et</strong>tre en place en France ?<br />

DMM : Les joueurs professionnels qui<br />

le désirent, bénéficient du même suivi<br />

que celui des autres joueurs. Nous<br />

sommes sollicités pour certaines missions,<br />

comme l’année dernière pendant<br />

les Internationaux de Roland<br />

Garros, où nous avons ouvert une<br />

consultation libre <strong>et</strong> gratuite pour l’ensemble<br />

des joueurs du circuit (examen<br />

clinique, ECG de repos <strong>et</strong> échocardiographie).<br />

De plus, nous sommes d’astreinte<br />

pendant les tournois majeurs<br />

(Roland Garros bien sûr, Open de<br />

Bercy, Open Gaz de France <strong>et</strong> le Tournoi<br />

des Vétérans à Roland Garros).<br />

C&S : A quel âge, en moyenne, les<br />

joueurs entrent-ils dans le centre de<br />

formation Roland Garros ? Quelle est la<br />

charge, le type de travail physique d’un<br />

joueur de tennis du centre <strong>et</strong> comment<br />

gère-t-il sa scolarité ?<br />

DMM : La plupart des jeunes joueurs<br />

entrent à partir de 11 ans dans le centre<br />

de formation Roland Garros <strong>et</strong> ils suivent<br />

leurs études en parallèle. Dans la<br />

préparation physique, la part du foncier<br />

est de 50 % en période hivernale, contre<br />

20 % le reste du temps. La plus grande<br />

part étant donnée au travail technique <strong>et</strong><br />

à la compétition. On se rend compte<br />

que, vu l’emploi du temps d’un joueur,<br />

il lui est difficile de “caser son jogging”<br />

entre les entraînements, les matchs, le<br />

travail technique <strong>et</strong> les études.<br />

>>><br />

événement<br />

5 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


événement<br />

>>><br />

C&S : Dans votre structure, quel<br />

type de protocole utilisez-vous pour<br />

les tests d’effort ?<br />

DMM : Nous pratiquons essentiellement<br />

les tests sur tapis roulant. Le protocole<br />

a été établi en accord avec les<br />

entraîneurs, avec une pente fixe de 2 %<br />

<strong>et</strong> une vitesse variable. Quand le joueur<br />

n’est pas connu de notre service, on<br />

commence avec une vitesse de 6 (filles)<br />

ou 8 km/h (garçons), avec des paliers<br />

de 2 km/h toutes les deux minutes, jusqu’à<br />

10 km/h, puis par paliers de 1 km/h<br />

toutes les minutes. Lorsque nous disposons<br />

d’un test d’effort antérieur, on<br />

adapte le protocole de telle manière<br />

que la durée de l’effort soit d’environ<br />

10 à 12 minutes, avec des paliers de<br />

1 km/h au niveau du seuil pour obtenir<br />

une vitesse au seuil la plus précise<br />

possible. Le calcul direct de la VO 2 maximale<br />

est réalisé systématiquement.<br />

C&S : Utilisez-vous aussi des tests<br />

de terrain ?<br />

DMM : Oui, nous utilisons aussi des<br />

tests de terrain, pour obtenir les VMA<br />

comme le Vameval <strong>et</strong> le Luc Léger.<br />

Plus spécifique au tennis, le test “zigzag”<br />

étudie la vitesse de déplacement<br />

sur 10 mètres, avec de nombreux<br />

changements de direction. Les tests<br />

“multi-bonds” viennent compléter le<br />

test de détente vertical sur tapis de<br />

Bosco pratiqué au laboratoire. Enfin,<br />

des tests de musculation sur Ariel,<br />

mesurant la force, la vitesse <strong>et</strong> la puissance<br />

maximale développée complètent<br />

les données du Cybex.<br />

C&S : Pourriez-vous nous décrire les<br />

principales caractéristiques cardiovasculaires<br />

des “tennismen” ?<br />

DMM : Je peux vous résumer les statistiques<br />

relevées sur les 64 derniers<br />

joueurs que nous avons examinés.<br />

Tableau 1 • Résultats de l’examen clinique du cœur des joueurs de tennis<br />

de haut niveau.<br />

L’examen clinique est normal dans<br />

69 % des cas (Tab. 1). L’anomalie la plus<br />

fréquente est un souffle systolique, dans<br />

94 % des cas. Les autres anomalies<br />

(troubles du rythme, arythmie, souffles<br />

vasculaires) restent très modérées, soit<br />

2 à 5 % des cas.<br />

L’ECG de repos est normal dans 53 %<br />

des cas. Les modifications électriques<br />

les plus fréquentes concernent la repolarisation,<br />

avec les atypies classiquement<br />

décrites chez les sportifs dans<br />

36 % des cas. Dans 30 % des cas, un bloc<br />

de branche droit incompl<strong>et</strong> a été<br />

observé (Tab. 2). Chez un joueur, un<br />

aspect compatible avec un syndrome<br />

de Brugada a nécessité un test à la flécaïne,<br />

qui s’est révélé négatif. Enfin, on<br />

r<strong>et</strong>rouve une fois une arythmie supra<br />

Filles Garçons Total %<br />

(34) (30) (64)<br />

Normal 22 22 44 69<br />

Souffle systolique 7 2 9 14<br />

Souffle vasculaire 1 1 2 3<br />

Varice 1 1 2<br />

Tachycardie 1 1 2<br />

Spasme laryngé 1 1 2<br />

Asthme 2 1 3 5<br />

<strong>et</strong> ventriculaire (2 %), une fois un bloc<br />

de branche droit compl<strong>et</strong> (2 %) <strong>et</strong> une<br />

fois des ondes Q profondes dans le territoire<br />

inférieur (2 %). Dans ce dernier<br />

cas, l’échocardiographie a mis en évidence<br />

une insuffisance mitrale minime<br />

par prolapsus valvulaire mitral.<br />

L’épreuve d’effort, réalisée suivant le<br />

protocole décrit au-dessus, est normale<br />

dans 90 % des cas. Dans 8 % des cas, on<br />

r<strong>et</strong>rouve des extrasystoles ventriculaires<br />

sans critère de gravité, une fois un bloc<br />

auriculo-ventriculaire en récupération,<br />

un spasme laryngé <strong>et</strong> une crise<br />

d’asthme à l’effort.<br />

La VO 2 maximale moyenne est de<br />

59 ml/mn/kg chez les garçons, avec une<br />

VMA à 18 km/h <strong>et</strong> de 52 ml/mn/kg chez<br />

les filles avec une VMA à 17 km/h (Tab. 3).<br />

Tableau 2 • Résultats de l’ECG de repos chez les joueurs de tennis de haut<br />

niveau.<br />

Filles Garçons Total %<br />

(34) (30) (64)<br />

Normal 10 14 34 53<br />

Atypies Repolarisation 15 8 23 36<br />

BiD 9 10 19 30<br />

BBD 1 1 2<br />

ESV-ESSV 1 1 2<br />

Ondes Q 1 1 2<br />

Brugada 1 1 2<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

6


L’échocardiographie est normale dans<br />

39 % des cas. Des signes de cœur d’athlète<br />

sont observés fréquemment, en<br />

particulier chez les garçons, une hypertrophie<br />

ventriculaire gauche dans 33 %<br />

des cas. La masse ventriculaire gauche<br />

moyenne est de 137 g pour les garçons,<br />

contre 96 g pour les filles. Les autres<br />

anomalies les plus fréquentes concernent<br />

le massif auriculaire, un foramen<br />

ovale perméable spontanément visible<br />

(12 %) <strong>et</strong> un anévrisme du septum<br />

inter-auriculaire (12 %).<br />

Nous manquons de références<br />

publiées chez les joueurs de tennis de<br />

haut niveau pour comparer nos données.<br />

La fréquence des anomalies du<br />

massif auriculaire spontanément<br />

r<strong>et</strong>rouvées est comparable à celle de<br />

la population générale. Cependant,<br />

elle peut sembler importante pour des<br />

sportifs de haut niveau <strong>et</strong> nécessite, à<br />

notre avis, de plus amples investigations<br />

pour savoir si elle peut être en<br />

rapport avec le sport pratiqué <strong>et</strong> en<br />

particulier les phases d’apnée brèves<br />

répétées qui accompagnent les gestes<br />

de frappe de la balle.<br />

C&S : Lors d’un tournoi de tennis<br />

de haut niveau, comme les Internationaux<br />

de Roland Garros, exist<strong>et</strong>-il<br />

une surveillance médicale<br />

spécifique pour les spectateurs <strong>et</strong>/ou<br />

pour les joueurs ?<br />

DMM : Pendant les tournois, il y a deux<br />

services médicaux, un pour le public <strong>et</strong><br />

un pour les joueurs. Dans le service des<br />

joueurs, ce sont des médecins vacataires<br />

qui assurent une présence pour traiter<br />

essentiellement des problèmes de traumatologie.<br />

Il n’y a pas de consultation<br />

cardiologique, mais je reste d’astreinte<br />

téléphonique pour les joueurs <strong>et</strong> les<br />

entraîneurs, pas pour le public. Tout le<br />

matériel de réanimation nécessaire est<br />

disponible sur le site du tournoi <strong>et</strong> une<br />

convention est passée en cardiologie<br />

avec l’Hôpital Ambroise Paré à Boulogne,<br />

pour la gestion des urgences cardiologiques<br />

éventuelles.<br />

C&S : Les joueurs participants<br />

doivent-ils présenter un certificat<br />

médical <strong>et</strong> bénéficient-ils d’une visite<br />

pré-tournoi, comme avant le Tour de<br />

France cycliste ?<br />

DMM : Le certificat médical est très probablement<br />

demandé mais, malheureusement,<br />

il n’y a pas de visite pré-tournoi.<br />

C&S : Enfin, il est fréquent de voir<br />

des compétitions de tennis dites de<br />

“masters” ou vétérans. Ces joueurs,<br />

parfois d’un âge respectable,<br />

doivent-ils présenter un certificat<br />

médical avant de participer au<br />

tournoi <strong>et</strong> bénéficient-ils d’un suivi<br />

cardiovasculaire minimal ?<br />

DMM : Avant chaque tournoi, un certificat<br />

médical est présenté, mais il<br />

n’existe pas de réel suivi des vétérans.<br />

Le suivi médical est seulement pour le<br />

haut niveau <strong>et</strong> les professionnels, les<br />

amateurs doivent se prendre en charge<br />

eux-mêmes. Il y a deux ans, nous avons<br />

Tableau 3 • Résultats de la mesure de VO 2 chez les joueurs de tennis de<br />

haut niveau.<br />

VO 2 VMA Seuil<br />

Ml/mn/kg km/h %<br />

Garçons 59 ± 8 18 ± 2 74 ± 12<br />

Filles 52 ± 8 17 ± 1 73 ± 11<br />

organisé une consultation gratuite (examen<br />

clinique <strong>et</strong> ECG de repos avec<br />

mesure de la pression artérielle) pendant<br />

les Championnats de France des<br />

vétérans. Seulement 25% des joueurs<br />

se sont présentés ! Certains joueurs<br />

présentaient des pathologies cardiovasculaires<br />

(bloc de branche gauche <strong>et</strong><br />

hypertension artérielle surtout), voire<br />

parfois des symptômes ayant nécessité<br />

la pratique d’une épreuve d’effort. Ainsi,<br />

je me souviens d’un vétéran qui présentait<br />

une hypertension artérielle, une<br />

douleur thoracique d’effort, un bloc de<br />

branche gauche <strong>et</strong> des lésions à la coronarographie.<br />

Il s’était pourtant inscrit<br />

au tournoi ! Il a bien sûr eu une contreindication<br />

à la poursuite du championnat.<br />

Je pense qu’une information, voire<br />

une éducation, doit être faite auprès des<br />

joueurs plus âgés. En eff<strong>et</strong>, la plupart se<br />

croient immunisés contre la maladie,<br />

en particulier cardiovasculaire. Il faut<br />

aussi insister sur l’importance du certificat<br />

médical de non contre-indication.<br />

Dans c<strong>et</strong>te population, il doit comporter<br />

un interrogatoire, un examen physique<br />

<strong>et</strong> au minimum un ECG de repos,<br />

voire, à mon avis, une épreuve d’effort.<br />

Les joueurs ont trop tendance à considérer<br />

le certificat médical comme une<br />

formalité administrative qui peut faire<br />

obstacle à leur désir de jouer. Je me souviens<br />

du cas de ce joueur persistant dans<br />

la volonté de continuer la compétition,<br />

alors que nous lui avions trouvé une<br />

contre-indication. Un bilan hémodynamique<br />

s’imposait en raison de la<br />

symptomatologie (dyspnée) qu’il présentait<br />

<strong>et</strong> en raison d’un aspect d’infarctus<br />

sur l’ECG de repos avec une<br />

fraction d’éjection à 35 % à l’échographie.<br />

Le comble est que ce joueur était<br />

médecin !<br />

Nous réfléchissons actuellement au<br />

niveau de la Fédération Française de<br />

Tennis aux examens qui seront obligatoirement<br />

demandés aux joueurs<br />

vétérans pour l’obtention de leur<br />

certificat médical de non contreindication.<br />

❚<br />

événement<br />

7 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


DOSSIER<br />

DOSSIER<br />

dossier<br />

Altitude <strong>et</strong> <strong>Sport</strong><br />

Adaptations, pathologies <strong>et</strong> prise en charge<br />

<br />

à l’hypoxie, Université Paris 13, Bobigny)<br />

<br />

Inserm U715, Strasbourg)<br />

<br />

<br />

Introduction<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg)<br />

Physiologie de l’hypoxie d’altitude :<br />

adaptations cardiovasculaires<br />

Pr Jean-Paul Richal<strong>et</strong> (Hôpital Avicenne, Laboratoire Réponses cellulaires <strong>et</strong> fonctionnelles<br />

Médicaments cardiovasculaires :<br />

peut-on prédire leur eff<strong>et</strong> en altitude ?<br />

Dr Laurent Monassier (Laboratoire de Neurobiologie <strong>et</strong> Pharmacologie <strong>Cardio</strong>vasculaire,<br />

Pathologies cardiaques en altitude :<br />

risques, traitements <strong>et</strong> prise en charge<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg)<br />

<strong>Sport</strong> en altitude :<br />

que faire avant un trekking ?<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg)<br />

p. 10<br />

p. 10<br />

p. 14<br />

p. 20<br />

p. 23<br />

MOTS CLÉS<br />

Altitude, sport, compétition, entraînement, hypoxie,<br />

physiologie, pathologies cardiaques, pharmacologie,<br />

capacité d’effort, trekking, contre-indications<br />

9<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


dossier<br />

DOSSIER<br />

DOSSIER<br />

>>><br />

>>><br />

La montagne est un milieu “hostile”, qui associe à des<br />

dangers d’ordre climatique ou liés au terrain une<br />

raréfaction en oxygène. L’hypoxémie qu’elle<br />

entraîne, qui s’accentue avec l’altitude, est à l’origine<br />

d’adaptations initialement cardioventilatoires. La présence<br />

d’une pathologie cardiovasculaire peut donc logiquement<br />

interférer avec ces phénomènes d’acclimatation<br />

ou s’aggraver avec l’altitude.<br />

La montagne n’est plus réservée aux professionnels ou à une<br />

élite. De plus en plus de personnes pratiquent les sports de<br />

montagne, la randonnée ou le trekking de haute altitude.<br />

Cela va généralement bien au-delà de la pratique d’un sport<br />

ou d’une activité physique. Il s’agit là de personnes passionnées<br />

qui, malgré un événement cardiovasculaire, souhaitent,<br />

Introduction<br />

Dr Stéphane Doutreleau<br />

dans la mesure du possible, repartir en montagne.<br />

De plus en plus de patients, conscients <strong>et</strong> informés des<br />

risques liés à l’altitude, viennent consulter <strong>et</strong> demander<br />

des conseils. La réponse que l’on peut leur apporter est<br />

difficile parce que les études faites chez les patients porteurs<br />

de cardiopathies sont peu nombreuses. En plus, nos<br />

patients prennent souvent plusieurs médicaments dont<br />

l’efficacité peut être modulée en altitude <strong>et</strong>/ou interférer<br />

avec l’acclimatation.<br />

Autant de questions auxquelles plusieurs spécialistes vont<br />

essayer d’apporter des éléments de réponses.<br />

En eff<strong>et</strong>, si beaucoup de choses restent à montrer, la<br />

connaissance des mécanismes de l’adaptation à l’hypoxie<br />

<strong>et</strong> la modélisation des eff<strong>et</strong>s des médicaments en altitude<br />

peuvent perm<strong>et</strong>tre de donner des conseils adaptés.<br />

<br />

Physiologie de l’hypoxie<br />

d’altitude : adaptations<br />

cardiovasculaires<br />

Pr Jean-Paul Richal<strong>et</strong> (Hôpital Avicenne, Laboratoire Réponses cellulaires <strong>et</strong> fonctionnelles à<br />

l’hypoxie, Université Paris 13, Bobigny)<br />

à l’environnement<br />

de haute altitude<br />

L’exposition<br />

entraîne des réactions cardiovasculaires<br />

variables dans le<br />

temps. Nous donnerons d’abord une<br />

définition biologique de l’altitude,<br />

en fonction de l’importance des<br />

eff<strong>et</strong>s ressentis <strong>et</strong> des capacités de<br />

survie (1).<br />

En basse altitude (jusqu’à 1 000 m<br />

environ), aucun eff<strong>et</strong> n’est ressenti, ni<br />

au repos ni à l’exercice. Il faut noter<br />

cependant que chez certaines personnes<br />

souffrant d’affection s’accompagnant<br />

déjà d’une hypoxémie<br />

au niveau de la mer (cardiopathies<br />

avec shunt droit-gauche), l’altitude<br />

de 1 000 m peut aggraver les symptômes.<br />

En moyenne altitude (1 000 à<br />

2 000 m), le sportif ressent un eff<strong>et</strong><br />

sur la performance maximale. Ainsi,<br />

la consommation maximale d’oxygène<br />

diminue. En haute altitude<br />

(entre 2 000 <strong>et</strong> 5 500 m environ), les<br />

eff<strong>et</strong>s immédiats de l’hypoxie (hyperventilation,<br />

tachycardie) sont ressentis<br />

pour des exercices d’intensité de<br />

plus en plus faible, puis au repos. En<br />

très haute altitude (au-delà de 5 500 m<br />

environ), la vie humaine permanente<br />

est, semble-t-il, impossible.<br />

Cependant, l’homme est capable, par<br />

des ajustements appropriés, de vivre<br />

<strong>et</strong> même d’avoir une activité physique<br />

parfois intense à ces altitudes.<br />

Ceci nécessite un temps incompressible<br />

d’acclimatation.<br />

De l’air ambiant jusqu’à la mitochondrie,<br />

le flux d’O 2 dépend des gradients<br />

successifs de pression d’O 2 <strong>et</strong> des<br />

débits de gaz ou de sang qui transportent<br />

l’O 2 . En altitude, la pression d’O 2<br />

<strong>et</strong> donc les gradients d’O 2 diminuent<br />

à tous les niveaux. Ainsi, pour maintenir<br />

un flux d’O 2 adéquat au niveau<br />

cellulaire, les débits ventilatoire <strong>et</strong> cardiaque<br />

doivent augmenter pour compenser<br />

la baisse des gradients d’O 2 .<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

