Télécharger le programme du spectacle (format pdf) - La virgule
Télécharger le programme du spectacle (format pdf) - La virgule
Télécharger le programme du spectacle (format pdf) - La virgule
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
spectac<strong>le</strong> déambulatoire<br />
conçu, écrit et mis en scène<br />
par Jean-Marc Chotteau<br />
une création <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong><br />
Centre Transfrontalier de Création Théâtra<strong>le</strong><br />
Mouscron-Tourcoing
JAUNE 100%<br />
MAGENTA 10%<br />
NOIR 100%<br />
<strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong> remercie<br />
<strong>le</strong>s partenaires qui lui ont apporté <strong>le</strong>ur soutien pour <strong>le</strong> projet HLM – Habiter <strong>La</strong> Mémoire<br />
Interreg efface <strong>le</strong>s frontières<br />
et <strong>le</strong>s partenaires qui Interreg lui doet apportent grenzen vervagen un soutien tout au long des saisons<br />
Licences 1-1011810 , 2-1011811, 3-1011812<br />
graphisme www.sebastienlordez.com<br />
photographies Pidz (sauf pp. 2-3 Pascaline Chombart, LMCU)<br />
création<br />
conception et mise en scène<br />
assistant général<br />
assistant répétiteur<br />
régie généra<strong>le</strong><br />
régie<br />
costumes<br />
avec<br />
<strong>du</strong> mardi 14 au samedi 25 juin 2011<br />
linéaire Euclide<br />
Quartier Be<strong>le</strong>ncontre, Tourcoing<br />
Jean-Marc Chotteau<br />
David <strong>La</strong>comb<strong>le</strong>z<br />
Stéphane Tite<strong>le</strong>in<br />
Sébastien Meerpoel<br />
Olivier Floury, David Lecocq<br />
Léa Drouault<br />
Juliette Barry<br />
Sylvie Baur<br />
Cyril Brisse<br />
Didier Coquet<br />
Nathalie Croix<br />
Aurélien Dujardin<br />
Rosalie Doudou<br />
Tristan Hernas<br />
Simon Hommé<br />
Va<strong>le</strong>ntin <strong>La</strong>doé<br />
Corinne <strong>La</strong>londrel<strong>le</strong><br />
Éric Leblanc<br />
Brigitte Mariaul<strong>le</strong><br />
Yoann Mascart<br />
Claire Mirande<br />
Barbara Monin<br />
Lionel Quesnée<br />
Wilfried Rioul<br />
<strong>La</strong>urence Sa<strong>le</strong>mbier<br />
Dominique Thomas<br />
Stéphane Tite<strong>le</strong>in<br />
Bruno Tuchszer
Dans un quartier en cours de réhabilitation, Be<strong>le</strong>ncontre à Tourcoing,<br />
vous entrerez dans un immeub<strong>le</strong> col<strong>le</strong>ctif voué à la démolition et vidé de<br />
ses habitants. Sauf un : un dernier locataire y fait de la résistance et va vous<br />
amener par petits groupes dans l’intimité des appartements de ses anciens<br />
voisins.<br />
Car, à travers <strong>le</strong> rêve étrange de ce personnage qui vous sert de guide,<br />
l’immeub<strong>le</strong> entier bruisse encore de la vie de ses anciens habitants. D’un<br />
appartement-témoin tout neuf, sorti des années soixante, à une sal<strong>le</strong> à manger<br />
qui sent encore la frite et la dispute conjuga<strong>le</strong>, d’un salon qui prend l’eau à<br />
une chambre à l’improbab<strong>le</strong> insonorisation, d’une ga<strong>le</strong>rie des glaces (où des<br />
miroirs multiplient à l’infini la problématique <strong>du</strong> voisinage) à l’appartementaquarium<br />
<strong>du</strong> dernier locataire, je vous promets avec <strong>le</strong>s vingt-deux comédiens<br />
qui feront vivre cette aventure, une traversée surprenante, déboussolante à<br />
proprement par<strong>le</strong>r, dans des mondes parallè<strong>le</strong>s…<br />
Ce que vous y verrez, ce que vous y vivrez, sera <strong>le</strong> fruit de notre<br />
imagination ; mais ce que vous entendrez sera la paro<strong>le</strong> même des habitants<br />
