PROGRAMME #1 - Les Subsistances
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INTERVIEW<br />
Pourquoi créer “ANIMAL Femelle” après “ANIMAL Mâle” ?<br />
Jean-Louis Badet - “ANIMAL Femelle” est le prolongement d’”ANIMAL Mâle”<br />
créé en 2005. Recommencer avec des femmes, c’était pour nous l’idée de<br />
travailler avec d’autres interprètes, de pousser certains aspects du travail.<br />
Changer de genre n’était pas le plus important à l’origine. Mais de fait, le regard<br />
sur la pièce, sur ce que l’on expose est interprété différemment, parce que ce<br />
sont des femmes.<br />
C’est un jeu de langage d’énoncer les choses comme cela ? Une pièce<br />
sur la lutte jouée par des femmes, son enjeu est tout de même très<br />
différent…<br />
Mark Tompkins - Oui, bien sûr, nous offrons aux regards une autre<br />
configuration. Mais pour nous il ne s’agissait pas de travailler cette pièce sur la<br />
lutte et le pouvoir, différemment avec des femmes. Le fait que ce soit des<br />
femmes évidemment change tout.<br />
En conséquence, est-ce vraiment la même chose qui se raconte<br />
sur scène ?<br />
JLB - Oui pour moi, c’est la même chose.<br />
MT - Heu… Je pense que “ANIMAL Femelle” précise un certain nombre de<br />
choses. Là où avec “ANIMAL Mâle”, certains voyaient un objet chorégraphique<br />
trop “homo-érotique”, dans un rapport de plaisir presque sexuel et normé avec<br />
la violence, là on ne peut plus dire ça. J’en avais le pressentiment, “ANIMAL<br />
Femelle” a une portée universelle plus immédiate et plus directe. Ça parle au<br />
plus grand nombre de l’assujettissement, du jeu avec le pouvoir et avec les<br />
images du pouvoir. La lecture est plus simple et le jeu plus complexe. Il y a<br />
pourtant une matière, je dirais presque une “chair”, qui est pour certaines<br />
personnes indépassable et cette présence des corps primaires les empêche<br />
d’aller plus loin.<br />
Avec les hommes puis avec les femmes, le travail a-t-il été différent ?<br />
MT - Oui, ne serait-ce que parce qu’avec les “mâles”, nous étions en création<br />
absolue et nous construisions ensemble. Avec les “femelles”, nous avons livré<br />
une partition déjà écrite. Et ensuite nous leur avons demandé de chercher des<br />
choses propres à elles. Au fur et à mesure que l’on avançait, alors que nous<br />
pensions changer des choses justement parce que c’était des femmes, nous<br />
nous apercevions que l’enjeu était de ne rien bouger, de garder les textes, les<br />
chansons et que ce sont elles par la manière de s’en saisir qui allaient modifier<br />
la nature de ce qui est dit sur scène.<br />
Comment se joue cette autonomie, cette résistance ?<br />
MT - Pour moi, avec les filles, il y avait quelque chose de très différent dès le<br />
départ. J’étais toujours à l’extérieur, l’homme. C’était clair, même si elles<br />
prenaient en compte ce que je disais, je n’étais pas avec elles, comme en<br />
rétrospective, j’ai pu l’être avec les garçons. Elles étaient autres, et c’était<br />
intéressant. D’un coup je me posais différemment les questions. Leurs relations<br />
avec le cadre, que je représente, sont différentes et on le reçoit en pleine gueule.<br />
C’est là le sens de la pièce ?<br />
MT - Oui, le vrai sens politique de cette pièce est peut-être là. Avec elles, le<br />
maître pourrait avoir un rapport de domination physique et on se rend compte<br />
qu’il ne domine rien, il est à jeter. Avec les mâles, dans la fin que nous avions<br />
trouvée, je me retirais hors jeu, là elles me jettent. Il a un truc qui se joue de<br />
manière bien plus complexe qu’avec les hommes, elles prennent plus le pouvoir<br />
sur scène.<br />
JLB - Pour les femmes, il est acquis culturellement que les hommes ont le<br />
pouvoir. Elles les laissent croire à leur puissance physique. Révéler leurs<br />
stratégies de puissance et de pouvoir, c’est ouvrir une porte. Moi, c’est vrai que<br />
le type de fonctionnement par le toucher, qu’ont les femmes, la manière dont<br />
physiquement elles sont en relation, c’est pour moi une révélation.<br />
PARCOURS<br />
Danseur, chorégraphe et pédagogue américain, Mark Tompkins vit en France<br />
depuis 1973. En 1983, il crée sa propre compagnie. Fabriquer des “objets<br />
performatifs non identifiés”, c’est tout l’art de Mark Tompkins. Spectacles<br />
chantés et dansés, créations collectives ou série de solos, ateliers et recherches<br />
autour de l’improvisation et de la composition instantanée sont les étapes de ce<br />
parcours initié au début des années 70 et poursuivi avec la complicité du<br />
scénographe Jean-Louis Badet depuis 1988.<br />
Aux <strong>Subsistances</strong>, il a présenté “Song and Dance” et “Sept voiles” en avril 2005<br />
et créé “ANIMAL Mâle” en octobre 2005.<br />
www.idamarktompkins.com<br />
Comment définir ce changement de nature ?<br />
MT - C’est un peu bête à dire, mais se révèle sous nos yeux une identité<br />
différente de notre sensibilité d’hommes. Le fonctionnement des filles est très<br />
éloigné de notre sensibilité, ne serait-ce que dans leur rapport au corps : elles<br />
se massent beaucoup entre elles, elles ont des formes de solidarité entre elles,<br />
des partages qui ne sont à aucun moment balayés par les tensions ou les<br />
rivalités. A partir de la même trame, le corps des cinq filles prend une autonomie<br />
par rapport à nous, et par rapport aux discours coercitifs. Profondément parce<br />
que nous sommes des garçons et qu’elles sont cinq filles, parce que les filles<br />
entre elles ne sont pas asservies aux ordres du chorégraphe, elles prennent une<br />
autonomie. Et c’est ça sans doute la différence dans la pièce. La fable raconte<br />
ça : l’autonomie, la résistance à l’asservissement malgré une domination<br />
physique et culturelle.<br />
DATES<br />
20.21.22 NOV 07 À 21H<br />
23.24 NOV 07 À 19H30<br />
DURÉE / 1H15<br />
TARIFS<br />
101 / 81/ 61<br />
PASS’ 2 SPECTACLES 161 / 131<br />
PASS’ 3 SPECTACLES 211 / 151<br />
RENDEZ-VOUS PUBLICS /<br />
Babel : 22 nov 07 à l'issue de la représentation