10


DOSSIER<br />

% ou b/min<br />

120<br />

110<br />

100<br />

90<br />

80<br />

70<br />

0 5000 5500 6000 6500 7000 5000<br />

8000 8848 0<br />

> La fréquence cardiaque<br />

L’activité sympathique augmente en<br />

hypoxie, comme en témoigne l’augmentation<br />

de l’activité nerveuse mesurée<br />

directement dans le nerf tibial ou<br />

péronier (2). La concentration plasmatique<br />

de noradrénaline augmente rapidement<br />

puis se stabilise, voire diminue<br />

après 2 à 3 semaines, mais reste toujours<br />

supérieure à sa valeur du niveau<br />

de la mer (3, 4). La fonction chronotrope<br />

cardiaque est fortement stimulée<br />

en altitude. Il faut différencier ce qui se<br />

passe en hypoxie aiguë (quelques jours)<br />

<strong>et</strong> en hypoxie prolongée ou chronique.<br />

En hypoxie aiguë, la fréquence cardiaque<br />

de repos augmente de façon<br />

proportionnelle au degré d’hypoxémie<br />

(Fig. 1). A chaque niveau absolu d’exercice,<br />

la fréquence cardiaque est plus<br />

élevée en altitude. En hypoxie prolongée,<br />

la fréquence cardiaque de repos <strong>et</strong><br />

à l’exercice modéré diminue progressivement<br />

avec l’acclimatation, mais reste<br />

supérieure aux valeurs correspondantes<br />

de normoxie. A l’exercice maximal,<br />

la fréquence cardiaque diminue à<br />

partir d’environ 3 000 m (Fig. 2).<br />

La diminution de la fréquence cardiaque<br />

maximale en hypoxie prolongée<br />

constitue certainement un facteur limitant<br />

du transport de l’oxygène à l’exercice<br />

maximal, car le débit cardiaque<br />

diminue de façon parallèle à la fré-<br />

5750<br />

7000<br />

6500<br />

60<br />

0 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35<br />

jour dans le caisson hypobare<br />

6500<br />

altitude<br />

Figure 1 • Variations de la saturation artérielle en oxygène <strong>et</strong> de la fréquence<br />

cardiaque en fonction de l’altitude. Données de l’Opération Everest COMEX, 1997 (20).<br />

quence, le volume d’éjection systolique<br />

variant peu en altitude. Ainsi, la quantité<br />

maximale d’oxygène apportée par le<br />

sang vers les tissus diminue.<br />

Ce phénomène de limitation de la fréquence<br />

cardiaque maximale est lié à une<br />

diminution de la réponse chronotrope<br />

cardiaque à la stimulation adrénergique,<br />

comme si l’altitude avait un eff<strong>et</strong><br />

“ß-bloquant” sur le cœur. Il a été mis sur<br />

le compte d’une hyperactivation parasympathique<br />

(5, 6), mais il s’agit surtout<br />

d’un phénomène de désensibilisation<br />

des récepteurs ß-adrénergiques (4, 7).<br />

Ainsi, on note une baisse en hypoxie de la<br />

réponse chronotrope cardiaque, soit lors<br />

d’une activation adrénergique endogène<br />

(exercice), soit d’une stimulation exogène<br />

par perfusion d’isoprénaline (8, 9). De<br />

plus, la densité des récepteurs ß-adrénergiques<br />

diminue en hypoxie, soit sur<br />

des lymphocytes chez l’homme (4, 7), soit<br />

sur des myocytes chez le rat (10). C<strong>et</strong>te<br />

désensibilisation des ß-récepteurs n’est<br />

pas complètement réversible par l’inhalation<br />

d’oxygène (9, 11). Il semble que ce<br />

phénomène soit lié à une modification de<br />

la transduction du signal au sein des ß-<br />

récepteurs adrénergiques (12). Il serait lié<br />

d’une part, à la stimulation chronique des<br />

ß-récepteurs liée à l’activation permanente<br />

du système sympathique, d’autre<br />

part à un eff<strong>et</strong> spécifique de l’hypoxie sur<br />

les récepteurs cardiaques <strong>et</strong> les protéines<br />

G régulatrices (12).<br />

Sa<br />

Fc<br />

C<strong>et</strong>te atténuation des propriétés chronotropes<br />

cardiaques maximales peut<br />

limiter la performance physique<br />

maximale, mais peut être également<br />

considérée comme un mécanisme protecteur<br />

du myocarde. En eff<strong>et</strong>, la<br />

fréquence cardiaque est l’un des principaux<br />

déterminants de la consommation<br />

d’oxygène du myocarde <strong>et</strong> une<br />

hypoxie sévère pourrait être incompatible<br />

avec la fourniture d’oxygène au<br />

myocarde nécessaire à une tachycardie<br />

intense (4). Ainsi, l’organisme choisit de<br />

limiter ses performances physiques<br />

pour protéger le cœur, organe vital, par<br />

une véritable autorégulation.<br />

> Le débit cardiaque<br />

<strong>et</strong> la contractilité<br />

myocardique<br />

Le volume d’éjection systolique varie<br />

peu en altitude. Au repos ou à l’exercice,<br />

il a tendance à augmenter ou à rester<br />

stable en hypoxie aiguë <strong>et</strong> à diminuer<br />

en hypoxie chronique. C<strong>et</strong>te diminution<br />

est à m<strong>et</strong>tre en relation avec une<br />

baisse du r<strong>et</strong>our veineux, comme en<br />

témoigne la diminution des pressions<br />

dans l’oreill<strong>et</strong>te droite (13). Le débit cardiaque<br />

augmente au repos <strong>et</strong>, pour des<br />

exercices modérés, diminue à l’exercice<br />

maximal en hypoxie prolongée.<br />

Le cœur ne semble pas souffrir en altitude,<br />

même en altitude extrême. Ainsi,<br />

des échocardiographies réalisées en<br />

FRÉQUENCE CARDIAQUE (b/min)<br />

200<br />

180<br />

160<br />

140<br />

120<br />

100<br />

80<br />

60<br />

40<br />

repos, hypoxie aiguë<br />

max, hypoxie aiguë<br />

0 1 2 3 4 5 6 7 8<br />

ALTITUDE 5km<br />

dossier<br />

Figure 2 • Variations schématiques de la fréquence<br />

cardiaque de repos <strong>et</strong> à l’exercice maximal en hypoxie<br />

aiguë (trait plein) <strong>et</strong> prolongée (trait pointillé)<br />

en fonction de l’altitude (1).<br />

9<br />

max, hypoxie prolongée<br />

repos, hypoxie prolongée<br />

>>><br />

11 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


dossier<br />

DOSSIER<br />

>>><br />

altitude simulée jusqu’à 8 848 m, montrent<br />

une augmentation des indices de<br />

contractilité, liée à l’activation du système<br />

sympathique : à 7 500 m, la fraction<br />

d’éjection augmente de 6 % au<br />

repos <strong>et</strong> de 10 % à l’exercice (14). La<br />

relation de Starling, évaluée par la<br />

courbe volume d’éjection/pression<br />

capillaire bloquée, n’est pas altérée en<br />

altitude (13). Des échographies cardiaques,<br />

réalisées jusqu’à l’altitude<br />

équivalente de 8 848 m lors de l’Opération<br />

Everest III, n’ont pas montré de<br />

modifications significatives de la fraction<br />

d’éjection (Fig. 3). Le diamètre télédiastolique<br />

du VG était plus faible en<br />

altitude, traduisant une diminution du<br />

remplissage VG, portant sur le remplissage<br />

précoce au profit du rôle joué par<br />

la contraction auriculaire (comme en<br />

témoigne la baisse du rapport de vitesse<br />

maximale de l’onde E sur l’onde A).<br />

C<strong>et</strong>te diminution est probablement liée<br />

à une gêne du remplissage du VG, du<br />

fait de la dilatation du VD qui refoule le<br />

septum vers la gauche (15).<br />

L’électrocardiogramme<br />

L’électrocardiogramme ne montre pas<br />

de modification notable outre les<br />

conséquences directes de la tachycardie<br />

<strong>et</strong> de l’hypertension artérielle pulmonaire,<br />

avec la surcharge ventriculaire<br />

droite qu’elle induit : axe droit (107° à<br />

8 800 m), augmentation de l’amplitude<br />

de l’onde P <strong>et</strong> des ondes T aplaties ou<br />

inversées en précordiales droites. Par<br />

ailleurs, quelques troubles du rythme à<br />

type d’extrasystoles ventriculaires, des<br />

bradyarythmies nocturnes ont pu être<br />

occasionnellement notés (16-18).<br />

Aucun signe électrique de souffrance<br />

myocardique n’a jamais été noté chez<br />

un suj<strong>et</strong> sain en haute altitude.<br />

La pression artérielle<br />

A<br />

(%)<br />

C<br />

(mm)<br />

80<br />

70<br />

60<br />

50<br />

60<br />

50<br />

40<br />

30<br />

NM<br />

NM<br />

Fraction d’éjection VG<br />

FRACTION D'ÉJÉCTION VG<br />

5000<br />

DIAMÈTRE TÉLÉDIASTOLIQUE VG<br />

5000<br />

7000<br />

CONDITION<br />

7000<br />

CONDITION<br />

8000 RNM<br />

Diamètre télédiastolique<br />

8000<br />

RNM<br />

p < 0.05 vs NM<br />

p < 0.05 vs NM<br />

liques à l’exercice en hypoxie prolongée<br />

(19). Certaines études trouvent une<br />

pression artérielle légèrement augmentée<br />

dès le début du séjour, mais<br />

d’autres études ne trouvent aucune<br />

variation des pressions systémiques,<br />

même après un séjour prolongé en<br />

hypoxie sévère (20).<br />

• La pression artérielle pulmonaire<br />

La pression artérielle pulmonaire (PAP)<br />

augmente en altitude. La vasoconstriction<br />

pulmonaire hypoxique, décrite par<br />

Von Euler en 1946, induit une hypertension<br />

artérielle pulmonaire (HTAP).<br />

C<strong>et</strong>te HTAP est particulièrement marquée<br />

à l’exercice en hypoxie (13). Elle<br />

est également majorée par la position<br />

allongée, en particulier au cours du<br />

sommeil. La PAP s’élève après<br />

quelques minutes <strong>et</strong> se stabilise en<br />

12 à 24 heures. Elle augmente avec<br />

l’altitude, mais peut être très variable<br />

suivant les individus. A 4 500 m, la PAP<br />

est le double de sa valeur du niveau de<br />

(mmHg)<br />

(%)<br />

50<br />

35<br />

30<br />

20<br />

45<br />

40<br />

25<br />

3<br />

2,5<br />

2<br />

1,5<br />

1<br />

0,5<br />

PRESSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE SYSTOLIQUE<br />

NM<br />

NM<br />

5000<br />

RAPPORT VITESSE MAX E/A<br />

5000<br />

7000<br />

CONDITION<br />

7000<br />

CONDITION<br />

8000 RNM<br />

8000 RNM<br />

p < 0.05 vs NM<br />

p < 0.05 vs NM<br />

Figure 3 • Fonction cardiaque en haute altitude : données échocardiographiques<br />

obtenues lors de l’Opération Everest COMEX (2,18). A : fraction d’éjection (VG) ;<br />

B : pression artérielle pulmonaire systolique ; C : diamètre télédiastolique (VG) ;<br />

D : rapport vitesse max E/A.<br />

NM : niveau de la mer ; RNM : r<strong>et</strong>our au niveau de la mer après 30 jours en caisson<br />

hypobare.<br />

B<br />

D<br />

Pression artérielle pulmonaire<br />

systolique<br />

Rapport vitesse max E/A<br />

• La pression artérielle systémique<br />

Elle varie peu en altitude. On note<br />

cependant une tendance à une élévation<br />

des pressions systoliques <strong>et</strong> diastola<br />

mer. La PAP mesurée par échographie<br />

lors de l’Opération Everest III<br />

(COMEX’97) montre une augmentation<br />

avec l’altitude (15). La pression ne<br />

semble pas revenue à la valeur de base,<br />

pour tous les suj<strong>et</strong>s, un jour après le<br />

r<strong>et</strong>our en normoxie (Fig. 3B).<br />

En hypoxie chronique, l’inhalation<br />

d’oxygène entraîne une diminution<br />

du débit cardiaque <strong>et</strong> de la PAP, les<br />

résistances pulmonaires ne variant<br />

pas : ceci signifie que s’installent des<br />

modifications structurelles à type de<br />

muscularisation des artérioles d’environ<br />

500 µm de diamètre, comme chez<br />

le résident de haute altitude. L’HTAP<br />

r<strong>et</strong>entit sur la fonction ventriculaire<br />

droite, en créant une hypertrophie<br />

(qui semble cependant limitée chez<br />

l’homme, alors qu’elle est très importante<br />

chez le rat). Elle peut également<br />

r<strong>et</strong>entir indirectement sur le remplissage<br />

ventriculaire gauche, par interaction<br />

entre les deux ventricules. Au<br />

niveau de la mer, la PAP, élevée chez le<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

12


DOSSIER<br />

fo<strong>et</strong>us, chute brusquement après la<br />

naissance ; en altitude, la PAP du nouveau-né<br />

ne diminue que très lentement,<br />

car le stimulus hypoxique de la vie in<br />

utero persiste. Ce phénomène pourrait<br />

expliquer l’incidence importante de<br />

décompensation de pathologies cardiaques<br />

chez les nouveau-nés de certaines<br />

populations vivant en altitude<br />

(Chinois vivant au Tib<strong>et</strong>). Le rôle de<br />

l’HTAP dans la genèse de l’œdème pulmonaire<br />

hypoxique est primordial (1).<br />

La circulation<br />

• La circulation coronaire<br />

La circulation coronaire réagit à l’hypoxie<br />

aiguë par une vasodilatation dont<br />

le médiateur pourrait être l’adénosine.<br />

En hypoxie chronique <strong>et</strong> chez le résident<br />

de haute altitude, le débit coronaire<br />

diminue (21).<br />

• La circulation cérébrale<br />

La circulation cérébrale est le siège d’un<br />

conflit entre la vasodilatation induite<br />

par l’hypoxie <strong>et</strong> la vasoconstriction<br />

induite par l’hypocapnie. La résultante<br />

va dans le sens d’une augmentation du<br />

débit cérébral pendant les 3 premiers<br />

jours en altitude, suivie d’un r<strong>et</strong>our progressif<br />

aux valeurs de base (22, 23).<br />

> En conclusion<br />

Au total, le système cardiovasculaire<br />

est aux avant-postes dans les processus<br />

d’ajustement à l’hypoxie<br />

aiguë <strong>et</strong> chronique, particulièrement<br />

lors de l’exercice musculaire. La stimulation<br />

permanente du système<br />

adrénergique est le mécanisme principal<br />

de mise en jeu de ce système.<br />

Cependant, des mécanismes de protection<br />

du cœur se m<strong>et</strong>tent en place<br />

très rapidement, qui font que le<br />

cœur sain est capable de supporter<br />

des hypoxémies très sévères sans<br />

dommage, pour peu que l’acclimatation<br />

soit progressive. ❚<br />

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22. Court-Payen M, Ter Minassian A, Olsen NV <strong>et</strong> al. The effect of isradipine in acute<br />

altitude hypoxia on cerebral, renal, and splanchnic blood flow evaluated by Doppler<br />

measurements. Int J of Angiology 1995 ; 4 : 212-7.<br />

23. Severinghaus JW, Chiodi H, Eger EI 2 nd <strong>et</strong> al. Cerebral blood flow in man at high<br />

altitude. Role of cerebrospinal flow pH in normalization of flow in chronic hypocapnia.<br />

Circ Res 1966 ; 19 : 274-82.<br />

dossier<br />

13 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


dossier<br />

DOSSIER<br />

>>><br />

Médicaments<br />

cardiovasculaires :<br />

peut-on prédire leur eff<strong>et</strong><br />

en altitude ?<br />

Dr Laurent Monassier (Laboratoire de Neurobiologie <strong>et</strong> Pharmacologie <strong>Cardio</strong>vasculaire,<br />

Inserm U715, Strasbourg)<br />

Si on a tendance à réfléchir sur le<br />

risque d’aggravation d’une pathologie<br />

cardiovasculaire du fait de<br />

l’altitude <strong>et</strong> donc de l’hypoxie, la majoration<br />

d’un risque médicamenteux n’est<br />

que rarement abordée. Or, un travail<br />

précurseur, publié en 1988 par une<br />

équipe russe (1), chez des malades insuffisants<br />

cardiaques, avait révelé des<br />

risques d’intoxication digitalique deux<br />

fois supérieur en altitude qu’au niveau<br />

de la mer.<br />

Le problème de la pharmacologie en<br />

altitude est complexe, dans la mesure<br />

où de nombreuses adaptations physiologiques<br />

sont susceptibles de<br />

modifier l’efficacité des médicaments,<br />

soit pour des raisons de pharmacocinétique,<br />

soit pour des<br />

variations de la réponse des cibles,<br />

c’est-à-dire de la pharmacodynamie.<br />

Cependant, très peu de groupes de<br />

recherche s’en sont rigoureusement<br />

préoccupés en analysant l’ensemble<br />

du problème, qui doit intégrer l’altitude<br />

à laquelle on va, la vitesse à<br />

laquelle on monte, le temps pendant<br />

lequel on y reste <strong>et</strong> l’ensemble des<br />

paramètres pharmacocinétiques <strong>et</strong><br />

pharmacodynamiques qui régissent<br />

l’efficacité de chacun des produits<br />

étudiés. De plus, dans le cas de l’appareil<br />

cardiovasculaire, l’altitude pro-<br />

duit des adaptations qui peuvent<br />

indirectement influencer l’eff<strong>et</strong> d’un<br />

traitement ciblant c<strong>et</strong> appareil. Ainsi,<br />

comme nous le verrons plus loin, l’altitude<br />

peut induire une tachycardie<br />

qui se verrait ajoutée à l’eff<strong>et</strong> d’un<br />

produit tachycardisant. Il s’agit là<br />

d’une interaction non pas pharmacologique,<br />

mais simplement fonctionnelle.<br />

C’est ainsi qu’il faudrait<br />

quasiment faire une étude clinique<br />

pour chaque produit cardiovasculaire<br />

avant de pouvoir répondre correctement<br />

à la question qui nous préoccupe<br />

: « Existe-t-il un risque de voir<br />

l’efficacité thérapeutique <strong>et</strong>/ou la<br />

toxicité d’un médicament modifiée<br />

du fait d’une montée en altitude ? ».<br />

Dans ce bref article, nous allons tenter<br />

de discuter trois principales questions<br />

:<br />

1. En quoi l’altitude affecte-t-elle la<br />

pharmacocinétique des médicaments<br />

?<br />

2. Quelle est l’influence de l’altitude<br />

sur la pharmacodynamie, c’est-à-dire<br />

des eff<strong>et</strong>s sur leurs cibles, des produits<br />

utilisés à des fins thérapeutiques<br />

cardiovasculaires ?<br />

3. Est-ce que l’adaptation à l’altitude<br />

conduit elle-même à des interactions<br />

fonctionnelles avec les médicaments<br />

cardiovasculaires ?<br />

> Modifications<br />

de la pharmacocinétique<br />

Eff<strong>et</strong>s de l’altitude<br />

sur la résorption<br />

La perte de poids associée à une anorexie<br />

est un phénomène couramment<br />

observé en altitude, particulièrement<br />

au dessus de 5 000 m (2). C<strong>et</strong>te perte<br />

de poids peut être observée en dépit<br />

d’un apport calorique normal <strong>et</strong> il est<br />

donc normal de se demander si elle<br />

ne pourrait pas, au moins en partie,<br />

provenir d’une réduction de la<br />

résorption intestinale. Les résultats<br />

du peu d’études réalisées semblent<br />

montrer que des expositions à des<br />

altitudes élevées (habituellement<br />

plus de 6 000 m) pourraient aboutir à<br />

une réduction de la résorption intestinale<br />

des sucres (3). Il est cependant<br />

peu probable que des modifications<br />

de pharmacocinétique des médicaments<br />

cardiovasculaires puissent être<br />

dues à des anomalies de la résorption<br />

intestinale, en particulier à moins de<br />

5 000 m d’altitude.<br />

Eff<strong>et</strong> du premier passage<br />

Indépendamment de la structure chimique<br />

des médicaments, qui n’est pas<br />

affectée par l’altitude, l’eff<strong>et</strong> de premier<br />

passage est majoritairement hépatique<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