que nous avons interrogés, pendant deux ans, et qui nous ont livré, comme<br />
autant d’auteurs, <strong>le</strong>urs points de vue.<br />
Afin de bouscu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s nôtres.<br />
Jean-Marc Chotteau<br />
Question de point de vue<br />
HLM : une aventure extra-ordinaire<br />
S’asseoir dans un fauteuil, regarder droit devant soi <strong>le</strong> rideau qui va s’ouvrir,<br />
<strong>le</strong>s lumières qui dessinent un autre monde et, enfin, cet autre monde vivre<br />
sous nos yeux : depuis deux mil<strong>le</strong> ans <strong>le</strong> théâtre nous contraint physiquement<br />
à un point de vue et nous impose son sens.<br />
Le XX ème sièc<strong>le</strong> a tenté, occasionnel<strong>le</strong>ment, de bou<strong>le</strong>verser ce rapport<br />
unidirectionnel à la scène et la soumission passive à ce qui s’y disait. Des<br />
auteurs, des metteurs en scène, se sont mis à l’ouvrage pour sortir <strong>le</strong> public<br />
de ce qu’ils considéraient comme un carcan. Ils ont placé autrement <strong>le</strong>s<br />
spectateurs, tout autour de la scène par exemp<strong>le</strong>, ont pulvérisé <strong>le</strong> quatrième<br />
mur pour mélanger acteurs et publics, ou, au contraire, lui ont demandé de se<br />
tenir à distance (« Verfrem<strong>du</strong>ng » disait Brecht) pour ne pas cesser d’avoir sur<br />
ce qui se racontait, sur ce qui se jouait, une position critique.<br />
J’aime ce théâtre qui bou<strong>le</strong>verse <strong>le</strong>s lignes, et il m’est arrivé aussi de <strong>le</strong><br />
projeter Hors Les Murs (HLM, déjà !) dans des lieux inatten<strong>du</strong>s en déplaçant<br />
<strong>le</strong>s regards et <strong>le</strong>s lignes de fuite : dans une usine, une piscine, un gallodrome,<br />
une bourloire, etc…<br />
Mais plus que jamais, avec HLM – Habiter <strong>La</strong> Mémoire, je compte bien vous<br />
« déranger » un peu ! Et vous inviterai à partager une extra-ordinaire aventure<br />
de théâtre, profondément humaine, avec son lot de rires, d’émotions et de<br />
surprises.
L’Équipe<br />
artistique<br />
Cyril Brisse<br />
Marcel, <strong>le</strong> dernier locataire<br />
Éric Leblanc<br />
Marcel, <strong>le</strong> dernier locataire<br />
Jean-Marc Chotteau, conception et mise en scène<br />
D’abord comédien de la décentralisation théâtra<strong>le</strong> (Jacques Rosner, Gildas<br />
Bourdet), Jean-Marc Chotteau fonde sa compagnie en 1982 et s’instal<strong>le</strong> en<br />
1988 dans la métropo<strong>le</strong> lilloise, dont il est natif. Il crée <strong>le</strong> Salon de Théâtre<br />
à Tourcoing et y développe une trip<strong>le</strong> activité d’auteur, metteur en scène et<br />
comédien, à travers des mises en scène d’auteurs contemporains (Robert<br />
Pinget, Harold Pinter, Pierre Louki, Thomas Bernhard), de nombreuses<br />
adaptations de textes non théâtraux (Bouvard et Pécuchet d’après Flaubert,<br />
Petites Misères de la Vie conjuga<strong>le</strong> d’après Balzac, L’Esthétocrate d’après Pol<br />
Bury, L’Éloge de la folie d’après Erasme, <strong>La</strong> Comédie <strong>du</strong> Paradoxe d’après<br />
Diderot), ou des pièces origina<strong>le</strong>s tel<strong>le</strong>s <strong>La</strong> Revue, Le Jour où Descartes<br />
s’est enrhumé, L’Endroit <strong>du</strong> théâtre, Comma, Situations critiques et Night<br />
Shop ou L’Arabe <strong>du</strong> coin. Enfin, certains de ses spectac<strong>le</strong>s sont écrits pour<br />
des lieux singuliers qui lui inspirent des scénographies origina<strong>le</strong>s : Prises<br />
de becs dans un gallodrome, <strong>La</strong> Vie à un fil dans une friche in<strong>du</strong>striel<strong>le</strong>,<br />