14


DOSSIER<br />

Tableau 1 • Aspects de métabolisme hépatique <strong>et</strong> de liaison aux protéines<br />

plasmatiques de quelques médicaments cardiovasculaires.<br />

Produits Métabolisme hépatique Liaison<br />

aux protéines<br />

plasmatiques<br />

Digoxine Faible 20 %<br />

Périndopril Activation (prodrogue) < 30 %<br />

Enalapril Activation (prodrogue) 50-60 %<br />

Lisinopril Non Non<br />

Losartan CYP2C9 (activation) 99 %<br />

Valsartan Non 94-97 %<br />

Propranolol CYP1A2, 2C19, 2D6, 3A4, 5, 7 90 %<br />

Métoprolol CYP2D6 10 %<br />

Carvédilol CYP2D6 98-99 %<br />

Diltiazem CYP3A4, 5, 7 80-85 %<br />

Vérapamil CYP1A2 <strong>et</strong> 3A4, 5, 7 90 %<br />

Nifédipine CYP3A4, 5, 7 90-95 %<br />

Molsidomine Activation (prodrogue) 10 %<br />

Amiodarone Non Non<br />

Flécaïnide Désacétylation (75 %) 40 %<br />

Aspirine Désacétylation (100 %) 95 %<br />

Clopidogrel Activation CYP2B6, 3A4 94-98 %<br />

Fluindione 65 % 97 %<br />

Acénocoumarol 100 % (métab. actifs) 97 %<br />

Furosémide Faible 96-98 %<br />

Hydrochlorothiazide Non 40 %<br />

Atorvastatine CYP3A4 (métab. actifs) 95 %<br />

Simvastatine Hydroxylation (métab. actif) 90 %<br />

<strong>et</strong> dépend du taux de fixation du produit<br />

aux protéines plasmatiques <strong>et</strong> aux<br />

globules rouges (plus il est fixé, moins<br />

il sera capté par les hépatocytes), ainsi<br />

que de l’activité des systèmes enzymatiques<br />

du foie. L’exposition à des<br />

altitudes d’environ 4 000 m est connue<br />

pour induire une augmentation de la<br />

concentration plasmatique des protéines,<br />

passant en partie par une<br />

réduction du volume circulant <strong>et</strong> une<br />

polyglobulie dès que la durée du séjour<br />

dépasse 5 à 7 jours (4, 5). On ne serait<br />

donc pas surpris de voir modifiée la<br />

pharmacocinétique des produits hautement<br />

fixés dans le compartiment<br />

sanguin.<br />

• Sur les caractéristiques cinétiques<br />

Ce problème a été étudié pour le furosémide,<br />

chez des suj<strong>et</strong>s placés au niveau<br />

de la mer puis en montagne, de<br />

manière aiguë ou prolongée. Il est lié à<br />

près de 98 % aux protéines plasmatiques,<br />

mais n’a pas de fixation érythrocytaire.<br />

En altitude, en dépit de<br />

l’augmentation des protéines circulantes,<br />

la fixation du furosémide passe<br />

de 97,2 % au niveau de la mer à 95,1 %<br />

après 15 heures à 3 600 m <strong>et</strong> 91,1 % chez<br />

des volontaires vivant en altitude depuis<br />

plus de 6 mois (6). La fraction libre, biologiquement<br />

active, du furosémide est<br />

donc multipliée par 3, ce qui est tout a<br />

fait considérable. Ce résultat, a priori<br />

contradictoire, provient probablement<br />

d’une réduction encore inexpliquée de<br />

l’affinité des protéines circulantes pour<br />

ce composé, avec, pour conséquence<br />

directe, une majoration de son excrétion<br />

rénale. Il est donc probable que son<br />

efficacité diurétique soit augmentée en<br />

altitude, mais la démonstration de c<strong>et</strong>te<br />

hypothèse reste à faire.<br />

Si on considère des produits à fixation<br />

strictement érythrocitaire (lithium), la<br />

polyglobulie d’altitude aboutit à une<br />

majoration de la fixation entraînant une<br />

réduction de la clairance <strong>et</strong> une prolongation<br />

du temps de demi-vie d’élimination<br />

(7).<br />

En ce qui concerne les produits à<br />

fixation partagée entre les protéines<br />

<strong>et</strong> les globules, les résultats sont plus<br />

complexes. Une analyse de ce type a<br />

été effectuée pour l’acétazolamide, le<br />

diurétique recommandé en prévention<br />

du mal des montagnes (8, 9).<br />

L’altitude provoquerait une augmentation<br />

de sa liaison globulaire, associée<br />

à une réduction de sa fixation<br />

aux protéines plasmatiques. Au total,<br />

la chronologie de son excrétion urinaire<br />

n’apparaît pas grandement<br />

modifiée, elle semble juste être un<br />

peu plus rapide au début, avec abaissement<br />

du taux résiduel.<br />

En concusion, le risque pricipal posé<br />

par l’altitude est l’augmentation de la<br />

fraction libre pour les produits très fixés<br />

aux protéines plasmatiques, avec<br />

réduction du temps de demi-vie d’élimination,<br />

mais aussi risque de majoration<br />

de l’eff<strong>et</strong> thérapeutique <strong>et</strong> de la<br />

toxicité (Tab. 1).<br />

dossier<br />

>>><br />

15 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


DOSSIER<br />

>>><br />

dossier<br />

• Sur l’activité des cytochromes<br />

L’hypoxie chronique peut aussi affecter<br />

l’activité des cytochromes (CYP) hépatiques.<br />

En eff<strong>et</strong>, l’exposition de rats à<br />

une hypoxie conduisant à maintenir<br />

des PaO 2 entre 35 <strong>et</strong> 50 mmHg, soit ce<br />

que l’on peut r<strong>et</strong>rouver lors de séjours<br />

aux alentours de 4 500 m d’altitude,<br />

aboutit à une réduction de l’activité<br />

puis de l’expression de CYP1A1,<br />

CYP1A2, CYP2B6, CYP2C9, CYP2C19 <strong>et</strong><br />

CYP2E1, alors que le CYP3A6 est surexprimé<br />

(10, 11). Ces résultats doivent<br />

être confirmés chez l’homme puisque,<br />

au contraire du rat, il a été montré que<br />

l’altitude pouvait majorer l’activité du<br />

CYP1A2 avec accélération du métabolisme<br />

de la caféine (12). Des médicaments<br />

cardiovasculaires métabolisés<br />

par ce cytochrome pourraient être<br />

concernés : la méxilétine <strong>et</strong> la propafénone<br />

ainsi que, pour une partie, le propranolol<br />

<strong>et</strong> le vérapamil, pourraient<br />

donc voir leur eff<strong>et</strong> de premier passage<br />

hépatique ainsi que leur métabolisme<br />

augmenté <strong>et</strong> donc, leur efficacité diminuée<br />

lors de séjours à des altitudes<br />

d’environ 4 000 m.<br />

En ce qui concerne le cas particulier du<br />

CYP1A2, il serait très intéressant de<br />

savoir comment son niveau d’expression<br />

varie dans d’autres tissus que le<br />

foie. Il semblerait que l’induction du<br />

CYP1A2 dans la paroi artérielle contribue<br />

à réduire les phénomènes de tolérance<br />

aux dérivés nitrés (13). Il est donc<br />

possible que l’altitude puisse participer<br />

à l’augmentation des eff<strong>et</strong>s de ces vasodilatateurs,<br />

comme cela a été suggéré<br />

en 1988 par une étude russe menée<br />

chez des malades insuffisants cardiaques<br />

en altitude (1).<br />

Distribution tissulaire<br />

L’altitude peut conduire à une perte de<br />

poids liée à une réduction de la masse<br />

grasse. C<strong>et</strong>te fonte peut être relativement<br />

rapide, d’autant plus que le séjour<br />

en montagne est bien souvent associé<br />

à une majoration de l’activité physique.<br />

Dans ce cadre, des substances lipo-<br />

philes <strong>et</strong> stockées dans le tissu adipeux<br />

pourraient voir leur concentration plasmatique<br />

augmenter. Ce problème doit<br />

être envisagé avec l’amiodarone, qui est<br />

une substance extrêmement fixée dans<br />

les tissus, dont le tissu adipeux, <strong>et</strong> pour<br />

laquelle la toxicité en altitude pourrait<br />

augmenter du fait d’une libération<br />

accrue.<br />

Elimination des médicaments<br />

Le rein participe à l’adaptation à l’altitude<br />

en synthétisant l’érythropoïétine<br />

<strong>et</strong> encontribuant à la régulation<br />

de l’équilibre hydrique <strong>et</strong> ionique<br />

(14, 15). Une exposition chronique à<br />

une altitude élevée (5 800 m) peut<br />

abaisser le débit rénal de près de 40 %<br />

(16). La clairance rénale des médicaments<br />

éliminés par c<strong>et</strong>te voie peut<br />

donc être diminuée en situation<br />

d’hypoxie prolongée, en particulier<br />

chez les malades présentant une<br />

dysfonction rénale préexistante.<br />

> Modifications<br />

de la pharmacodynamie<br />

Nous verrons ici les adaptations portant<br />

sur le système nerveux sympathique<br />

<strong>et</strong> sur la vasorelaxation<br />

dépendante de l’endothélium impliquant<br />

le monoxyde d’azote (NO).<br />

Des expositions brèves à des pressions<br />

partielles en oxygène réduites sont<br />

connues pour augmenter les concentrations<br />

plasmatiques d’adrénaline <strong>et</strong><br />

de noradrénaline (17). Ces augmentations<br />

sont intégralement responsables<br />

de la tachycardie d’altitude, car c<strong>et</strong>te<br />

dernière est totalement abolie par les<br />

β-bloquants. Ces médicaments cardiovasculaires<br />

sont donc responsables<br />

d’un blocage de la principale adaptation<br />

hémodynamique instantanée à<br />

l’altitude, avec pour conséquence une<br />

réduction des capacités à l’exercice plus<br />

importante que celle que l’on pourrait<br />

observer pour la même dose de produit<br />

au niveau de la mer.<br />

Lorsque l’hypoxie se prolonge, les<br />

modifications d’expression des protéines<br />

qui participent aux réponses<br />

adrénergiques vont être complexes,<br />

mais globalement contribuer à une<br />

réduction des réponses adrénergiques.<br />

Par une activation directe des<br />

chémorécepteurs, ainsi que par la stimulation<br />

de l’expression de la tyrosine<br />

hydroxylase (enzyme limitante<br />

de la biosynthèse des catécholamines)<br />

(18), l’hypoxie déclenche l’activation<br />

du système adrénergique<br />

mais, de manière intéressante, elle<br />

semble porter principalement sur la<br />

libération nerveuse de noradrénaline,<br />

plus que sur celle d’adrénaline<br />

par la glande médullo-surrénale.<br />

C<strong>et</strong>te libération de noradrénaline, en<br />

particulier cardiaque <strong>et</strong> artérielle, est<br />

probablement amplifiée par une<br />

désensibilisation des récepteurs α2-<br />

adrénergiques pré-synaptiques,<br />

comme cela a été récemment montré<br />

chez l’homme en altitude dans les<br />

plaqu<strong>et</strong>tes sanguines (17). Dans ce<br />

cas, des antihypertenseurs activant,<br />

au moins en partie, ces récepteurs<br />

(rilménidine, moxonidine, clonidine)<br />

pourraient voir leur activité thérapeutique<br />

diminuée en altitude. On ne<br />

peut actuellement ém<strong>et</strong>tre aucune<br />

hypothèse quant à un éventuel eff<strong>et</strong><br />

de l’altitude sur leurs eff<strong>et</strong>s antihypertenseurs<br />

centraux.<br />

Sur le versant post-synaptique, l’augmentation<br />

de la concentration<br />

synaptique de noradrénaline conduit<br />

à une désensibilisation des récepteurs<br />

β1 (19), alors que les β2 ne<br />

seraient pas affectés. C<strong>et</strong>te désensibilisation<br />

réceptorielle est associée à<br />

une répression de l’expression de la<br />

forme active de la protéine G s α, alors<br />

que les protéines G i voient leur<br />

niveau d’expression augmenté (20).<br />

Comme les récepteurs β1 sont exclusivement<br />

couplés à la protéine G s ,<br />

alors que les β2 le sont à G s <strong>et</strong> G i , la<br />

réponse cardiaque chronotrope <strong>et</strong><br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

16


DOSSIER<br />

A. niveau de la mer<br />

B. altitude<br />

Activation baroréflexe<br />

Stimulation de l’expression<br />

de la tyrosine hydroxylase<br />

+<br />

Noradrénaline<br />

+ +<br />

1<br />

Eff<strong>et</strong> β1 prédominant : Inotrope+,<br />

Chronotrope +<br />

-<br />

inotrope positive (due à l’augmentation<br />

de la production d’AMPc, suite à<br />

la stimulation de la G s ) diminue avec<br />

le temps, pour être remplacée par un<br />

eff<strong>et</strong> majoritaire de l’activation G i .<br />

Ainsi, les eff<strong>et</strong>s post-synaptiques cardiaques<br />

habituels de la noradrénaline<br />

disparaîtraient avec le temps,<br />

pour être remplacés par un eff<strong>et</strong><br />

paradoxal, masqué complètement au<br />

niveau de la mer (Fig. 1). Dans ce<br />

cadre, les β-bloquants vont empêcher<br />

les adaptations initiales, voire<br />

même fonctionner en synergie avec<br />

la désensibilisation, mais pourraient<br />

préserver la densité des récepteurs<br />

β1, lorsque ceux-ci désensibilisent<br />

puisque c<strong>et</strong>te dernière est la conséquence<br />

directe de la stimulation cactécholaminergique.<br />

D’autres récepteurs adrénergiques sont<br />

aussi concernés par les conséquences<br />

de l’altitude. En eff<strong>et</strong>, certains récepteurs<br />

α-adrénergiques (α 1a <strong>et</strong> α 1b ) possèdent,<br />

dans la région promotrice de leurs<br />

gènes, des zones régulées par l’hypoxie.<br />

Ainsi, l’expression du récepteur α 1a est<br />

Noradrénaline<br />

1<br />

α2<br />

Augmentation de la libération de noradrénaline,<br />

diminution de sa recapture.<br />

Désensibilisation des récepteurs β1. Réduction<br />

d’expression de la protéine G sα . Renforcement<br />

de l’eff<strong>et</strong> β2, en particulier<br />

passant par G i (inotrope-, dromotrope-)<br />

Figure 1 • Eff<strong>et</strong>s de l’hypoxie chronique sur l’expression synaptique des récepteurs β1, β2<br />

<strong>et</strong> α2 adrénergiques. L’hypoxie augmente la libération de noradrénaline, qui va induire<br />

une modification du niveau d’expression de certains récepteurs adrénergiques.<br />

stimulée par l’hypoxie (21), au contraire<br />

du sous-type α 1b qui est réprimé dans<br />

c<strong>et</strong>te condition, mais de manière différente<br />

en fonction des tissus (22).<br />

Vasoconstriction du réseau<br />

pulmonaire<br />

L’hypoxie d’altitude induit une vasoconstriction,<br />

qui semble ne pas être<br />

compensée par les habituels systèmes<br />

vasodilatateurs, dans plusieurs<br />

territoires vasculaires, dont le<br />

plus connu est le réseau pulmonaire.<br />

Le monoxyde d’azote (NO) est produit<br />

à partir de la L-arginine par une<br />

enzyme endothéliale, la NO synthase<br />

(NOS), avant de diffuser au travers<br />

de la lame basale <strong>et</strong> d’exercer ses<br />

eff<strong>et</strong>s relaxant sur les cellules musculaires<br />

lisses de la paroi artérielles,<br />

par activation de la guanylate cyclase<br />

<strong>et</strong> production de GMPc. L’hypoxie,<br />

loin de réprimer l’expression de la<br />

NOS, provoque une surexpression de<br />

c<strong>et</strong>te enzyme qui peut aller jusqu’à<br />

environ 4 fois (23), du fait de la présence,<br />

dans le promoteur du gène de<br />

la NOS, d’une zone stimulée par l’hypoxie<br />

(24). Cependant, l’activité de<br />

c<strong>et</strong>te enzyme semble être, au moins<br />

en partie, réprimée par l’altitude,<br />

puisque l’administration de L-arginine<br />

chez des suj<strong>et</strong>s placés 36 heures<br />

à 4 350 m aboutit à une moindre production<br />

de GMPc <strong>et</strong> de L-citrulline<br />

(formée à partir de la L-arginine par<br />

la NOS) (25). C<strong>et</strong>te moindre activité<br />

pourrait passer par une inhibition<br />

directe de l’enzyme, mais pourrait<br />

aussi provenir d’une moins bonne<br />

disponibilité locale de la L-arginine.<br />

En tout cas, les protéines situées en<br />

aval de la NOS répondent de<br />

manière normale en hypoxie,<br />

puisque l’inhalation de NO contribue<br />

à limiter la vasoconstriction<br />

artérielle pulmonaire due à l’altitude<br />

(26). Dans ce cadre, il est donc probable<br />

que des médicaments “donneurs<br />

de NO” soient actifs en<br />

altitude.<br />

L’activité de ces produits ne pourrait<br />

donc être limitée que par les capacités<br />

de l’organisme à les dénitrater.<br />

L’hypoxie aiguë majore clairement la<br />

production de NO, provenant à la<br />

fois de la nitroglycérine (trinitrine) <strong>et</strong><br />

du mononitrate d’isosorbide (27).<br />

C<strong>et</strong>te augmentation d’efficacité<br />

apparaît maintenue si l’hypoxie se<br />

prolonge, comme cela avait déjà été<br />

décrit chez des malades insuffisants<br />

cardiaques. Certaines différences<br />

entre les produits doivent cependant<br />

être envisagées, puisqu’il semblerait<br />

que le dinitrate d’isosorbide inhibe<br />

la NOSi <strong>et</strong> la NOSe, au contraire de la<br />

trinitrine qui serait sans eff<strong>et</strong> (28).<br />

> Interactions<br />

fonctionnelles<br />

Fréquence cardiaque<br />

Il a été clairement décrit dans l’article<br />

précédent de ce dossier que la majorité<br />

de l’adaptation aiguë à l’altitude<br />

passe par la tachycardie, le débit<br />

cardiaque augmentant de manière<br />

dossier<br />

>>><br />

17 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


dossier<br />

DOSSIER<br />

>>><br />

proportionnelle à celle de la fréquence<br />

cardiaque. Dans ces conditions,<br />

tous les produits qui peuvent<br />

modifier la fréquence cardiaque vont<br />

interférer avec l’adaptation à l’altitude.<br />

Nous avons cité plus haut le cas<br />

des β-bloquants, qui vont clairement<br />

limiter la nécessaire tachycardie due<br />

à l’activation nerveuse sympathique,<br />

mais les inhibiteurs des canaux calciques<br />

vont aussi pouvoir affecter la<br />

fréquence cardiaque. Ainsi, les<br />

dépresseurs du nœud sinusal, comme<br />

le diltiazem, mais surtout le vérapamil,<br />

vont réduire la tachycardie, alors<br />

que les produits à eff<strong>et</strong> vasculaire prédominant,<br />

parmi lesquels on trouve<br />

surtout les dihydropyridines (nifédipine),<br />

auraient plutôt tendance à<br />

l’amplifier. Bien entendu, pour ces<br />

dernières, le risque n’existe que si elles<br />

provoquent une chute de pression<br />

artérielle rapide <strong>et</strong> importante, l’utilisation<br />

de formes à libération prolongée<br />

annulant c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> réflexe. Notons<br />

enfin que les inhibiteurs calciques risquent<br />

de contribuer à majorer les<br />

œdèmes périphériques d’altitude,<br />

mais que la néfédipine s’est montrée<br />

active en prévention de l’œdème pulmonaire.<br />

Electrophysiologie cardiaque<br />

L’altitude peut provoquer des modifications<br />

électrocardiographiques<br />

extrêmement complexes, liées en<br />

partie à l’hypertension artérielle pulmonaire.<br />

Dans ces conditions, il<br />

apparaît difficile de prédire l’eff<strong>et</strong> des<br />

antiarythmiques. En particulier, nous<br />

voudrions pouvoir répondre à la<br />

question de leur potentiel risque<br />

arythmogène en altitude. L’absence<br />

de données cliniques nous contraint<br />

à ne pas discuter ce point extrêmement<br />

complexe du fait des interactions<br />

entre les modifications<br />

électrolytiques, l’hypoxie tissulaire, le<br />

mode d’action pharmacologique du<br />

produit <strong>et</strong> la cardiopathie qui a<br />

conduit à leur prescription.<br />

Le problème de la pharmacologie en altitude est complexe<br />

Pression artérielle<br />

Chez l’homme, les eff<strong>et</strong>s de l’altitude<br />

sur la pression artérielle sont très<br />

controversés. Néanmoins, il semblerait<br />

que l’altitude ait plutôt tendance<br />

à augmenter la pression artérielle<br />

des suj<strong>et</strong>s non acclimatés. L’efficacité<br />

des antihypertenseurs pourrait<br />

donc être réduite par l’altitude. Il est<br />

cependant établi que les bloqueurs<br />

du système rénine-angiotensine<br />

aldostérone gardent une bonne activité<br />

thérapeutique dans ces conditions<br />

(29). De plus, plusieurs travaux<br />

ont maintenant établi qu’une réduction<br />

constitutive de l’activité de<br />

l’enzyme de conversion de l’angiotensine<br />

facilite l’adaptation à l’hypoxie<br />

(30, 31).<br />

> En conclusion<br />

La prévision des eff<strong>et</strong>s des médicaments<br />

cardiovasculaires en montagne est<br />

un problème complexe. Elle nécessite<br />

de pouvoir disposer de l’ensemble<br />

des paramètres pharmacodynamiques,<br />

pharmacocinétiques <strong>et</strong><br />

fonctionnels en altitude, dont certains<br />

peuvent conduire à des actions<br />

complètement opposées. C<strong>et</strong>te<br />

courte revue ne pouvait aborder la<br />

totalité de la question <strong>et</strong> n’a pu qu’essayer<br />

d’envisager quelques éléments<br />

de la réflexion. Il est clair que, face à<br />

la demande croissante des malades<br />

<strong>et</strong> de leurs médecins, le salut ne<br />

pourra provenir que de l’élaboration<br />

de protocoles de recherche clinique<br />

centrés sur les eff<strong>et</strong>s de l’altitude sur<br />

les divers aspects de la pharmacologie<br />

des produits pris individuellement,<br />

mais aussi des interactions<br />

médicamenteuses. Nous en sommes<br />

encore au niveau de la mer, il n’y a<br />

plus que la montagne à gravir…❚<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

18


DOSSIER<br />

dossier<br />

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19 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


dossier<br />

DOSSIER<br />

>>><br />

<br />

Pathologies cardiaques<br />

en altitude : risques,<br />

traitements <strong>et</strong> prise en charge<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg)<br />

Les voyagistes proposent des destinations<br />

qui, bien que lointaines,<br />

sont de plus en plus accessibles<br />

pour la majorité d’entre nous. Des milliers<br />

de personnes partent ainsi chaque<br />

année. Il s’agit pour plus d’un tiers<br />

d’entre elles de personnes âgées, donc à<br />

fort risque cardiovasculaire. Nos<br />

patients, porteurs de cardiopathies plus<br />

ou moins sévères ou cumulant simplement<br />

des facteurs de risque, veulent<br />

aussi participer à c<strong>et</strong>te mondialisation<br />

des voyages.<br />

Le transport <strong>et</strong> le stress qui l’accompagne,<br />

la fatigue, les modifications du<br />

rythme nycthéméral <strong>et</strong> de l’alimentation,<br />

ainsi que la destination choisie,<br />

sont autant de facteurs susceptibles<br />

d’interférer avec leur statut cardiovasculaire.<br />

Les patients, de mieux en<br />

mieux renseignés <strong>et</strong> parfois même<br />

poussés par les agences elles-mêmes,<br />

se tournent vers le corps médical pour<br />

obtenir leur passeport “sécurité”.<br />

Dans c<strong>et</strong> article, nous ne nous intéresserons<br />

qu’aux risques engendrés par<br />

l’altitude en cas de maladie cardiovasculaire<br />

<strong>et</strong> aux conseils qui en découlent.<br />

Les risques inhérents au voyage proprement<br />

dit ne sont pas nuls <strong>et</strong> les compagnies<br />

d’assurance montrent que 10 %<br />

des rapatriements sanitaires <strong>et</strong> 56 % des<br />

décès en avion sont d’origine cardiovasculaire.<br />

Ces aspects, bien évidemment<br />

indissociables du voyage, ne<br />

seront pas abordés ici. Des revues, complètes<br />

sur le suj<strong>et</strong>, sont disponibles dans<br />

la littérature (1, 2).<br />

Peu d’études existent sur l’adaptation à<br />

l’hypoxie d’altitude des patients porteurs<br />

de cardiopathie. La modélisation<br />

des eff<strong>et</strong>s de l’hypoxie reste difficile, car<br />

aucun patient ne se ressemble <strong>et</strong> l’interaction<br />

avec leur traitement est complexe,<br />

mais indissociable de leur<br />

pathologie (cf. l’article de L. Monassier).<br />

En plus, l’hypoxie n’est pas le seul facteur<br />

qui intervient. Il ne faut pas oublier<br />

non plus le froid, le vent, les problèmes<br />

d’alimentation <strong>et</strong> l’activité physique,<br />

souvent inhabituelle, qui est pratiquée<br />

pendant c<strong>et</strong>te période.<br />

Les eff<strong>et</strong>s attendus ou prouvés de l’altitude<br />

vont donc être développés dans<br />

chaque grand chapitre de la pathologie<br />

cardiovasculaire.<br />

> Hypertension artérielle<br />

L’hypertension artérielle (HTA) est bien<br />

sûr la pathologie la plus fréquente<br />

parmi les voyageurs de tous âges !<br />

Chez l’homme, la pression artérielle<br />

semble peu varier en altitude, même<br />

pour des séjours prolongés. En période<br />

d’acclimatation, donc en début de<br />

séjour, des poussées hypertensives ont<br />

été rapportées.<br />

Toutefois, l’eff<strong>et</strong> des médicaments<br />

diminuerait avec l’altitude (cf l’article<br />

de L. Monassier). Certaines classes thérapeutiques<br />

peuvent même poser des<br />

problèmes. Les ß-bloqueurs, en inhibant<br />

la réponse chronotrope induite<br />

par l’hypoxie aiguë, pourraient avoir un<br />

eff<strong>et</strong> néfaste <strong>et</strong> peut-être r<strong>et</strong>ardateur de<br />

l’état d’acclimatement. C’est surtout le<br />

cas pour les séjours à une altitude élevée,<br />

où l’augmentation de la fréquence<br />

cardiaque est la principale variable<br />

d’ajustement du débit cardiaque. Certains<br />

inhibiteurs calciques peuvent<br />

aussi avoir c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> chronotrope négatif.<br />

Les diurétiques ne sont pas recommandés,<br />

surtout pour des séjours<br />

prolongés, car il existe toujours en altitude<br />

une tendance à l’hypovolémie<br />

(exercice physique, air sec).<br />

Si l’HTA isolée <strong>et</strong> contrôlée sous traitement<br />

ne contre-indique donc pas un<br />

séjour en altitude, une éventuelle modification<br />

thérapeutique peut se discuter<br />

quand elle est faite suffisamment tôt,<br />

que le traitement est bien toléré <strong>et</strong> les<br />

chiffres de pressions artérielles bien<br />

contrôlés.<br />

> Maladies coronaires<br />

Vasodilatation coronaire<br />

L’hypoxie d’altitude induit normalement,<br />

chez le suj<strong>et</strong> sain, une vasodilatation<br />

coronaire, seul moyen d’augmenter<br />

le débit coronaire puisque l’extraction<br />

myocardique en oxygène est déjà maximale<br />

au repos. La réponse peut-être<br />

diminuée, voire inversée, chez les coronariens.<br />

Dans tous les cas, l’hypoxie<br />

diminue les apports en oxygène <strong>et</strong> les<br />

besoins myocardiques augmentent<br />

(tachycardie, activité physique), créant<br />

donc une situation de déséquilibre<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

20


DOSSIER<br />

délétère en cas de maladie coronaire ou<br />

de dysfonction ventriculaire gauche.<br />

C’est bien l’augmentation du travail<br />

myocardique qui est en cause puisque,<br />

chez des coronariens, les signes ischémiques<br />

en altitude apparaissent pour le<br />

même double produit (FC x PA Systolique),<br />

mais bien sûr pour une charge<br />

moindre.<br />

Une étude récente (3) a d’ailleurs montré<br />

que chez des coronariens, la réserve<br />

coronaire à l’effort est diminuée (-18 %)<br />

pour une altitude de 2 500 m, alors<br />

qu’elle augmente chez des suj<strong>et</strong>s sains<br />

pourtant exposés à une altitude supérieure<br />

(4 500 m). La réponse du réseau<br />

coronaire est donc anormale, dès lors<br />

que des lésions coronaires ont été<br />

détectées, mais aussi, probablement,<br />

dès qu’il existe une dysfonction endothéliale<br />

coronaire, même sans atteinte<br />

coronarographique décelable.<br />

Période à risque<br />

Plusieurs études, faites essentiellement<br />

dans le Colorado (4), confirment que<br />

l’altitude diminue le seuil ischémique<br />

mais que, pour des altitudes inférieures<br />

à 3 000-3 200 m, les accidents étaient<br />

finalement exceptionnels chez des<br />

coronariens connus, traités <strong>et</strong> stables.<br />

La période à risque est celle de l’acclimatation,<br />

donc pendant les 2-3 premiers<br />

jours à une altitude donnée, du<br />

fait de l’augmentation de la consommation<br />

myocardique en oxygène. Par<br />

ailleurs, l’incidence du mal aigu des<br />

montagnes n’est pas supérieure chez<br />

les coronariens.<br />

Dans tous les cas, l’interférence avec les<br />

traitements anti-angineux doit être<br />

envisagée : si les ß-bloquants, dans<br />

c<strong>et</strong>te indication, ne semblent pas devoir<br />

être remis en cause, l’emploi de certains<br />

dérivés nitrés en particulier est discutable<br />

(cf l’article de L. Monassier).<br />

Aucune règle ne peut donc être établie<br />

<strong>et</strong> les conseils devront être individualisés<br />

en fonction du degré d’atteinte<br />

coronaire, de l’existence d’une ischémie<br />

résiduelle, de la fonction ventriculaire<br />

gauche, d’éventuels troubles du rythme<br />

associés <strong>et</strong> des traitements pris. Une<br />

évaluation complète est donc indispensable.<br />

Chez un coronarien stable, une altitude<br />

de 3 000 m n’est pas déraisonnable,<br />

sous réserve d’une acclimatation bien<br />

sûr correcte. Pour des trekkings de<br />

haute altitude (au-delà de 5 000 m),<br />

aucune donnée n’est disponible, mais<br />

des cas de coronariens pontés, ayant<br />

effectués des marches dans l’Himalaya,<br />

ont été rapportés (4).<br />

En post-angioplastie, il faut attendre<br />

quelques semaines avant d’autoriser la<br />

montée en altitude, d’autant plus que<br />

le risque thrombotique est accru dans<br />

ces conditions.<br />

> Insuffisance cardiaque<br />

Les risques de l’altitude<br />

La prévalence de l’insuffisance cardiaque<br />

ne cesse d’augmenter du fait de<br />

la prise en charge optimisée des accidents<br />

coronariens, des progrès thérapeutiques<br />

<strong>et</strong> du vieillissement de la<br />

population. Beaucoup d’insuffisants cardiaques<br />

modérés, stables sous traitement<br />

médical optimal, reprennent une<br />

activité professionnelle <strong>et</strong> une vie quotidienne<br />

proches de la normale. Logiquement,<br />

ces patients sont désireux à la fois<br />

de voyager <strong>et</strong> même, pour certains<br />

d’entre eux, de prendre de l’altitude.<br />

L’élévation des catécholamines circulantes,<br />

les modifications de la perméabilité<br />

capillaire pulmonaire, les<br />

altérations du métabolisme aérobie<br />

musculaire <strong>et</strong> une éventuelle ischémie<br />

myocardique ne sont pas des facteurs<br />

qui, au premier abord, nous incitent à<br />

les autoriser à monter en altitude.<br />

Cependant, très peu d’études se sont<br />

intéressées à l’adaptation <strong>et</strong>, surtout,<br />

aux risques que comporte la montée en<br />

altitude chez les insuffisants cardiaques.<br />

Protocole d’étude<br />

Une seule étude s’est intéressée aux<br />

eff<strong>et</strong>s, sur les performances à l’exercice,<br />

de différentes altitudes simulées en<br />

laboratoire (niveau de la mer, 1 000,<br />

1 500, 2 000 <strong>et</strong> 3 000 mètres) (5). Une<br />

population de 38 insuffisants cardiaques<br />

stables (FE moyenne = 34 ± 7 % ;<br />

diamètre VG > 65 mm), habitués à la<br />

pratique des épreuves d’effort sur bicycl<strong>et</strong>te<br />

ergométrique avec enregistrement<br />

des échanges gazeux, a été<br />

comparée à 14 suj<strong>et</strong>s sains appariés. La<br />

population d’insuffisants cardiaques<br />

était répartie en trois groupes, en fonction<br />

de leur pic deVO 2 : > 20, entre 15 <strong>et</strong><br />

20 <strong>et</strong> < 15 ml.min -1 .kg -1 . Les patients de<br />

c<strong>et</strong>te étude prenaient tous un traitement<br />

par IEC, digitaliques <strong>et</strong> diurétiques.<br />

Quatre d’entre eux prenaient un<br />

inhibiteur des antagonistes aux récepteurs<br />

de l’angiotensine II <strong>et</strong> seulement<br />

un prenait des ß-bloquants.<br />

Altitude <strong>et</strong> capacité d’effort<br />

Les eff<strong>et</strong>s de l’altitude sur les capacités<br />

d’effort sont d’autant plus marqués que<br />

l’insuffisance cardiaque est grave : la<br />

pente de réduction de la puissance<br />

maximale développée est surtout significativement<br />

diminuée (-10 ± 3 % par<br />

1 000 m d’altitude) chez les insuffisants<br />

cardiaques, avec un pic de<br />

VO 2 < 15 ml.min -1 .kg -1 comparativement<br />

aux suj<strong>et</strong>s sains (-2 ± 1 %/1 000 m)<br />

ou aux insuffisants cardiaques moins<br />

sévères (-4 ± 2 %/1 000 m). De la même<br />

façon, on observe une diminution de la<br />

consommation d’oxygène similaire<br />

chez tous les insuffisants cardiaques<br />

par rapport aux suj<strong>et</strong>s contrôles, mais<br />

uniquement pour des altitudes supérieures<br />

à 2 000 m.<br />

Adaptation ventilatoire<br />

L’adaptation ventilatoire à l’exercice<br />

chez l’insuffisant cardiaque n’est pas<br />

modifiée <strong>et</strong> contrairement aux suj<strong>et</strong>s<br />

contrôles, il n’y a pas d’augmentation<br />

du débit ventilatoire de fin d’effort.<br />

C<strong>et</strong>te absence d’hyperventilation,<br />

bénéfique sur le plan énergétique car<br />

n’augmentant pas le travail ventilatoire,<br />

dossier<br />

>>><br />

21 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


DOSSIER<br />

>>><br />

dossier<br />

est toutefois, peut-être, un facteur péjoratif<br />

sur le plan de l’acclimatation.<br />

Enfin, élément important, les auteurs<br />

ne signalent aucun trouble du rythme<br />

ou aucun signe électrique d’ischémie<br />

myocardique, quelle que soit l’altitude.<br />

Finalement, l’hypoxie aiguë d’altitude<br />

ne semble pas plus risquée sur un myocarde<br />

altéré. Les eff<strong>et</strong>s d’une hypoxie<br />

chronique ne sont pas connus, mais ne<br />

devraient pas s’accompagner d’une<br />

majoration du risque. L’insuffisant cardiaque<br />

stable, sous traitement médical<br />

optimal, va voir sa capacité d’exercice<br />

diminuée <strong>et</strong> ce, d’autant plus qu’elle<br />

était initialement altérée. C’est donc le<br />

problème essentiel : monter, oui, mais<br />

pour faire quoi ?<br />

On peut donc probablement autoriser un<br />

insuffisant cardiaque stable, sans hypertension<br />

artérielle pulmonaire, à monter<br />

jusqu’à une altitude de 3 000 m. Un programme<br />

de réentraînement, avant son<br />

séjour, ne pourra lui être que bénéfique.<br />

Aucune étude n’est disponible pour des<br />

altitudes supérieures, mais nous<br />

connaissons tous, parmi nos patients,<br />

des insuffisants cardiaques (évidemment<br />

modérés), ayant effectué des<br />

séjours à des altitudes bien supérieures<br />

<strong>et</strong> étant revenus enchantés <strong>et</strong> heureux !<br />

> Troubles du rythme<br />

Les troubles du rythme, compliquant<br />

une cardiopathie ou une hypertension<br />

artérielle, peuvent s’aggraver, du fait de<br />

l’activation du système adrénergique en<br />

altitude. Ceci, d’autant plus que l’eff<strong>et</strong><br />

de la plupart des médicaments antiarythmiques<br />

(sauf l’amiodarone) est<br />

diminué. C’est donc un facteur supplémentaire<br />

à prendre en compte avant<br />

d’autoriser un séjour en altitude.<br />

Pour les troubles du rythme survenant<br />

sur cœur “sain”, l’influence de l’hypoxie<br />

n’est pas connue mais ne semble pas<br />

délétère. On décrit parfois des extrasystoles<br />

ventriculaires ou auriculaires en<br />

début de séjour, à un moment où<br />

la désaturation du sang artériel en<br />

L’hypertension artérielle est la pathologie<br />

la plus fréquente parmi les voyageurs.<br />

oxygène est la plus importante <strong>et</strong> toujours<br />

à des altitudes importantes. Dans<br />

tous les cas, l’exercice peut être, comme<br />

au niveau de la mer, un facteur déclenchant.<br />

Des troubles du rythme paroxystiques,<br />

sur cœur sain, surtout s’ils ne<br />

nécessitent pas de traitement antiarythmique,<br />

ne contre-indiquent pas le<br />

séjour en altitude.<br />

Une mention spéciale pour la fibrillation<br />

auriculaire. L’exposition à une hypoxie<br />

aiguë ou chronique entraîne, sur une<br />

étude échographique, une augmentation<br />

de la participation auriculaire au débit<br />

cardiaque (6). L’adaptation à l’hypoxie,<br />

lorsque la systole auriculaire mécanique<br />

a disparu, est probablement moins<br />

bonne, mais cela n’a jamais été montré.<br />

Si un traitement est nécessaire, son efficacité<br />

ou sa toxicité seront probablement<br />

affectées par l’altitude, mais une modélisation<br />

reste difficile. Les patients doivent<br />

en être avertis avant de partir.<br />

> Patients porteurs<br />

de stimulateurs<br />

Les suj<strong>et</strong>s porteurs d’un stimulateur cardiaque<br />

sont généralement aussi porteurs<br />

d’une cardiopathie. Dans ce cas, c’est<br />

bien sûr elle qui détermine l’autorisation<br />

ou non au séjour en altitude. Toutefois,<br />

plusieurs règles <strong>et</strong> recommandations,<br />

découlant de l’adaptation “normale” à<br />

l’altitude, peuvent être énumérées. Les<br />

seuils de détection <strong>et</strong> de stimulation des<br />

sondes, aussi bien ventriculaires<br />

qu’auriculaires, ne sont pas modifiés en<br />

situation d’altitude aiguë (pendant<br />

30 minutes), simulée (hypoxie hypobare)<br />

entre 500 <strong>et</strong> 4 000 m (7). Aucune<br />

étude ne s’est intéressée aux eff<strong>et</strong>s de<br />

l’hypoxie chronique, donc aux séjours<br />

prolongés, mais aucun accident n’a<br />

jamais été rapporté.<br />

Compte tenu de l’importance de l’adaptation<br />

de la fréquence cardiaque en début<br />

de séjour, il convient de la rendre possible,<br />

en l’absence de contre-indication : augmentation<br />

de la fréquence cardiaque de<br />

base pour les patients dépendants <strong>et</strong>/ou<br />

augmentation de la sensibilité des capteurs<br />

d’asservissement.<br />

La fréquence cardiaque maximale n’a<br />

pas besoin d’être supérieure, mais il<br />

faut s’assurer par épreuve d’effort<br />

qu’elle sera suffisante pour l’exercice à<br />

réaliser en altitude.❚<br />

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3. Wyss CA, Koepfli P, Fr<strong>et</strong>z G <strong>et</strong> al.<br />