Eloge de la paresse dans une bourloire, Le Bain des pinsons dans une<br />
ancienne piscine et Jouer comme nous dans <strong>le</strong> cloître d’un ancien<br />
monastère. Prenant une dimension européenne, sa compagnie est devenue,<br />
en 1999, <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong>, Centre Transfrontalier de Création Théâtra<strong>le</strong>.<br />
Claire Mirande<br />
Marcel<strong>le</strong>, la dernière locataire<br />
Barbara Monin<br />
Marcel<strong>le</strong>, la dernière locataire<br />
David <strong>La</strong>comb<strong>le</strong>z, assistant général<br />
Stéphane Tite<strong>le</strong>in, assistant répétiteur<br />
Sébastien Meerpoel, régie généra<strong>le</strong><br />
Olivier Floury et David Lecocq, régie<br />
Léa Drouault, costumes<br />
Maïté Furling et Yann Mendes Lopes, stagiaires régie<br />
Témoignages des habitants recueillis par<br />
David <strong>La</strong>comb<strong>le</strong>z, Lucie Hardouineau et Juliette Dulon<br />
Dominique Thomas<br />
Marcel, <strong>le</strong> dernier locataire<br />
Bruno Tuchszer<br />
Marcel, <strong>le</strong> dernier locataire
Le Monde HLM<br />
entre ombres et lumière<br />
par Thibault Tellier<br />
Maitre de Conférences en Histoire contemporaine à l’Université de Lil<strong>le</strong> III<br />
Juliette Barry Sylvie Baur Didier Coquet Nathalie Croix<br />
la voisine <strong>du</strong> dessous l’agent immobilier <strong>le</strong> pion blanc la danseuse <strong>du</strong> ventre<br />
Rosalie Doudou Aurélien Dujardin Tristan Hernas Simon Hommé<br />
la baigneuse <strong>le</strong> premier visiteur l’agent des eaux <strong>le</strong> théâtreux<br />
Va<strong>le</strong>ntin <strong>La</strong>doé Corinne <strong>La</strong>londrel<strong>le</strong> Yoann Mascart Brigitte Mariaul<strong>le</strong><br />
l’é<strong>le</strong>ctricien la fornicateuse <strong>le</strong> second visiteur la femme aux frites<br />
Lionel Quesnée Wilfried Rioul <strong>La</strong>urence Sa<strong>le</strong>mbier Stéphane Tite<strong>le</strong>in<br />
<strong>le</strong> fornicateur l’homme-grenouil<strong>le</strong> <strong>le</strong> pion noir l’homme à la télé<br />
Récemment, dans <strong>le</strong> cadre de son projet de rénovation urbaine, la vil<strong>le</strong><br />
de Dammarie-<strong>le</strong>s-Lys en Seine-et-Marne a décidé de rebaptiser <strong>le</strong>s rues de la<br />
cité de <strong>La</strong> Plaine <strong>du</strong> Lys. L’idée à la base est simp<strong>le</strong> : donner aux rues de ces<br />
quartiers d’habitat social des noms qui ne fassent plus référence à <strong>le</strong>ur passé<br />
de grands ensemb<strong>le</strong>s mais, au contraire, se rattachent à l’histoire de la vil<strong>le</strong><br />
el<strong>le</strong>-même. Cet exemp<strong>le</strong> illustre la difficulté pour <strong>le</strong>s cités HLM construites<br />
au cours des Trente Glorieuses de trouver <strong>le</strong>ur place dans la France urbaine<br />
d’aujourd’hui ainsi que dans la mémoire col<strong>le</strong>ctive. Les débats récents sur<br />
l’existence avérée ou non en France de ghettos urbains tels que <strong>le</strong>s États-Unis<br />
en possèdent montrent d’ail<strong>le</strong>urs à quel point ce type d’habitat col<strong>le</strong>ctif à<br />
vocation socia<strong>le</strong> souffre d’une stigmatisation importante. Il n’y a d’ail<strong>le</strong>urs pas<br />
si longtemps de cela qu’un haut responsab<strong>le</strong> politique de notre pays, devenu<br />
depuis Président de la République, souhaitait passer au Kärcher certaines de<br />
ces cités…<br />
Il faut remettre l’histoire des cités HLM dans la longue <strong>du</strong>rée pour<br />