Influence of altitude exposure on coronary<br />

flow reserve. Circulation 2003 ;<br />

108 (10) : 1202-7.<br />

4. Alexander JK. Coronary heart<br />

disease at altitude. Tex Heart Inst J<br />

1994 ; 21 (4) : 261-6.<br />

5. Agostoni P, Cattadori G, Guazzi M <strong>et</strong><br />

al. Effects of simulated altitude-induced<br />

hypoxia on exercise capacity in<br />

patients with chronic heart failure. Am<br />

J Med 2000 ; 109 (6) : 450-5.<br />

6. Boussuges A, Molenat F, Burn<strong>et</strong> H <strong>et</strong><br />

al. Operation Everest III (Comex ‘97) :<br />

modifications of cardiac function<br />

secondary to altitude-induced hypoxia.<br />

An echocardiographic and Doppler<br />

study. Am J Respir Crit Care Med 2000 ;<br />

161 (1) : 264-70.<br />

7. Weilenmann D, Duru F, Schonbeck M<br />

<strong>et</strong> al. Influence of acute exposure to<br />

high altitude and hypoxemia on ventricular<br />

stimulation thresholds in<br />

pacemaker patients. PACE 2000 ; 23 (4<br />

Pt 1) : 512-5.<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

22


DOSSIER<br />

<strong>Sport</strong> en altitude :<br />

que faire avant<br />

un trekking ?<br />

dossier<br />

Dr Stéphane Doutreleau (Hôpital civil, Strasbourg)<br />

<br />

De plus en plus de patients, désireux<br />

de partir en altitude, viennent<br />

nous demander conseil.<br />

> Les processus<br />

d’adaptation<br />

Comme nous l’avons vu, les études<br />

sont peu nombreuses, mais la<br />

connaissance des processus d’adaptation<br />

à l’hypoxie aiguë <strong>et</strong> chronique<br />

perm<strong>et</strong> de donner quelques règles :<br />

- il existe une activation du système<br />

adrénergique à l’origine d’une augmentation<br />

de la consommation en oxygène<br />

du myocarde <strong>et</strong>, éventuellement,<br />

de l’aggravation de troubles du rythme;<br />

- pour un travail équivalent, la<br />

consommation en oxygène du myocarde<br />

est augmentée ;<br />

- la pression artérielle pulmonaire<br />

augmente en altitude <strong>et</strong> est susceptible<br />

d’aggraver ou de décompenser<br />

une cardiopathie ;<br />

- l’altération des capacités d’exercice sera<br />

d’autant plus importante en altitude<br />

qu’elles sont limitées au niveau de la mer ;<br />

- la réserve coronaire d’exercice est<br />

diminuée chez les coronariens, mais<br />

aussi, probablement, chez tous les<br />

patients cumulant des facteurs de<br />

risque cardiovasculaire.<br />

> Les contre-indications<br />

De là, découlent bien sûr des contreindications<br />

aux séjours en haute altitude<br />

(supérieure à 2 500 m) :<br />

Pour chaque suj<strong>et</strong> se rendant en altitude, des renseignements précis doivent être<br />

obtenus avant de se prononcer.<br />

- cardiopathies instables ou décompensées<br />

;<br />

- troubles du rythme grave ;<br />

- cardiopathie cyanogène ;<br />

- hypertension artérielle pulmonaire<br />

importante.<br />

> Les renseignements utiles<br />

Pour chaque suj<strong>et</strong> se rendant en alti-<br />

tude, des renseignements précis doivent<br />

être obtenus avant de se prononcer.<br />

Renseignements concernant<br />

le patient<br />

Il est bien sûr indispensable de faire<br />

le point sur la cardiopathie pour<br />

connaître la symptomatologie<br />

actuelle <strong>et</strong> le traitement pris. Des<br />

>>><br />

23 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


DOSSIER<br />

>>><br />

dossier<br />

examens complémentaires sont<br />

nécessaires :<br />

- ECG de repos ;<br />

- épreuve d’effort (éventuellement<br />

avec mesure des échanges gazeux),<br />

pour connaître le seuil ischémique <strong>et</strong><br />

l’existence de troubles du rythme<br />

induits par l’exercice ;<br />

- échographie cardiaque : fonction<br />

systolique ventriculaire gauche, pression<br />

artérielle pulmonaire ;<br />

- holter ECG, éventuellement à l’effort,<br />

selon le contexte.<br />

Renseignements concernant<br />

le séjour<br />

Il faut absolument connaître l’eff<strong>et</strong><br />

d’un éventuel séjour antérieur en altitude<br />

<strong>et</strong> connaître les caractéristiques<br />

du séjour prévu : altitude d’arrivée,<br />

altitude maximale envisagée, profil<br />

d’ascension, dénivelé quotidien, port<br />

de charge, nature du terrain <strong>et</strong> possibilité<br />

d’une assistance ou non !<br />

suj<strong>et</strong>s ne prenant pas de médicaments<br />

chronotropes négatifs.<br />

> En conclusion<br />

Un séjour en altitude ne doit pas être<br />

systématiquement interdit aux<br />

patients atteints de pathologies cardiovasculaires.<br />

Aucune règle ne peut<br />

être établie faute d’étude sur le suj<strong>et</strong>.<br />

La décision doit donc faire appel à nos<br />

connaissances <strong>et</strong> au bon sens.<br />

Les hypertendus, les porteurs de stimulateurs<br />

cardiaques (sans autres<br />

anomalies importantes) <strong>et</strong> les patients<br />

ayant des troubles du rythme idiopathiques<br />

peuvent, a priori, être autorisés<br />

à séjourner en altitude, moyennant<br />

parfois des aménagements thérapeutiques.<br />

Les coronariens stables, sans dysfonction<br />

ventriculaire gauche importante<br />

(< 40 %), peuvent être autorisés à<br />

séjourner en altitude. Les accidents en<br />

dessous de 3 500 m sont rares. Audelà,<br />

le risque est peut-être plus élevé<br />

<strong>et</strong> à discuter au cas par cas.<br />

Les insuffisants cardiaques seront<br />

limités à l’exercice, d’autant plus que<br />

leur capacité d’effort est réduite au<br />

niveau de la mer. Il ne semble pas y<br />

avoir de sur-risque rythmique ou<br />

ischémique pour des altitudes inférieures<br />

à 3 000 m. Tout est conditionné<br />

par le but du séjour : un<br />

trekking avec sac à dos sera probablement<br />

difficile, mais contempler un<br />

panorama grandiose après une montée<br />

en téléphérique ne doit pas leur<br />

être interdit.<br />

La montagne est une passion. Les<br />

passionnés prennent des risques. ❚<br />

> Conseils <strong>et</strong> tests<br />

Dans tous les cas, la décision <strong>et</strong> les<br />

conseils seront individualisés. Il faut<br />

donc aussi pouvoir discuter des éventuelles<br />

complications possibles.<br />

Les risques liés à l’altitude, à l’activité<br />

physique <strong>et</strong>, éventuellement, à un isolement<br />

géographique (pas de secours<br />

possible) sont expliqués au suj<strong>et</strong>, pour<br />

qu’il puisse prendre une décision.<br />

A côté des explorations purement cardiologiques,<br />

l’intérêt d’un test en<br />

hypoxie peut se discuter. Il s’agit de<br />

tester l’adaptation aiguë, c’est-à-dire<br />

la sensibilité des chémorécepteurs à<br />

l’hypoxémie, au repos <strong>et</strong> à l’exercice<br />

sous maximal.<br />

Il ne s’agit en aucun cas d’un test d’aptitude<br />

en cas de cardiopathie, mais<br />

l’apparition de signes ischémiques sur<br />

l’ECG n’est pas de très bon augure !<br />

De plus l’interprétation des résultats,<br />

qui se base entre autres sur la fréquence<br />

cardiaque, est faite pour des<br />

Un séjour en altitude ne doit pas être systématiquement interdit aux patients<br />

atteints de pathologies cardiovasculaires.<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

24


Pathologie vasculaire<br />

<strong>et</strong> sport : revue pour<br />

une démarche clinique<br />

mise au point<br />

La pathologie vasculaire est encore mal connue chez le sportif. Le symptôme<br />

dominant en est la douleur. On se propose donc de partir des symptômes douloureux<br />

<strong>et</strong> de leur localisation pour envisager la pathologie vasculaire dans c<strong>et</strong>te<br />

population. L’angor <strong>et</strong> l’infarctus du myocarde qui, du point de vue du médecin<br />

vasculaire, ne sont “que” des complications cardiaques de lésions artérielles<br />

parmi d’autres, ne seront pas abordés dans c<strong>et</strong>te revue, qui se limite aux vaisseaux<br />

“extra-cardiaques”.<br />

Dr Pierre Abraham (Service Explorations Fonctionnelles, CHU Angers)<br />

MOTS CLÉS<br />

Pathologie vasculaire, sport,<br />

douleur aiguë, douleur<br />

chronique, écho-Doppler,<br />

céphalée d’altitude,<br />

dissection aortique,<br />

syndrome des loges,<br />

scanner, IRM<br />

Le réseau vasculaire est bien plus<br />

qu’un simple système de<br />

conduction de l’oxygène du<br />

poumon vers la périphérie <strong>et</strong> r<strong>et</strong>our,<br />

grâce à la pompe cardiaque. Longtemps<br />

considérée comme un simple<br />

“tuyau” passif, l’artère est un organe<br />

“plastique” susceptible de remodelage ;<br />

l’endothélium vasculaire, un ensemble<br />

de cellules sécrétrices, interagissant<br />

fortement avec les cellules <strong>et</strong> les hormones<br />

circulantes ; la micro-circulation,<br />

un lieu d’échange essentiel entre<br />

le sang <strong>et</strong> les tissus <strong>et</strong> un régulateur<br />

puissant de la volémie <strong>et</strong> donc de la<br />

tension artérielle. Malgré cela, la<br />

pathologie vasculaire du sportif reste<br />

encore assez mal connue, à la fois par<br />

les difficultés diagnostiques persistantes<br />

dans le cadre de c<strong>et</strong>te pathologie<br />

<strong>et</strong> par le fait que l’athérome,<br />

principale cause de pathologie vasculaire,<br />

est le plus souvent observée chez<br />

le suj<strong>et</strong> âgé en raison de son évolution<br />

lente. C’est oublier un peu vite que,<br />

d’une part, les perturbations du flux<br />

augmentent avec le débit au sein d’un<br />

vaisseau considéré <strong>et</strong>, d’autre part,<br />

qu’il existe de nombreuses maladies<br />

vasculaires non athéromateuses.<br />

Ainsi, des lésions artérielles “mineures”,<br />

qui resteraient longtemps asymptomatiques<br />

chez des suj<strong>et</strong>s peu ou pas<br />

actifs peuvent, à la faveur de symptômes,<br />

se révéler chez des suj<strong>et</strong>s<br />

modérément sportifs (joggers “du<br />

dimanche”) ou chez des athlètes de<br />

bon - voire de haut - niveau.<br />

C<strong>et</strong>te revue n’est sans doute pas<br />

exhaustive, mais se voudrait didactique<br />

pour guider le cardiologue dans<br />

sa démarche clinique.<br />

> Douleur aiguë<br />

Par douleur “aiguë”, on entend une<br />

douleur d’installation le plus souvent<br />

brutale, d’intensité variable, mais qui,<br />

surtout, apparaît à l’effort, au décours<br />

de celui-ci ou lors de mouvements <strong>et</strong><br />

ne cède pas à la mise au repos.<br />

Tête <strong>et</strong> cou<br />

C’est le plus souvent lors d’un effort en<br />

résistance (effort “en force”), d’une<br />

poussée tensionnelle d’effort ou d’un<br />

mouvement brutal de la tête ou d’un<br />

choc direct (sports de combat), qu’est<br />

notée l’apparition d’une douleur qui,<br />

dans le domaine vasculaire, doit faire<br />

penser à une dissection artérielle (1-6).<br />

Un contexte particulier est celui des<br />

manipulations “ostéopathiques” du<br />

rachis cervical, au cours desquelles<br />

sont (heureusement rarement) observés<br />

des accidents vasculaires (7-9).<br />

Dans ce contexte particulier, il est difficile<br />

d’incriminer formellement le<br />

geste de manipulation comme cause<br />

de la dissection, dans la mesure où la<br />

motivation initiale de la consultation<br />

est souvent une douleur pré-existante,<br />

rapportée à un effort sportif ou à un<br />

faux mouvement.<br />

La douleur, souvent unilatérale <strong>et</strong> latérocervicale,<br />

peut rester isolée ou s’accompagner<br />

de signes cérébraux (dissection<br />

carotidienne) ou vertébro-basilaires (dissection<br />

vertébrale) d’intensité variable<br />

<strong>et</strong> qu’il faut rechercher lorsqu’ils restent<br />

discr<strong>et</strong>s ou ont régressé. La présence<br />

d’un souffle à l’auscultation n’est absolument<br />

pas obligatoire en cas de dissection<br />

longue ou d’occlusion complète de<br />

l’axe vasculaire.<br />

L’examen de première intention est<br />

l’écho-Doppler suivi, le cas échéant,<br />

d’autres examens d’imagerie vasculaire<br />

si le diagnostic est confirmé ou<br />

>>><br />

25<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


mise au point<br />

>>><br />

suspecté <strong>et</strong>/ou à la recherche de dysplasies<br />

des autres troncs. Les diagnostics<br />

différentiels sont nombreux, allant<br />

du simple “torticolis” à la pathologie<br />

bucco-dentaire. Un examen clinique<br />

compl<strong>et</strong> de la tête <strong>et</strong> du cou <strong>et</strong> un bilan<br />

radiologique cervical perm<strong>et</strong>tent de<br />

faire, le plus souvent, la part des<br />

choses. La céphalée d’altitude dans les<br />

sports de haute montagne doit être<br />

citée dans c<strong>et</strong>te revue sur le sport.<br />

Signe avant-coureur du mal aigu des<br />

montagnes, elle est très spécifique <strong>et</strong><br />

bien connue des guides <strong>et</strong> accompagnateurs.<br />

Le traitement de la dissection est le<br />

plus souvent médical par anticoagulant,<br />

contrôle tensionnel, antalgiques<br />

<strong>et</strong> mise au repos. La reprise du sport<br />

dépend des séquelles éventuelles <strong>et</strong> du<br />

contexte d’apparition de la dissection<br />

(dysplasies artérielles…), mais la pratique<br />

des sports à risque de poussée<br />

tensionnelle (haltérophilie, sport de<br />

combat…) est a priori à déconseiller.<br />

Tronc<br />

Si la dissection aortique peut être le<br />

mode de révélation de l’athérosclérose<br />

chez des sportifs d’âge moyen,<br />

les maladies du tissu élastique ou<br />

conjonctif se compliquent volontiers<br />

d’anévrisme ou de dissection aortiques<br />

chez des athlètes plus jeunes<br />

(10-15). Il convient d’y penser chez<br />

les athlètes de grande taille (bask<strong>et</strong>,<br />

volley-ball…). Dans ces deux situations,<br />

la dissection peut survenir lors<br />

d’un effort sportif banal. Dans le<br />

contexte des sports de vitesse, les<br />

décélérations ou les chocs violents<br />

peuvent être en cause (16, 17).<br />

Dominé par la douleur violente<br />

migratrice postérieure, le tableau clinique<br />

est le plus souvent bruyant,<br />

voire dramatique, parfois associé à<br />

des complications périphériques<br />

(troubles neurologiques centraux en<br />

cas de dissection des troncs supraaortiques,<br />

ischémie digestive <strong>et</strong> des<br />

membres inférieurs en cas de dissection<br />

étendue aux branches artérielles…).<br />

Le scanner injecté, surtout,<br />

ou l’IRM en urgence, posent le diagnostic.<br />

Parmi les diagnostics différentiels,<br />

on peut citer : l’embolie<br />

pulmonaire, l’infarctus du myocarde<br />

<strong>et</strong> la perforation digestive.<br />

Le traitement relève d’une hospitalisation<br />

urgente en milieu spécialisé.<br />

L’avenir sportif est à priori très largement<br />

compromis, sauf, peut-être,<br />

pour les sports cérébraux ou la pêche<br />

au coup…<br />

Membre supérieur<br />

La thrombophlébite d’effort est l’apanage<br />

des sports sollicitant les bras (natation,<br />

kayak). Quelques rares observations<br />

ont été faites au cours de traumatismes<br />

La douleur est le maître symptôme des pathologies vasculaires chez le sportif.<br />

directs (18-20). L’épisode aigu est souvent,<br />

mais pas toujours, précédé d’un œdème<br />

d’effort récidivant du membre supérieur.<br />

L’œdème, la douleur <strong>et</strong> l’apparition<br />

brutale d’une circulation collatérale<br />

sous-cutanée doivent faire suspecter<br />

le diagnostic. L’écho-Doppler, voire la<br />

phlébographie, perm<strong>et</strong>tent d’affirmer<br />

le diagnostic <strong>et</strong> d’éliminer les diagnostics<br />

différentiels (syndrome de<br />

loge, contexte infectieux...). La fibrinolyse,<br />

en plus du traitement anticoagulant,<br />

est parfois proposée pour<br />

limiter les conséquences fonctionnelles<br />

à long terme, si l’athlète est vu<br />

précocement. A moyen terme, en cas<br />

de récupération ad-integrum de l’axe<br />

vasculaire, la levée chirurgicale du<br />

défilé thoraco-brachial, le plus souvent<br />

associé, est fréquemment proposée <strong>et</strong>,<br />

dans ce cas, la reprise du sport est en<br />

général obtenue sans problème (21).<br />

Membre inférieur<br />

• L’ischémie aiguë<br />

L’ischémie aiguë par décollement d’une<br />

plaque ou hémorragie sous-intimale,<br />

chez le sportif occasionnel d’âge moyen,<br />

n’est pas spécifique du sport. Par contre,<br />

la possibilité de complications vasculaires<br />

lors de traumatismes violents<br />

(cyclisme, sports de glisse...) ne doit<br />

pas être oubliée (22-24).<br />

• La pathologie veineuse<br />

La pathologie veineuse ne semble pas<br />

avoir de spécificité particulière, si ce<br />

n’est la possibilité de traumatismes<br />

directs des axes veineux lors des sports<br />

de combat, qui a été incriminée dans<br />

le développement ou la rupture de<br />

varices segmentaires.<br />

La déshydratation lors des pratiques<br />

d’exercice physique par forte chaleur,<br />

les transferts longs, la polyglobulie<br />

sévère, voire le dopage, pourraient être<br />

proposés comme facteurs aggravants<br />

de l’hyper-coagulabilité <strong>et</strong> augmenter<br />

le risque de thrombose, mais aucune<br />

étude ne semble conclure de façon for-<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4 26


melle à un risque thrombotique veineux<br />

accru chez le sportif (25, 26).<br />

Enfin, un syndrome de loge aigu,<br />

venant compliquer un syndrome de<br />

loge chronique, est une éventualité<br />

rare qui doit être connue.<br />

• L’occlusion<br />

Le diagnostic ne pose en général<br />

aucun problème en cas d’occlusion<br />

fémorale brutale, avec douleur de moll<strong>et</strong>,<br />

pâleur, froideur, disparition des<br />

pouls <strong>et</strong> déficit sensitivo-moteur (d’autant<br />

plus qu’il s’agit de suj<strong>et</strong>s jeunes,<br />

avec des artères plutôt en bon état).<br />

Par contre, plusieurs observations de<br />

douleurs atypiques (pseudo-sciatiques,<br />

douleurs lombo-fessières), liées à l’occlusion<br />

aiguë de troncs proximaux<br />

(iliaque primitive, voire interne) <strong>et</strong> non<br />

diagnostiquées ont été rapportées.<br />

Dans le syndrome de loge aigu, la normalité<br />

des pouls distaux est la règle <strong>et</strong><br />

ne doit en aucun cas être utilisée<br />

comme un argument d’élimination.<br />

La mesure des pressions artérielles<br />

<strong>et</strong>/ou de loge <strong>et</strong> le Doppler vasculaire<br />

font le diagnostic.<br />

• Le spasme vasculaire<br />

Les diagnostics différentiels non vasculaires<br />

sont facilement éliminés. A<br />

l’inverse, un “spasme vasculaire”, qui<br />

peut survenir après des traumatismes<br />

même mineurs, peut parfois<br />

donner le change avec une ischémie<br />

sub-aiguë. De nature <strong>et</strong> de définition<br />

vagues, de durée parfois prolongée,<br />

ce “spasme” cède au réchauffement<br />

du membre <strong>et</strong>/ou aux vasodilatateurs.<br />

Le choix entre traitement médical,<br />

angioplastie ou chirurgie est guidé par<br />

le contexte clinique <strong>et</strong> la sévérité du<br />

tableau. L’avenir sportif est fonction<br />

des lésions associées, de la restitution<br />

ou non d’un axe vasculaire parfait <strong>et</strong><br />

des séquelles post-ischémiques cutanées<br />

musculaires ou neurologiques<br />

éventuelles.<br />

> Douleur chronique<br />

Par douleur “chronique”, on entend une<br />

douleur d’intensité variable liée à l’exercice.<br />

Elle apparaît à l’effort ou au cours<br />

de celui-ci <strong>et</strong> disparaît à sa diminution<br />

ou à son arrêt, pour réapparaître, le plus<br />

souvent, pour une intensité comparable<br />

si l’effort est repris.<br />

Tête <strong>et</strong> cou<br />

La céphalée réapparaissant à chaque<br />

effort chez le sportif relève du même<br />

bilan étiologique que chez les suj<strong>et</strong>s non<br />

sportifs, à la recherche principalement<br />

d’une hypertension artérielle primitive<br />

ou secondaire (coarctation aortique<br />

méconnue, dysplasie des artères<br />

rénales…). Dans les sports susceptibles<br />

de donner lieu à des traumatismes cérébraux,<br />

la recherche d’une fistule posttraumatique<br />

(par exemple temporodurale)<br />

ne doit pas être oubliée.<br />

L’examen clinique <strong>et</strong> l’interrogatoire à<br />

la recherche de signes focaux, de<br />

troubles visuels, <strong>et</strong>c., peuvent orienter<br />

le diagnostic. Les examens complémentaires,<br />

guidés par l’examen initial,<br />

aident au diagnostic étiologique. Le<br />

Doppler vasculaire <strong>et</strong> une surveillance<br />

tensionnelle (mesure ambulatoire de<br />

la pression artérielle, épreuve d’effort…)<br />

sont souvent utiles. Les autres<br />

examens (échocardiographie, étude<br />

de la fonction rénale…) sont dictés par<br />

l’analyse du r<strong>et</strong>entissement fonctionnel<br />

de l’hypertension artérielle. Les diagnostics<br />

différentiels, très nombreux<br />

(migraine, pathologies dentaire ou<br />

ophtalmique…), ne seront pas<br />

détaillés ici. Historiquement, les<br />

céphalées observées la nuit lors des<br />

polyglobulies majeures, ne sont plus<br />

courantes du fait des contrôles d’hématocrite<br />

régulièrement pratiqués.<br />

Un traitement symptomatique n’est<br />

pas satisfaisant tant qu’une cause<br />

organique n’a pas été formellement<br />

éliminée. En cas d’hypertension artérielle<br />

primitive, contrôlée sous traitement,<br />

les sports de “musculation” ou<br />

de “résistance” ne sont pas recommandés.<br />

L’activité physique en endurance,<br />

au contraire, ne pose pas de<br />

problème.<br />

Tronc<br />

● Les douleurs d’effort<br />

Les douleurs thoraciques d’effort relèvent<br />

principalement, dans le domaine<br />

vasculaire, de l’angor d’effort. Le<br />

contexte sportif, les signes cliniques,<br />

les diagnostics différentiels <strong>et</strong> les traitements<br />

de l’angine de poitrine ne<br />

seront pas détaillés ici. Il faut se rappeler<br />

que l’on se doit de reproduire<br />

les symptômes <strong>et</strong> donc, que chez un<br />

suj<strong>et</strong> entraîné, il faut disposer d’un<br />

ergomètre perm<strong>et</strong>tant d’atteindre des<br />

puissances correspondant au niveau<br />

d’effort habituel.<br />

Les douleurs abdominales d’effort<br />

résulteraient, pour la plupart, d’une<br />

ischémie digestive qui serait liée à un<br />

vol vasculaire par les muscles actifs, au<br />

dépend des territoires splanchniques.<br />

Elle survient surtout au cours des sports<br />

de grande endurance, type marathon<br />

ou iron man en triathlon (27).<br />

La douleur abdominale peut s’accompagner<br />

de diarrhée <strong>et</strong> de vomissements.<br />

L’examen clinique au repos<br />

est en règle générale strictement normal.<br />

Un souffle dans la région épigastrique<br />

est souvent observé <strong>et</strong> rapporté<br />

à la présence d’une compression<br />

extrinsèque du tronc cœliaque par le<br />

ligament arqué du diaphragme.<br />

● Les lombalgies <strong>et</strong> fessalgies<br />

Chez le sportif d’âge mûr, les lombalgies<br />

ou fessalgies d’effort doivent faire<br />

rechercher une ou des lésions sur les<br />

axes iliaques primitifs ou internes. Si<br />

la pathologie athéromateuse n’a pas<br />

de spécificité sportive, la possibilité de<br />

douleurs proximales d’origine vasculaire<br />

reste encore mal connue <strong>et</strong> doit<br />

sans doute, à ce titre, être citée dans<br />

c<strong>et</strong>te revue (28). Les lésions hypogastriques<br />

peuvent être responsables de<br />

troubles sexuels.<br />

mise au point<br />

>>><br />

27 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


mise au point<br />

>>><br />

L’écho-Doppler peut confirmer la présence<br />

du ligament arqué ou d’une<br />

atteinte iliaque <strong>et</strong> élimine la possibilité<br />

d’une autre anomalie vasculaire ou<br />

non vasculaire.<br />

Les nombreux diagnostics différentiels<br />

de la pathologie digestive ne seront pas<br />

décrits ici. Dans le cadre des fessalgies<br />

<strong>et</strong> lombalgies d’effort, la pathologie<br />

rachidienne <strong>et</strong>, en particulier, la présence<br />

d’un canal lombaire étroit, sont<br />

souvent discutées.<br />

La prise en charge du ligament arqué<br />

a été presque abandonnée, sauf en cas<br />

d’amaigrissement sévère. Le traitement<br />

des douleurs abdominales d’effort<br />

est, en l’absence de cause<br />

objectivée, essentiellement symptomatique.<br />

Les lésions iliaques internes<br />

peuvent bénéficier d’une angioplastie<br />

souvent spectaculairement efficace.<br />

Membre supérieur<br />

● Les syndromes<br />

Dans les sports sollicitant les avantbras<br />

(motocross, planche à voile…), la<br />

présence de douleurs récidivantes aux<br />

membres supérieurs peut révéler un<br />

syndrome de loge (29). L’apparition<br />

d’un syndrome du défilé thoraco-brachial<br />

pourrait être favorisée par les<br />

sports sollicitant la ceinture scapulaire,<br />

comme l’halthérophilie, le canoëkayak,<br />

le lancer, la natation (30, 31).<br />

Des micro-angiopathies digitales peuvent<br />

survenir comme complication<br />

des chocs répétés sur la paume de la<br />

main (pelotari à main nue).<br />

● Les symptômes<br />

La douleur, dans les syndromes de<br />

loge, s’accompagne d’un durcissement<br />

<strong>et</strong> de faiblesse anormale des<br />

masses musculaires <strong>et</strong>, parfois, de<br />

fourmillement aux extrémités. La<br />

douleur peut être r<strong>et</strong>ardée ou prolongée<br />

(quelques minutes) par rapport<br />

à l’effort. En règle symétrique,<br />

elle n’apparaît qu’après une période<br />

d’effort répété. Dans les défilés thoracobrachiaux,<br />

le caractère positionnel est<br />

souvent difficile à affirmer à l’interrogatoire.<br />

L’examen physique de repos, à<br />

distance de l’effort, est en principe normal<br />

dans ces deux syndromes. L’existence<br />

d’un syndrome de Raynaud sévère<br />

ou atypique peut être un mode de révélation<br />

d’un syndrome du défilé thoracobrachial<br />

ou de ses complications, mais<br />

peut aussi révéler des micro-angiopathies<br />

digitales traumatiques.<br />

● Le diagnostic<br />

La mesure des pressions de loge au<br />

membre supérieur perm<strong>et</strong> le diagnostic<br />

de syndrome de loge, à condition de<br />

reproduire le geste sportif qui induit la<br />

douleur. Les manœuvres classiques de<br />

provocation <strong>et</strong> l’écho-Doppler aident<br />

au diagnostic de syndrome du défilé <strong>et</strong><br />

perm<strong>et</strong>tent de s’assurer de l’absence de<br />

complications vasculaires (anévrysme<br />

post-sténotique, embols vasculaires<br />

périphériques).<br />

L’existence d’une hypertrophie musculaire<br />

très prononcée ou d’une douleur<br />

au repos doit faire évoquer la possibilité<br />

d’un syndrome de loge secondaire.<br />

Le défilé thoraco-brachial peut donner<br />

le change, voire s’associer aux pathologies<br />

canalaires (cubital au coude, canal<br />

carpien…) ou aux pathologies tendineuses<br />

des membres supérieurs. L’existence<br />

d’une douleur de repos ou d’une<br />

douleur provoquée à la palpation doit<br />

faire rechercher une telle association.<br />

L’aponévrectomie (ou aponévrotomie)<br />

dans le syndrome de loge <strong>et</strong> la levée chirurgicale<br />

de la compression, en règle<br />

associée à une ablation de la première<br />

côte dans le syndrome du défilé perm<strong>et</strong>tent,<br />

en l’absence de complication,<br />

une reprise d’activité sportive à l’identique.<br />

Les atteintes vasculaires sévères,<br />

dans le cadre des micro-angiopathies<br />

traumatiques ou emboliques, peuvent<br />

nécessiter une sympathectomie. Dans<br />

ce cas, la reprise du sport s’accompagne<br />

parfois d’une difficulté, voire d’une<br />

baisse de performance, chez certains<br />

Le lancer favorise l’apparition<br />

du syndrome du défilé thoraco-brachial.<br />

sportifs, en raison de l’eff<strong>et</strong> chronotrope<br />

négatif des sympathectomies des<br />

membres supérieurs.<br />

Membre inférieur<br />

● Les syndromes<br />

Le syndrome de loge a souvent été décrit<br />

dans la loge antéro-externe chez le footballeur.<br />

Il est aussi rapporté comme très<br />

fréquent chez les patineurs <strong>et</strong> est souvent<br />

discuté chez les marcheurs <strong>et</strong> les<br />

coureurs à pied. Il peut toucher toutes<br />

les loges musculaires en jambe comme<br />

en cuisse (32, 33). L’endofibrose induite<br />

par l’exercice ne doit être évoquée que<br />

chez des sportifs de bon ou haut niveau<br />

d’entraînement, ayant un long passé<br />

sportif d’endurance. Si la majorité des<br />

observations concernent les cyclistes,<br />

toutes les disciplines d’endurance sont<br />

concernées (34, 35). Les autres pathologies,<br />

artériopathie athéromateuse ou<br />

non, artère poplité piégée, claudication<br />

veineuse, ne relèvent pas de contextes<br />

sportifs spécifiques.<br />

● Les symptômes<br />

Dans le syndrome de loge, la tension<br />

douloureuse musculaire apparaît pendant<br />

<strong>et</strong> persiste quelques minutes<br />

après l’effort. Elle peut s’accompagner<br />

de troubles neurologiques transitoires.<br />

La présence de p<strong>et</strong>ites hernies musculaires<br />

d’effort, parfois confondues<br />

avec des varices, est un bon argument<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

28


en faveur du diagnostic. Au repos, le<br />

muscle est habituellement non douloureux<br />

à la palpation. On doit rechercher<br />

une cause locale (masse tumorale<br />

ou lésion osseuse), susceptible de donner<br />

lieu à un syndrome de loge secondaire.<br />

L’examen clinique de repos<br />

d’une endofibrose est généralement<br />

strictement normal <strong>et</strong> la présence d’un<br />

souffle n’a pas de caractère pathologique.<br />

Les symptômes cliniques sont<br />

souvent décrits comme une sensation<br />

de “grosse cuisse” ou de “jambe molle”.<br />

Ils surviennent exclusivement lors des<br />

efforts maximaux ou supra-maximaux<br />

(sprints, échappées) <strong>et</strong> disparaissent<br />

très rapidement dès que l’athlète “lève<br />

le pied”. La douleur de moll<strong>et</strong> à la<br />

marche, paradoxalement parfois<br />

absente lors de la course, est classiquement<br />

décrite comme un argument<br />

en faveur d’un piège poplité. L’impossibilité<br />

de réaliser 50 extensions<br />

consécutives sur la pointe des pieds a<br />

été proposée comme un test diagnostique<br />

de dépistage. A l’exception de<br />

l’artère poplitée piégée, la notion de<br />

“trigger d’intensité” <strong>et</strong> de sédation<br />

rapide à l’arrêt de l’effort sont de bons<br />

arguments pour une origine vasculaire<br />

aux douleurs chroniques des<br />

membres inférieurs, même si le siège<br />

de la douleur est parfois atypique<br />

(claudication proximale). Un piège<br />

diagnostique est la possibilité de douleurs<br />

vasculaires atypiques dans leur<br />

localisation (proximale) ou leur description<br />

(sciatalgie, douleur de<br />

hanche), résultant de lésions iliaques<br />

internes (ou primitives), évoquant<br />

une pathologie neurologique (canal<br />

lombaire étroit, sciatique) ou rhumatologique<br />

(pseudo-arthrose de<br />

hanche). Le caractère de la symptomatologie<br />

liée à l’effort <strong>et</strong> disparaissant<br />

à son arrêt, ainsi que la présence<br />

de facteurs de risques vasculaires chez<br />

un suj<strong>et</strong> d’âge mûr, doivent inciter à<br />

exiger de l’échographiste une analyse<br />

spécifique des iliaques primitives <strong>et</strong><br />

internes.<br />

● Le diagnostic<br />

La mesure des pressions intra-tissulaires<br />

après l’effort est plus utilisée que la scintigraphie<br />

pour le diagnostic de syndrome<br />

de loge. Echographie <strong>et</strong><br />

scintigraphie musculaires perm<strong>et</strong>tent<br />

d’éliminer une cause inflammatoire<br />

locale. Une élévation des CPK à distance<br />

(> 72 h) de tout effort doit faire discuter<br />

la possibilité d’une myopathie sousjacente.<br />

L’écho-Doppler est l’examen<br />

de première intention dans le diagnostic<br />

de l’artère poplitée piégée <strong>et</strong> peut<br />

être utile au diagnostic d’endofibrose<br />

entre des mains exercées. Pour l’endofibrose<br />

comme pour les autres lésions<br />

artérielles (inflammatoires ou athéromateuses),<br />

la mesure des index de pression<br />

de cheville à l’arrêt d’un effort, dont<br />

l’intensité a permis de reproduire la<br />

douleur, apporte le plus souvent un<br />

argument décisif pour l’origine vasculaire<br />

des symptômes.<br />

Les diagnostics différentiels, avec des<br />

pathologies non vasculaires, en particulier<br />

tendineuses, musculaires ou<br />

ostéo-articulaires, sont innombrables.<br />

Les périostites <strong>et</strong> fractures<br />

de fatigue sont, dans notre expérience,<br />

très souvent objectivées lors<br />

des scintigraphies osseuses, réalisées<br />

chez les patients qui nous sont adressés<br />

pour suspicion de syndrome de<br />

loge. Ils ne rem<strong>et</strong>tent pas en cause la<br />

réalité d’un syndrome de loge secondaire<br />

éventuel, mais leur traitement<br />

en priorité semble préférable à une<br />

aponévrotomie de décharge. La présence<br />

d’une douleur exquise à la palpation<br />

<strong>et</strong> d’une douleur au choc par<br />

percussion de l’os dans son grand<br />

axe doit les faire rechercher. Le syndrome<br />

de Maigne est un diagnostic<br />

différentiel classique de l’endofibrose.<br />

Le concept de plicature iliaque<br />

développé par les auteurs hollandais<br />

ne doit sans doute pas être confondu<br />

avec une endofibrose (36).<br />

Actuellement, nous ne r<strong>et</strong>enons pas<br />

comme pathologique un simple<br />

allongement artériel.<br />

Le traitement chirurgical des syndromes<br />

de loge <strong>et</strong> de l’artère poplitée piégée perm<strong>et</strong><br />

en règle générale une reprise du<br />

sport sans séquelle. Pour l’endofibrose,<br />

comme pour les autres lésions artérielles<br />

pariétales, le traitement est la chirurgie<br />

ou… l’abstention. Les gestes d’angioplasties<br />

ne sont pas recommandés dans<br />

le cadre de l’endofibrose. Les patients<br />

opérés courent le risque de récidive ou<br />

de sténose anastomotique. Dans la<br />

majorité des cas, la reprise du sport perm<strong>et</strong><br />

d’atteindre des performances<br />

identiques, voire supérieures, aux performances<br />

pré-opératoires. Si les<br />

lésions artérielles résultent d’un athérome<br />

débutant, la prise en charge<br />

médicale des facteurs de risque est<br />

essentielle.<br />

> En conclusion<br />

La douleur reste le maître symptôme des<br />

pathologies vasculaires chez le sportif.<br />

Elle ne doit cependant pas masquer la<br />

possibilité d’autres signes cliniques, parfois<br />

isolés <strong>et</strong> révélateurs de troubles vasculaires,<br />

comme une hypertension<br />

artérielle (coarcation, dysplasies), une<br />

dyspnée (hypertension artérielle pulmonaire),<br />

une fatigabilité (claudication<br />

proximale), un œdème (obstacle veineux),<br />

voire des pathologies n<strong>et</strong>tement<br />

plus exceptionnelles telles que le<br />

pseudo-purpura rhumatoïde embolique<br />

(defilé thoraco-brachial) ou une dysphagie<br />

(lusoria), <strong>et</strong>c.<br />

Au total, quand faut-il penser à une<br />

pathologie vasculaire ? Toujours ! Dès lors<br />

qu’un symptôme lié à l’exercice reste inexpliqué,<br />

pour éviter un diagnostic r<strong>et</strong>ardé.<br />

Ainsi, le r<strong>et</strong>ard diagnostique moyen des<br />

maladies vasculaires du suj<strong>et</strong> jeune est de<br />

plus de deux ans. Que faire si on suspecte<br />

une pathologie vasculaire ? Adresser le<br />

patient à un correspondant expérimenté<br />

en pathologie vasculaire chez le sportif,<br />

car les problèmes de diagnostic restent<br />

encore souvent nombreux, même en cas<br />

de forte suspicion clinique. ❚<br />

mise au point<br />

>>><br />

29 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


mise au point<br />

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<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