s’apercevoir que l’habitat col<strong>le</strong>ctif destinée aux populations <strong>le</strong>s plus modestes<br />
a, depuis l’origine, c’est-à-dire depuis la fin <strong>du</strong> XIX e sièc<strong>le</strong> et la création des<br />
Habitations à bon marché (HBM), fait l’objet d’une très grande suspicion.<br />
Au congrès international des HBM réuni à Paris à l’occasion de l’exposition<br />
universel<strong>le</strong> de 1889, <strong>le</strong>s délégués <strong>du</strong> Mouvement rappel<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>ur position de<br />
principe sur <strong>le</strong> sujet : « Entre <strong>le</strong>s maisons séparées et <strong>le</strong>s maisons col<strong>le</strong>ctives,<br />
que l’on se place <strong>du</strong> point de vue de l’hygiène ou au point de vue de la<br />
mora<strong>le</strong>, écrivent-ils, l’hésitation n’est pas permise, <strong>le</strong> choix ne saurait être<br />
douteux (...) il est incontestab<strong>le</strong> que la maison isolée, qui donne à la famil<strong>le</strong><br />
un foyer dont la salubrité et la respectabilité dépendent de la seu<strong>le</strong> volonté<br />
de ses membres, nous paraît de beaucoup préférab<strong>le</strong> ». Déjà au cours de l’un<br />
des premiers congrès hygiénistes qui avait eu lieu à Bruxel<strong>le</strong>s en 1876, un<br />
rapporteur avait déclaré : « Le bien-être matériel et moral des travail<strong>le</strong>urs,<br />
la salubrité publique et la sécurité socia<strong>le</strong> sont intéressés à ce que chaque<br />
famil<strong>le</strong> ouvrière habite une maison séparée, saine et commode, qu’el<strong>le</strong><br />
puisse acquérir ». Si la construction d’habitat col<strong>le</strong>ctif s’avère néanmoins<br />
indispensab<strong>le</strong> au regard de la crise aigue <strong>du</strong> logement que traverse la France,<br />
en particulier au <strong>le</strong>ndemain de la Seconde Guerre mondia<strong>le</strong>, la méfiance<br />
reste de mise parmi <strong>le</strong>s responsab<strong>le</strong>s en charge de ces questions. Ainsi, pour<br />
<strong>le</strong> docteur Robert Henri Hazemann, Inspecteur général de la Santé et de la<br />
Population, professeur à l’Institut d’urbanisme de Paris, <strong>le</strong>s conséquences<br />
socia<strong>le</strong>s engendrées par l’habitat col<strong>le</strong>ctif peuvent s’avérer extrêmement<br />
dangereuses. Par son caractère répétitif et gigantesque, il nuirait au bon<br />
dérou<strong>le</strong>ment de la vie socia<strong>le</strong> mais éga<strong>le</strong>ment à l’affirmation de la mora<strong>le</strong><br />
comme il l’écrit dans un artic<strong>le</strong> paru en 1959 : « <strong>La</strong> promiscuité d’un pulvérulat<br />
d’humanités avec l’absence constante de liens affectifs, même négatifs,<br />
réalise une absence tota<strong>le</strong> de solidarité alors que l’homme d’autre part se<br />
plait à tourner en dérision la fourmilière et la termitière. Sans solidarité, il
n’existe ni ordre, ni décence, donc pas de santé ». Très vite, la presse assimi<strong>le</strong><br />
grands ensemb<strong>le</strong>s et montée de la délinquance, en particulier juvéni<strong>le</strong>. <strong>La</strong><br />
presse relaie régulièrement ce type d’affirmation. L’Aurore identifie Sarcel<strong>le</strong>s<br />
à un lieu de « fabrique de blousons noirs et d’éco<strong>le</strong> de la vio<strong>le</strong>nce (...). L’un<br />
des pires fléaux que notre société ait jamais inventé ». Certains films comme<br />
Terrain vague de Marcel Carné sorti en 1960 mettent aussi en scène des<br />