30


Dépistage cardiovasculaire<br />

Consensus européen<br />

pour les jeunes sportifs<br />

analyse d’article<br />

Corrado D, Pellicia A, Bjornstad HH <strong>et</strong> al. <strong>Cardio</strong>vascular pre-participation screening of young comp<strong>et</strong>itive athl<strong>et</strong>es for prevention of sudden death :<br />

proposal for a common European protocol. Eur Heart J 2005 ; 26 : 516-24.<br />

Sur les terrains de sport, l’accident cardiovasculaire a souvent une issue <strong>et</strong> des<br />

conséquences dramatiques. Les groupes européens de <strong>Cardio</strong>logie du <strong>Sport</strong> <strong>et</strong><br />

des Maladies du Myocarde <strong>et</strong> du Péricarde de la Société Européenne de<br />

<strong>Cardio</strong>logie viennent de proposer un consensus sur les modalités d’un dépistage<br />

cardiovasculaire chez les jeunes sportifs (< 35 ans), suivant un entraînement<br />

régulier <strong>et</strong>/ou participant à des compétitions.<br />

Pr François Carré (CHU Pontchaillou, >>> Rennes)<br />

MOTS CLÉS<br />

Accident cardiovasculaire,<br />

mort subite, activité sportive,<br />

jeune sportif, dépistage,<br />

consensus européen,<br />

bilan cardiovasculaire, ECG<br />

Bien que relativement rare,<br />

l’accident cardiovasculaire<br />

touche surtout les hommes<br />

<strong>et</strong> concerne, dans l’immense majorité<br />

des cas, un cardiaque ignoré,<br />

chez qui le risque de mort subite lors<br />

de la pratique d’une activité sportive<br />

intense est n<strong>et</strong>tement majoré (x 2,5).<br />

Il est donc logique de réfléchir aux<br />

possibilités d’amélioration du dépistage<br />

de ces suj<strong>et</strong>s à risque. C’est dans<br />

c<strong>et</strong>te optique que les groupes européens<br />

de <strong>Cardio</strong>logie du <strong>Sport</strong> <strong>et</strong> des<br />

Maladies du Myocarde <strong>et</strong> du Péricarde<br />

de la Société Européenne de<br />

<strong>Cardio</strong>logie viennent de proposer un<br />

consensus sur les modalités d’un<br />

dépistage cardiovasculaire chez les<br />

jeunes sportifs.<br />

En France, toute personne désireuse de participer à une compétition doit être en possession d’un certific<br />

non contre-indication, daté de moins d’un an <strong>et</strong> établi par un médecin.<br />

> L’hétérogénéité<br />

des modalités<br />

En eff<strong>et</strong>, une grande hétérogénéité<br />

règne actuellement, selon les pays,<br />

dans ce domaine. Rappelons qu’en<br />

France, toute personne désireuse de<br />

participer à une compétition doit être<br />

en possession d’un certificat de non<br />

contre-indication, daté de moins d’un<br />

an <strong>et</strong> établi par un médecin. Aucun<br />

protocole précis du bilan n’est imposé<br />

dans ce cadre. Un arrêté du ministère<br />

de la Jeunesse <strong>et</strong> des <strong>Sport</strong>s, publié au<br />

Journal Officiel en février 2004, définit<br />

le contenu obligatoire du bilan minimal<br />

dont doivent bénéficier les sportifs<br />

avant leur inscription sur les listes<br />

de haut niveau ou espoir. Ces listes<br />

sont établies par la fédération dont<br />

dépend le sportif <strong>et</strong> cela concerne<br />

entre 13 <strong>et</strong> 14 000 suj<strong>et</strong>s. Dans le<br />

>>><br />

31 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


analyse d’article<br />

>>><br />

domaine cardiovasculaire, ce bilan doit<br />

comprendre un examen clinique biannuel,<br />

un électrocardiogramme de<br />

repos annuel, un échocardiogramme<br />

transthoracique de repos une fois dans<br />

la carrière (deux si le premier examen<br />

a été fait avant 15 ans), une épreuve<br />

d’effort au moins tous les 4 ans. Cela<br />

ne concerne pas les ligues professionnelles<br />

(football, rugby, cyclisme, tennis,<br />

golf…), qui ne dépendent pas du<br />

ministère des <strong>Sport</strong>s <strong>et</strong> qui ont leur<br />

propre règlement médical.<br />

Tableau 2 • Signes à rechercher à l’examen physique.<br />

● Signes musculosquel<strong>et</strong>tiques <strong>et</strong>/ou oculaires évocateurs d’un syndrome<br />

de Marfan<br />

● Asymétrie des pouls radiaux <strong>et</strong> fémoraux<br />

● Clicks méso ou télésystoliques<br />

● Souffles cardiaques marqués (systolique ou diastolique > 2/6)<br />

● Arythmie cardiaque<br />

● Pression artérielle > 140/90 mmHg au moins à 2 mesures<br />

cine du sport, chez tout suj<strong>et</strong> désirant<br />

prendre une licence sportive.<br />

Différentes études ont montré l’efficacité<br />

supérieure du bilan médical<br />

imposé en Italie au simple interrogatoire<br />

<strong>et</strong> examen physique proposé en<br />

Amérique du nord. Ainsi, la cardiomyopathie<br />

hypertrophique (CMH),<br />

dont l’incidence dans la mort subite<br />

des suj<strong>et</strong>s jeunes non sportifs est voisine<br />

en Italie <strong>et</strong> en Amérique du nord,<br />

Tableau 1 • Antécédents <strong>et</strong> signes fonctionnels à rechercher à l’interrogatoire.<br />

Interrogatoire dirigé<br />

Antécédents familiaux<br />

Famille proche<br />

Mort subite ou accident cardiaque précoce<br />

(< 55 ans hommes <strong>et</strong> < 65 ans femmes)<br />

<strong>Cardio</strong>myopathie<br />

Syndrome de Marfan<br />

Syndrome de QT long<br />

Syndrome de Brugada<br />

Arythmies sévères<br />

Maladie coronaire<br />

Autre maladie cardiovasculaire sévère<br />

Antécédents personnels <strong>et</strong> signes fonctionnels<br />

<strong>Cardio</strong>pathie<br />

Syncope ou malaise<br />

Palpitations ou irrégularités cardiaques<br />

Douleur ou gêne thoracique à l’effort<br />

Dyspnée inappropriée à l’effort<br />

Fatigue inappropriée à l’effort<br />

> Le modèle italien<br />

Le consensus proposé dans l’European<br />

Heart Journal s’est largement<br />

inspiré de l’expérience italienne dans<br />

ce domaine. En eff<strong>et</strong>, depuis 25 ans,<br />

la loi italienne impose le contenu du<br />

bilan médical, qui doit être réalisé par<br />

des praticiens spécialisés en médeest<br />

exceptionnellement en cause chez<br />

les jeunes sportifs italiens, à l’inverse<br />

de leurs homologues américains. Bien<br />

que le maître examen diagnostique de<br />

la CMH soit l’échocardiographie transthoracique,<br />

sa réalisation systématique<br />

sur de grandes populations ne paraît<br />

pas actuellement raisonnable, vu son<br />

coût. L’expérience italienne, basée sur<br />

l’ECG de repos 12 dérivations, a montré<br />

chez les jeunes sportifs (0,07 %) une<br />

prévalence de la CMH proche de celle<br />

de l’échographie (0,1 %) utilisée en<br />

Amérique du nord chez des jeunes<br />

suj<strong>et</strong>s de race blanche. Ainsi, par rapport<br />

aux seuls interrogatoire <strong>et</strong> examen<br />

physique, l’association systématique<br />

d’un ECG de repos chez les jeunes<br />

sportifs améliore de 77 % l’efficacité<br />

de la détection de la CMH.<br />

> L’intérêt de l’ECG<br />

L’intérêt de l’ECG à visée diagnostique<br />

est aussi bien reconnue dans d’autres<br />

pathologies potentiellement létales<br />

chez le jeune sportif, comme les syndromes<br />

du QT long, du QT court, de<br />

Brugada, de Wolf-Parkinson-White, la<br />

maladie de Lenégre <strong>et</strong>, à un moindre<br />

niveau, la maladie arythmogène du<br />

ventricule droit <strong>et</strong> la cardiomyopathie<br />

dilatée. Avec la CMH, les pathologies<br />

citées constituent près de 60 % des<br />

causes de mort subite chez le jeune<br />

sportif <strong>et</strong> la meilleure connaissance<br />

des signes électrocardiographiques de<br />

certaines d’entre elles récemment<br />

décrites devrait perm<strong>et</strong>tre d’améliorer<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

32


leur détection chez les jeunes sportifs.<br />

L’ECG de repos est moins performant<br />

pour détecter la maladie coronaire <strong>et</strong><br />

l’anomalie de naissance des artères<br />

coronaires.<br />

> Le protocole<br />

de dépistage<br />

Ainsi, le protocole de dépistage des<br />

maladies cardiovasculaires proposé ici<br />

comprend un interrogatoire dirigé, qui<br />

précisera les antécédents familiaux <strong>et</strong><br />

personnels, ainsi que les signes fonctionnels<br />

(Tab. 1), un examen physique<br />

qui conserve sa place irremplaçable<br />

avec mesure de la pression artérielle<br />

(Tab. 2) <strong>et</strong> un ECG 12 dérivations de<br />

repos.<br />

Connaissant les dates d’apparition,<br />

mais aussi la possible évolution dans<br />

le temps des signes électrocardiographiques<br />

de ces pathologies, il est proposé<br />

que l’ECG de repos 12 dérivations<br />

soit réalisé systématiquement à partir<br />

de 12-14 ans <strong>et</strong> répété tous les 2 ans.<br />

Avant c<strong>et</strong> âge, dans les intervalles <strong>et</strong><br />

en l’absence de signes évocateurs,<br />

l’examen clinique (Tab. 1 <strong>et</strong> 2) devra<br />

bien sûr être réalisé avant la délivrance<br />

d’une licence sportive.<br />

Une attitude appropriée aux données<br />

du bilan médical <strong>et</strong> de l’ECG 12 dérivations<br />

est proposée sur la figure 1.<br />

Comme le soulignent les auteurs, une<br />

bonne connaissance du praticien de<br />

la médecine du sport, mais aussi des<br />

signes cliniques <strong>et</strong> électrocardiographiques<br />

évocateurs des pathologies<br />

cardiovasculaires cités, ne pourra<br />

qu’améliorer l’efficacité de ce dépistage.<br />

analyse d’article<br />

Figure 1 • Diagramme illustrant le protocole de dépistage des pathologies<br />

cardiovasculaires chez les jeunes sportifs proposé par Corrado <strong>et</strong> al.<br />

Compétiteurs entre 12 <strong>et</strong> 35 ans<br />

Bilan médical<br />

Antécédents familiaux <strong>et</strong> personnels (Tab. 1)<br />

Signes fonctionnels (Tab. 1)<br />

Examen physique (Tab. 2)<br />

ECG de repos 12 dérivations à répéter tous les 2 ans<br />

Le protocole de dépistage devrait perm<strong>et</strong>tre de détecter<br />

les pathologies cardiovasculaires chez le jeune sportif.<br />

En Europe, par rapport au seul examen<br />

médical, la majoration du coût du protocole<br />

proposé serait d’environ<br />

10 euros, ce qui reste modéré vu son<br />

apport.<br />

Normal<br />

Anormal<br />

Pas de contre- Cœur Examens<br />

indication “sain” complémentaires<br />

à la compétition<br />

ciblés<br />

Pathologie<br />

cardiovasculaire<br />

Attitude adaptée<br />

aux recommandations<br />

> En conclusion<br />

La mise en place progressive de ce<br />

protocole dans les pays de la communauté<br />

européenne devrait perm<strong>et</strong>tre de<br />

détecter des pathologies cardiovasculaires<br />

latentes <strong>et</strong> potentiellement graves<br />

chez le jeune sportif. Elle ne perm<strong>et</strong>tra<br />

cependant pas de prévenir tous les accidents<br />

potentiels. Ainsi, pour le groupe<br />

de consensus les recherches doivent se<br />

poursuivre en particulier par l’évaluation<br />

précise du rapport coût efficacité<br />

de l’échocardiogramme transthoracique<br />

<strong>et</strong> par la tenue d’un registre international<br />

des morts subites observées dans<br />

c<strong>et</strong>te population. ❚<br />

33 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


XV e Journées Européennes<br />

de la Société Française<br />

de <strong>Cardio</strong>logie, Paris 2005<br />

congrès<br />

Les points forts des deux sessions des dernières Journées Européennes de<br />

<strong>Cardio</strong>logie concernant les relations entre le système cardiovasculaire <strong>et</strong> l’activité<br />

physique vous sont résumées par deux des intervenants, Marc Ferrière de<br />

Montpellier <strong>et</strong> Hervé Douard de Bordeaux.<br />

Dr Marc Ferrière (Service de <strong>Cardio</strong>logie B, Montpellier)<br />

Pr Hervé Douard (Hôpital <strong>Cardio</strong>logique, Pessac)<br />

> Exercice physique<br />

sur ordonnance<br />

Alors que le précédent ministre de la<br />

Santé, Mr Douste-Blazy, venait<br />

d’aborder largement le thème de la<br />

prévention cardiovasculaire dans son<br />

discours d’inauguration, l’atelier de<br />

travail sur l’exercice physique sur<br />

ordonnance pour les patients cardiovasculaires<br />

s’est déroulé devant une<br />

audience fournie.<br />

De l’intérêt de l’ordonnance<br />

Le but de c<strong>et</strong>te session était de montrer<br />

l’apport complémentaire que l’ordonnance<br />

personnalisée peut<br />

apporter aux recommandations de<br />

pratique d’une activité physique. Ces<br />

recommandations sont bien diffusées,<br />

mais d’ordre général <strong>et</strong> global,<br />

elles sont, hélas, peu suivies par les<br />

patients dans leurs applications quantitatives,<br />

qualitatives <strong>et</strong>, surtout, dans<br />

la durée. L’ordonnance établit une<br />

prescription personnalisée d’une thérapeutique<br />

(ici non pharmacologique)<br />

dans le but d’obtenir un gain<br />

thérapeutique (justifié idéalement par<br />

la médecine basée sur les preuves),<br />

ou sur les symptômes. Elle prévoit<br />

une posologie, un mode d’administration<br />

<strong>et</strong> est renouvelé à intervalle<br />

régulier, jamais au-delà de 6 mois,<br />

perm<strong>et</strong>tant ainsi de juger de l’efficacité<br />

<strong>et</strong> de la compliance au traitement<br />

<strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tant un ajustement en fonction<br />