bandes de jeunes inoccupés sur fond de cités d’habitat social. Cel<strong>le</strong>s qui<br />
sont construites dans la métropo<strong>le</strong> lilloise n’échappent pas à ce type de<br />
jugements. Lors de son congrès régional en 1960, l’Union féminine civique et<br />
socia<strong>le</strong> révè<strong>le</strong> l’existence à Lil<strong>le</strong>, dans certains quartiers d’habitat social de<br />
la périphérie, « des bandes d’enfants dont <strong>le</strong>s chefs n’ont même pas quatorze<br />
ans » (et qui) abîment <strong>le</strong>s murs, <strong>le</strong>s couloirs et <strong>le</strong>s caves.<br />
Il serait pourtant injuste et historiquement faux de ne présenter <strong>le</strong> monde<br />
des HLM que sous un jour négatif. On ne répétera jamais assez à quel point,<br />
au cours des Trente Glorieuses, ce type d’habitat a surtout donné l’occasion<br />
à des famil<strong>le</strong>s, modestes pour la plupart d’entre el<strong>le</strong>s, d’accéder enfin à<br />
un logement sain et moderne. Que dire de cel<strong>le</strong>s qui, venues des courées,<br />
découvraient pour la première fois l’usage d’une sal<strong>le</strong> de bain ? d’une cuisine<br />
dotée de toutes <strong>le</strong>s commodités, y compris l’eau courante ? Certes, il fallait<br />
laisser <strong>du</strong> temps pour s’adapter à cette nouvel<strong>le</strong> vie. Pour cela, il était prévu de<br />
mettre en place certaines structures de proximité comme <strong>le</strong>s locaux col<strong>le</strong>ctifs<br />
résidentiels afin de permettre aux nouveaux voisins de se rencontrer, de<br />
mieux se connaître, de s’apprécier… De ce point de vue, il y eut <strong>le</strong> temps de la<br />
construction puis celui, forcément plus long, de l’affirmation d’une vie socia<strong>le</strong><br />
propre à ces nouveaux quartiers. Dans la majorité des cas, c’est néanmoins <strong>le</strong><br />
sentiment d’accéder enfin au confort moderne qui a prévalu malgré quelques<br />
désagréments <strong>du</strong>s à des chantiers jamais tout à fait terminés…<br />
<strong>La</strong> vil<strong>le</strong> de Tourcoing a participé à cette grande aventure urbaine des<br />
Trente Glorieuses. Le développement économique requiert l’apport urgent<br />
de nouvel<strong>le</strong>s populations actives. <strong>La</strong> municipalité envisage donc de nouvel<strong>le</strong>s<br />
constructions susceptib<strong>le</strong>s d’attirer de nouvel<strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s. Pour cela, el<strong>le</strong> fait<br />
appel au CIL (Comité interprofessionnel <strong>du</strong> logement), f<strong>le</strong>uron emblématique<br />
de la construction socia<strong>le</strong> dans la métropo<strong>le</strong> lilloise depuis la fin de la guerre.<br />
700 logements seront ainsi édifiés à Be<strong>le</strong>ncontre. D’autres réalisations <strong>du</strong><br />
même type comme cel<strong>le</strong>s de la Bourgogne doivent permettre à Tourcoing de<br />
dépasser avant la fin <strong>du</strong> sièc<strong>le</strong> <strong>le</strong> seuil fatidique des 100 000 habitants. Pour<br />
<strong>le</strong>s élus locaux, il ne s’agit ni plus ni moins que de « préparer <strong>le</strong> Tourcoing<br />
de l’an 2000 ». Peu à peu, à Be<strong>le</strong>ncontre comme dans <strong>le</strong>s autres nouveaux<br />
quartiers de Tourcoing, la vie loca<strong>le</strong> s’organise avec ses joies et ses difficultés.<br />
<strong>La</strong> crise économique des années 1970 portera néanmoins un coup très<br />
<strong>du</strong>r à ces cités dont <strong>le</strong> ressort économique, au plan tourquennois, dépend<br />
très étroitement de l’activité <strong>du</strong> texti<strong>le</strong> qui est alors en train de chuter. Les<br />
grands ensemb<strong>le</strong>s entrent alors dans une période sombre : paupérisation de<br />
ses habitants, montée des vio<strong>le</strong>nces urbaines, phénomènes de décrochage<br />
scolaire… Une fois encore, l’habitat col<strong>le</strong>ctif de type HLM est chargé de<br />
tous <strong>le</strong>s maux et ses populations ren<strong>du</strong>es en partie responsab<strong>le</strong>s de la crise<br />
urbaine que traverse à nouveau la France. Il faut attendre <strong>le</strong>s débuts de la<br />
Politique de la Vil<strong>le</strong> en 1981 pour que <strong>le</strong>s pouvoirs publics envisagent de<br />
mettre en place des <strong>programme</strong>s d’action ambitieux en direction de ces<br />
zones urbaines en difficultés. Selon <strong>le</strong>s périodes, on par<strong>le</strong>ra de rénovation ou<br />
de réhabilitation. Progressivement se développera l’idée selon laquel<strong>le</strong> ces<br />
opérations de grande envergure ne peuvent se faire sans <strong>le</strong> concours actif<br />
des habitants eux-mêmes. Par là même, <strong>le</strong>s grands ensemb<strong>le</strong>s retrouvent un<br />
supplément d’âme que la crise semblait <strong>le</strong>ur avoir en<strong>le</strong>vé. C’est au cours des<br />
années 1990 que l’on commence aussi à évoquer certaines de ces cités comme<br />
appartenant au patrimoine urbain contemporain. À cet effet, el<strong>le</strong>s vont faire<br />
l’objet d’une attention particulière concernant <strong>le</strong> recueil de <strong>le</strong>ur mémoire et<br />
l’écriture de <strong>le</strong>ur histoire. Ces cités, considérées essentiel<strong>le</strong>ment jusque là<br />
comme des blocs de béton pathogènes (on parlait alors d’extraire certaines<br />
« tumeurs » des grands ensemb<strong>le</strong>s), acquièrent un nouveau statut : celui de<br />
laboratoire pour <strong>le</strong> renouveau de la démocratie loca<strong>le</strong>. <strong>La</strong> participation des<br />
habitants a en effet surtout pour but de redonner une fierté à toute une<br />
catégorie de la population qui avait été jusque-là dans une large partie<br />
écartée des processus de décision. <strong>La</strong> patrimonialisation de l’habitat social,<br />
tout comme cel<strong>le</strong> <strong>du</strong> monde de l’usine a une fonction socia<strong>le</strong> extrêmement<br />
importante : inscrire <strong>du</strong>rab<strong>le</strong>ment dans l’histoire de la vil<strong>le</strong> <strong>le</strong>s traces d’un<br />
type d’habitat qui a été décrié. C’est ce que la Vil<strong>le</strong> de Tourcoing s’attache<br />
à faire depuis plusieurs années. Nul doute qu’il s’agit d’ail<strong>le</strong>urs là d’un vo<strong>le</strong>t<br />
important <strong>du</strong> dossier en cours de constitution destiné à obtenir <strong>le</strong> précieux<br />
label Vil<strong>le</strong> d’Art et d’Histoire.<br />
Le spectac<strong>le</strong> qui est proposé par Jean-Marc Chotteau saisit à sa manière<br />
la notion de « trace-mémoire » développée par l’écrivain antillais Patrick<br />
Chamoiseau. Il s’agit ici de redonner vie à une histoire intime, cel<strong>le</strong> de tous<br />
ceux qui habitent ou ont habité <strong>le</strong> quartier de Be<strong>le</strong>ncontre. Il y a d’ail<strong>le</strong>urs<br />
une logique à ce que Jean-Marc entreprenne ce qui pourrait aussi apparaître<br />
comme un véritab<strong>le</strong> devoir de mémoire à l’égard de populations qui<br />
apparaissent encore trop « invisib<strong>le</strong>s » dans la mémoire col<strong>le</strong>ctive. Déjà, dans<br />
Texto, il avait ren<strong>du</strong> hommage au monde de l’Usine, c’est-à-dire aux hommes<br />