d’un objectif. L’ordonnance doit<br />

pouvoir aider à l’application <strong>et</strong> donc<br />

à l’efficacité des recommandations<br />

de bonne pratique d’une activité physique.<br />

Quatre thèmes majeurs ont été développés<br />

lors de c<strong>et</strong> atelier : l’hypertension<br />

artérielle, le diabète sucré à haut<br />

risque cardiovasculaire,<br />

l’insuffisance<br />

cardiaque <strong>et</strong> la prévention<br />

primaire des<br />

maladies cardiovasculaires.<br />

L’hypertension<br />

Dans le cadre de l’hypertension,<br />

le Pr<br />

Xavier Girerd (Pitiésalpêtrière,<br />

Paris) a<br />

présenté le programme, ONE – HTA,<br />

correspondant à une prescription<br />

informatisée <strong>et</strong> personnalisée de l’activité<br />

physique <strong>et</strong> de conseils nutritionnels<br />

chez l’hypertendu. Une<br />

méta-analyse de 53 études a montré<br />

qu’une activité physique régulière de<br />

type aérobie induisait, en moyenne,<br />

une baisse de 3-4 mmHg sur la PA<br />

systolique <strong>et</strong> de 2 à 3 mmHg sur la PA<br />

Le programme<br />

ONE-HTA<br />

correspond à<br />

une prescription<br />

informatisée <strong>et</strong><br />

personnalisée de<br />

l’activité physique<br />

chez l’hypertendu.<br />

MOTS CLÉS<br />

Exercice physique,<br />

ordonnance, hypertension<br />

artérielle, diabète,<br />

insuffisance cardiaque,<br />

prévention primaire,<br />

coronaropathies,<br />

recommandations,<br />

contre-indications, sport<br />

diastolique, optimisant ainsi les résultats<br />

du traitement antihypertenseur.<br />

Les meilleurs résultats sont obtenus<br />

pour une durée d’activité de 120 à<br />

150 minutes par semaine, dans le but<br />

de dépenser au moins 2 000 kcal par<br />

semaine en plus des activités habituelles.<br />

La bicycl<strong>et</strong>te<br />

semble plus efficace<br />

que la marche <strong>et</strong> le<br />

jogging. Si l’intensité<br />

de l’exercice influe peu<br />

sur les chiffres systoliques,<br />

une intensité<br />

modérée paraît plus<br />

efficace sur les chiffres<br />

diastoliques. Le programme<br />

ONE-HTA<br />

proposait au médecin,<br />

à partir de données médicales <strong>et</strong><br />

personnelles, recueillies par questionnaires<br />

<strong>et</strong> analysées par<br />

l’Institut Français de la Condition<br />

Physique <strong>et</strong> du Mode de Vie, une prescription<br />

personnalisée de conseils de<br />

nutrition <strong>et</strong> de pratique d’activité physique.<br />

Des 372 hypertendus recrutés<br />

(âge moyen 55 ans), 67 % étaient<br />

sédentaires <strong>et</strong> 32 % très sédentaires.<br />

>>><br />

35<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


congrès<br />

>>><br />

Un programme d’activité personnalisé<br />

présenté par le médecin traitant<br />

devrait perm<strong>et</strong>tre d’améliorer l’observance<br />

individuelle de l’hypertendu.<br />

La validation scientifique de l’efficacité<br />

de ce programme doit être étudiée<br />

prochainement.<br />

Le diabète à haut risque<br />

cardiovasculaire<br />

Richard Brion (hôpital Desgen<strong>et</strong>tes,<br />

Lyon) est à l’origine d’une consultation<br />

de prescription de l’exercice physique<br />

pour les patients à haut risque<br />

cardiovasculaire <strong>et</strong>, plus particulièrement,<br />

les diabétiques de type 2. Il est<br />

prouvé que ces suj<strong>et</strong>s, qui pratiquent<br />

moins d’activité physique que la<br />

population générale, présentent des<br />

altérations de la typologie musculaire<br />

<strong>et</strong> une capacité physique altérée. La<br />

prescription banale, non personnalisée,<br />

d’une activité physique est peu<br />

efficace. La consultation, mise en<br />

place à Lyon, repose sur une analyse<br />

des facteurs de risque <strong>et</strong> des handicaps,<br />

une identification des habitudes<br />

personnelles, de l’environnement<br />

familial, social <strong>et</strong> économique. Après<br />

synthèse de ces données, une ordonnance<br />

personnalisée d’activité physique<br />

est remise au patient <strong>et</strong> diffusée<br />

à tous les acteurs médicaux ou paramédicaux.<br />

Actuellement, sont observés<br />

100 % de motivation en fin de<br />

consultation, 100 % de compréhension<br />

du bénéfice de l’activité physique<br />

<strong>et</strong> 43,7 % de poursuite de l’activité<br />

physique à 16 mois. L’analyse des<br />

causes d’échec a révélé que 66,7 % des<br />

patients auraient souhaité reprendre<br />

avec un “entraîneur” <strong>et</strong> que l’anxiété<br />

<strong>et</strong> l’obésité sont associées à un plus<br />

fort taux d’arrêt.<br />

L’insuffisance cardiaque<br />

Le bénéfice de la pratique d’une activité<br />

physique adaptée chez l’insuffisant<br />

cardiaque a été précisé par<br />

Jean-François Aup<strong>et</strong>it (Saint-Joseph,<br />

Lyon). Deux aspects prédominent :<br />

d’une part, la notion de déconditionnement<br />

réversible <strong>et</strong>, d’autre part,<br />

la valeur pronostique sur la mortalité.<br />

Ainsi, le muscle de l’insuffisant<br />

cardiaque présente des anomalies<br />

énergétiques d’origine multifactorielle,<br />

qui sont réversibles avec un<br />

reconditionnement adapté à l’aptitude<br />

individuelle. Aujourd’hui, le<br />

“frein” à la prescription d’activité physique<br />

chez ces patients doit être levé.<br />

En eff<strong>et</strong>, après réadaptation cardiovasculaire<br />

chez le coronarien, la<br />

consommation maximale d’oxygène<br />

est augmentée de 13 % <strong>et</strong> la durée de<br />

l’exercice de 17 %.<br />

Dans le même temps,<br />

c<strong>et</strong> entraînement<br />

s’accompagne d’une<br />

baisse de la mortalité<br />

de 20 % <strong>et</strong> de la mort<br />

subite de 37 %. Chez<br />

l’insuffisant cardiaque,<br />

les premiers résultats<br />

montrent un risque<br />

relatif de mortalité<br />

abaissé de 35 % par<br />

le réentraînement.<br />

L’innocuité de c<strong>et</strong>te<br />

prescription a été confirmée <strong>et</strong> l’indication<br />

est reconnue pour les insuffisants<br />

cardiaques de classe NYHA II<br />

ou III. En l’absence, actuellement, de<br />

proposition consensuelle sur la posologie<br />

<strong>et</strong> le mode d’administration, il<br />

est recommandé une prescription<br />

personnalisée <strong>et</strong> non contraignante.<br />

La prévention primaire<br />

En prévention primaire également,<br />

l’activité physique modérée <strong>et</strong> régulière<br />

a fait ses preuves. Marc Ferrière<br />

(Montpellier) a rappelé les eff<strong>et</strong>s<br />

bénéfiques de c<strong>et</strong>te pratique, qui<br />

diminue le risque d’apparition de<br />

maladies cardiovasculaires. Ainsi, une<br />

baisse significative de l’apparition<br />

d’une HTA est r<strong>et</strong>rouvée chez la<br />

femme (-63 %), comme chez l’homme<br />

(-82 %). Une baisse du LDLc <strong>et</strong> une<br />

hausse significatives du HDLc, ainsi<br />

Un programme<br />

d’activité<br />

personnalisé,<br />

présenté par<br />

le médecin traitant,<br />

devrait perm<strong>et</strong>tre<br />

d’améliorer<br />

l’observance<br />

individuelle<br />

de l’hypertendu.<br />

qu’une diminution de la progression<br />

de l’index intima-média de 40 % sont<br />

rapportés. Plusieurs études, réalisées<br />

sur de grandes populations, ont montré<br />

une diminution de 50 % d’apparition<br />

de nouveaux cas de diabète<br />

(type 2) <strong>et</strong> de 60 % de syndrome<br />

métabolique. Enfin, une baisse de la<br />

CRP a aussi été récemment démontrée.<br />

Après 75 ans, la pratique d’une<br />

activité physique régulière augmente<br />

de 53% le nombre d’années en bonne<br />

santé. Une activité intense n’est pas<br />

plus efficace qu’une activité modérée.<br />

Trois heures de marche active<br />

par semaine, une<br />

activité d’endurance<br />

dépensant au moins<br />

4,5 METs, suffisent<br />

pour observer des<br />

eff<strong>et</strong>s positifs.<br />

Ainsi, l’ordonnance<br />

médicale a pour buts<br />

de personnaliser la<br />

prescription de l’activité<br />

physique, d’éviter<br />

les surdosages en<br />

fonction des facteurs<br />

de risque, d’améliorer<br />

la compliance, gages du succès de<br />

toute thérapeutique. Un bénéfice aussi<br />

important, prouvé scientifiquement,<br />

ne peut se satisfaire de simples recommandations<br />

appliquées par un p<strong>et</strong>it<br />

nombre de patients <strong>et</strong> pour un suivi<br />

de courte durée. Si des consultations<br />

d’activité physique, telle que celle<br />

ouverte par Richard Brion se développent,<br />

si des programmes d’accompagnement<br />

<strong>et</strong> de conseils des<br />

suj<strong>et</strong>s à risque cardiovasculaire, tels<br />

que celui proposé par Xavier Girerd,<br />

se m<strong>et</strong>tent en place <strong>et</strong> si, comme l’a<br />

indiqué Jean-François Aup<strong>et</strong>it, la<br />

rééducation des insuffisants cardiaques<br />

vient s’ajouter à celle des<br />

coronariens, enfin, si la prévention<br />

passe du stade des discours au stade<br />

de la pratique, gageons que l’ensemble<br />

de la communauté médicale, si rapide<br />

à prescrire les nouveaux traitements,<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4 36


prescrira réellement l’activité physique<br />

(dont les niveaux de preuve d’efficacité<br />

sont exceptionnels), avec la même<br />

réflexion <strong>et</strong> la même conviction, perm<strong>et</strong>tant<br />

une efficacité prolongée. C’est<br />

ce qui est ressorti de c<strong>et</strong> atelier “écologique”<br />

(pas de cohortes d’animaux<br />

de laboratoire sacrifiés) <strong>et</strong> économique<br />

(marcheurs, cyclistes <strong>et</strong> joggeurs<br />

peuvent combler le gouffre de<br />

la sécurité sociale avec un matériel<br />

n’ayant pas besoin d’AMM !).<br />

> <strong>Sport</strong><br />

<strong>et</strong> coronaropathies<br />

Si les bénéfices à moyen <strong>et</strong> long terme<br />

de l’exercice physique <strong>et</strong> sportif ne<br />

peuvent être remis en cause, il est<br />

aussi vrai que l’exercice physique<br />

intense constitue une “condition<br />

idéale” pour que le suj<strong>et</strong> à risque fasse<br />

un accident coronarien.<br />

Les facteurs de risque<br />

Les facteurs favorisant c<strong>et</strong> accident<br />

ont été rappelés par le Pr Machecourt<br />

(Grenoble) durant c<strong>et</strong>te session.<br />

L’augmentation de la consommation<br />

en oxygène du myocarde, reflétée par<br />

les majorations chronotrope <strong>et</strong> tensionnelle,<br />

peut générer une ischémie<br />

en cas de coronaropathie méconnue,<br />

avec risque d’arythmie ventriculaire<br />

maligne. Sur une plaque coronaire,<br />

lors de l’exercice intense, le risque de<br />

rupture est augmenté par la dilatation<br />

des volumes cavitaires, qui crée une<br />

excursion, une élongation <strong>et</strong> des plicatures<br />

des coronaires épicardiques.<br />

La pulsatilité accrue induit des mouvements<br />

en “accordéon” à type d’allongement-raccourcissement,<br />

des<br />

coudures liées aux contractions myocardiques,<br />

qui contraignent mécaniquement<br />

les plaques coronaires. Par<br />

ailleurs, la rupture de plaque est favorisée<br />

par une augmentation de la<br />

pression interne vasculaire <strong>et</strong> les altérations<br />

des conditions rhéologiques.<br />

Enfin, sur certaines sténoses ou<br />

plaques vulnérables, la dysfonction<br />

endothéliale peut générer des rétrécissements<br />

par vasoconstriction plus<br />

ou moins spastique, favorisant l’accident<br />

coronarien aigu. Les accidents<br />

coronariens se manifestent cliniquement<br />

souvent en post-effort immédiat,<br />

en raison de la diminution du<br />

r<strong>et</strong>our veineux <strong>et</strong> de la vasodilatation<br />

périphérique, responsables d’une<br />

hypotension <strong>et</strong> d’une hypoperfusion<br />

coronaire qui, associées à une imprégnation<br />

catécholergique majeure,<br />

sont susceptibles de déclencher une<br />

arythmie. Le Pr Machecourt a ainsi<br />

souligné l’importance des accidents<br />

coronariens survenus en montagne,<br />

notamment lors des descentes de la<br />

Vallée Blanche près de Chamonix,<br />

favorisés également par l’altitude,<br />

l’hypoxie <strong>et</strong> l’intensité de l’effort, souvent<br />

inhabituelles chez des suj<strong>et</strong>s peu<br />

ou mal entraînés.<br />

Les ultrasons intra-coronaires (IVUS)<br />

restent un outil diagnostique d’exception,<br />

mais qui offrent des enseignements<br />

extrêmement riches sur les<br />

mécanismes des syndromes coronariens<br />

aigus. L’expérience du Pr Fin<strong>et</strong><br />

(Lyon) en ce domaine est majeure.<br />

S’appuyant sur une présentation iconographique<br />

particulièrement spectaculaire,<br />

il nous l’a rapportée avec le<br />

brio oratoire qui le caractérise. L’importance<br />

du substrat thrombotique,<br />

par rapport au contenu athéromateux<br />

de la plaque rompue, apparaît ainsi<br />

très variable selon les situations cliniques,<br />

pouvant rem<strong>et</strong>tre en question<br />

l’opportunité de certaines approches<br />

thérapeutiques, telle que le direct stenting,<br />

qui peut agir comme un véritable<br />

“presse-purée” sur de telles lésions.<br />

Les recommandations<br />

de contre-indications<br />

La deuxième partie de c<strong>et</strong>te session<br />

était consacrée aux recommandations<br />

concernant les contre-indications à<br />

la pratique sportive en cas de coronaropathie.<br />

Le Dr Brion (Lyon) a rapporté<br />

un travail de thèse lyonnais,<br />

constitué de différentes observations<br />

analysées par plusieurs “spécialistes”<br />

français de cardiologie du sport <strong>et</strong> leur<br />

attitude face à une reprise de l’activité<br />

sportive après un accident coronarien<br />

aigu. Ce travail souligne les très<br />

nombreuses discordances qui existent<br />

en ce domaine. La prudence, en<br />

raison des implications médicolégales,<br />

sous-entend la plupart des<br />

attitudes. L’absence de recommandations<br />

officielles détaillées, en dehors<br />

des sports de compétition, est l’un des<br />

facteurs de discordance, ainsi que la<br />

méconnaissance actuelle de l’évolutivité<br />

des coronaropathies.<br />

Actuellement, des recommandations<br />

nord-américaines existent (conférences<br />

de B<strong>et</strong>hesda 1994 <strong>et</strong> 2004) <strong>et</strong><br />

viennent d’être remises à jour <strong>et</strong><br />

publiées dans le J Am Coll <strong>Cardio</strong>l du<br />

11 avril 2005. Elles sont basées sur<br />

l’évaluation du risque cardiovasculaire<br />

en deux groupes. Dans le groupe le<br />

moins à risque, seuls les sports de type<br />

IA ou IIA ne sont pourtant qu’autorisés.<br />

Ces références renvoient à la classification<br />

de Mitchell, établie selon le<br />

niveau faible, modéré ou élevé <strong>et</strong> le<br />

caractère dynamique (respectivement<br />

A, B, C) ou statique (respectivement I,<br />

II, III) de l’exercice physique. C<strong>et</strong>te<br />

classification, qui a le mérite d’exister,<br />

est cependant critiquable. En eff<strong>et</strong>, elle<br />

méconnaît de nombreux sports plus<br />

spécifiquement européens. Par<br />

ailleurs, elle ne tient pas compte des<br />

facteurs psychologiques, des conditions<br />

de réalisation extérieure (température,<br />

altitude, milieu aquatique…),<br />

ni du risque cardiovasculaire pendant<br />

les périodes d’entraînement, qui peut<br />

solliciter le système cardiovasculaire<br />

d’une manière différente. Enfin, l’intensité<br />

individuelle de réalisation <strong>et</strong> la<br />

durée de l’exercice sont des facteurs<br />

non pris en compte dans c<strong>et</strong>te classification.<br />

congrès<br />

>>><br />

37 <strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4


congrès<br />

>>><br />

Les recommandations européennes,<br />

présentées oralement à Munich, doivent<br />

être publiées bientôt dans l’European<br />

Heart Journal. L’originalité<br />

des recommandations européennes<br />

repose sur l’évaluation du risque cardiovasculaire,<br />

qui est établi après<br />

stratification clinique <strong>et</strong> fonctionnelle<br />

(par épreuve d’effort). Elles différencient<br />

les athlètes ayant une coronaropathie<br />

connue, des athlètes avec<br />

une très forte prévalence potentielle<br />

de coronaropathie (mais sans événement<br />

clinique coronarien avéré),<br />

qui se réfère au logiciel d’analyse probabilistique<br />

SCORE, également utilisé<br />

dans la stratification du risque<br />

cardiovasculaire. Enfin, différentes<br />

situations cliniques impliquant une<br />

ischémie myocardique sont évoquées<br />

(ponts myocardiques, maladie de<br />

Kawasaki, anomalies de naissance<br />

coronaire, transplantations cardiaques…).<br />

Une probabilité faible de<br />

survenue d’événements cliniques liés<br />

à l’exercice inclut les sportifs coronariens<br />

sans sténose coronarienne résiduelle<br />

significative, avec une fraction<br />

d’éjection supérieure à 50 %, sans<br />

ischémie ni arythmie maligne ventriculaire<br />

à l’effort <strong>et</strong> avec une capacité<br />

d’effort conservée par rapport à la<br />

théorique. Même dans ces groupes à<br />

faible risque, seuls les sports de type<br />

IA <strong>et</strong> IB sont autorisés en compétition.<br />

En cas de probabilité élevée, la<br />

compétition est formellement contreindiquée,<br />

même pour des sports tels<br />

que le golf, le billard, le bowling…<br />

Chez les suj<strong>et</strong>s indemnes d’accident<br />

coronarien, mais avec une prévalence<br />

significativement plus élevée<br />

que la normale, la plupart des sports<br />

restent autorisés en compétition, en<br />

excluant cependant les sports de type<br />

IIIA à IIIC. Tout test d’effort anormal<br />

(<strong>et</strong> malgré les nombreux faux positifs<br />

connus chez les sportifs de haut<br />

niveau) nécessite une évaluation non<br />

invasive complémentaire, voire coronarographique.<br />

Dans ces recommandations,<br />

il est également souligné<br />

l’absence d’intérêt des tests d’efforts<br />

de dépistage chez des athlètes entraînés<br />

asymptomatiques, sans facteur<br />

de risque <strong>et</strong> chez qui tous les sports<br />

de compétition sont autorisés. Rappelons<br />

qu’en France, dans le suivi des<br />

sportifs de haut niveau, listés par leur<br />

fédération respective, un test d’effort<br />

est cependant obligatoire tous les<br />

4 ans.<br />

Les recommandations actuelles ne<br />

concernent que la pratique du sport<br />

en compétition. Des recommandations<br />

spécifiques françaises, qui<br />

auront pour mission de ne pas se<br />

limiter aux sports réalisés en compétition<br />

mais étendues à toute activité<br />

sportive de loisir, sont en cours de<br />

finalisation. ❚<br />

agenda<br />

17 E CONGRÈS DU COLLÈGE NATIONAL<br />

DES CARDIOLOGUES FRANÇAIS (CNCF)<br />

6-8 octobre 2005<br />

Lyon<br />

- Déjeuner débat organisé par les laboratoires MENARINI<br />

le 7 octobre à 12h30<br />

Thème : La rapidité d’action : un atout pour l’efficacité<br />

- Symposium MENARINI le 8 octobre à 9h30<br />

Thème : Bêta-bloquants <strong>et</strong> qualité de vie<br />

● Inscription<br />

Agence CCC<br />

32 rue de Paradis - 75010 PARIS<br />

Tel. : 01 45 23 96 13 - Fax : 01 45 23 00 95<br />

JOURNÉES DES GROUPES DE TRAVAIL<br />

DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE<br />

DE CARDIOLOGIE<br />

21 octobre 2005 <strong>et</strong> 16 décembre 2005<br />

Paris<br />

● Renseignements<br />

Mme Elizab<strong>et</strong>h Fidon<br />

SFC<br />

15 rue Cels<br />

75014 Paris<br />

Tél : 01 43 22 29 71 - Fax : 01 43 22 63 61<br />

E-mail : efidon@cardio-sfc.org<br />

Sites :<br />

http://www.sfcardio.fr/<br />

<strong>Cardio</strong>&<strong>Sport</strong> • n°4<br />

38

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