et aux femmes qui avaient laissé <strong>le</strong>urs empreintes à un monde aujourd’hui<br />
quasiment disparu. Habiter <strong>La</strong> Mémoire est donc en quelque sorte la suite<br />
de cette investigation basée sur la sensibilité. Donner à voir sans jamais de<br />
voyeurisme la vie quotidienne dans ce qu’el<strong>le</strong> a de plus banal mais éga<strong>le</strong>ment<br />
de plus émotionnel. Car <strong>le</strong> monde des HLM, c’est aussi celui d’une espérance,<br />
cel<strong>le</strong> tout simp<strong>le</strong>ment pour <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s de mieux vivre. Il appartient donc à<br />
chacun d’entre nous d’imaginer que derrière ces blocs de béton, il y a eu des<br />
histoires tout simp<strong>le</strong>ment humaines.<br />
Longtemps, <strong>le</strong>s historiens <strong>du</strong> contemporain ont surtout appréhendé la Vil<strong>le</strong><br />
comme un lieu de pouvoir, de développement économique ou bien encore de<br />
tensions socia<strong>le</strong>s. Aujourd’hui, en particulier grâce aux études sociologiques<br />
qui ont été menées depuis <strong>le</strong>s années 1950 dans <strong>le</strong> sillage de l’Éco<strong>le</strong> de<br />
Chicago, on met davantage l’accent sur <strong>le</strong>s hommes et <strong>le</strong>s femmes qui ont<br />
façonné à <strong>le</strong>ur manière la Vil<strong>le</strong> des Trente Glorieuses. Certes, cette histoire<br />
connaît encore des zones d’ombres, mais sans aucun doute, <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong><br />
proposé par Jean-Marc Chotteau et <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong> apportera cette expression<br />
artistique qui fait encore trop défaut lorsqu’il s’agit de par<strong>le</strong>r de l’histoire de<br />
l’habitat social contemporain. « <strong>La</strong> France est une personne » assurait <strong>le</strong> grand<br />
historien Ju<strong>le</strong>s Miche<strong>le</strong>t. Gageons que ce spectac<strong>le</strong> rappel<strong>le</strong>ra que <strong>le</strong> monde<br />
des HLM, c’est avant tout des personnes. Certes entre ombres et lumière. Mais<br />
avant tout des personnes.
Pendant HLM,<br />
sous <strong>le</strong> chapiteau…<br />
Appartements Témoins<br />
Conception, décor et mise en scène : Jean-Marc Chotteau<br />
Assistante à l’adaptation : Blandine Aubin<br />
Avec : Éric Leblanc<br />
Pro<strong>du</strong>ction : <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong><br />
Vendredi 24 et samedi 25 juin 2011 à 14h30<br />
Tarif : 10€ / Tarif étudiants - demandeurs d’emploi : 8€<br />
Seul vestige d’un « grand ensemb<strong>le</strong> » tout juste abattu pour faire place à<br />
des logements flambant neufs, un mur de boîtes à <strong>le</strong>ttres se met à livrer des<br />
mémoires à un passant... Les histoires de famil<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s anecdotes de voisinage,<br />
<strong>le</strong>s petites choses quotidiennes, mais aussi <strong>le</strong>s joies et <strong>le</strong>s peines des grands<br />
événements de la vie, résonnent ainsi une dernière fois au milieu des gravas.<br />
Les habitants sont partis, relogés ail<strong>le</strong>urs, mais la mémoire <strong>du</strong> lieu, où <strong>le</strong>s<br />
destins solitaires croisaient <strong>le</strong>s aventures solidaires, subsiste à travers <strong>le</strong>urs<br />
mots : « On n’est pas des gens qu’on déplace pion par pion. On est des gens...<br />
qu’on a une histoire. »<br />
Grand Ensemb<strong>le</strong><br />
Présentation de travaux de l’Éco<strong>le</strong> Transfrontalière <strong>du</strong> Spectateur<br />
Conception et mise en scène : Jean-Marc Chotteau<br />
Assistante à l’adaptation : Blandine Aubin<br />
Samedi 18 juin 2011 à 14h30 et 16h00. Entrée libre<br />
Les élèves des trois années de l’ETS montent sur la scène <strong>du</strong> chapiteau<br />
pour présenter un oratorio à 50 voix inspiré des témoignages recueillis auprès<br />
des habitants des quartiers. Les élèves ont préparé ce spectac<strong>le</strong> mis en forme<br />
par Jean-Marc Chotteau, lors des séances d’ateliers hebdomadaires animées<br />
en première et deuxième années par Éric Leblanc, et en masterclass par Jean-<br />
Marc Chotteau.<br />
Présentation de travaux<br />
Pour partager <strong>le</strong> projet artistique HLM avec la population des quartiers<br />
de Tourcoing, Éric Leblanc y a animé plusieurs ateliers-théâtre au long de la<br />
saison. <strong>La</strong> présence <strong>du</strong> chapiteau est l’occasion de présenter au public <strong>le</strong> fruit<br />
de <strong>le</strong>ur travail.<br />
Ateliers menés au Centre Social de Be<strong>le</strong>ncontre<br />
Mercredi 15 juin 2011 à 14h30. Entrée libre<br />
<strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong>, Centre Transfrontalier de Création Théâtra<strong>le</strong>,<br />
œuvre, sous la direction artistique de Jean-Marc Chotteau, à<br />
faire vivre sans frontières la création théâtra<strong>le</strong> au cœur de la<br />
grande Métropo<strong>le</strong> Lil<strong>le</strong> - Kortrijk - Tournai. Son implantation à<br />
Tourcoing s’est enrichie de sa fusion avec <strong>le</strong>s activités théâtra<strong>le</strong>s<br />
<strong>du</strong> Centre Culturel de Mouscron (B) et se développe aujourd’hui<br />
au sein de l’Eurodistrict avec d’autres vil<strong>le</strong>s tel<strong>le</strong> Comines-<br />
Warneton (B).<br />
Les créations de <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong> et son répertoire s’attachent<br />
à proposer au public des œuvres en réponse aux questions<br />
de notre temps, en s’ouvrant désormais à l’Europe entière<br />
dans <strong>le</strong> souci constant d’un théâtre populaire et artistiquement<br />
exigeant.<br />
C’est dans cette démarche que <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong> invite éga<strong>le</strong>ment<br />
ses spectateurs, chaque saison, à découvrir une programmation<br />
de compagnies répondant à la même éthique et s’inscrivant dans<br />
<strong>le</strong> même dynamisme européen. Carrefour et lieu d’émergence<br />
de ta<strong>le</strong>nts émanant <strong>du</strong> Nord-Pas de Calais, de Belgique, mais<br />
aussi d’autres régions de l’Europe, – ainsi avec Les Eurotopiques,<br />
son festival biennal européen de projets théâtraux –, <strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong><br />
s’ouvre sans cesse à de nouveaux publics, pour un théâtre<br />
qu’el<strong>le</strong> veut faire vivre au cœur de la cité comme l’espace de<br />
l’échange, <strong>du</strong> lien social et <strong>du</strong> plaisir.<br />
Ateliers menés au Collège Lucie Aubrac de Tourcoing<br />
Mercredi 22 juin 2011 à 14h30. Entrée libre.<br />
In<strong>format</strong>ions et réservations<br />
Tél : +33 (0)3 20 27 13 63 / +32 (0)56 860 164<br />
Mail : contact@lavirgu<strong>le</strong>.com<br />
Site web : www.lavirgu<strong>le</strong>.com
<strong>La</strong> Virgu<strong>le</strong><br />
Centre Transfronatlier de Création Théâtra<strong>le</strong><br />
Mouscron - Tourcoing<br />
Direction Jean-Marc Chotteau<br />
82 bou<strong>le</strong>vard Gambetta, 59200 Tourcoing (F)<br />
+33 (0)3 20 27 13 63 / +32 (0)56 860 164<br />
contact@lavirgu<strong>le</strong>.com<br />
www.lavirgu<strong>le</strong>.com